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tradicteurs légitimes que la loi leur donne, en chargeant l'un de conserver, et l'autre de veiller à la conservation des biens substitués.

Il n'en est pas de même à l'égard de l'usufruitier celui-ci n'a pas les actions qui ne concernent que le droit de propriété, puisqu'il n'est pas propriétaire; et en conséquence s'il était rendu contre lui quelque jugement blessant les droits du propriétaire qui n'aurait pas été appelé, ce dernier ne serait pas passible de l'exception de la chose jugée, ainsi que nous l'exposerons plus amplement dans la suite.

COMPARAISON

De l'Usufruit et des Servitudes réelles:

66. Le droit d'usufruit a, dans son caractère propre, ses points de différence et d'identité avec le droit de servitude réelle.

per

1.o Il diffère de la servitude réelle, en ce qu'il n'est constitué qu'en faveur de la personne de l'usufruitier et s'éteint au décès de cette sonne; tandis que la servitude réelle, étant établie sur un fonds pour l'utilité d'un autre fonds, est perpétuelle dans sa durée, comme l'objet auquel elle s'applique.

2.0 En ce que l'usufruit ne peut être légué ni stipulé pour commencer à la mort de l'usufruitier; tandis que rien n'empêche que la servitude réelle ne soit ainsi léguée ou promise pour le temps qui suivra le décès du propriétaire du fonds.

5. L'usufruit d'un fonds est lui-même un

immeuble civilement distinct et séparé de la nue propriété; immeuble qui peut être spécialement hypothéqué et aliéné au profit d'un tiers, indépendamment de la propriété : la servitude réelle au contraire n'est qu'une qualité inséparable du fonds, laquelle ne peut être ni spécialement hypothéquée, ni aliénée qu'avec le fonds.

4. L'usufruit établi sur un édifice seulement s'éteint par la destruction totale du bâtiment, et ne revit point par la reconstruction de l'édifice: la servitude réelle, au contraire, revit par le rétablissement de la chose (704). 67. Mais, sous d'autres rapports, l'usufruit participe essentiellement de la nature des servitudes.

1.0 Pris dans un sens abstrait, pour la simple faculté de jouir, l'usufruit, comme la servitude, est un droit incorporel; en sorte qu'à l'égard de l'un comme à l'égard de l'autre, un acte de renonciation expresse suffit pour en opérer l'ex

tinction.

2.o L'usufruit d'un immeuble est classé, par la loi, au rang des immeubles, comme les servitudes foncières (526), qui sont aussi nécessairement immobilières, puisqu'elles ne sont que des qualités de l'héritage auquel elles s'appliquent.

3. L'usufruit ne peut être établi au profit d'une personne que sur le fonds qui appartient à un autre (578), comme la servitude ne peut être constituée sur un héritage qu'à raison et pour l'utilité d'un immeuble appartenant à un autre maître (637); en sorte que l'un (617) comme l'autre (705) s'éteignent également par consolidation ou confusion, et qu'on applique

également à l'un et à l'autre la maxime: res sua

nemini servit.

4.0 L'usufruit, comme la servitude, considérés l'un et l'autre dans l'objet auquel ils s'appliquent, sont également des charges purement réelles; charges qui n'affectent que le fonds; d'où résulte cette conséquence, que, comme le propriétaire de l'héritage grevé de servitude n'est obligé à autre chose qu'à en souffrir l'usage (698), de même le propriétaire d'un fonds grevé d'usufruit n'est obligé qu'à en souffrir l'exercice, sans pouvoir rien faire qui y mette obstacle; mais sans être tenu à aucune prestation personnelle envers celui qui a droit de jouir de l'usufruit, puisque la loi ne lui impose d'autres devoirs que celui de ne pas nuire, par son fait, ni de quelque manière que ce soit, aux droits de l'usufruitier (599).

COMPARAISON

De l'Usufruit et de la Jouissance fondée sur le

prêt.

68. Le prêt peut avoir pour objet, ou des choses qui ne se consomment pas par le premier usage, et alors on l'appelle commodat ou prêt à usage; ou des choses fongibles, et dans ce cas on l'appelle prêt de consommation.

Ce sont plus communément des meubles, comme un instrument, un lit, une table, une voiture, un cheval, qui sont l'objet du prêt à usage; néanmoins, comme le dit Pothier, les immeubles peuvent aussi en être l'objet tous

:

les jours un ami prête à son ami sa cave, son grenier, un appartement dans sa maison (1).

Dans le prêt à usage, l'emprunteur se sert de la chose d'autrui et en use gratuitement; comme dans la constitution d'usufruit, celui qui en a le droit, jouit des choses qui appartiennent à un

autre.

Dans le prêt à usage encore, l'emprunteur doit donner à la conservation de la chose les soins d'un bon père de famille, pour la rendre en bon état, comme l'usufruitier doit veiller à la conservation des choses dont il jouit, pour les rendre à la fin, sans détériorations imputables à sa faute.

Mais le prêt ne transfère à l'emprunteur aucun droit réel dans la chose; il n'opère aucun démembrement de propriété, comme la constitution d'usufruit.

L'usufruitier, comme nous le verrons plus bas, peut quelquefois vendre les meubles soumis à son usufruit; l'emprunteur ne peut jamais aliéner la chose qui lui a été prêtée.

L'usufruitier est obligé à toutes les réparations d'entretien; l'emprunteur, comme le dit Pothier, n'est tenu que des impenses ordinaires, qui sont une charge naturelle du service qu'il tire de la chose prêtée.

Ainsi, lorsque c'est un immeuble qui a été prêté, l'emprunteur ne doit que les impenses nécessaires pour pourvoir aux menues réparations qu'on appelle communément locatives, et

(1) Traité du prêt à usage, n.o 14.

qui sont considérées comme ayant immédiatement pour cause l'usage de la chose tandis que toutes les réparations de gros entretien pe

seraient sur l'usufruitier.

Ainsi, lorsque l'usufruit a été établi sur des animaux, l'usufruitier doit non-seulement les nourrir, mais il doit pourvoir, à ses frais, à toutes les impenses extraordinaires que pourraient occasioner leurs maladies; l'emprunteur, dans le même cas, n'est obligé qu'à la nourriture, et il a l'action commodati contraria, pour répéter les impenses extraordinaires, à moins qu'elles ne soient absolument minutieuses.

Le maître de la chose prêtée, sans terme convenu pour la rendre, peut la répéter sitôt que l'emprunteur a consommé l'usage pour léquel le prêt avait été fait : l'usufruitier, au contraire, a le droit de garder la chose jusqu'à la mort, s'il n'y a pas eu d'autre terme fixé à sa jouissance.

69. Il y a aussi quelque similitude et en même temps des différences essentielles entre le prêt de consommation et l'usufruit légué sur des choses fongibles.

Ils conviennent en ce que, dans le cas de cette espèce d'usufruit, comme dans celui du prêt de consommation, les choses qui en sont l'objet passent également dans le domaine de l'emprunteur ou de l'usufruitier, et que ni l'un ni l'autre ne sont obligés de les conserver. Ils diffèrent néanmoins essentiellement :

1. En ce que le prêt est toujours un contrat qui n'a lieu que par acte entre-vifs; tandis que

TOM. 1.

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