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29.-La demande de la caution se forme par requête grossoyée, signifiée d'avoué à avoué, et il y est répondu de la même manière. La requête et la réponse ne peuvent excéder deux rôles (Tarif, 75).

30.-Le jugement qui ordonne la caution doit déterminer la somme jusqu'à concurrence de laquelle elle doit être fournie (C. pr. 167), et le délai dans lequel elle doit l'être. Quant aux formes à suivre, ce sont celles prescrites par l'art. 519 C. pr.

31. Le jugement qui ordonne cette caution est simplement préparatoire et ne peut dès lors prononcer de condamnation définitive aux dépens. — 3 février 1821, Colmar.

32. La caution judicatum solvi a pour objet le payement des frais et des dommages-intérêts résultant du procès (C. civ. 16). Ces mots résultant du procès expliquent la disposition trop vague de l'article 196 C. proc., qui parle des dommages-intérêts auxquels les étrangers pourraient être condamnés. Le cautionnement ne s'étend done pas aux dommages-intérêts dont la répétition serait l'objet de l'action principale, ni même à ceux qui, nés pendant le procès, n'en seraient pas la conséquence nécessaire. Dalloz; Carré, L. de la pr., n. 696; Pig., t. 1er, p. 223.

55. Si la caution n'a pas été limitée à une somme déterminée, elle s'étend naturellement à tous les frais et dommages résultés de l'instance. Dalloz, n. 46.

34.-Un supplément de caution peut être demandé devant la cour d'appel, pour les frais d'appel et de cassation; mais la demande serait tardive devant la cour de cassation; la nature de l'institution de cette cour ne lui permettrait pas d'en connaître.-Dalloz, n. 49.

35. La caution fournie en première instance, sans fixation de somme, ne serait pas tenue des frais d'appel et de cassation, à moins d'une disposition expresse à cet égard dans le jugement. Carré, n. 700; Dalloz, n. 50.

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58. Il ne s'agit ici de l'exception d'incompétence que quant à sa forme, c'est-à-dire quant au point de savoir à quelle phase de la procédure elle doit être proposée à peine de déchéance. Ce qui se rattache au fond du droit en cette matière est traité vo Compétence.

On va parler successivement lo du renvoi pour incompétence à raison de la personne; 2o du renvoi pour incompétence à raison de la matière.

59.10 Incompétence personnelle. - La partie appelée devant un tribunal autre que celui qui doit connaitre de la contestation, peut demander son renvoi devant les juges compétents (C. pr. 168).

41. La partie appelée, etc. Ces mots semblent restreindre au défendeur le droit de demander le renvoi, et il a été jugé en ce sens que la partie qui porte elle-même une reprise d'instance devant un tribunal d'arrondissement, n'est pas recevable à soutenir ensuite que la cour d'appel est seule compétente pour statuer.-23 nov. 1825. Req.

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42. La demande en renvoi pour incompétence personnelle doit être formée préalablement à toutes autres exceptions ou défenses (C. pr. 169). Telle est la règle générale qu'avait déjà établie l'article ler, tit. 4 de l'ordonnance de 1667, et, avant lui, les lois romaines. On comprend, en effet, que la première chose à examiner dans une instance, c'est la compétence du juge, et que soumettre à un tribunal la décision de quelque partie du litige, c'est virtuellement reconnaître sa juridiction pour le procès entier, dont le jugement ne doit pas être divisé. — Dalloz, n. 62.

43. On doit considérer comme purement relative, et dès lors comme devant être proposée, à peine de déchéance, in limine litis:

44. L'incompétence d'un tribunal autre que celui dans le ressort duquel une inscription hypothécaire a été prise, pour connaître de l'action en radiation ou réduction d'hypothèque.-V. Compétence.

45. L'incompétence d'un tribunal civil devant lequel est portée une contestation sur l'exécution d'un jugement, lorsque, régulièrement, celte contestation, eût dû être soumise à un autre tribunal.

46. Il n'en est pas de la règle des deux degrés de juridiction comme de l'intervention des juridictions ou de l'incompétence ratione materiæ qui, tenant aux principes de l'ordre public, ne peut recevoir aucune atteinte par le silence ou même par l'adhésion des parties; par suite, si les deux parties ont conclu et plaidé au fond, sans réserves ni protestations, devant le tribunal d'appel, sur une cause non décidée par les premiers juges, elles se sont rendues non-recevables à se faire un moyen de cassation contre l'arrêt de l'atteinte portée à la règle des deux degrés de juridiction.--4 fév. 1829. Req.

