Page images
PDF
EPUB

62. Mais, dans ce cas, par qui et comment devra être réglée l'indemnité?-S'il y a suppression de la totalité ou de la partie la plus essentielle de l'usine, la loi du 7 juill. 1833, sur l'expropriation publique, devient applicable. Si au contraire il s'agit simplement de quelques modifications à opérer à l'usine, comme alors il n'y aurait pas une véritable expropriation, l'indemnité devrait être réglée conformément à la loi du 16 septembre 1807. Proudh.,

n. 839.

63. Mais si les moulins ou les usines dont la destruction devient nécessaire pour rendre une rivière navigable ont été établis sans l'autorisation du gouvernement, il ne sera dû aucune indemnité.

64.Tout ce qui touche au curage et à l'établissement ou entretien des digues des petites rivières est réglé par la loi du 14 flor. an xi.

65. D'après l'art. 1er de cette loi, il est pourvu au curage des canaux et rivières non navigables, et à l'entretien des digues et ouvrages d'art qui y correspondent, de la manière prescrite par les anciens règlements, ou d'après les usages locaux.

66. Lorsque l'application des règlements ou l'exécution du mode consacré par l'usage épouvera des difficultés, ou lorsque des changements survenus exigeront des dispositions nouvelles, il y sera pourvu par le gouvernement dans un règlement d'administration publique, rendu sur la proposition de l'autorité provinciale, de manière que la quotité de la contribution de chaque imposé sera toujours relative au degré d'intérêt qu'il aura aux travaux qui devront s'effectuer (L. 14 flor. an x1, art. 2).

67. Quant aux rôles de répartition des sommes nécessaires au payement des travaux d'entretien, réparation et reconstruction, ils sont dressés sous la surveillance de la députation permanente du conseil provincial, rendus exécutoires par elle, et le recouvrement s'en opère de la même manière que celui des contributions publiques. S'il s'élève des contestations relativement à la répartition et à la confection des travaux, c'est la députation permanente du conseil provincial qui doit en connaître (L. 14 flor. an x1, art. 3 et 4).

68. Ainsi, d'après ces articles, la députation permanente du conseil provincial statue sur les dégrèvements qui peuvent être demandés de la part de ceux qui prétendent que leurs fonds sont trop imposés comparativement aux autres.

69.-Elle statue encore sur les difficultés relatives à la confection des travaux, c'est-à-dire qu'elle peut condamner les ouvriers ou entrepreneurs qui auraient mal exécuté les travaux, à des dommagesintérêts. Proudh., n. 1037.

70. C'est l'administration qui détermine les endroits où devront être déposés les déblais du curage. Mais le propriétaire sur le fonds duquel ces déblais sont rejetés, a droit à une indemnité. -- Proudh., n. 1059.

71. Cette indemnité doit être supportée par tous les propriétaires qui profitent du curage, et le rôle de répartition en doit être dressé par la députation.

72. Dans le cas où il devient nécessaire de creuser un fossé pour mieux fixer le cours des eaux à l'avenir, c'est l'administration qui doit en déterminer la direction.

73. L'intérêt public qui nécessite le curement d'une petite rivière peut quelquefois exiger, ou qu'on enlève les îles qui s'y trouvent, ou qu'on en élargisse le lit. Mais toujours c'est l'administration qui doit ordonner ces diverses opérations.

74. Toutefois, comme nul ne peut être tenu de sacrifier sa propriété pour le salut des autres, une indemnité est due, dans ce cas, aux propriétaires soit des îles, soit du terrain qui est enlevé pour l'élargissement du lit.

75.- Quant au montant de l'indemnité, il doit être judiciairement fixé, si les parties ne se sont pas accordées amiablement; et l'administration en fait ensuite la répartition entre tous ceux qui doivent la supporter. Prouqh., n. 1050.

76. A la différence de ce qui a lieu pour les rivières navigables et flottables, les propriétaires riverains des petites rivières peuvent faire au bord de leurs héritages tous ouvrages de protection nécessaires pour défendre leurs propriétés. - Proudh., n. 1227.-V. n. 47.

77. — Ainsi, tout propriétaire riverain peut établir au-devant de son fonds et parallèlement à la rivière tous les ouvrages qui peuvent servir à défendre sa propriété.

