Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

fonds, ne serait toujours qu'un pur don de la fortune, puisque le trésor n'est ni une partie intégrante, ni nne partie accessoire, ni le fruit de l'immeuble dans lequel il est découvert, ainsi que nous l'avons établi ailleurs et de là on doit encore tirer cette conséquence que les père et mère doivent en avoir l'usufruit légal, lors même qu'ils n'auraient pas la jouissance du fonds dans lequel la découverte aurait été faite.

QUATRIÈME EXCEPTION.

151. L'usufruit légal ne porte point sur les biens qui sont donnés ou légués aux enfans sous la condition expresse que les père et mère n'en jouiront pas (387): le donateur, qui pourrait s'abstenir de faire aucune libéralité, doit être le maître d'en borner les effets au profit de la personne qui est le seul objet de ses affections.

Nous disons sous la condition expresse, parce que ce sont les termes du code. Pour que l'usufruit paternel n'ait pas lieu sur les biens donnés aux enfans mineurs de dix-huit ans, il est donc nécessaire que les père et mère en soient formellement exclus par l'acte de libéralité; et de là il résulte qu'il faut écarter la doctrine des auteurs (1) qui ont écrit, que, quand le père est institué héritier conjointement avec ses enfans, par un étranger, il ne doit pas avoir l'usufruit légal sur les portions d'hérédité dévolues à ceux-ci, par cela seul qu'il aurait au-delà de

(2) Voy. dans LAPEYRÈRE, lettre V, n.° 74.

la

la part qui lui a été assignée par le testateur. Car alors le père ou la mère ne revendique point l'usufruit des biens du défunt, mais seulement la jouissance de ceux de ses enfans; et il doit l'obtenir du moment que le testateur ne l'a point prohibé, ni déclaré d'une manière expresse, qu'il voulait que le fils seul profitât de sa portion tant en propriété qu'en jouissance. 152. Dans les principes de l'ancienne jurisprudence, lorsque la mère, instituant son fils héritier, avait prohibé l'usufruit légal au père, cette prohibition n'avait d'effet qu'à l'égard des biens donnés qui excédaient la légitime de l'enfant, parce qu'il n'y a que cet excédant qu'on puisse dire être totalement à la disposition de l'homme. En conséquence la portion légitimaire n'en restait pas moins soumise à la jouissance du père, par la raison que le fils n'était toujours censé la recevoir que des mains de la loi, qui en disposait elle-même, en usufruit au profit du père (1). On doit porter encore aujourd'hui la même décision à l'égard de la réserve légale des enfans, et dire que, si le testateur ou le donateur est, par rapport à sa qualité d'ascendant, obligé de laisser une partie de ses biens au fils de famille, il ne peut prohiber efficacement au survivant des père et mère l'usufruit légal sur cette por

(1) Voy. dans FACHINÉE, controver. juris, lib. 5, cap. 21;-LAPEYRÈRE, lett. V, n.° 80;-CATELLAN, liv. 4, chap. 80; — CHABROL, sur la coutume d'Auvergne, chap. II, art. 2, sect. 1, tom. I, p. 157;—BANNELIER, tom. 4, p. 55, n.o 1533, édition in-4.°;-DEPEISSE sur l'usufruit, sect. 4, n.o 13 tertio.

TOM. I.

13

tion, parce que les enfans ne tiennent également cette nouvelle légitime que de la loi, qui elle-même en attribue la jouissance au père ou à la mère survivant.

Néanmoins, comme l'observe M. Touillier, célèbre professeur en droit à Rennes (1), s'il s'agissait d'une donation entre-vifs, faite avec prohibition d'usufruit légal, et acceptée sans aucune réserve ni protestation par le père ou la mère agissant pour les mineurs, cette acceptation pure et simple pourrait lui être opposée comme une renonciation tacite au droit d'usufruit qui s'ouvre, au profit du père, au moment même où les enfans acquièrent la propriété des biens donnés.

