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<< délai, le créancier, s'il n'est pas intégralement payé, pourra << exercer de nouveau la contrainte par corps contre le débi<< teur principal, sans préjudice de ses droits contre la caution.>>

Il faut entendre ces dispositions bienveillantes de la loi dans ce sens, que les à-compte payés par le débiteur, non seulement depuis son arrestation, mais même depuis sa condamnation et avant son arrestation, doivent être imputés sur le tiers libératoire ainsi le débiteur condamné pour une dette principale de 1200 fr., qui a payé à-compte 300 fr. avant son arrestation, n'est tenu qu'à verser une nouvelle somme de 100 fr., et non 500 fr., formant le tiers du capital diminué par les à-compte précédemment payés (1).

2004. « Le débiteur qui, après les délais fixés par la loi, a « obtenu son élargissement de plein droit, ne pourra plus être « détenu ou arrêté pour dettes contractées antérieurement à << son arrestation et échues au moment de son élargissement, «< à moins que ces dettes n'entraînent par leur nature et par « leur quotité une contrainte plus longue que celle qu'il aura << subie et qui dans ce dernier cas lui sera toujours comptée « pour la durée de la nouvelle incarcération » (L. 17 avril 1852, art. 27).

Enfin, la loi du 17 avril 1852 a décidé que la somme destinée à pourvoir aux aliments des détenus pour dettes devra être consignée d'avance et pour trente jours au moins. Les consignations pour plus de trente jours ne vaudraient qu'autant qu'elles seraient d'une seconde ou de plusieurs périodes de trente jours. Cette somme est de 30 fr. à Paris et de 25 fr. dans les autres villes pour chaque période de 30 jours (art. 28 et 29).

Faute de consignation d'aliments, le détenu peut obtenir son élargissement sur simple requête présentée au président du tribunal civil. Le débiteur élargi faute de consignation d'aliments ne pourra plus être incarceré (art. 30 et 31).

2005. Les règles que nous venons de faire connaître sont applicables aux étrangers, mais sous certaines modifications qui ont pour effet d'en aggraver quelques dispositions. «< Tout << jugement qui interviendra au profit d'un Français contre un

(1) V. Troplong, n. 565 et 566; Coin-Delisle, p. 106, n. 3.

«

étranger non domicilié en France emportera la contrainte << par corps, à moins que la somme principale de la condam<«< nation ne soit inférieure à 150 fr., sans distinction entre « les dettes civiles et les dettes commerciales » (art. 14).

La jurisprudence et les auteurs entendent par étranger domicilié celui-là seul qui a obtenu de l'Empereur, conformément à l'art. 13 du Code Napoléon et par décret, l'autorisation de fixer son domicile en France et la jouissance des droits civils.

<< Avant le jugement de condamnation, mais après l'échéance «< ou l'exigibilité de la dette, le président du tribunal de 1" in<«<stance dans l'arrondissement duquel se trouvera l'étranger << non domicilié pourra, s'il y a de suffisants motifs, ordonner * son arrestation provisoire sur la requête du créancier fran«çais. Dans ce cas, le créancier sera tenu de se pourvoir en «< condamnation dans la huitaine de l'arrestation du débiteur, «< faute de quoi celui-ci pourra demander son élargissement.

La mise en liberté sera prononcée par ordonnance de référé, << sur une assignation donnée au créancier par l'huissier que «<le président aura commis dans l'ordonnance qui autorisait «<l'arrestation, et, à défaut de cet huissier, par tel autre qui « sera commis spécialement » (art. 15).

«L'arrestation provisoire n'aura pas lieu ou cessera, si l'é<«<tranger justifie qu'il possède, sur le territoire français, un « établissement de commerce ou des immeubles, le tout d'une <<< valeur suffisante pour assurer le paiement de la dette, ou s'il <«< fournit pour caution une personne domiciliée en France et a reconnue solvable » (art. 16).

La durée de la contrainte par corps contre les étrangers est fixée à deux ans, lorsque le montant de la condamnation principale ne s'élèvera pas à 500 fr.; à quatre ans, lorsqu'il ne s'élèvera pas à 1000 fr.; à six ans, lorsqu'il ne s'élèvera pas à 3000 fr. ; à huit ans, lorsqu'il ne s'élèvera pas à 5000 fr.; à dix ans, lorsqu'il sera de 5000 et au-dessus (art. 17). A l'égard des étrangers, la contrainte par corps peut donc être prononcée pour toute dette s'élevant à 150 fr., et pour deux ans au moins et dix ans au plus. Sauf ces modifications et les règles relatives à l'arrestation provisoire et préventive avant

le jugement de condamnation, toutes les autres dispositions que nous avons fait connaître sont applicables aux étrangers.

TITRE II.

De la compétence des tribunaux de commerce.

ARTICLE 631.

Les tribunaux de commerce connaîtront: 1. de toutes contestations relatives aux engagements et transactions entre négociants, marchands et banquiers; 2o entre toutes personnes, des contestations relatives aux actes de commerce.