78. De même encore, il peut construire sur son fonds et au-dessus des bords, une digue pour prévenir l'inondation de sa propriété dans les cas de débordement. - Proudh., n. 1228.

79. —- Toutefois, si les ouvrages pratiqués par le propriétaire riverain s'avançaient dans le lit du fleuve, les propriétaires de la rive opposée qui en éprouveraient un préjudice actuel, pourraient en demander la destruction; et si le préjudice était éventuel, ils pourraient seulement exiger un cautionnement d'indemnité de la part du constructeur. Proudh., n. 1229.

80. Dans ce cas, c'est aux tribunaux ordinaires qu'appartient la répression de ces anticipations faites sur le cours de l'eau.

81. Les propriétaires riverains des petites rivières, ayant le droit de pêche, peuvent construire dans la rivière même tous les ouvrages de pêcherie, gords et autres barrages.

82. Mais, dans ce cas, d'après l'art. 24 de la loi du 15 avril 1829, les ouvrages ne doivent pas être construits de manière à empêcher entièrement le passage du poisson.

85. Si une partie se trouvait lésée par ces ouvrages, elle devrait s'adresser aux tribunaux ordinaires pour en faire prononcer la destruction (Déc. 12 avril 1812).

84. Tout propriétaire riverain ayant droit de pêche, a par suite le droit d'avoir une barque şur cette rivière.

85. Mais l'exercice de ce droit de barque doit être borné aux usages privés, et le propriétaire ne peut point en user pour passer des tiers d'une rive à l'autre.

86. Le propriétaire riverain a encore le droit de se servir de l'eau qui borde son héritage pour l'irrigation de sa propriété. Nous ne parlerons pas ici du droit d'irrigation. - V. Servitude.

87. Seulement nous dirons que le propriétaire riverain a le droit de faire dans la rivière un barrage pour faciliter l'irrigation, pourvu toutefois que ce barrage ne porte préjudice à personne.-Proudh., n. 1260.

88. Dans le cas où il est intervenu entre les propriétaires riverains des conventions pour régler l'usage des eaux, ces règlements ont force obligatoire.

§ 2. Des eaux de source et pluviales. — V. Servitude et Propriété.

§ 3.-Des marais.-V. ce mot.

[blocks in formation]

89. On appelle étang un amas d'eau contenu par une chaussée ou digue, et dans lequel on nourrit du poisson. - Dalloz, n. 154.

90. Chacun est libre de faire un étang sur son fonds, sans entreprendre sur le domaine public ou les propriétés privées. Il n'est besoin d'autorisation administrative qu'autant que la superficie de l'étang excéderait cinquante hectares, ou que la chaussée serait placée sur ou contre un chemin public (2e proj. C. rur. art. 262).

91. Les poissons des étangs, y jouissant de leur liberté naturelle, sont considérés comme immeubles par accession; mais, dès l'instant où la bonde de l'étang est levée pour le mettre en pêche, on est dans l'usage de les regarder comme meubles, et comme susceptibles d'être l'objet d'une saisie-mobilière. Proudh., n. 1579.

92.Si, dans un débordement des eaux, les poissons d'un étang passent dans un autre, ils sont acquis au proprietaire de l'étang dans lequel ils ont émigré, à moins qu'ils n'y aient été attirés par fraude el artifice (C. civ. 564).

93. Tout propriétaire d'un étang peut y chasser ou y faire chasser en tout temps, comme dans celles de ses propriétés qui sont closes (Décr. 30 avril 1790, art. 15).

94. Autrefois, le propriétaire d'un étang pouvait forcer le voisin d'en recevoir les eaux, moyennant indemnité (Arr. 27 nov. 1460); mais aujourd'hui nul ne peut être dépossédé que pour cause d'utilité publique (C. civ. 545). Guyot, Rép., vo Etang; Garnier, t. 2. p. 105; Dalloz, n. 159.

95. Les propriétaires riverains, de leur côté, ne peuvent faire sur l'étang des prises d'eau pour l'irrigation de leurs héritages.-Proudh., n. 1422.

96. L'étang doit être entretenu dans un état non préjudiciable à autrui. Le préjudice peut avoir deux causes principales: l'inondation, et des exhalaisons méphitiques.

