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PIÈCES JUSTIFICATIVES.

NÉGOCIATION DE DAUXION-LAVAYSSE.

LES pièces relatives à la négociation que Lavaïsse avait voulu entamer avec Christophe et avec le président Pétion, furent publiées après la rupture des conférences.

La correspondance avec Christophe n'est pas longue: elle se borne à une seule lettre. Ce roi, qui avait pris le nom de Henri Ier, la fit imprimer le 11 novembre 1814; il y joignit les instructions données à l'envoyé par le ministre de la marine de France et l'interrogatoire que subit le malheureux adjoint du soi-disant député de Louis XVIII. En tête du recueil on lit une proclamation furibonde, aussi injurieuse à Pétion qu'au gouvernement français. Nous n'avons pas cru devoir reproduire cette pièce. Le cabinet du roi d'Haïti ayant renouvelé en 1816, à l'occasion

du voyage de M. Esmangard à Saint-Domingue, les raisonnemens et les violentes sorties qui se trouvent dans la proclamation de 1814, nous avons donné la préférence au document dont la date est la plus récente; mais nous l'avons abrégé. Il sert d'introduction à la première partie de nos pièces justificatives, qui se compose des morceaux indiqués par les notes 1. 2. et 3 du Précis historique et classés sous les lettres A. B. et C.

Pétion publia, au Port-au-Prince, le recueil des notes échangées entre le prétendu négociateur français et le gouvernement de la république; une seconde édition en fut faite à New-York en 1816; l'une et l'autre portent ce titre, que nous transcrivons littéralement :

PIÈCES RELATIVES aux communications faites au nom du gouvernement français, au PRÉSIDENT D'HAÏTI, par M. le général Dauxion Lavaïsse, député de S. M. Louis xviii, Roi de France et de Navarre..

En 1819, on réimprima, dans le royaume de Christophe (imprimerie royale de Sans-Souci)

les deux collections, avec une nouvelle diatribe contre le président Pétion.

Nous avons réuni sous la lettre A, immédiatement après la déclaration faite en 1816 par le Roi d'Haïti, les diverses notes diplomatiques relatives à la double mission de M. DauxionLavaïsse.

DÉCLARATION DU ROI (HENRI 1er. )

Plein de confiance dans la justice de notre cause et dans la légitimité de nos droits, prenant Dieu et l'univers pour juges dans les prétentions des Français, et n'ayant point de secret à garder envers notre peuple, nos intérêts étant les mêmes et liés d'un manière indissoluble, nous nous sommes fait une impérieuse loi de traiter publiquement, et de la manière la plus solennelle, les affaires qui ont rapport à la liberté et à l'indépendance du peuple haïtien.

Mûs par ces sentimens, nous avons fait publier toutes les ouvertures et toutes les propositions qui nous ont été faites de la part du cabinet français, soit directement, soit indirectement. Nous avons cru devoir nous écarter

de la politique ordinaire des gouvernemens et, par une conduite franche et loyale, nous avons exprimé nos sentimens, et nous avons fait connaître notre inébranlable résolution de vivre libres et indépendans ou de mourir.

En 1814, l'Europe venait d'être délivrée de l'oppression de la France. Après vingt-cinq ans de guerres, de luttes et de combats, les peuples commençaient à jouir des bienfaits de la paix; Louis XVIII venait d'être rétabli sur le trône de France, par les puissances alliées; il était à présumer que sous un prince que l'on dit éclairé et ennemi des préjugés, et qui avait éprouvé de longs malheurs, le cabinet français, revenu à des principes plus humains, plus justes et plus libéraux, aurait changé son systême envers le peuple haïtien ; il était à présumer que la France, satisfaite de lier des relations commerciales avec nous, à l'instar des autres nations, aurait renoncé à vouloir subjuguer un peuple contre qui elle avait déjà vainement fait l'essai de ses forces; il était à présumer que S. M. Louis XVIII, mûe par des sentimens de justice et d'humanité, aurait reconnu notre indépendance, et par cet acte de justice, réparé et effacé les maux incalculables que nous avions éprouvés des Français sous le

gouvernement de Bonaparte; il était enfin à présumer, par nos constans et généreux efforts à combattre et à détruire les armées de l'oppresseur de l'Europe, qu'au rétablissement de la paix générale, nous eussions mérité de jouir de quelques avantages, puisque nous avions supporté tous les fléaux d'une guerre barbare et destructive. Nos justes espérances étaient fondées sur les principes moraux de justice et d'équité qui dirigent les souverains et les peuples éclairés de l'Europe. Le traité de Paris se fit, et il ne fut point question d'Haïti; la France se réserva, et les puissances lui laissèrent le droit de conquérir Saint-Domingue ; et malgré la noble et magnanime et généreuse opposition du peuple et du gouvernement britannique, pour faire renoncer la France à la traite des esclaves, elle conserva dans le traité de Paris le privilége de faire pendant cinq ans cet odieux trafic, uniquement pour se réserver les moyens de remplacer la population d'Haïti, dans le cas où elle l'eût détruite par la guerre d'extermination qu'elle avait en vue de nous faire (1).

(1) Le droit, que se réserva la France et que les

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