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[Voyez le Traité du Douaire, de POTHIER, chap. 5, 6 et 7.1

L'usufruit est le droit de jouir en totalité de la chose d'autrui à la charge d'en conserver la substance et la forme; 578. ou, si la chose est fongible, d'en rendre pareille quantité, 587. qualité et valeur, ou l'estimation, à la fin de l'usufruit.

[ J'ai changé quelque chose à la rédaction de l'article 578. D'abord il y est dit que l'usufruitier a le droit de jouir comme le propriétaire; ce qui n'est pas tout-à-fait exact, puisque le propriétaire a toujours le droit de changer le mode de jouissance; ce que ne peut pas toujours l'usufruitier. (Art. 592 et 598. ) L'article 34 du Sénatus-Consulte du 8 frimaire an 12, sur l'administration des sénatoreries, défend aux titulaires 'desdites sénatoreries, qui peuvent être regardés comme des usufruitiers, de changer la nature de l'exploitation des biens ruraux qui en dépendent. ( Bulletin, no 3377.)

Secondement, l'article impose seulement à l'usufruitier l'obligation de conserver la substance. Je pense qu'il est également tenu de conserver la forme. ( L. 7, § 3, LL. 8, et 13, § 4 et 7, de Usufructu.) Si cependant l'opposition du propriétaire était évidemment fondée sur des motifs de chicane ou de malveillance, je pense qu'elle pourrait être rejetée; si, par exemple, il s'opposait à ce que l'usufruitier défrichât une lande, ou terminât un bâtiment commencé : Malitiis non est indulgendum. Cependant la loi 61, ff. de ·Usufructu, décide que, dans ce dernier cas, l'opposition

des propriétaires serait fondée. Mais je regarde cela comme une subtilité qui ne serait pas admise dans notre droit; tout au plus, le propriétaire aurait-il le droit de veiller à ce qu'en terminant l'édifice, on ne contrarie pas le plan et les dessins d'après lesquels il a été commencé. ]

L'usufruit est établi par la loi, ou par la volonté de 579. l'homme.

Par la loi En faveur des père et mère dans deux cas : 1o par suite de la puissance paternelle, et sur les biens de leurs enfans vivans, jusqu'à l'époque fixée par loi; et 2o 384. sur une portion des biens de leurs enfans décédés sans postérité, et sans autres ascendans ayant droit de succéder, ni 754. frères ni soeurs, ni descendans de ces derniers.

[On peut regarder aussi comme un usufruit légal le droit en vertu duquel les fruits et revenus des biens personnels des époux mariés sans contrat, appartiennent à la communauté (Art. 1401), ainsi que le droit accordé par l'article 127 aux envoyés en possession des biens d'un absent, de percevoir tout ou partie des fruits desdits biens.]

Par la volonté de l'homme : Par convention, donation entre-vifs ou testamentaire, [ et avec les formalités voulues pour ces sortes d'actes. Observez, au surplus, que l'usufruit étant un démembrement de la propriété, ne peut être concédé que par le propriétaire ayant capacité d'aliéner. S'il a été concédé a non domino, il peut être acquis par la prescription de trente ans, ou, s'il y a bonne foi, par celle de dix ans. Sic jugé en cassation, et avec raison, le 17 juillet 1816. (SIREY, 1817, 1re part., pag. 153.)]

L'usufruit peut être établi, ou purement [auquel cas il commence de suite et finit ainsi qu'il sera dit ci-après], ou 580. à certain jour, ou sous condition, sur toute espèce de biens, 581. meubles ou immeubles, fongibles ou non fongibles.

[Le mode à certain jour peut s'entendre de deux manières. D'abord, ex die, pour ne commencer que tel jour: je donne et lègue l'usufruit de ma terre à Pierre, à comp ter d'un an après ma mort. L'usufruit commence le premier jour de la seconde année, et finit par les manières ordinaires. Ensuite, ad diem, pour finir tel jour : je donne

et lègue, etc., pendant dix ans. L'usufruit commence de suite, et finit à l'expiration de la dixième année. On voit, d'ailleurs, que le même usufruit peut être ex die et ad diem.

.

Mais quid, si l'usufruit a été établi ad diem, et que l'usufruitier vienne à mourir avant l'expiration du délai ? La loi 12, Cod. de Usufructu, décide que, dans ce cas, l'usufruit est éteint par la mort de l'usufruitier, et ce, sur le fondement que le terme est censé ajouté, plutôt pour abréger, que pour prolonger la durée de la jouissance. Cette décision serait probablement admise dans notre droit, relativement à l'usufruit constitué à titre gratuit. Car c'est de cette espèce d'usufruit seulement qu'il s'agit dans la loi 12. Mais s'il était à titre onéreux, je pense que la convention devrait être strictement suivie.

Quid, si un testateur a légué la nue-propriété d'un fonds, sans rien déterminer quant à l'usufruit? L'usufruit appartiendra à ses héritiers, et finira par le décès du dernier mourant. (L. 14. Cod. de Usufructu.)]