97. Il faut remarquer, en outre, que si le mauvais état de la chaussée ou le défaut de curage rendait imminente l'irruption des eaux, les voisins, pour prévenir le dégât, pourraient sommer le propriétaire de faire les réparations utiles. -Boutaric, Droits seign., p. 570; Garnier, eod.; Merlin, Rép., yo Etang; Toullier, t. 3, n. 138; Dur., t. 4, n. 408; Dalloz, n. 163.

98. - Quant aux exhalaisons méphitiques, lorsque les étangs, d'après les avis et procès-verbaux des gens de l'art, peuvent occasionner, par la stagnation de leurs eaux, des maladies épidémiques ou épizootiques, les gouverneurs sont autorisés à en ordonner la destruction, sur la demande des conseils communaux, et d'après les avis des commissaires de district (L. 11 septembre 1792). -- La mème mesure est prescrite pour le cas où, par leur position, les étangs sont sujets à des inondations qui envahissent et ravagent les propriétés inférieures.

99. La loi du 14 frim. an 11, qui avait ordonné le desséchement de tous les étangs et lacs qu'on est dans l'usage de mettre à sec pour les pêcher, et de ceux dont les eaux sont rassemblées par des digues ou chaussées, a été rapportée par une autre loi du 13 mess. an III.

Le desséchement des étangs est aujourd'hui soumis aux formalités de la loi du 16 sept. 1807 (V. supra, 1er).

100.- Si deux étangs sont si voisins que l'eau de l'un touche la chaussée de l'autre, le propriétaire inLÉGISL.

férieur doit-il vider ses eaux pour faciliter la pêche de l'étang supérieur ? Oui ; l'art. 640 C. civ. assujettit le fonds inférieur à supporter les eaux du fonds supérieur, sauf aux tribunaux à concilier les intérêts divers, aux termes de l'art. 645.- Garnier, t. 2, p. 105, n. 112.

Non; l'art. 640 C. est inapplicable; il ne parle que des eaux qui coulent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué. C'est à celui qui construit l'étang à s'assurer préalablement du moyen de faire écouler ses eaux. Il s'agit là d'une véritable servitude qui ne peut être établiè que de l'une des manières déterminées par la loi. - Dur., n. 411.

101. Sous l'ancienne législation, le propriétaire inférieur y était obligé, encore même qu'il n'y fût pas assujetti à titre de servitude. - Merl., yo Etang; Dalloz, n. 167.

102.-La vente d'un étang s'étend-elle au poisson qu'il renferme? On a distingué : l'étang est-il destiné à nourrir du poisson et à sa reproduction? nul doute que le poisson n'en fasse partie, l'art. 524 C. civ. lève en termes formels l'incertitude qu'exprimaient d'anciens auteurs. Le poisson n'avait-il été déposé que provisoirement, contre la destination de l'étang, et non pour son service ou son exploitation habituelle? Dans ce cas, il est excepté de la vente. - Godefroy, sur l'art. 207 de la coutume de Normandie; Delv., sur l'art. 524 C. civ.; Garnier, t. 2, p. 109. Dalloz, n. 171.

103. Y a-t-il lieu à la résolution de la vente d'un étang pour indication dans le contrat d'une étendue qui excède de plus du vingtième l'étendue réelle? Oui; les art. 1617 à 1619 C. civ. sont généraux les produits, et, par conséquent, le prix d'un étang, varient selon son étendue. D'ailleurs, on a pu l'acheter dans l'intention de le mettre à secet en culture (Arr. 4 avril 1765). — Dénizart, vo Etang; Garnier, t. 2, p. 109.

104. Toutefois, on a dit que dans une telle vente, ce n'est pas précisément le terrain qu'on achète; que l'étang contient par sa nature une superficie dont les bornes sont constantes et invariables; qu'il est superflu de la spécifier dans le contrat.

105.-L'ordonnance de 1669, tit. 25, art. 17 et 18, contient plusieurs dispositions sur la pêche des étangs.-V. Pêche.

§ 5.- Des puits, citernes et égouts.

106.-Un puits est un trou profond, creusé de main d'homme, ordinairement revêtu de pierres en dedans, et fait exprès pour en tirer de l'eau. L'art. 674 C. civ. renvoie aux usages et règlements particuliers pour la distance et autres précautions à observer quant à cet ouvrage. « Nul ne peut, sans autorisasation, creuser un puits à moins de cent mètres des nouveaux cimetières transférés hors des communes; les puits déjà existants peuvent, après visite contradictoire d'experts, être comblés en vertu d'une ordonnance du gouverneur, sur la demande de la police locale.» (Décr. 7 mars 1808).-Merl., Rép., vo Puits; Favard, Rep., vo Puits; Garnier, t. 2, p. 114; Dalloz, n. 179.