2006. Les rédacteurs du Code de commerce, après quelques hésitations (1), paraissent avoir rejeté, pour régler la compétence, un principe absolu, et refusé de déclarer qu'elle serait exclusivement déterminée, soit par la qualité des personnes qui sont parties au procès, soit par la nature du fait même qui donne lieu à la contestation. La rédaction de l'art. 631, toutefois, ferait présumer, au premier abord, que la loi déclare les tribunaux de commerce compétents: 1" quand le différend existe entre négociants, marchands et banquiers; 2o quand le différend existe entre personnes non commerçantes, s'il est relatif à des actes de commerce. La compétence serait donc tout à la fois personnelle et réelle. C'est la pensée qu'ont exprimée les exposés de motifs et les rapports. Cette interprétation n'est pas exacte. En ce qui concerne les négociants, marchands et banquiers, la juridiction commerciale n'est compétente que s'il s'agit d'actes de commerce; mais la loi, dans ce cas particulier, présume par la seule qualité des parties que l'acte est commercial, tout en réservant la preuve contraire; lorsque l'acte est évidemment civil, la justice consulaire ne sera pas saisie. Si le différend, au con traire, est entre personnes non commerçantes, l'acte est présumé non

(4) V. Locré, t. 8, p. 209 et s.

commercial, sauf encore la preuve contraire (1). L'art. 631 n'a pas d'autre sens, ni une portée plus grande et le commentaire en est tout entier dans l'art. 652 et les articles suivants; un paragraphe de l'art. 632 ci-après répète même en d'autres termes la première disposition de l'art. 631 en nommant: toutes obligations entre négociants, marchands et banquiers. L'énumération que cet article et les suivants ont donnée n'a pas suffi, au reste, pour faire disparaître toutes les difficultés, et elles devront être de notre part l'objet d'un examen attentif ; nous ne pouvons donc que renvoyer pour offrir l'explication complète de l'art. 631 à ce que nous serons contraints de dire ci-après.

2007. Si l'art. 631 en attribuant aux tribunaux de commerce la connaissance de toutes contestations entre commerçants n'a été guidé que par cette seule considération, qu'il y a présomption, en ce qui les concerne, que les engagements et transactions intervenues entre eux ont un caractère commercial, il faudrait décider, par suite, que l'art. 631 est de plein droit inapplicable à tous les actes accomplis, par le commerçant, qui appartiennent nécessairement par leur nature à la vie purement civile et à ceux qu'il accomplit comme citoyen, comme fils, comme époux, comme père.

<< Toutes les ventes, dit M. Orillard, échanges et même locations d'immeubles à quelque usage qu'on les destine, les donations entre-vils ou testamentaires, les partages de succession, les conventions matrimoniales, les constitutions de rentes perpétuelles ou viagères et autres actes semblables faits par le commerçant en sa qualité de chef de famille, sont, par la nature même de la convention étrangers au commerce » (2). Par quelques personnes en conséquence que de pareils actes soient faits, ils ne peuvent appartenir à la juridiction commerciale exclusivement limitée aux actes commerciaux. La disposition de l'art. 631 n'a pas d'autre portée, nous le répétons, que de faire présumer de plein droit qu'un contrat, pouvant avoir l'un et l'autre caractère, doit être réputé commercial par cela scul

(4) Nouguier, t. 1o, p. 65 et s.

(2) De la Compétence, n. 187.

IV.

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qu'il est intervenu entre commerçants; ainsi la vente et l'achat, ainsi le prêt, ainsi le cautionnement, ainsi le contrat de gage ou de nantissement, et les difficultés qu'il peut soulever (1), ainsi le mandat (2), ainsi le dépôt, sauf la preuve contraire: s'il était établi, en effet, que le contrat a été entièrement officieux et gratuit, qu'il a été consenti dans le but unique d'obliger un ami, sans aucun bénéuce ni profit, il faudrait décider que l'acte est purement civil (3).

2008. « Certains engagements se forment, dit l'art. 1370, « C. Nap., sans qu'il intervienne aucune convention ni de la << part de celui qui s'oblige ni de la part de celui envers qui «< il est oblige. Les uns résultent de l'autorité seule de la loi, « les autres naissent d'un fait personnel à celui qui se trouve « obligé. »

La loi cite comme exemples des premiers, ceux qui se forment entre propriétaires voisins ou ceux des tuteurs et autres administrateurs qui ne peuvent refuser la fonction qui leur est déférée. Entre quelques personnes que l'autorité seule de la loi ait formé un engagement, il est évident qu'il ne peut avoir rien de commercial.

Les engagements qui naissent d'un fait personnel à celui qui se trouve obligé sont la conséquence du principe posé par l'art. 1382 C. Nap. aux termes duquel : « tout fait quelconque « de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui « par la faute duquel il est arrivé à le réparer; » ce fait peut être une infraction qualifiée de contravention, de délit ou de crime par la loi penale et puni comme tel; ou simplement un fait nuisible pouvant donner lieu à des dommages-intérêts et appelé par la loi quasi-delit (C. Nap., 1370),

La réparation du préjudice causé par l'infraction punissable de peine criminelle, correctionnelle ou de simple police, donne lieu à une action évidemment étrangère aux attributions des tribunaux de commerce.

Il en est de même, en règle générale, pour la réparation du

(1) Cass., 31 mai 1836 (S. V.36.1.857).

(2) Lyon, 17 fév. 1833 (S. V.33.2.365); Bordeaux, 14 avril 1840 (S. V. 40.2.440); 1d. 8 mars 1841 (S.V.42.2.107).

(3) Angers, 8 fév. 1830 (D.P.33.2.166).

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