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qu'autant qu'elles reproduisent l'esprit du texte, et que d'ailleurs je ne pouvais souvent que résumer les principes sans entrer dans les développements, j'ai pris soin d'indiquer les articles des lois, qu'on peut lire soit comme des autorités qui justifient mes propositions, soit comme un complément de la matière. Quelques lois m'ont paru d'une assez grande importance pour que j'en fisse une explication plus approfondie ; j'ai cru utile de les réunir dans un Appendice, afin que les étudiants et les personnes qui n'ont point le Bulletin des Lois pussent les consulter. Dans d'autres circonstances, ne pouvant insérer entièrement des lois trèsétendues, quelquefois abrogées en grande partie, j'ai cité dans le texte ou dans les notes celles de leurs dispositions qui me semblaient assez importantes pour être placées sous les yeux des lecteurs. Enfin, je me suis appuyé autant qu'il m'a été possible sur la jurisprudence du Conseil d'État et de la Cour de cassation, dont j'ai toujours indiqué les monu

ments.

Ainsi ce livre, pour les étudiants qui suivent mon cours, est le résumé de mes leçons; pour tout le monde c'est un abrégé, que je me suis efforcé de rendre clair et méthodique, de la science générale du droit public, dont la connaissance doit précéder toutes les applications et toutes les études spéciales.

La seconde édition a reçu de grandes améliorations quant au fond et quant à la forme; elle a été portée de deux à trois volumes. Dans la troisième édition, que j'offre en ce moment au public, j'ai conservé, à très-peu de chose près, la forme de la seconde; les améliorations portent principalement sur le fond. Sans cesser d'être élémentaire, j'ai dû suivre le mouvement général de la science, et donner le résultat de mes études particulières; j'ai dû surtout m'occuper d'exposer la théorie des lois que nous devons aux dernières législatures. Le nombre des volumes est resté le même, mais le nombre des pages de chacun d'eux est beaucoup augmenté.

Qu'il me soit permis, en terminant, de présenter quelques

observations qui me semblent fort opportunes dans un moment où l'on s'occupe de fonder l'enseignement du droit sur de nouvelles bases; il s'agit des conditions de capacité et d'instruction qu'il serait nécessaire d'exiger d'un grand nombre de fonctionnaires publics. Depuis longtemps la législation est entrée dans cette voie, pour ce qui concerne l'ordre judiciaire et le barreau; on ne peut être juge ni avocat sans justifier d'études et d'examens. Pourquoi n'en serait-il pas de même dans l'ordre administratif? Faut-il moins d'instruction pour appliquer les lois de droit public que celles de droit privé? Les intérêts de la société sont-ils moins graves que ceux des familles? et d'ailleurs les intérêts des familles ne sont-ils pas souvent compromis par des décisions administratives? Pourquoi des juges qui prononcent à huis clos et sans débat ne seraient-ils pas aussi instruits que ceux devant lesquels des avocats ont pu exposer publiquement les moyens de leurs clients?

Ici je ne parle pas seulement de l'étude du droit administratif, dont il est trop évident que les administrateurs ne peuvent se passer; mais je vais plus loin, et je demande qu'on exige d'eux des études complètes de droit. Ces études, qui portent sur toute la législation, qui nécessitent un travail de plusieurs années, et qui sont éprouvées par des examens publics, peuvent seules donner l'intelligence des lois et l'habitude de leur application.

D'ailleurs tout se tient dans le droit, et l'administrateur est souvent obligé d'avoir recours aux règles du droit civil; par exemple, il ne peut ignorer ce qui est relatif à la condition civile des personnes qui détermine souvent leur condition politique, à la distinction des biens, aux contrats qu'il peut être chargé de passer ou d'interpréter, aux hypothèques, à la prescription, etc., etc.

Sans doute il est des fonctions administratives qui n'exigent pas les études dont je viens de parler, et qui peuvent sans danger être confiées à des hommes que l'expérience seule a éclairés. Mais il en est d'autres pour lesquelles elles me paraissent indispensables; ainsi les conseillers de préfecture,

véritables juges administratifs, les conseillers d'État qui font partie des comités de législation et du contentieux, devraient avoir fait preuve d'études de droit. Je dirai la même chose des préfets, auxquels une haute responsabilité est imposée, et qui sont à la fois des administrateurs et des juges; si quelques exceptions paraissent nécessaires, elles devraient être très-rares, et motivées sur d'anciens et honorables services administratifs. Les sous-préfets pourraient avec moins d'inconvénients être affranchis de la règle, parce qu'ils n'agissent en général que sous la direction du préfet; mais cependant on devrait s'attacher à choisir de préférence ceux que des études solides auraient préparés à la pratique des affaires. Ce serait d'ailleurs un moyen de former des préfets instruits et capables.

