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TROISIÈME PROPOSITION.

358. Lorsque la quotité disponible qui, pris égard au nombre des enfans, forme le maximum, a été épuisée par une première donation entrevifs, toutes autres libéralités, soit entre-vifs, soit testamentaires, sont inutiles et comme non avenues, sans que le premier donataire soit obligé de venir à contribution avec les autres.

Cette proposition, fondée sur le texte de la loi (923), est aussi évidente par elle-même; car ce qui a été une fois irrévocablement donné à l'un, ne peut plus être donné à d'autres.

Ainsi, à supposer qu'un père, qui n'a qu'un enfant, eût donné la moitié de ses biens à un étranger, c'est en vain qu'il tenterait de donner encore quelque chose à son épouse : cette seconde donation ne pouvant avoir d'objet, serait nécessairement inutile et sans effet.

Ainsi, à supposer que ce même père, ayant trois enfans ou un plus grand nombre, eût, par traité nuptial, donné à son épouse un quart en propriété et un autre quart en usufruit, ou même seulement le quart en toute propriété, toute autre donation qu'il voudrait faire par la suite, soit au profit d'un étranger, soit par préciput au profit d'un de ses enfans, resterait inutile et sans objet.

QUATRIÈME PROPOSITION.

359. Lorsqu'il s'agit de combiner ensemble plusieurs legs de quotité dont la masse est inofficieuse, et dont l'un est fait au profit de la veuve, et d'autres sont faits au profit d'étrangers, on doit s'attacher d'abord à reconnaître quelle est la quotité disponible la plus forte, et, après en avoir opéré la distraction, on doit la distribuer aux legataires suivant la proportion comparative de leurs legs, et l'intention présu

mée du testateur:

Ainsi, à supposer que le testateur n'ait laissé qu'un enfant, on verra d'abord que la plus forte quotité devra être prise de l'article 913, et qu'elle sera de la moitié de tous les biens de la succession.

Dans cette première hypothèse, si le testateur a légué la moitié de ses biens à un étranger, et qu'il ait, d'autre part, légué la moitié de ses biens en usufruit à sa veuve, on devra considérer le legs de moitié, fait à l'étranger, comme ne portant que sur la nue propriété, et la veuve comme légataire de l'usufruit de cette même moitié, parce qu'il est naturel de présumer qu'un père n'aura pas voulu excéder les bornes qui lui sont prescrites sur la légitime de son enfant, et qu'en conséquence on ne doit pas croire qu'il aura eu l'intention de donner tout à la fois la moitié en toute propriété, et une autre moitié en usufruit il n'y aura donc, en ce cas, aucune autre réduction à faire par contribution entre

les deux légataires. Mais c'est là un point sur lequel nous reviendrons encore plus bas.

Si, outre le legs de moitié fait à l'étranger, le testateur avait encore légué un quart en propriété et un quart en usufruit à sa veuve, on ne pourrait ici, comme dans le cas précédent, présumer qu'il eût voulu se renfermer dans les bornes d'une seule de ses quotités disponibles, puisqu'il aurait expressément donné les deux.

Cependant il faudrait réduire les deux legs dans les bornes de la plus forte des deux quotités disponibles, qui est la moitié, et qui devrait être partagée entre les deux légataires dans la proportion de leurs droits.

Ce partage ne pourrait être opéré qu'après qu'on en aurait trouvé les bases dans l'estimation de chacun des legs; et comme les droits de la veuve, quoique de diverse nature, ne devraient former qu'une seule masse estimative pour comparer la valeur de son legs avec celle de l'autre, il serait nécessaire d'estimer son droit d'usufruit pour le convertir en droit de propriété, à l'effet d'opérer une juste réduction des deux legs, en les renfermant l'un et l'autre dans la moitié des biens délaissés par le testateur.

Si, par exemple, l'usufruit légué à la veuve était estimé à la valeur de moitié du fonds, la masse totale de son legs serait d'un quart et demi, ou de trois demi-quarts; tandis que la masse des droits de l'autre légataire serait de quatre demi-quarts d'où il résulte qu'en dernière analyse, la moitié qui serait la plus forte quotité disponible délivrée aux deux légataires,

devrait être partagée en sept parts, dont trois reviendraient à la veuve, et les quatre autres à ce légataire étranger.

Dans ce cas et autres semblables, les enfans n'auraient plus de legs d'usufruit à supporter, parce qu'ils doivent toujours être quittes des legs par l'abandon de la plus forte quoité disponible.

Il nous reste encore de semblables explications à donner sur les deux autres hypothèses dans lesquelles la quotité disponible prise de l'article 913 est différente, par rapport à la diversité du nombre des enfans; mais pour ne pas multiplier inutilement des calculs dont nous n'avons à indiquer que les bases, nous supposerons toujours qu'il s'agit d'un legs de moitié fait à un étranger, et du legs du quart en propriété avec un autre quart en usufruit fait à la veuve; ce qui conservera entre les deux légataires une proportion de droits que le lecteur pourra toujours apercevoir au premier coupd'oeil et sans peine.

Si le testateur avait laissé deux enfans, la plus forte quotité disponible serait du tiers, d'après l'article 913; tandis qu'elle serait d'un quart en propriété, et d'un autre quart en usufruit, suivant l'article 1094. Cependant les enfans ne seraient obligés de souffrir que la distraction d'une des deux; mais les légataires pourraient exiger la plus forte.

Pour connaître celle qui devrait l'emporter sur l'autre, il faudrait encore apprécier le droit d'usufruit légué à la veuve, comparativement à

celui de propriété, à l'effet d'arriver à un résultat semblable à celui que nous avons indiqué dans la première hypothèse où il n'y avait qu'un enfant.

Le tiers à prendre comme quotité disponible d'après l'article 913, surpasse le quart d'un douzième : il s'agirait donc de savoir ce que vaudrait ce douzième comparativement à l'usufruit du quart pris dans l'article 1094, au-delà du quart en propriété.

Si, pris égard à l'àge de la veuve, l'usufruit n'était estimé qu'au tiers de la propriété, le quart légué en usufruit ne vaudrait qu'un douzième en propriété, parce que le tiers du quart est un douzième; et, soit qu'on prît la quotité disponible dans l'article 913, soit qu'on la prît dans l'article 1094, on la trouverait toujours la même, c'est-à-dire que, dans l'une comme dans l'autre manière de la supputer, elle ne comprendrait toujours que le tiers de la masse totale de la succession; et c'est ce tiers qui serait à partager entre les deux légataires, dans la proportion de leurs droits; en sorte que, sur dix parts, il en reviendrait quatre à la veuve, et six au légataire 'étranger.

Si, dans cette même hypothèse, l'usufruit de la veuve était estimé à la valeur de la moitié du fonds, le quart en usufruit vaudrait un douzième et demi en propriété, puisque trois douzièmes sont la même chose que le quart: or, nous venons de voir que, quand l'usufruit est estimé au tiers, le quart en usufruit vaut un douzième du fonds, lequel douzième, ajouté au quart en propriété, donne justement le tiers du tout, ce qui fait

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