47. Les art. 168 et 169 C. pr., d'après lesquels l'exception d'incompétence doit être proposée avant la défense au fond, s'appliquent au demandeur comme au défendeur.-7 nov. 1830. Req.

48. La constitution d'avoué, même sans aucune espèce de réserve, n'est ni une défense, ni une exception, mais une simple formalité préliminaire, indispensable au défendeur pour pouvoir proposer l'exception de renvoi, et, par conséquent, aucune déchéance ne peut en résulter relativement à cette exception.-Dalloz, n. 78.

49.-Les actes de poursuite d'audience, la demande en remise de la cause ne sont également pas des poursuites au fond; car le défendeur peut donner avenir pour plaider sur le déclinatoire, et demander un délai pour préparer ses moyens d'incompétence.

50.-L'exception de renvoi n'étant couverte par la défense au fond, ou par la proposition d'une autre exception, que parce qu'il en résulte une renonciation tacite du défendeur à réclamer ses juges naturels, il s'ensuit que tout acte, même extrajudiciaire, qui annoncerait clairement cette renonciation, doit produire le même effet. Ainsi, le défendeur qui, dans des exploits signifiés au demandeur, se dirait domicilié dans l'arrondissement du tribunal devant lequel il a été assigné, se rendrait par là non-recevable à exciper plus tard de l'incompétence de ce tribunal.— Dalloz, n. 81.

51. Mais il ne faudrait pas regarder comme une renonciation à exciper de l'incompétence du tribunal civil le fait d'avoir comparu, sans réserve, devant un bureau de paix de l'arrondissement de ce tribunal. Le préliminaire de conciliation n'a rien de commun avec l'instance devant le tribunal civil. De ce que, pour me concilier, j'ai comparu volontairement de

EXCEPTIONS.

vant un juge de paix qui n'était pas le mien, il ne s'ensuit pas qu'à défaut de conciliation j'aie entendu renoncer à mes juges naturels : actus ultrà intentionem agentium operari non debent. Décider autrement, ce serait aller contre le but même de l'institution des bureaux de conciliation.-Carré, Lois de la pr., t. 1er, p. 438.

52. Le défendeur contre lequel serait rendu un jugement par défaut, serait-il en temps utile pour demander le renvoi, sur l'opposition qu'il aurait formée à ce jugement? Oui, s'il a eu soin de proposer le déclinatoire dans sa requête en opposition. -Demiau, p. 135, Carré, Lois de la proc., t. ler, p. 457.

53.- Jugé ainsi que le souscripteur ou endosseur d'un billet à ordre, non négociant, peut, sur l'opposition formée à un jugement par défaut rendu contre lui par le tribunal de commerce, demander son 23 déc. 1809, renvoi devant les tribunaux civils. Bruxelles.

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54. Si le défaillant a laissé expirer les délais de l'opposition, et interjeté appel du jugement rendu par défaut. comme il n'a fourni ni dù fournir alors aucune défense, il est vrai de dire qu'en proposant le déclinatoire sur l'appel il demande son renvoi préalablement à toute autre défense ou exception.— Favard, Rep., vo Exception, § 2, n 5.

55. Il y a deux exceptions qui semblent pouvoir être invoquées avant celle d'incompétence, savoir : l'exception de caution ( V. supra), et dans certains cas, celle de communication de pièces, proposée par le défendeur pour s'éclairer sur la nature de la demande dont l'exploit introductif ne lui permettrait pas de bien saisir le caractère. Mais, dans ce cas, il faut annoncer que c'est à cette unique fin que la communication est demandée, et se réserver expressément le droit de proposer le déclinatoire, si, par suite de cette Toute autre communication, on s'y croit fondé. exception a pour effet de couvrir l'exception du renvoi.

56.-Les tribunaux ne sont pas tenus de prononcer d'office, dans le silence des parties, leur incompétence, lorsqu'elle n'est pas relative mais ils ont la faculté de le faire, à l'exception des juges de paix.V. Compétence.