107. De ce qu'on s'est conformé aux usages et règlements en construisant un puits, il ne résulte pas que si cette construction cause un préjudice aux voisins, on soit à l'abri d'une action en indemnité. -Garn., p. 118.

108.---Nul n'a le droit de puiser dans le puits d'un autre, sans le consentement du propriétaire, excepté pour les cas d'incendie. Le propriétaire d'un puits ne peut point détourner l'eau qui l'alimente, 104° LIVR.

ni le combler et le détruire, lorsqu'un tiers y a des droits, car ce serait les lui faire perdre (L. 2, ff. de Rivis).

Les copropriétaires d'un puits doivent tous contribuer aux frais d'entretien.

tance à observer pour les cloaques n'est pas la même que pour les puits ou citernes. Il n'y a point de règles générales sur cette matière. Tout dépend, dans l'application, de la situation du cloaque, de son étendue, de sa destination, des exhalaisons plus ou moins malsaines qui s'en échappent (V. Coutume de Paris, art. 217). Desgodets; Merl., yo Cloaque; Garn., p. 126; Dalloz, n. 190.

109. Mais celui qui renonce à sa copropriété est-il tenu des réparations actuellement nécessaires? -Non; l'art. 656 C. civ. permet, sans distinction, au copropriétaire d'un mur mitoyen de se soustraire aux charges en abandonnant son droit de mitoyenneté, et ici il y a analogie parfaite (Garnier, t. 2, p. 121). Cependant Cœpolla, sur la loi 4, ff. Comm. Sle. divid., pense qu'il n'est affranchi que des réparations ou reconstructions futures. Ayant joui, ditil, des avantages de la chose, il doit en supporter les charges, et ne peut faire un abandon qui nuirait à la propriété commune. Mais le législateur a dû considérer que la renonciation n'interviendrait d'ordinaire que lorsque le mur serait en mauvais état.Dalloz, n. 183.

110. Le fermier a, quant à la jouissance, le même droit que le propriétaire, mais il n'est point obligé aux grosses réparations ni au curage du puits (C. civ. 1720 et 1756). - Garnier, n. 141.

111. Il existe d'anciennes règles encore applicables pour le mode de jouissance d'un puits, s'il n'a été stipulé par titre. 1o Le puits est-il renfermé dans une cour? celui qui a le droit de puisage peut exiger une clef des serrures, afin de n'être point gêné dans l'exercice de son droit (Cout, de Normand., art. 621); 20 il ne doit pas tirer continuellement de l'eau, de manière à tarir le puits et à le rendre inutile au propriétaire on pourrait le réduire ad legitimun modum (L. 5, C. de Aquæd.); 3o il n'est pas autorisé à passer dans la cour à toute heure de la nuit, pour puiser l'eau (L. iter ff. de Comm. præd. ; Cœpolla et Bartole sur cette loi; Basnage, t. 2, p. 292; Mornac, in leg. 4 ff. de Serv. ; parlem. de Paris, 16 fév. 1618; Garnier, p. 122); 4o celui qui doit la servitude est tenu aussi de fournir un chemin ad aquam hauriendam (L. 4, § de Serv. rust. præd.; C. civ. 696); mais l'entretien de ce chemin est à la charge du voisin qui s'en sert (L. 1re, ff. de Fonte; C. civ. 698). Dalloz, n. 185.

112. Certains puits, peu profonds, servent d'abreuvoirs aux bestiaux. La servitude d'abreuvage est soumise à des règles spéciales: 1o un arrêté du Directoire, du 3 mess. an vii, défend de conduire aux abreuvoirs publics les bestiaux infectés d'une maladie contagieuse. La prohibition serait la même pour les abreuvoirs particuliers; 20 des ordonnances de police défendent d'y conduire par un seul homme -plus de trois chevaux à la fois, et de puiser de l'eau aux abreuvoirs et autres endroits où l'eau est sale et croupissante. Une déclaration du 22 avril 1782 fait exception pour les maîtres de poste, qui peuvent en conduire jusqu'à quatre. Cette déclaration est encore en vigueur, ainsi que l'a décidé la cour de cassation, le 8 sept. 1809; -3° d'après la loi 50, ff. de Serv.præd. rust., celuí qui, en vendant le fonds, se réserve l'abreuvage et une portion de terrain autour n'est pas censé s'être réservé la propriété de ce terrain, mais le simple usage, comme lui facilitant l'accès de l'abreuvoir. Dall., n. 187.

