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Mais de là il ne résulte pas que la volonté du testateur devait rester inexécutée; en effet, le préteur au lieu d'obliger le bénéficiaire à prêter le serment, le soumettait à la charge même que le testateur lui imposait, c'est-à-dire à donner ou à faire ce qui avait été exigé de lui sous serment.

Ulpianus, fr. 8, § 6, eod: « Quotiens heres jurare jubetur, daturum se aliquid, vel facturum, quod non improbum est, actiones hereditarias non alias habebit, quam si dederit, vel fecerit id, quod erat jussus jurare. »

FIDEICOMMIS ET AFFRANCHISSEMENTS

CONDITIONS IMPOSSIBLES, CONTRAIRES AUX LOIS OU AUX

MŒURS

La règle admise pour les conditions impossibles, ou illicites, dans la matière des institutions d'héritier, une fois passée, après discussion entre les écoles, dans la matière des legs, fut étendue assez facilement aux autres dispositions testamentaires. Les Institutes de Justinien nous donnent la règle ainsi généralisée :

De hered. inst., § 10, II, 14: Impossibilis conditio in institutionibus et legatis, nec non in fideicommissis et libertatibus, pro non scripto habetur.

Le fr. 8, § 2, De cond. instit., XXVIII, 7, qui se rapporte à la condition jurisjurandi nous dit que dans les fidéicommis on doit se conformer à l'édit du préteur, parce qu'ils suivent le sort des legs.

In fideicommissis quoque oportebit eos, qui de fideicommisso cognoscunt subsequi prætoris edictum, ea propter, quia vice legatorum funguntur.

Dans les affranchissements la règle était la même : les conditions qui nous occupent étaient réputées non écrites, la liberté étant acquise. Je prendrai l'exemple d'une falsa conditio assimilée à la condition impossi

ble.

Papinianus, fr. 72, § 7, De cond. et dem., XXXV, 1.

<«<Falsam conditiorem Cassius et Cœlius Sabinus impossibilem esse dixerunt: veluti, Pamphilus, si quod Titio debeo solverit, liber esto: si modo nihil Titio fuit debitum; quod si post testamentum factum testator pecuniam exsolvit, defecisse conditionem intelligi.»>

Le texte s'occupe de l'espèce suivante: le testateur affranchit un esclave par son testament « s'il paie à Titius ce que je lui dois. » Le teslateur a acquitté cette dette après la confection du testament, il est impossible à l'esclave d'accomplir la condition, la liberté est donnée purement et simplement.

D'autres textes présentent quelques difficultés.

Nous avons vu en traitant de la condition jurisjurandi que l'édit du préteur considérait la disposition comme pure et simple, et obligeait le bénéficiaire, héritier ou légataire, à exécuter la charge à lui imposée par le

testateur sous serment.

Un texte nous apprend que lorsqu'il s'agit d'un affranchissement, la même solution n'est pas possible, l'édit du préteur n'est pas applicable, la condition doit être remplie :

Ulpianus, fr. 12,pr. De manumis testam.,XL, 4: « Si quis libertatem sub jurisjurandi conditione reliquerit, edicto prætoris locus non erit, ut jurisjurandi conditio remittatur : et merito; nam si quis remiserit conditionem libertatis, ipsam libertatem impedit: dum competere aliter non potest, quam si paritum fuerit conditioni (voir la même règle dans le § 1, eod.).

D'où provient la différence? Sur ce point, les auteurs

sont partagés.

La raison qu'en donne Barthole, c'est que le préteur fait remise du serment parce qu'il semble dur, non seulement de ne point s'en rapporter à la promesse du légataire, mais en outre de le forcer à jurer de faire ce que renferme la condition, en sorte qu'il dût perdre son legs si sa conscience, par trop timorée, l'empêchait, par crainte de la divinité, de faire un serment quoique d'ailleurs il fut disposé à faire la chose prescrite; mais lorsque la liberté a été laissée à un esclave sous la condition du serment, cet esclave ne doit point trouver trop dure l'injonction qui lui est faite, et qui lui procure le moyen d'acquérir le plus précieux des biens, la liberté (apud Pothier, Pandecta Justin., XXXV.,1, § 29).

Savigny (Droit romain, § 123), de son côté, dit que la condition du serment est par exception autorisée dans quelques cas: 1° en faveur d'une ville; 2° lorsqu'un esclave est affranchi sous la condition d'une promesse avec serment (L. 12, pr. § 1, XL, 4). Cette exception se fonde sur ce que la plupart des actes qui peuvent être imposés à un homme libre comme conditions, ne peuvent l'être à un esclave à cause de son incapacité du droit. Au reste, le serment prêté par l'esclave n'était pas juridiquement obligatoire, c'était celui prêté par l'affranchi; mais on comptait qu'un sentiment religieux engagerait l'esclave affranchi par son premier serment à en préter un nouveau qui donnerait lieu à une action en justice.

De ce cas, dit-il, est venu sans doute la coutume d'exigerun serment comme condition d'une disposition testamentaire: dans la suite, des testateurs imposèrent cette condition à des hommes libres, et voilà ce qui détermina la prohibition de l'édit.

Quant à moi je souscrirai à l'opinion très juridique de mon savant maître M. Bufnoir. La remise de la conditio jurisjurandi à l'esclave affranchi par testament sous cette condition, ne lui aurait pas assuré le bénéfice de la liberté : le préteur, dans l'hypothèse de tout autre legs, à défaut d'efficacité reconnue par le droit civil, pouvait procurer au légataire des résultats équivalents par des moyens prétoriens. Il n'en était pas de même pour l'affranchissement: il n'y avait pas de liberté tuitione prætoris, comme il y avait, par exemple, une propriété prétorienne. Tout ce que le préteur aurait pu faire ici, ainsi qu'il le faisait en d'autres circonstances, ç'aurait été de maintenir l'esclave en liberté de fait, mais les résultats n'auraient pas été les mêmes c'est évidemment à ces principes que se réfère notre texte, quand il dit que la liberté ne peut être acquise que par l'accomplissement de la condition, c'est impedire ipsam libertatem. I suppose nécessairement que la remise de la condition jurisjuran li ne pouvait donner à la disposition qui y avait été soumise, que les effets qu'il était au pouvoir du droit prétorien de lui faire produire (op. cit., p. 48).

Il nous reste à mentionner un dernier cas: un testa

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