Lorsque le 57.20 Incompétence matérielle. tribunal est incompétent à raison de la matière, le renvoi peut être demandé en tout état de cause (c'està-dire tant que le tribunal n'a pas rendu un jugement définitif qui le dessaisisse du procès); et si le renvoi n'est pas demandé, le tribunal est tenu de renvoyer d'office devant qui de droit (C. pr. 170).

58. Le renvoi pour incompétence matérielle peut être demandé pour la première fois, non-seulement en appel, mais même en cassation. C'est ce qui résulte des termes de l'article 170, en tout état de

cause.

59.-Le renvoi pour incompétence matérielle peut être demandé par toutes les parties, même par celle qui a saisi le tribunaux incompétent.

60. Si le renvoi n'étant requis ni par les parties, ni par le ministère public, le tribunal le prononce d'office, ce tribunal ne peut condamner le demandeur aux frais envers le défendeur: ce serait juger ultrà petita. - Pig., Comm., art. 170.

$ 2.. Du renvoi pour litispendance.

61. Il y a litispendance lorsqu'un tribunal est saisi de la connaissance d'une cause sur laquelle il n'a pas encore prononcé, et la litispendance autorise la partie qui est traduite devant un autre tribunal,

à raison du même objet, à demander son renvoi devant celui où l'affaire a d'abord été portée (Code de pr. 171).

La litispendance est à l'instance ce que la chose jugée est à l'action elle-même; elle lui oppose un invincible obstacle: c'est ce qui a fait dire à Zangerus, Traité des exceptions, que la litispendance empêchait l'instance de se former: dicitur impeditiva causæ et litis.

62. Il n'est pas nécessaire qu'il y ait contestation en cause pour autoriser à demander le renvoi pour litispendance. L'opinion contraire, professée par quelques anciens commentateurs du droit romain, et condamnée par les plus grandes autorités, notamment par un arrêt du parlement de Grenoble, de 1640 (Boucheul, Biblioth. civ., vo Litis pendance), qui a jugé qu'un ajournement régulier opère litispendance; par un autre arrêt du parlement de Douai, du 2 déc. 1785, rendu conformément à une consultation de Merlin (V. Quest. de droit, vo Litispendance), par le président Favre, qui décide (liv. 2, tit. 38, déf. 1, n. 10). qu'il suffit d'un simple ajournement pour fermer la litispendance, lis enim pendere dicitur, licet nulla dum contestatio secula sit. V. aussi Voet, sur le titre du Dig. de except. præscript. et præj., n. 7; par Deghewict, Instit., part. 5, lit. 2, §6, art. 3, et par Welembecius, sur le Code, liv. 1er, lit. 21.

63.- Pour qu'on puisse demander le renvoi pour litispendance, il faut, comme on l'a dit, que les deux demandes soient portées devant des tribunaux différents. Si elles étaient formées devant le même tribunal, il y aurait lieu d'en demander la jonction.

64.-Le droit qu'a une partie assignée devant un tribunal étranger, de traduire à son tour son adversaire devant un tribunal belge, sans craindre l'exception de litispendance, ne saurait s'appliquer à celui qui aurait consenti à plaider devant les tribunaux étrangers; il aurait abdiqué par là le droit d'exciper de leur incompétence, et il ne lui resterait d'autre garantie que la révision par les tribunaux belges des jugements rendus contre lui à l'étranger, si toutefois on venait à en poursuivre l'exécution. - Dalloz, n. 133.

65. Lorsqu'une contestation a été portée devant deux tribunaux, celui de ces tribunaux qui en a été saisi le premier doit, en cas de renvoi pour litispendance, être préféré, et ce, encore que, s'agissant d'affaires commerciales, le tribunal dernier saisi, soit le 23 déc. 1807. Req. tribunal compétent.

66. Sauf à exciper, si déjà on ne l'a fait, et s'il en est temps encore, de l'incompétence du premier tribunal, devant lui-même.

67. Cependant, si un tribunal premiersaisi était manifestement incompétent, par exemple, à raison de la matière, le second tribunal pourrait refuser le renvoi, ou du moins surseoir à y statuer jusqu'à ce que le premier eût prononcé sur sa compétence; car l'art. 171 ne dit pas que le renvoi sera ordonné en cas de litispendance, mais qu'il pourra l'être; ce qui laisse au juge la faculté d'accueillir, ou non, l'exDalloz, n. 136. ception, suivant les circonstances.