113. Les citernes diffèrent des puits, en ce que les unes contiennent des eaux pluviales; les autres, des eaux vives. Du reste, les règles que nous venons d'exposer leur sont communes.- Cæpolla, Tract. 11, ch. 47, n. 6; Merl., vo Cloaque; Garn., p. 125; Dall., n. 189.

114. L'égout ou cloaque est destiné à recevoir, outre les eaux pluviales, les immondices. La dis

ART. 3.-Des moulins et usines à eau.

-

[blocks in formation]

114. Les moulins et usines construits soit sur une rivière navigable ou flottable, soit sur un simple cours d'eau, sont soumis aux mêmes règles, hors une ou deux exceptions, que nous signalerons ciaprès.

116. Nul ne peut établir des moulins dans les fleuves et rivières navigables et flottables, à peine d'amende (Ord. 1669, tit. 27, art. 42). Il n'y a d'exception que pour les moulins déjà existants et fondés en titres ou possession centenaire, remontant au delà de 1566 (Ordonn. 1669, article 41; édition de 1683).

117. L'arrêté du Directoire, du 19 vent. an vi, prescrit (art. 5) «la destruction, dans le mois, de tous ceux de ces établissements qui ne se trouveront pas fondés en titres, ou qui n'auront d'autres titres que des concessions féodales abolies. Cette disposition ne tient aucun compte de la possession, quelque longue qu'elle soit; mais il faut remarquer: 10 que le Directoire exécutif n'ayant pas autorité pour abroger une loi, la possession qui remonte au delà de l'édit de 1566 est encore un titre suffisant, d'après l'ord. de 1669; 2o que, selon une circulaire du ministre de l'intérieur, du 21 germ. an vi,« l'esprit de la loi étant seulement de faciliter la navigation et de supprimer les obstacles qui l'entravaient, l'administration doit conserver les établissements, quoique non fondés en titre, qui ne gènent pas la navigation ou même qui lui sont utiles. »Dans ce cas, le propriétaire n'est tenu que d'obtenir l'autorisation du gouvernement. - Garn., t. 2, p. 140; Merl., vo Moulins, § 7, art. 4, p. 3; Corm., vo Cours d'eau ; Fav., vo Moulins, n. 6.

118. C'est au gouvernement qu'on doit s'adresser pour obtenir une ordonnance de concession permettant de construire les usines à eau cette ordonnance n'est rendue qu'après une enquête de commodo et incommodo.

119. Est-il besoin de l'autorisation du gouvernement pour construire un moulin sur un cours d'eau non navigable ni flottable? Non; l'arrêté de l'an vi, de même que l'ordonnance de 1669, ne parlent que des rivières navigables ou flottables; et si la police de ces eaux est confiée aux préfets, c'est une police toute locale qui a pour but de régler, dans l'intérêt public, la hauteur des eaux et de veiller à ce que le niveau ne soit pas dépassé. Les rédacteurs du second projet du code rural ont consacré cette interprétation en déclarant suffisante l'autorisation du préfet (art. 217), quoique, par l'art. 177, ils exigent pour les rivières navigables la permission du gouvernement. - Dalloz, n. 213.

120. En effet, si aucune loi n'impose expressément aux riverains d'un cours d'eau privé la formalité de l'autorisation royale, du moins les lois des 20 août 1790 et 6 oct. 1791, qui chargent les préfets de fixer la hauteur des eaux pour prévenir la submersion des prairies, amènent à l'exiger; car elles