[ocr errors]

Quant à la quotité disponible, comme le donateur aurait pu en disposer au profit d'un étranger, et exclure par là le survivant des père et mère de toute jouissance à cet égard, il a pu également en disposer, au profit des enfans, avec prohibition d'usufruit légal, parce que ceux-ci ne peuvent être d'une condition pire que l'étranger, sur cet objet. 153. Pour se bien pénétrer du véritable sens du texte de notre code, portant que l'usufruit paternel ne s'étend pas sur les biens donnés aux enfans sous la condition expresse que les père et mère n'en jouiront pas, il faut observer que la loi n'assigne aucunes expressions sacramentelles, dont le disposant soit tenu de se servir

(1) Le droit civil franç. par M. TOUILLIER, tom. 2, pag. 348.

[ocr errors]

pour mettre obstacle à cette jouissance; qu'il suffit en conséquence que la volonté par lui exprimée soit telle qu'en l'exécutant dans l'intérêt des enfans, le père ou la mère doive être exclu de l'usufruit des biens donnés; car, en exprimant une disposition incompatible, dans son exécution intégrale, avec l'exercice du droit paternel, le donateur fait réellement une libéralité sous la condition expresse que les père et mère n'en profiteront pas; et de quelque manière que la volonté ait été déclarée dans l'acte, elle doit nécessairement faire la loi, puisqu'il était pleinement le maître.

Ainsi, lorsqu'un père est nommé légataire avec son fils, si le testateur avait dit qu'il léguait la moitié de ses biens au père, et que l'autre moitié appartiendrait au fils, non-seulement en propriété, mais encore en jouissance, du moment de son décès; le père n'aurait pas la jouissance de la portion du fils, parce qu'en déclarant d'une manière expresse que cette jouissance ne doit appartenir qu'au fils, dès l'instant du décès du testateur, c'est suffisamment exprimer qu'elle ne doit point appartenir au père, et qu'au contraire il doit en être privé.

Ainsi encore, dans le cas d'un fideicommis, si le père, nommé légataire, était chargé de rendre les biens à son fils, avant que celui-ci eût atteint ses dix-huit ans, il ne pourrait en retenir l'usufruit, parce que la restitution dont le fiduciaire est grevé, doit embrasser la chose toute entière; qu'étant chargé de rendre le tout, il doit rendre le tout; et qu'il y aurait de la

contradiction à lui accorder le droit de reprendre, à titre d'usufruit paternel, une portion du domaine que, suivant la volonté du testateur, il est chargé de restituer en totalité (1); que le testateur, en exprimant la charge de rendre ou de transmettre sa libéralité toute entière au fils avant qu'il eût atteint l'âge de dix-huit ans, a, par là, suffisamment cxprimé que dès-lors le père n'en devait plus jouir. Nous pouvons ajouter que la question a été ainsi décidée en Conseil d'état, sous le Gouvernement précédent, le 30. janvier 1811, à l'égard des majorats qui ne sont autre chose que des substitutions fideicommissaires perpétuelles (2).

C'est par application de ce principe que la cour royale de Paris a rendu un arrêt le 24 mars 1812, dans une espèce qu'il ne sera pas inutile de retracer ici.

Par son testament du 12 fructidor an 11, le sieur Sévenet avait fait un legs de 2000 francs au sieur Compigny, son petit-fils, dans les termes suivans: «< Enfin je laisse et lègue au même · » Compigny, mon petit-fils, la somme de deux >> mille francs en argent comptant, à prendre sur >> ma succession mobilière; de laquelle somme >> moitié sera conservée pour être employée à >> son éducation, ou à lui faire prendre un état, » et les autres mille francs seront placés le plus

(1) Voy. dans SURDUS, de alimentis; et les auteurs par lui cités, tit. 7, quest. 14, n.o 30 et 31.- Facit etiam, 1. 50, ff. ad S.-C. Trebellian., lib. 36, tit. 1.

(2) Voy. au bull., 4. série, tom. 14, pag. 143.

« PreviousContinue »