68.- Si le second tribunal persiste à vouloir connaître du litige, il y a lieu alors à un règlement de juges, dont le résultat peut être favorable au tribunal dernier saisi. — V. Règlement de juges.

69. L'exception de renvoi pour litispendance doit être proposée avant les exceptions de nullité. Si l'art. 171 C. pr. se tait sur le moment où les exceptions dont il parle doivent être présentées, tout ce qu'il faut en conclure, c'est qu'il se réfère, sur ce point, à l'art. 169 dont la disposition, bien que paraissant restreinte au renvoi pour incompétence per

sonnelle, doit être applicable aux renvois pour litispendance et pour connexité, qui sont l'objet du même paragraphe, et qui, par cela seul, sont évidemment placés sur la même ligne. Il semble, il est vrai, rigoureux de laisser une partie dans la nécessité de plaider, pour une même affaire, devant deux juridictions, par cela seul qu'elle aura omis d'exciper d'abord de la litispendance. Mais les parties peuvent parer à l'inconvénient des deux instances, soit en demandant à l'un des tribunaux de surseoir jusqu'à ce que l'autre ait prononcé définitivement, soit en concluant à ce que le tribunal saisi de la première affaire en fasse le renvoi au tribunal devant lequel la deuxième instance a été portée. Merlin, Rép., yo Compte.

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Du renvoi pour connexilé.

70. La connexité diffère de la litispendance en ce que celle-ci suppose deux instances pour une mème contestation, tandis qu'il suffit, pour qu'il y ait lieu au renvoi pour connexité, que les deux instances, bien que relatives à un objet différent, aient entre elles une corrélation telle, que la décision de l'une doive influer sur l'autre.

:

71.-Malgré cette différence, ces deux exceptions reposent sur le même motif, savoir le besoin de prévenir des jugements contradictoires, et de rendre plus prompte et moins onéreuse pour les parties la dispensation de la justice.

72. L'art. 171 C. pr. se borne à énoncer que le renvoi pourra être demandé et ordonné, si la contestation est connexe à une cause déjà pendante à un autre tribunal, sans dire en quoi consiste la connexité, laissant aux tribunaux l'appréciation des circonstances qui, dans chaque espèce, peuvent contribuer à l'établir.

73. Les juges, dans cette appréciation, ne doivent pas oublier qu'à côté de l'avantage de réunir deux procès en une seule instance, se trouve le danger de distraire les citoyens de leur juridiction naturelle. C'est assez dire qu'il ne doit y avoir connexité à leurs yeux qu'autant que les deux contestations ont un rapport intime et nécessaire; ils ne pourraient impunément proclamer une doctrine contraire; mais rien de plus facile que de rendre hommage au principe, tout en le transgressant dans l'application.

74. La connexité peut exister entre deux contestations, quoique les parties qui y figurent ne soient pas toutes les mêmes, à la différence de la litispendance qui exige l'identité des parties.

75. Si de deux demandes connexes, portées devant le même tribunal, l'une seulement est en état, le tribunal peut, même d'office, ordonner qu'elles seront l'objet de jugements séparés, car il a le droit de prendre toutes les mesures qui lui semblent nécessaires pour l'instruction des procès. - Rodier, e quest. tit. 8 de l'ord.; Berriat, p. 232. — Contrà, Carré, Comm., art. 184.

76. Dans le cas où un tribunal est investi d'une juridiction spéciale, relativement à l'objet de la contestation, on ne peut, sous prétexte de connexité, porter l'affaire devant un autre tribunal. et, par exemple, saisir de la connaissance des difficultés élevées sur l'arrestation d'un débiteur, un tribunal autre que celui du lieu où s'est faite l'arrestation (C. pr. 794), p. 750. Carré. Comment.

77. La compétence sur la demande principale n'attribue juridiction sur les questions incidentes qu'à l'égard des tribunaux ordinaires : elle ne conférerait pas aux tribunaux d'exception le droit de statuer sur ces questions incidentes, si elles sortaient du cer

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78. En matière ordinaire, toute demande en renvoi est présentée par requête. Cette requête, et celle en défense, ne peuvent excéder six rôles (Tar.75). En matière sommaire, les demandes en renvoi sont présentées à l'audience. - Pig., 1, 208.

