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La malle de juin 1851 annonça que les troubles du sud de la Chine avaient pris de nouveaux développements, et que l'un des principaux chefs des rebelles du Kwang-si, non content de se donner le titre de souverain, avait désigné l'année sous ce nom : « 4re année de Tien-tih (vertu céleste); » il avait frappé une monnaie de cuivre sur laquelle étaient gravés ces deux caractères, qu'il avait adoptés pour qualifier son règne. Cinq cents ans auparavant, vers 1331, les Chinois avaient commencé à se soulever contre la première dynastie tartare, celle des Mongols, sous laquelle Marco Polo fut si bien accueilli à Pékin. Les Mongols ont été chassés par les Chinois au milieu du 17° siècle; il reste à savoir si les Mantchoux seront à leur tour expulsés, au milieu du 19° siècle, après une domination de 200 ans.

La province du Kwang-si est très-montagneuse, et les rebelles pouvaient se retirer à volonté dans de sûrs abris, où ils défiaient les troupes du gouvernement. Au mois de juillet 1854, ils avaient pris et saccagé Kwei-lin, capitale du Kwang-si, et leurs bandes parcouraient quatre provinces, les deux Kwang, le Honan et le Kiang-si. S'ils étaient maîtres de la passe étroite située entre Nangan et Nanheung, ils intercepteraient les communications de Pékin avec Canton; jusque-là, on ne peut pas dire encore que l'autorité de l'empereur soit détruite dans le sud mais la prise de cette passe, qui est en quelque sorte la clef de Canton et de l'ouest de la province, est un événement très-probable, si on laisse à la révolte le temps de se développer. L'état des affaires, au milieu de 1851, était assez sérieux pour que le gouverneur général des deux Kwang se mît en personne à la tête des troupes. De son côté, l'empereur des rebelles, Tien-tih, adressa une proclamation au peuple, et promit que « si la vertu céleste triomphait, le pays deviendrait aussi heureux, et les magistrats aussi honnêtes que sous les anciennes dynasties. >>

La ville de Canton a subi les conséquences de la politique insensée que le gouvernement avait adoptée après la capitulation de 1841. Impuissants pour résister aux étrangers, les mandarins avaient encouragé les excès de la populace, et ces armes déloyales devaient se retourner contre eux-mêmes. Ils avaient semé le vent, et ils recueillaient la tempête. Voici les renseignements fournis par une lettre de Chine : « Comme place de commerce, Canton décline. Sa révolte du sud et la concurrence de Shanghai expliquent cette décadence, et il est probable que l'avantage demeurera à ce dernier port. Ce résultat serait favorable à Hong-Kong. Les principaux habitants de Canton ont invité tous leurs concitoyens à organiser des souscriptions ainsi qu'un service personnel pour la défense de la ville. Ils ne veulent plus, disent-ils, avoir aucun rapport avec les agents du gouvernement qui les ont engagés à concourir avec eux à la résistance contre les rebelles. Ils prétendent que les autorités ont gaspillé les sommes qui leur avaient été fournies lors de la guerre des Anglais. Si ces nouvelles sont exactes, elles paraissent très-importantes elles montrent que le peuple est disposé à rester neutre entre le gouvernement et les rebelles, pour se ranger ultérieurement du côté du plus fort. »

Le drame n'est point encore arrivé au cinquième acte: mais si le dénoùment est marqué par une catastrophe fatale à la domination des Tartares Mantchoux, ce ne sera que justice.....

Traduit de l'anglais de sir JOHN DAVIS,

Par C. LAVOllée.

Le chapitre qui précède, extrait du livre China during the war and since the peace, a été écrit au commencement de 1852. Il permet d'apprécier l'origine et les premiers progrès de la révolte qui désole aujourd'hui les principales provinces de la Chine. Nous devons renvoyer nos lecteurs aux renseignements publiés mensuellement dans la Chronique de la Revue de l'Orient: ils y trouveront le récit des principaux incidents qui, depuis 1852, se rattachent à la rébellion. C. L.

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Le 3, à onze heures du matin, nous poursuivions notre voyage, et à midi nous entrions dans Voutoucouty, d'où nous repartions à une heure pour arriver à trois heures du soir à Colaram ; c'est un village jeté aux pieds d'un groupe de montagnes et de rochers abruptes, à côté d'une grande forteresse en terre qui a trois enceintes. Tout près, se trouve un vaste étang, contenu par de puissantes digues, et plus loin, dans la plaine qui fait face à la forteresse, de nombreuses ruines d'anciens retranchements qui donnent à penser que ce territoire a dû être fréquemment le théâtre de guerres acharnées.