ne disent pas que l'autorisation du gouverneur sera définitive. De droit commun, on peut en appeler, et le ministre de l'intérieur peut, dans l'intérêt public, solliciter du roi, en conseil d'État, la réformation de l'arrêté préfectoral. Le projet du code rural, qu'on invoque, n'a jamais été obligatoire. Des rivières, quoique non navigables ni flottables, intéressent parfois un trop grand nombre de riverains, pour que l'érection des usines n'y soit pas l'objet d'un règlement d'administration publique. La nécessité de ce règlement a été reconnue par des lois encore subsistantes pour des matières analogues pour le curage des cours d'eau non navigables ni flottables (L. 4 mai 1803); pour les usines qui emploient le feu (L. 21 avril 1810), et les fabriques insalubres de première classe (L. 15 oct. même année). Les dispositions relatives à la hauteur des eaux, aux barrages, etc., n'ont pas moins d'importance que celle sur le curage. L'établissement d'un nouveau moulin peut influer sur la marche de ceux construits au-dessus et au-dessous, et cette influence s'étendre même au delà des limites d'une province. Des règlements faits à cet égard, il peut résulter et des obligations pour les uns, et des titres pour les autres titres que le Code civil prescrit aux tribunaux de respecter, et qui deviennent, par conséquent, des propriétés transmissibles, auxquelles on ne saurait donner trop d'authenticité et de fixité.

121. L'autorisation est-elle nécessaire même pour les innovations qu'on voudrait apporter à l'usine? Oui, si elles sont importantes (Instr. min. 19 therm. an vi). Ainsi, l'autorisation est indispensable, soit pour le transport d'un moulin d'un endroit de la rivière à l'autre, soit pour le rétablissement d'un moulin détruit.-Garnier, t. 1er, p. 48; Favard, ve Moulin, n. 9; Proud, n. 1193.

122. L'innovation aurait-elle besoin d'autorisation, si, sans changer la dépense des eaux, elle dénaturait l'exploitation, et, par exemple, convertissait un moulin à blé en filature hydraulique? Oui, car la nouvelle opération rompt spontanément toutes les habitudes d'une commune, peut même y apporter le trouble, et modifie le titre constitutif de la jouissance concédée ou tolérée. — Favard, eod.

123. Non, le système contraire serait un acheminement à la restauration des maîtrises et au renversement de la liberté accordée au commerce par l'art. 7 de la loi du 2 mars 1791, puisque l'industrie ne serait plus libre dans toute usine mise en jeu par le secours de l'eau. Du reste, l'autorisation serait nécessaire pour toute destination nouvelle qui exigerait un autre emploi de l'eau, un plus grand nombre de roues motrices. - Garnier, eod.

124. En général, les innovations qui ont besoin d'être autorisées, sont celles qui sont de nature à apporter un obstacle quelconque au libre cours des eaux. (Ord. 1669: arrété 19 vent. an vi). Ainsi, sont exempts de l'autorisation tous travaux qui, au lieu de l'arrêter, auront pour but de faciliter l'écoulement de l'eau, ou le laisseront dans le même état. Il sera donc permis, par exemple, d'abaisser les barrages et déversoirs, d'agrandir le débouché des van.nes, de réparer les roues, écluses et tout autre accessoire du mécanisme du moulin. On conçoit que si la plus grande facilité d'écoulement nuisait aux propriétés voisines, et que les tiers eussent intérêt à ce que les barrages et déversoirs conservassent la hauteur déterminée par l'administration, l'abaissement devrait être autorisé. - Favard et Garnier, loc. cit.

125. Il peut arriver tel cas d'urgence où, pour des travaux même qui changeraient en quelque manière le cours des eaux, on serait dispensé d'au

torisation. C'est ce qu'a jugé en France, le conseil d'État, le 31 mai 1821, à l'occasion d'avaries produites par la débâcle des glaces.

126. L'on a prétendu qu'à part la circonstance de procès, où le moindre retard aurait compromis l'existence de l'établissement, l'autorisation doit être préalable à toute réparation. Garnier et Dalloz pensent, au contraire, que l'administration n'a le droit d'intervenir qu'après la confection des ouvrages, ou lorsqu'ils sont arrivés au point d'entraver la navigation.

§2.- Conditions de l'autorisation.]

127. Une clause banale termine tous les actes du gouvernement qui autorisent les usines à eau : c'est que, dans aucun temps ni sous aucun prétexte, il ne pourra être prétendu aucune indemnité ni chômage, à raison des dispositions que le gouvernement jugerait à propos de faire pour l'avantage de la navigation, du commerce et de l'industrie, même dans le cas de démolition. »(Arrêté 13 vend. an XII; décr. 31 janv. 1806, 12 mars 1811; ord. 15 mars 1826). Dalloz, n. 236.