Plus que jamais le gouvernement doit exiger des connaissances étendues des hommes auxquels il confie les hautes fonctions administratives. Le besoin de la société aujourd'hui, c'est la légalité; l'esprit d'examen est répandu partout, il pénètre dans les cabinets des administrateurs, éclaire les coins les plus obscurs des bureaux, et, trop souvent hostile, il dénonce des erreurs et des négligences comme des attentats aux libertés publiques. Il faut donc que les hauts fonctionnaires administratifs aient fait une étude complète des lois, sinon ils seraient placés, à l'égard de leurs administrés, dans une position d'infériorité qui enlèverait au gouvernement toute son autorité et toute sa force.

Une ordonnance du 4 octobre 1820 statue que les jeunes gens qui se destinent aux fonctions administratives suivront pendant deux années le cours du droit administratif, et subiront sur cette matière un examen spécial, dont il sera fait mention dans leurs certificats d'aptitude et dans leurs diplômes. Cette ordonnance était un premier pas dans la voie des améliorations; elle excitait l'émulation des étudiants, en leur faisant entrevoir que des études plus approfondies seraient pour eux un titre à l'admission dans les fonctions publiques, et elle permettait à l'administration de choisir en connaissance de cause ceux qui présentaient le plus de

garanties d'instruction. Malheureusement elle est tombée en désuétude, et n'a même, je crois, jamais été appliquée. Cependant elle offre, bien qu'insuffisante, un puissant encouragement à des études que l'on ne saurait trop recommander. J'en sollicite avec ardeur le rétablissement ou l'application, en attendant que d'autres améliorations puissent être effectuées.

En effet, créer des chaires de droit public, c'est vouloir qu'elles soient utiles pour les services publics; offrir cet enseignement aux jeunes gens, c'est leur dire, au nom du Roi, ce que l'empereur Justinien disait aux étudiants de son temps, en leur adressant ses Institutes: « Summâ itaque ope » et alacri studio has leges nostras accipite, et vosmetipsos sic eruditos ostendite, ut spes vos pulcherrima foveat toto legitimo opere perfecto, posse etiam nostram rempublicam " in partibus ejus vobis credendis gubernari. (Institut. præmium, § 7.)

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Nota. Les lois et ordonnances marquées d'un astérisque sont celles dont le texte se trouve à l'Appendice. Nous avons cru devoir insérer dans leur entier les lois et ordonnances qui composent cet Appendice, bien que quelquefois leurs dispositions se trouvent abrogées ou modifiées par des actes postérieurs. Il ne faut donc le consulter que comme un complément de l'ouvrage, et se reporter, pour connaître le véritable état de la législation sur chaque matière, aux chapitres spéciaux où il en est traité.

Le mot droit a plusieurs sens.

Tantôt il signifie la justice absolue, ou les actions que la justice absolue permet de faire;

Tantôt il signifie l'ensemble des lois établies chez une nation ou sur une matière le droit romain, le droit français, le droit criminel, le droit commercial;

Ou les facultés conférées par ces lois, et les actions qu'elles permettent de faire, comme le droit de voter dans les assemblées électorales, le droit de contraindre un débiteur au payement.

Il signifie encore la science des lois, l'art de les appliquer; enfin, il est employé comme synonyme d'impôt. On dit: les droits de timbre, d'enregistrement.

Considéré comme un ensemble de lois, le droit se divise en droit naturel, résultant de la constitution de notre être et de l'ordre établi dans la création par Dieu même ; et en droit positif, comprenant les lois formellement exprimées par un législateur humain, lesquelles ne sont ou ne doivent être que l'application du droit naturel aux besoins de la société. On appelle encore le droit naturel droit absolu, parce qu'il est le même dans tous les temps et chez tous les peuples; et le droit positif droit relatif, parce qu'il varie suivant les temps et suivant les lieux.

Le droit positif se subdivise :

En droit écrit, quand il a un auteur certain;

En droit non écrit ou coutumier, quand il résulte d'usages dont l'origine se perd dans la nuit des temps.

Suivant son objet, on divise le droit,

En droit public et droit privé.

Le droit public est celui qui règle les rapports de l'État soit avec les autres États, soit avec les individus.

Dans le premier cas, il reçoit les noms de droit public externe, droit public international, droit des gens (jus gentium).

Dans le second cas, on l'appelle droit public interne.

Le droit public interne comprend le droit politique, qui a rapport au gouvernement de la société, et le droit administratif, qui est relatif à la gestion des intérêts collectifs.

Le droit privé règle les rapports des citoyens entre eux.

Il se subdivise en droit civil et droit commercial.

Nous nous occupons dans cet ouvrage du droit public interne, ce qui embrasse le droit politique et le droit administratif.

Nota. La réimpression de ces deux volumes était déjà fort avancée quand les Chambres ont été saisies de projets de lois relatifs à quelques-unes des matières qui y sont traitées. Cet incident m'a déterminé à suspendre la publication du se volume jusqu'après la session, afin de pouvoir y ajouter un supplément qui fera connaître les modifications que cette session aura produites. Un erratum général sera également inséré à la fin de ce troisième volume.

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