Colaram est la patrie du célèbre Hyder-Ali, père de Tippoo-Saëb. Parmi les montagnes qui l'environnent, on nous en montra une qui, d'après la tradition, aurait jadis été habitée par une peuplade de géants. On y voit même encore, nous dit-on, les débris cyclopéens de Icurs habitations, et, bien que la tribu soit éteinte depuis des siècles, aucun naturel n'a jamais osé en risquer l'ascension pour s'assurer du fait. Je ne crois même pas qu'un seul Européen ait pu tenter l'aventure, nul indigène ne consentant, à quelque prix que ce fût, à lui servir de guide, et la montagne étant trop escarpée pour qu'on ose seul essayer de la gravir.

Le 4, sur les quatre heures du matin, nous nous mimes en route pour Narsabouron, que nous atteignîmes

à six heures et demie, et où nous passàmes la journée pour donner quelque repos à nos boys, exténués de fatigue.

Nous quittâmes cette étape le 5, à quatre heures du matin et nous arrivâmes à sept heures à Ouscotté (ou Cotté-Cotté), grand village protégé par une vaste forteresse construite partie en pierre, partie en terre, avec de solides bastions qui dominent la route. Comme celle de Colaram, cette forteresse a trois enceintes. Près du village, s'élève un vieux monument qui paraît être le tombeau de quelque grand personnage hindou.

Le 6, à quatre heures du matin, nous partîmes pour Bangalore, où nous arrivâmes à sept heures.

La forteresse est grande et en fort bon état; le général anglais, qui commande la division, y fait sa résidence. Les casernes, admirablement tenues, sont établies près de la ville, à un mille environ de la citadelle. Près de là, un monument a été érigé à la mémoire du colonel Moorhouse, de ses vaillants officiers et des autres braves morts glorieusement en 1791, à l'assaut de Bangalore.

Bangalore, ville du Maïssour, à 93 kilomètres N.-E. de Seringapatam, renferme une population de plus de 60,000 hommes, la plupart Hindous. On y fabrique des soieries, des cotons, du papier, des ustensiles de fer et de cuivre. Elle a été fondée par Hyder-Ali.

Le 8, à cinq heures du soir, nous partîmes de Bangalore, et à sept heures et demie nous étions à Kinguery.

Le 9, nous nous remîmes en route à cinq heures du matin, et nous arrivâmes à sept heures à Beddedy, pour en repartir à trois heures de l'après-midi et atteindre Nossa-Pettech vers les cinq heures. Nossa-Pettech est un grand village, construit dans une vaste plaine entourée de montagnes, sur la rive gauche de l'Arcanvatty, que l'on traverse sur un beau pont construit par les Anglais. Toutes les campagnes environnantes sont dans un bon état de culture, et le pays est en général assez boisé. De petits hameaux sont éparpillés sur la verdure

des plaines et des vallées. Quant aux maisons du village, ce sont les mieux bâties que nous ayons rencontrées depuis notre départ de Pondichéry, et la mise de la population annonce une certaine aisance.

Le 10, à quatre heures et demie du matin, nous quittâmes Nossa-Pettech, et à six heures et demie nous déjeunâmes à Chinapatam, où l'on voit une forteresse en pierre en bon état, mais sans canons. Nous en partîmes à quatre heures, et nous arrivâmes à Madoor à six heures du soir. Là aussi il y a une forteresse, mais en terre, et, comme la précédente, sans canons.

Le 11, à deux heures de l'après-midi, nous nous éloignions de Madoor et nous entrions à Mundium à cinq heures du soir.

Le 12, départ de Mundium à quatre heures du matin, halte à Zoopum-Kairy à six heures. Nous nous remettons en route à une heure de l'après-midi, pour arriver vers les trois heures à Seringapatam, où nous avons pour asile un ancien palais de Tippoo-Saëb.

Seringapatam, en sanscrit Sri-Ronga-Patana (ville de Vischnou), autrefois capitale de l'Etat de Mysore, chef-lieu à 400 kilomètres O.-S.-O. de Madras (population, 32,000 âmes), est située au milieu de vastes plaines, à l'angle d'une île baignée par le Cavery, ou Cauvery, et sur la rive droite de ce cours d'eau, qui prend sa source dans les montagnes, à 32 kilomètres de Mangalore. Le Cavery traverse le royaume de Mysore et arrive à Trichenopoly, après un trajet de plus de 400 kilomètres. A 5 kilomètres environ au nord de cette dernière ville, il se partage en deux grands bras : celui qui coule au nord s'appelle Calram ou Caleroom; l'autre conserve le nom de Cavery, et, à 20 kilomètres à l'est de Trichenopoli, il se subdivise encore en quatre rameaux qui, après avoir traversé le royaume de Tanjore, ou Tanjaour, vont se décharger dans la mer, au-dessous de Karikal.

A quelques kilomètres après leur séparation, le Cal

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