128. De telles stipulations seraient-elles proposables pour l'érection d'une usine sur un cours d'eau non navigable? Non; elles ne sont applicables qu'aux rivières navigables et du domaine public. L'État n'a que la police et non la propriété des cours d'eau dont il s'agit ( C. 644), et dès lors que l'usine offre toutes garanties d'innocuité, le gouvernement ne saurait en ordonner la destruction sans indemnité (C. 545; 1.8 mars 1810). Isambert, de la Voirie, t. 1er, p. 219; Daviel, Pratique des cours d'eau ; Garnier, t. 2, p. 159; Cormenin, vo Cours d'eau. - Toutefois, dans la prévoyance d'une navigabilité prochaine du cours d'eau, ou d'une dérivation nécessaire pour alimenter des cours d'eau navigables ou rivières canalisées, le gouvernement peut imposer la condition de la démolition future sans indemnité, Autrement, il se verrait exposé, soit à des indemnités très-onéreuses, soit à l'abandon de ses projets d'utilité publique. Cormenin, eod.

129.

130. Une autre condition de l'autorisation est qu'elle ne préjudicie pas aux droits des tiers (L. 6 oct. 1791); mais il faut un préjudice réel pour qu'un particulier puisse s'opposer à ce que les eaux soient employées à faire mouvoir une usine. — Cormenin, p. 26; Garnier, t. 2, p. 162.

151. L'Etat ne peut autoriser, pour l'érection d'une usine. l'expropriation d'un riverain, quoiqu'en offrant indemnité. Le sacrifice de la propriété n'est dû qu'à l'utilité publique. — Corm., loc. cit.; Fav., n. 5; Garn., t. 1er, p. 52.

152. De là est née cette question; Le gouvernement peut-il, au profit d'un tiers, disposer de tout ou partie de la pente d'un cours d'eau non compris dans les dépendances du domaine national?-Non; la pente du cours d'eau est un genre de propriété des riverains.-Corm., eod.; Fav., eod.; Garn.,eod.; Dalloz, eod.- Contrà, Proud., n. 1237.

135. Toutefois, pour encourager l'industrie, le gouvernement dispose de la pente d'eau, lorsqu'il n'en résulte pas de préjudice notable pour les tiers (C. civ. 645). Corm., eod.; Dalloz, eod.

134. Si un entrepreneur d'usine était propriétaire des deux rives sur une assez grande longueur, pour que la pente pût devenir une force motrice, la pente serait à sa disposition.-Corm., eod.

135. - Dans quel cas l'autorisation ne peut-elle être accordée? Suffirait-il qu'un préjudice dût en résulter pour une usine déjà existante? Il faut dis

tinguer entre les causes de préjudice: est-ce l'eau qui, en remontant ou regorgeant, entrave la marche du premier moulin? l'opposition du propriétaire est légitime. C'était la doctrine de tous les anciens auteurs (Barthole, ff. de Fluminib.; Godefroy et Flaust, sur l'art. 210, cout. de Normand.; Legrand, cout. de Troyes, art. 180; Brodeau, cout. de Paris, art. 71; Boucherel, cout. de Poitou, art. 40). Le préjudice n'a-t-il pour cause que la diminution de revenus provenant de la concurrence? l'opposition n'est pas fondée. C'est ce qu'enseignent d'Argentrée, Favre, C. de Serv., et aq. def. 5; Henrys, t. ler, liv. 3, ch. 3, quest. 54.

156. Le propriétaire d'une usine, comme on vient de le dire, n'a droit à aucune indemnité à raison de la diminution du produit ou de la clientèle résultant de l'établissement d'une nouvelle usine; mais si les deux usines se trouvent établies sur la même rivière, comment devra-t-on régler entre elles l'usage matériel du cours d'eau?

137. Si les deux usines ont été autorisées pas le gouvernement, l'usage matériel du cours d'eau doit avoir lieu selon le règlement qui a été fait par l'administration. A défaut de règlement, les tribunaux doivent se déterminer d'après les règles du droit commun. Proud., n. 1120.