79. Même en matière ordinaire, le déclinatoire est jugé sommairement (C. pr. 172), c'est-à-dire avec célérité, quoique ce ne soit pas alors une cause sommaire (Carré, L. de la proc., 1, 449; Favard, vo Exceptions, § 2, n. 11; et, dans ce cas, les dépens sont taxés comme en matière ordinaire. 25 mai 1808. Paris.

80. Celui qui propose un simple déclinatoire pour raison d'incompétence, n'est point obligé de désigner le tribunal devant lequel il demande à être renvoyé.4 mars 1818. Req.

81. - Du reste, il le désigne suffisamment en invoquant la maxime actor sequitur forum rei, dans un acte qui contient l'énonciation de son domicile. Même arrêt.

82. Aux termes de l'art. 172 C. pr., la demande en renvoi ne peut être réservée ni jointe au principal.

83. Le tribunal ne peut pas statuer sur le fond par le même jugement qui rejette le déclinatoire; il faut deux jugements séparés.

84. Cette règle, qui a pour objet de donner au défendeur le temps de préparer sa défense au fond et d'appeler du jugement de compétence, se confirme par l'exception même qu'y apporte l'art. 425 C. pr., relativement aux tribunaux de commerce. Carré, Loi de la proc., n. 735; Fav., vo Exception, § 2, n. 12.

85. Les deux jugements qui doivent statuer séparément sur la compétence et sur le fond ne peuvent étre à la même audience. Autrement, le jugement qui rejette le declinatoire recevrait son exécution avant l'épiration de la huitaine, pendant laquelle l'art. 450 C. pr. suspend cette exécution, à raison de ce que l'art. 449 ne permet l'appel qu'après ce délai; car le tribunal ne peut procéder à la décision du fond qu'en exécution du jugement par lequel il déclare sa compétence. - Rodier et Serpillon, sur l'art. 3, tit. 6, de l'ord. de 1667; Demiau, p. 140, et Carré, L. de la proc., t. ler, p. 454.

86. Quelque urgente que soit une demande provisionnelle, elle ne peut être accordée ou refusée que par le juge compétent, et cette compétence semble dès lors devoir être préalablement mise hors de doute. Il serait bizarre qu'une cour d'appel, après avoir accordé la provision réclamée par l'une des parties, pût ensuite se déclarer incompétente pour statuer au fond; ce résultat choquerait la maxime de qui défend de diviser les éléments d'un même procès : ne continentia litis dividatur (Carré, Lois de la proc, t. 1er, p. 459).

87. Celui qui, après un jugement d'incompétence, porte sa demande devant un autre tribunal, peut, suivant Pigeau (Comm., art. 170), se dispenser de libeller son exploit, en s'en référant aux conclusions prises dans sa première demande, attendu que celle-ci reste dans l'instance, en tant qu'elle interrompt la prescription (C. civ. 2246). Mais il est plus prudent de libeller l'exploit.

88. On ne saurait prendre en appel aucune con

clusion nouvelle; et lorsque, d'ailleurs, la cour d'appel se trouve saisie de l'appel d'un jugement rendu par le tribunal de commerce, elle ne peut statuer sur une demande qui est en litispendance devant le tribunal civil. 27 août 1822, Bruxelles.

ART. 3.

De l'exception des nullités d'exploits exploits introductifs d'instance, dont les vices sont et d'actes de procédure.

$1.- Des nullités d'exploits et d'actes de procédure en matière civile.

89.

Avant de plaider au fond, on doit vérifier si l'instance a été ou non légalement engagée et suivie. Toute nullité d'exploit ou d'acte de procédure est couverte, si elle n'est proposée avant toute défense ou exception autre que les exceptions d'incompétence (C. pr. art. 173).

90. Cet article ne s'applique qu'aux nullités contenues dans les exploits ou autres actes de procédure. 1er mars 1826, Bordeaux.

91. Il ne s'étend pas aux nullités résultant, non de l'irrégularité de l'acte dans sa forme extérieure, mais d'un vice intérieur dont l'effet nécessaire serait d'anéantir l'action, comme par exemple, si un acte d'appel avait été tardivement signifié. Dans des cas semblables, la nullité de l'exploit constitue, non une nullité de forme, mais une exception péremptoire de l'action, proposable en tout état de cause, tant qu'on n'y a pas renoncé. Si la loi a dû prévenir l'abus que l'esprit de chicane peut faire des formes de la procédure, elle a aussi dû laisser aux parties la latitude nécessaire pour rechercher et produire leurs moyens de défense auxquels on ne peut pas raisonnablement leur supposer l'intention de renoncer.

