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mais obligé d'aller chercher les légataires pour leur offrir leurs legs: Hæres quoque legatorum nomine non propriè ex contractu obligatus intelligitur: neque enim cum hærede, neque cum defuncto ullum negotium legatarius gessisse propriè dici potest, et tamen quia ex maleficio non est obligatus, quasi ex contractu debere intelligitur (1). Voilà le principe de l'action personalis ex testamento, qui appartient à tout légataire pour obtenir contre l'héritier la délivrance de son legs, action qui, d'après les lois (2), doit être portée par-devant le tribunal du lieu de l'ouverture de la succession, c'est-à-dire du domicile mortuaire du testateur (110).

Mais, pour donner plus d'efficacité à cette obligation personnelle de l'héritier, les lois tant anciennes (3) que nouvelles (1017) ont voulu que le légataire eût une hypothèque légale sur les biens de la succession.

Ainsi, lorsque le legs consiste dans une somme d'argent ou autres choses fongibles, le légataire est créancier hypothécaire sur les biens de la succession pour obtenir le payement de la valeur de son legs.

Ainsi encore, lorsque les choses léguées consistent en corps certains, le légataire a également une hypothèque en garantie de la délivrance qui doit lui être faite, soit pour les dommagesintérêts qui pourraient lui être dus en cas de re

(1) S. 5, instit. de obligat. quæ ex quasi-contract., lib. 3, tit. 28.

(2) Art. 50 et 59 du cod. de procéd.

(3) L. 1, cod. communia de legat., lib. 6, tit. 43.

tard, soit pour ceux qui lui seraient dus en cas de distraction, destruction ou détérioration de la chose par la faute de l'héritier, attendu que tout ce qui est dans l'obligation personnelle de celui qui doit conserver la chose pour la délivrer, se trouve aussi dans la garantie accessoire de l'hypothèque que la loi attache à cette obligation (1).

Enfin, lorsque la chose léguée en propriété ou en usufruit consiste dans un corps certain, le lé→ gataire a l'action réelle en revendication de la propriété, ou confessoire en revendication de son usufruit.

388. Le légataire de l'usufruit qui intente son ac

tion en délivrance contre l'héritier, est en droit d'exiger le compte des fruits à dater du jour de la demande in his autem actionibus quæ de usufructu aguntur, etiam fructus venire plusquàm manifestum est (2); mais la saisine du légataire ne peut avoir d'effet rétroactif et être reportée au principe de la demande qu'envers l'héritier contre lequel l'action a été intentée : si donc un fonds soumis au droit d'usufruit était entre les mains d'un tiers qui en fût possesseur de bonne foi, ce n'est qu'à dater du jour d'une autre demande intentée contre lui que l'usufruitier pourrait en exiger le rapport des fruits (3). 389. IV. C'est seulement lorsque la délivrance du legs a été volontairement consentie ou ordon

(1) Voy. dans GOMES, variæ resolut. de legat., cap. 12,

n.° 7.

(2) L. 5, §. 3, ff. si ususfr. petatur, lib. 7, tit. 6. (3) Voy. dans RENUSSON, traité du douaire, chap. 5 n.o 32; — et dans POTHIER, idem, n.o 189.

née en justice, que le légataire est véritablement saisi de son legs, ou plutôt des objets qui lui sont légués; et par ce nouvel état de choses, il acquiert encore de nouveaux avantages et de nouvelles actions qui forment le dernier terme de la progression de ses droits.

Et d'abord, étant envoyé en possession en exécution d'un titre juste, il fera désormais les fruits siens.