[La condition dont il s'agit peut être suspensive ou résolutoire. Suspensive, lorsque l'usufruit ne doit avoir lieu, qu'autant que tel événement arrivera ou n'arrivera pas. Résolutoire, lorsqu'il commence de suite, mais qu'il doit finir dans le cas où tel événement arrivera ou n'arrivera

pas. ] L'usufruitier d'un objet quelconque a le droit d'en jouir en totalité, c'est-à-dire de retirer de la chose tous les fruits qu'elle peut légitimement procurer; mais s'il a le droit de 582. jouir, il ne peut disposer, ni par conséquent abuser, de la chose non-fongible, c'est-à-dire, la détériorer, ni même l'appliquer à un autre usage que celui auquel elle est naturellement destinée.

[On sent, en effet, que ces principes ne peuvent s'appliquer aux choses fongibles, sur lesquelles on ne peut réellement établir d'usufruit proprement dit. C'est plutôt un prêt qu'un usufruit : c'est même un véritable prêt, quand il est constitué entre-vifs.]

C'est de la combinaison de ces deux principes, que naissent toutes les dispositions relatives aux droits et aux obli

gations de l'usufruitier, et qui font l'objet des deux Sections suivantes. Nous verrons dans une troisième, comment s'éteint l'usufruit.

SECTION PREMIÈRE.

Des droits de l'Usufruitier.

Comme l'usufruit consiste dans le droit de jouir de la chose, et par conséquent d'en percevoir les fruits, il convient, avant tout, de faire connaître ce qu'on doit entendre par fruits.

Les fruits sont les produits ordinaires de la chose, soit qu'ils naissent du corps même de cette chose, ou qu'ils soient perçus à son occasion. De là, une première division en fruits naturels et fruits civils.

Les fruits naturels sont ceux qui naissent du corps même de la chose, comme les moissons: ils sont purement naturels, quand ils viennent d'eux-mêmes et sans le secours habituel de l'industrie humaine, comme les bois, le 583. croît des animaux, etc.; sinon, on les nomme industriels.

[Nous avons dit sans le secours habituel de l'industrie humaine, parce que, si l'on ne regardait comme fruits naturels que ceux qui n'ont absolument aucun besoin de l'industrie humaine, on en réduirait infiniment le nombre, puisque les bois mêmes ont toujours besoin de quelque soin, ne fût-ce que pendant leur jeunesse. Mais cependant, comme ces soins ne sont pas habituels, et ne se renouvellent pas à des époques périodiques, comme pour les moissons, on range les bois dans la classe des fruits purement naturels. Au surplus, cette division de fruits, en naturels et industriels, n'est mise ici que pour complément; car il n'en résulte pas de différence dans le droit. ]

Les fruits civils sont ceux qui ne naissent pas du corps même de la chose, mais qui sont perçus à son occasion, tels que le loyer des maisons, le prix des baux à ferme, l'in584. térêt de l'argent.

[Ce prix n'était pas mis anciennement au nombre des fruits civils, parce que, disait-on, il représentait les fruits

du fonds. De ce changement il est résulté une différence dans le droit de l'usufruitier, au commencement et à la fin de l'usufruit, ainsi que nous le verrons tout à l'heure. ]

Ces distinctions établies, nous dirons que les droits de l'usufruitier varient, suivant la nature de la chose soumise à l'usufruit.

Si elle est meuble, il faut distinguer si elle est fongible ou non fongible.

L'usufruitier de meubles non fongibles ne peut s'en servir que pour l'usage auquel ils sont destinés; mais aussi, il n'est tenu de les rendre à la fin de l'usufruit, que dans l'état où ils se trouvent alors, sans être responsable d'autres pertes ou détériorations, que de celles qui seraient survenues par son dol ou par sa faute.

que,

[Quid, si ce sont des choses qui se dégradent peu à peu par l'usage, comme des meubles meublans, et que l'usufruitier n'en représente aucun vestige, prétendant qu'elles ont été entièrement consommées par le service. Je pense dans ce cas, il est tenu d'en rembourser le prix sur le pied de la valeur des objets, au commencement de l'usufruit. (Argument tiré de l'article 950, qui assujettit à cette obligation le donateur qui s'est réservé l'usufruit, et qui est bien certainement le plus favorable de tous les usufruitiers.) On doit présumer, comme nous l'avons déjà dit ci-dessus, qu'il a vendu les objets dès le commencement de son usufruit, et qu'il en a retiré conséquemment la valeur qu'ils avaient alors. C'est à lui, s'il veut empêcher l'effet de cette présomption, à représenter au moins les vestiges qui ont dû lui rester, et à remplir par là l'obligation qui lui est imposée par l'article 603, de représenter les objets à la fin de l'usufruit.

Il est, au surplus, bien entendu que, si l'usufruitier prétend que les objets soumis à l'usufruit, ont péri entièrement par cas fortuit, il doit être admis à le prouver. Et cette preuve faite, si le propriétaire soutient que le cas fortuit a été précédé d'une faute qui y a donné lieu, ce sera à lui à le prouver à son tour. (Argument tiré de l'article 1808.) Si l'usufruit est établi sur un animal qui vienne à périr sans

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