92. Relativement aux exploits et actes de procédure (auxquels s'applique expressément l'art. 173 C. proc.), un arrêt de la cour de cassation, du 24 déc. 1811 (V. Enquête), établit une distinction qui semble inadmissible. Suivant cet arrêt, l'assignation en contre-enquête ne couvre pas la nullité de l'assignation en enquête, lorsque cette nullité comme dans l'espèce, provient de l'omission du parlant à ; et cela, 1o parce que cette formalité est substantielle, et doit être constatée par l'acte même; 2o parce qu'une contre-enquête n'est pas une de ces défenses auxquelles l'article 175 attribue l'effet de couvrir les nullités. Cet arrêt (du moins, le premier motif) est contraire lo au texte de cet art. 173, lequel ne fait aucune distinction entre les différents vices de forme dont un exploit peut être affecté ; 2o à l'esprit de la loi; car toutes les formalités auxquelles l'art. 61 C. pr. assujettit les exploits, doivent être constatées dans l'acte lui-mêne; toutes sont sanctionnées par la même nullité, et quant à celles à l'omission desquelles la loi n'aurait pas attaché de nullité, cette peine ne peut être suppléée (Dalloz, n. 212; Carré, Lois de la proc., t. 1er, p. 753 et 1021). Quant au deuxième motif, quoique subtil, il peut paraître suffisant pour justifier l'arrêt, car la contre-enquête ne résulte pas de l'assignation donnée pour y assister, mais du jugement qui l'autorise et de l'ordonnance du juge; et il semble qu'une nullité d'exploit ne peut être couverte par une défense qu'autant que celle-ci est une suite nécessaire de l'exploit qu'on prétend ensuite faire annuler.

93. Une nullité ne peut être couverte qu'autant qu'elle a été ou pu être connue; par conséquent, la renonciation au droit de s'en prévaloir ne saurait résulter que d'un fait postérieur à l'acte entaché de nullité, et une renonciation générale souscrite d'avance au droit de se prévaloir des nullités que LEGISL.

pourraient offrir les actes d'une procédure non encore signifiés, ne serait pas plus valable que la renonciation à une prescription non encore acquise; car elle serait plus contraire encore à l'ordre public, puisqu'elle conduirait au mépris des formes légales. 94. De là, la nécessité de distinguer entre les naturellement effacés par toute défense ou exception (art. 1753), et les autres actes de procédure intervenus dans le cours de l'instance, après que les parties ont discuté les exceptions et même entamé les plaidoiries au fond, telles que les assignations à fin d'enquête, d'expertise, d'interrogatoire, de prestation de serment, etc. Les irrégularités que présenteraient ces derniers actes ne peuvent être effacées que par des exceptions et défenses produites depuis l'existence de ces mèmes actes.

95. Pour faciliter les recherches au milieu des nombreux arrêts rendus par application de l'art. 173 C. proc., on va, conformément à la distinction qui vient d'être indiquée, rappeler d'abord ceux dans lesquels cet article a été appliqué à des exploits introductifs d'instance (tels qu'assignations et actes d'appel); on énumérera eusuite ceux dans lesquels il s'est agi d'autres actes de procédure.

96. De même, la nullité d'un acte d'appel résultant de ce qu'il renferme seulement élection de domicile chez un avoué près la cour, sans contenir constitution d'un avoué, est couverte par l'acte d'occuper que l'avoué de l'intimé fait signifier à l'avoué chez lequel l'appelant a élu son domicile. La réserve que l'intimé fait dans cet acte de ses moyens de nullité, ne peut s'entendre que des moyens autres que ceux tirés de l'irrégularité ou du défaut de constitution d'avoué. 24 fév. 1813, Req. Paris; 26 mai 1810, Rennes; 9 mai 1826, Paris. V. Carré, Lois de la pr., t. fer, p. 460.