Lorsqu'après la mort du testateur il n'y a encore qu'une simple ouverture au droit d'usufruit, le légataire n'a encore directement à exercer que sa demande en délivrance; mais une fois que ses droits sont reconnus par la délivrance consentie ou ordonnée à son profit, il se trouve en voie d'agir directement par action réelle, pour obtenir soit contre l'héritier, soit contre tout tiers détenteur, la jouissance effective de tout héritage qui serait renfermé dans son legs : utrùm autem adversùs dominum duntaxat in rem actio usufructuario competat, an etiam adversùs quemvis possessorem, quæritur? Et Julianus scribit, hanc actionem adversùs quemvis possessorem ei competere. (1). Ces actions sont essentiellement différentes dans leur qualité, leur ordre, et leur objet. L'action en délivrance est toute personnelle, et ne peut être portée qu'au tribunal de l'ouverture de la succession; tandis que l'action réelle doit être intentée pardevant le tribunal de la situation du fonds (2).

(1) L. 5, §. 1, ff. si ususfruc. petatur, lib. 7, tit. 6. (2) Art. 59 du cod. de procéd.

le

L'action en délivrance doit être dirigée contre tous les héritiers s'ils sont plusieurs, puisque tous sont tenus de la prestation du legs, dans la proportion de leurs droits à l'hérédité (1017); tandis que l'action en revendication de la propriété ou de l'usufruit ne peut être intentée que contre possesseur de la chose. L'action en délivrance est nécessairement la première en ordre, parce qu'il faut que le titre du légataire soit reconnu avant qu'on puisse le mettre à exécution (1). La demande en délivrance est générale dans son objet : il s'agit, par cette action, de faire reconnaître les droits du légataire, et d'en faire ordonner l'exécution dans leur généralité : la délivrance ordonnée en justice comme celle qui est consentie par l'héritier, considérée en elle-même, n'est pas nécessairement spéciale quant aux choses; ce n'est qu'au moment où l'on en vient à l'application du titre dont l'exécution a été consentie ou ordonnée, qu'il faut spécifier les objets qui y sont compris : l'action confessoire au contraire est toute spéciale et déterminée dans son objet, parce qu'elle est réelle comme l'action en revendication de la propriété : si in rem aliquis agat, debet designare rem: et utrùm totam an partem quotam petat. Appellatio enim rei non genus sed speciem significat (2).

590. Enfin, tant que le legs d'usufruit n'a point été délivré, le légataire qui est sans saisine ne peut avoir les actions possessoires, et c'est encore

(1) Voy. sur cette priorité d'action, l'art. 40, tit. I, de l'ordonnance de 1747, sur les substitutions.

(2) L. 6, ff. de rei vindicat., lib. 6, tit. 1.

là un nouveau genre d'actions qui ne lui sont acquises que par sa propre prise de possession: utifrui autem prohibuisse is videtur, qui vi dejicit utentem et fruentem; aut non admisit cùm ex fundo exiisset non ususfructus deserendi causá. Cæterùm si quis ab initio volentem incipere utifrui, prohibuit; hoc interdictum locum non habet. Quid ergo est? debet fructuarius usumfructum vindicare (1).

Aux termes de l'article 59 du code de procédure, c'est au tribunal de l'ouverture de la succession, ainsi que nous l'avons déjà dit, que la demande en délivrance des legs doit être portée; et dans tous les cas (1014), elle doit être formée suivant l'ordre établi par l'article 1011 du code civil; c'est-à-dire, qu'il faut la diriger d'abord contre les héritiers auxquels une quotité des biens est réservée par la loi; ensuite et à leur défaut, contre les légataires universels; et enfin, à défaut de ceux-ci, contre les héritiers appelés dans l'ordre établi par le code au titre des successions. 391. Quoique les héritiers ne se présentent point pour recueillir, il faut néanmoins s'adresser à eux pour les forcer à prendre qualité; et s'ils renoncent, ou s'ils ne sont pas connus, il faut s'adresser au Tribunal de l'ouverture de la succession, et lui demander la nomination d'un curateur à l'hoirie jacente, à l'effet d'agir ensuite en délivrance contre lui (811, 812 et 813). 392. Si le testateur avait légué l'usufruit du fonds à l'un, et la nue proprieté à un autre,

(1) L. 3, §. 14, ff. de vi et vi armatâ, lib. 43, tit. 16.

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