158. Si les deux usines n'ont pas été autorisées, et s'il y a absence de tout règlement, dans la coutume locale sur l'usage des cours d'eau, c'est le maître de l'usine la plus ancienne qui doit avoir un droit prépondérant, par l'effet de son droit de premier occupant, et il a une action en dommagesintérêts pour le préjudice matériel qui lui est occasionné par l'établissement de l'autre usine. Proudh., n. 1121.

139. Il peut même demander la destruction de la nouvelle usine, si elle nuit, soit par le refoulement des eaux, soit de toute autre manière, à la marche de son établissement. - Garn., t. 1er, p. 45.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small]

141. Au contraire, s'il est reconnu que le canal du moulin a été fait à main d'homme, les propriétaires riverains ne peuvent y pratiquer aucune rigole pour en attirer les eaux à l'usage de l'irrigation de leurs fonds. En effet, selon ce qui a été dit plus haut," les francs bords d'un canal appartiennent au propriétaire du canal; dès lors, les propriétaires adjacents ne peuvent user du bénéfice de l'art. 644, puisque leurs fonds ne bordent pas l'eau courante. Proudh., n. 1082.

142. Toutes les fois que l'existence d'une usine occasionne des dégradations soit sur d'autres usines précédemment établies, soit sur les fonds voisins de la rivière, les propriétaires qui souffrent ces lésions, de quelque nature qu'elles soient, sont en droit de s'en plaindre à la justice, et leurs actions en dommages-intérêts doivent être admises nonobstant que l'usine ait été établie avec l'autorisation du gouvernement. Proudh., n. 1116.

[blocks in formation]

sines, le fermier devra être condamné aux dommages-intérêts, si c'est lui qui a exhaussé le barrage du moulin; si au contraire le barrage était tel avant son entrée en jouissance, c'est le propriétaire qui devra supporter la condamnation (C. pén. 457). — Proudh., n. 1141.

144. Il suffit que l'existence d'une usine établie sur une rivière navigable ou flottable apporte quelque lésion dans le service public du cours d'eau, pour que le gouvernement puisse en ordonner la destruction, alors même que cette usine eût été construite avec son autorisation. Mais, dans ce cas, le propriétaire a droit à une indemnité (Arrêté 27 prair. an ix). Corm., vo Cours d'eau. p. 29.

145. — D'après l'art. 48 de la loi du 16 sept. 1807, les usines établies sur toutes sortes de cours d'eau non navigables ni flottables. peuvent être supprimées ou modifiées chaque fois que cette mesure est nécessaire pour l'exécution de quelques établissements ou travaux d'utilité générale, ordonnés par le gou

vernement.

146. Il est dû alors une indemnité au propriétaire, à moins que l'usine ne soit pas fondée en titre, ou que le titre constitutif n'ait été consenti par le gouvernement que sous la condition que, le cas arrivant, elles seraient démolies sans indemnité.

147. Outre le cas d'utilité publique, la suppression ou la modification d'une usine peut être demandée à raison des sinistres et des dégâts que ses barrages ou écluses peuvent causer aux propriétés voisines. Proudh., n. 1166.

148. Mais, dans ce cas, il n'est dû aucune indemnité au propriétaire, alors même que l'usine a une existence légale. L'administration publique, en effet, n'ayant pas le pouvoir de disposer des biens des particuliers, les concessions pour établissement d'usines ne sont toujours faites que sous la condition exprimée ou sous-entendue, que nulle personne tierce n'en ressentira de dommage. Or, du moment qu'il arrive que des tiers se trouvent lésés par le fait de l'existence de l'usine, le propriétaire ne peut se plaindre de la destruction de l'usine, puisqu'il s'était soumis d'avance à une pareille condition. Proudh., n. 1169.

Les

149. - Il n'est mention, dans cet article, ni des usines insalubres, ni des moulins à vent. premières sont l'objet d'un traité particulier, vo Manufactures. Quant aux seconds. il suffit de remarquer, 1o qu'ils sont, comme les moulins à eau, compris dans la prohibition d'en établir sur la ligne des douanes pour favoriser la contrebande (L. 21 vent. an XI, art. 1 et 2); 2o qu'à la différence des moulins à eau, il n'est besoin d'aucune autorisation pour les construire; 3° que cependant l'autorité municipale peut, pour la facilité et la sûreté des communications, prescrire une certaine distance des routes afin que la rotation rapide des roues ou la projection de l'ombre des ailes n'effraye pas les chevaux.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small]
« PreviousContinue »