97. La comparution du défendeur ne suffit pas pour couvrir la nullité de l'assignation.

98. Il en est de même, à fortiori, dans le cas où, sans exprimer de réserve, le défendeur a demandé communication de l'original de l'exploit, dans le but annoncé de vérifier s'il ne renferme aucune nullité.

99. Lorsque il y a deux ou plusieurs défendeurs dont l'un fait défaut, les conclusions prises par ceux qui sont présents, à fin de jonction du profit du défaut, et le jugement de jonction, les rendent-ils nonrecevables à exciper ensuite de la nullité de l'exploit? Cette question, qui est commune aux exceptions de renvoi, et même à toutes les exceptions, a été résolue affirmativement par un arrêt de la cour de Rennes, du 22 avril 1815, que Carré cite (Lois de la proc., t. 1er, p. 456), mais en le désapprouvant comme trop rigoureux et contraire à un usage général (ibid., n. 625). Et, en effet, le jugement de jonction n'est qu'une formalité nécessaire pour régulariser la procédure, et on ne peut y.voir ni une défense au fond, ni une exception, ce qui écarte l'application de l'art. 173.-Dalloz, n. 244; Demiau, p. 150.

100. L'exception de nullité n'est pas couverte par l'exception d'incompétence (C. pr. 169 et 173). V. aussi Merlin, Rép., vo Compte.

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101. Il en serait de même, à cet égard, en appel qu'en première instance; c'est-à-dire qu'une partie peut faire valoir ses moyens de nullité contre un appel, après même qu'elle a proposé une exception d'incompétence à raison de la matière. Les art. 173 et 470 combinés du C. de proc. ne permettent pas de faire-ici une distinction qu'aucune raison, d'ail118 LIVE.

leurs ne motive.-Dalloz, n. 247; Carré, Lois de la proc., n. 743.

102.- L'intimé ne couvre pas la nullité d'un exploit d'appel, par cela qu'il ne la propose qu'après la plaidoirie de l'appelant. — Dalloz, n. 249; Carré, Lois de la proc., t. 1er, p. 459.

103.-Le juge peut-il du moins et doit-il suppléer les nullités quand le défendeur fait défaut? Oui, dit Dalloz, n. 308; car les partisans de l'opinion contraire (Carré, Lois de la proc., n. 748, et Fayard, yo Exception, § 3, n. 4) reconnaissent eux-mêmes que le juge pourrait admettre d'office la nullité d'un exploit qui ne porterait pas la preuve de sa notification au défendeur, parce qu'on pourrait attribuer l'absence de celui-ci à ce défaut de notification. Or, pourquoi n'en serait-il pas de même à l'égard de l'ajournement qui n'indiquerait pas soit le tribunal devant lequel la cause serait portée, soit l'objet de la demande, et par suite de tout exploit qui présenterait des irrégularités telles qu'il ne mettrait pas le défendeur à mème de connaître l'action dirigée contre lui, et d'y répondre. On dit que les nullités ne sont pas favorables; soit, mais peut-on inférer de cette maxime que le défaillant doive être présumé avoir renoncé aux exceptions existant en sa faveur, quand son absence peut s'expliquer souvent par l'irrégularité même de l'exploit. Vainement dit-on que, d'après l'art. 173, les nullités se couvrent par le silence de la partie. Cet article ne s'exprime point ainsi; il décide que la nullité est couverte, si elle n'est proposée avant toute défense ou exception, etc,, ce qui montre qu'il entend parler du cas où le défendeur est présent à l'audience, et non du cas où il est défaillant. Le défaillant n'éprouvera, dit-on, aucun préjudice, parce qu'il pourra toujours proposer ses nullités sur l'opposition au jugement; mais pourquoi lui imposer la charge de plaider en opposition. Enfin, Dalloz invoque, à l'appui de son opinion, la disposition de l'art. 150 C. pr. et l'autorité de Rodier, sur l'art. 5, tit. 6 de l'ordonnance de 1667.

