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que de celles du donateur, il n'appartiendrait point à celui-ci de la soumettre à une condition qui pût la modifier et la soustraire aux dispositions du droit commun.

287. Si un droit d'usufruit ou une pension viagère appartient à la femme lors de son mariage, ou lui est acquis depuis, la communauté ou le mari ont le droit d'en jouir comme de tout autre bien dotal, et à la dissolution du mariage on ne doit restituer à la veuve que le droit d'usufruit ou de la rente (1568), sans lui tenir compte des fruits ou intérêts échus durant le mariage. 288. Il arrive assez souvent que des pères et mères, mariant leurs enfans, leur accordent, par avancement d'hoirie et pour les aider à supporter les charges du mariage, la jouissance seulement de certains fonds spécifiés dans le contrat nuptial. L'usufruit ainsi accordé a, sous le rapport de sa durée, deux caractères qui lui sont propres, et par lesquels il diffère essentiellement de celui qui serait légué dans un testa

ment.

Et d'abord, l'usufruit ordinaire ne finit pas par la mort du propriétaire du fonds qui en est grevé, tandis qu'ici le droit de jouissance, accordé au fils par son père, prend fin par le décès de celui-ci, parce qu'il n'a été accordé qu'en attendant l'ouverture de la succession du donateur.

En second lieu, l'usufruit ordinaire finit à la mort de l'usufruitier; en sorte que ses héritiers n'en profitent ni par droit de transmission, ni comme appelés à le recueillir après lui. Au contraire, dans le cas que nous avons supposé, si le

fils donataire de la jouissance de certains immeubles vient à décéder avant son père, et laisse des enfans du mariage en contemplation duquel ce droit de jouissance avait été accordé, ceux-ci doivent en profiter, jusqu'au décès de leur aïeul, comme étant censés appelés par substitution vulgaire, tacite, parce que c'est en vue de leurs nourriture et entretien que la libéralité a été faite.

CHAPITRE VIII.

De l'Usufruit qui appartient aux titulaires des bénéfices ecclésiastiques.

289.

Les titulaires des bénéfices ecclésiastiques sont aussi constitués par la loi usufruitiers des biens composant la dotation de leurs bénéfices, puisqu'ils ont droit d'en jouir et qu'ils n'en sont pas propriétaires.

Ils exercent donc sur ces biens tous les droits d'un véritable usufruitier, et en supportent les charges, conformément aux règles portées dans le code civil à l'égard des usufruitiers ordinaires; sauf néanmoins les modifications prescrites par le décret du 6 novembre 1813, comme tenant à la nature de cette espèce particulière (1). 290. Il n'en était pas ainsi dans les temps de l'Eglise primitive: car, suivant les anciennes règles canoniques, les ecclésiastiques n'avaient pas, sur les biens dépendant de leur bénéfice, des

(1) Voyez l'art. 16 de ce décret, bullet. 536, t. 19, pag. 377, 4. série.

droits aussi étendus que celui d'usufruit. Ils ne devaient être considérés que comme de simples usagers. Les canons ne leur accordaient d'autres droits que celui de prendre, sur les revenus de leur église, ce qui était absolument nécessaire à leur honnête entretien. Tout le surplus était destiné au soulagement des pauvres et aux dépenses nécessaires soit à l'exercice du culte, soit aux réparations des temples. S'ils avaient fait quelques acquisitions en leur nom propre, mais avec leur superflu, elles devaient retourner à leur source et servir de supplément à la dotation de l'église dont elles étaient provenues: Inquirendum est, si quis presbyterorum de reditibus ecclesiæ, vel oblationibus, vel votis fidelium alieno nomine res comparavit, quia sicuti nec suo, ita nec alieno nomine presbyter fraudem facere de facultatibus ecclesiasticis debet, quoniam hoc sacrilegium est, et par crimini Judæ furis, qui sacras oblationes asportabat et furabatur (1).

Pour mettre obstacle aux tentatives de l'avarice, lorsqu'un clerc se présentait à l'ordination, on devait s'informer s'il avait du patrimoine à lui propre; et, s'il était reconnu qu'il n'en eût point, toutes les acquisitions qu'il pouvait faire par la suite devaient être de plein droit dévolues à l'église : Investigandum est, si nihil patrimonii habens presbyter, quando promotus est ad ecclesiasticum ordinem, posteà emerit prædia cujus juris sint, quoniam ecclesiæ,

(1) Decretal. Gregor. de peculio clericorum, cap. 42 lib. 3, tit. 25.

Il résulte de là que, s'il y a des fonds non affermés, les fruits pendans par racines sur ces fonds, au jour de la vacance, doivent être partagés avec les héritiers du titulaire décédé, suivant le prorata du temps de la dernière année, qui s'est écoulé avant son décès; car le mot revenus, employé par l'auteur du décret précité, est un terme générique qui ne convient pas moins aux fruits naturels ou industriels, qu'aux fruits civils; et tels étaient déjà les principes de la doctrine ancienne à l'égard des bénéficiers (1). Il en résulte encore qu'on doit, en ce cas, tenir compte des frais de culture et de semences aux héritiers du bénéficier décédé, parce que le revenu seul ne consiste que dans ce qui reste après les avances payées, fructus eos esse constat, qui deductá impensá supersunt (2), et qu'en accordant à l'un une part égale dans le produit brut du fonds, tandis que les impenses préparatoires de la récolte seraient laissées à la charge de l'autre, il n'y aurait plus d'égalité entre les copartageans. 293. Les revenus échus dès l'ouverture de la vacance jusqu'à la nomination du nouveau titulaire, accroissent en réserve au profit du bénéfice, pour les impenses des grosses réparations; et les difficultés qui peuvent s'élever, sur les comptes et répartitions de revenus, entre le nouveau titulaire, les héritiers du précédent, et le

(1) Voyez dans SOTOMAYOR, de usufructu, cap. 79, nos. 4 et II in fine.

(2) L. 7, ff. soluto matrimonio, liv. 24, tit. 3. V. et I. 36, §. 5, ff. de hæredit. petit., lib. 5, tit. 3.

trésorier

trésorier du bénéfice, doivent être portées au conseil de préfecture (1).

294. Le titulaire d'un bénéfice ecclésiastique n'est pas, comme un légataire d'usufruit, obligé à fournir un cautionnement; mais, lors de sa prise de possession, il doit en être dressé procès-verbal par-devant le Juge de paix, et ce procèsverbal doit porter la promesse par lui souscrite de jouir des biens en bon père de famille, de les entretenir avec soin, et de s'opposer à toute usurpation ou détérioration (2).

S'il y des bois dans la dotation, il a le droit de jouir des taillis, conformément à ce qui est prescrit par l'article 59o du code, c'est-à-dire, en observant l'aménagement des coupes, et sans indemnité pour ses héritiers, à raison de celles qu'il n'aurait pas faites pendant sa jouissance.

Mais, quant aux arbres futaies réunis ou épars, il doit se conformer à ce qui est ordonné pour les bois des communes, c'est-à-dire qu'il est nécessaire qu'il y ait des besoins urgens de dépenses à faire pour grosses réparations ou reconstructions; que cela soit préalablement vérifié et constaté, et qu'il faut ensuite obtenir du Gouvernement la permission de couper ou vendre les futaies jusqu'à concurrence de ce que peut exiger le rétablissement des objets qui sont à réparer dans les fonds du bénéfice (3).

(1) Voyez l'art. 26 du décret précité.
(2) Art. 7 du décret précité.

(3) Voyez les articles 12 et 13 du décret précité;
- le nouveau Répert., au mot futaies, §. ';

- et les

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