104.-Le jugement des exceptions de nullité doitil, comme celui des exceptions de renvoi. être séparé du jugement du fond? Oui, suivant Carré et Favard, lorsque la nullité est péremptoire en la forme, c'està-dire a pour but d'anéantir l'instance, car il est inutile de se livrer à l'examen long et dispendieux du fond, qui peut s'évanouir devant un moyen de nullité. Non, suivant Dalloz, car l'art. 175 n'a pas étendu aux exceptions de nullité la règle portée par l'art. 132, relativement aux déclinatoires; et quant à l'arrêt du 5 mars 1810, invoqué par Carré, il est sans application à l'espèce (Voy. cet arrêt, Dalloz, vo Appel). Il ne faut donc pas distinguer entre les exceptions de nullité péremptoires quant à la forme, et celles qui tendent à l'annulation d'un acte de procédure en laissant subsister l'instance; toutes peuvent être jointes au fond; mais le juge, investi à cet égard d'une sorte d'arbitraire, ne doit ordonner la jonction d'une exception de nullité péremptoire de l'instance qu'autant que cette exception offre peu de chances de réussite; et quand la jonction n'a pas eu lieu, il convient d'accorder au défendeur dont l'exception est rejetée le temps nécessaire pour préparer sa défense au fond.

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ne déclarent couverte, faute d'avoir été proposée avant toute exception et défense, que la nullité résultant de ce que la citation a été donnée à un délai trop court, Dalloz conclut que les autres nullités sont proposables en tout état de cause. Il y aurait, ajoute-il, trop de sévérité à priver un prévenu d'un moyen de forme que, dans son ignorance, il n'aurait pas aperçu d'abord, surtout si ce moyen était de nature à lui faire obtenir le bénéfice de la prescription. Cet auteur ne pense même pas qu'il y ait lieu, lorsque la citation est donnée directement à la requête de la partie civile, de s'écarter de la règle qu'il établit, même en ce qui concerne l'intérêt civil des parties; attendu qu'on ne peut distinguer là où là loi ne l'a pas fait; d'ailleurs, la partie civile ne peut obtenir une réparation pécuniaire qu'en faisant déclarer le prévenu coupable, et il serait bizarre d'interdire au prévenu d'exciper de la nullité de la citation contre la partie civile auteur de cette nullité, tandis qu'il pourrait l'opposer au ministère public à qui elle serait étrangère.-Dalloz, n. 312.

106.-Du reste, en admettant, avec quelques arrêts, que l'art. 173 C. pr. soit applicable aux matières correctionnelles et de police, il faut restreindre cette application aux irrégularités de la citation et des autres actes de procédure, et ne point l'étendre aux nullités d'une poursuite provenant, par exemple, des vices essentiels dont le procès-verbal servant à constater le délit se trouverait entaché. Quand le procèsverbal est nul, la preuve légale du délit ou de la contravention n'existe plus, et toujours un prévenu est recevable à se prévaloir du défaut de preuve du délit qui lui est reproché.-Dalloz, n. 320.

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107.-La compétence du tribunal reconnue, et la procédure jugée régulière, le moment est venu de proposer les exceptions dilatoires, c'est-à-dire qui tendent à différer la décision du litige.

108. Il y a d'autres exceptions dilatoires que celles mentionnées sous le § 4, tit. 9, C. pr. Ce sont, en général, toutes celles qui ont pour but direct de faire différer le jugement du procès; par exemple, les demandes en remise de la cause à un jour plus éloigné, les exceptions de discussion et de division que la caution peut opposer, aux termes des articles 2022 et 2026 C. civ., etc. Aussi Pigeau, t. 1er, p. 179, dit-il que l'exception de discussion doit être présentée simultanément avec l'exception de garantie, par application de l'art. 186 C. pr. Dalloz, n. 326.

109.

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L'art. 186, C. pr. exige que les exceptions dilatoires soient proposées conjointement; mais cet article ne s'applique pas à la demande en remise, qui est essentiellement de nature à pouvoir être proposée en tout état de cause, dès l'instant qu'il survient un motif capable de la justifier.-Dalloz,n.327. 110. Berriat, p. 227. note 2, et Carré, Lois de la proc., t. 1er, p. 492, pensent même que cette`disposition de l'art. 186, C. pr. n'a rien d'inflexible. Ils citent l'exemple des demandes incidentes qui, nonobstant l'art. 388 sont admises dans la pratique, quoique non présentées simultanément, toutes les fois qu'il paraît que leur présentation successive n'est pas un artifice employé afin d'éterniser le procès.

111. L'art. 186 exige aussi que toutes les exceptions dilatoires soient proposées avant toutes défenses au fond. Il ne doit être dérogé à cette règle que pour

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