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Mais, me dira-t-on, les membres de ce conseil, destiné à transformer l'Assemblée Nationale en corps législatif muet, ou pour le moins réduit à voter des lois qu'elle n'aura pas imaginées, sont nommés par l'Assemblée Nationale elle-même. Eh! voilà précisément le piége qu'on tend à cette Assemblée; elle se tuera

en nommant ses tuteurs.

Combien ne doit-elle pas se trouver honorée ! elle nomme le Conseil d'État! Mais elle le nomme pour six ans (Art. 69), elle qui n'est nommée que pour trois ans (Art. 29), et le Conseil d'État se renouvelle par moitié dans les deux premiers mois de chaque législature, tandis qu'elle se renouvelle intégralement.

Quel admirable mécanisme ! l'Assemblée Nationale se trouve toujours avoir en face, ou plutôt bien au-dessus d'elle, un Sénat d'autant plus fort qu'il est moins nombreux, et que, tout en paraissant nommé par elle, il ne l'est point en réalité, puisque, nommé par la législature précédente pour la moitié de ses membres, il tire de cette origine une autorité indépendante que lui confirme d'ailleurs sa longue durée relative.

Le Conseil d'État peut dire à l'Assemblée sortie du Peuple : J'existe avant toi, et j'existerai après; je suis d'ailleurs présidé par un homme qui, lui aussi, a plus de durée que toi, puisqu'il est nommé pour quatre ans. Cet homme, c'est le second astre du système ; il est au Président, qui le présente, ou plutôt qui le nomme, ce que la lune est au soleil ; j'espère qu'il me fera jouir par réflexion des rayons bienfaisants de la nouvelle monarchie. Qu'es-tu donc devant moi? Tu votes les lois que je t'élabore, d'accord avec le Gouvernement (Art. 72), et tu ne peux même en faire une sans me consulter (même article).

Mais combien d'autres attributions le Conseil d'État n'a-t-il pas encore ! C'est lui qui fait les règlements d'administration publique, et qui fait seul ceux de ces règlements à l'égard desquels l'Assemblée Nationale lui a donné une délégation spéciale; il exerce à l'égard des administrations publiques les pouvoirs de contrôle et de surveillance qui lui sont déférés par la loi ; et on nous promet encore pour lui bien d'autres attributions (Art. 72).

Tout cela serait bien, s'il ne pesait pas de tout son poids sur l'Assemblée Législative, s'il n'intervenait pas dans la confection des lois. Mais intervenant de la façon la plus oppressive dans la confection des lois, et d'un autre côté faisant seul pour ainsi dire les règlements d'administration publique, sous l'influence du Pouvoir Exécutif, il se trouve être l'instrument de la servitude du Pouvoir Législatif.

Quoi! ne saura-t-on donc jamais que river des fers à l'esprit humain !

APPENDICE.

APPENDICE.

Lorsque M. de La Rochejaquelein nous appela une négation personnifiée, et nous somma d'apporter un principe d'organisation ou de nous taire, et que tous les journaux ennemis du progrès répétèrent à l'envi ses paroles en dénaturant son intention que nous reconnaissons bonne et loyale, nos idées étaient depuis longtemps mùres pour donner réponse à ce défi. En quelques jours notre Contre-Projet fut rédigé, imprimé, et distribué à l'Assemblée.

Nous avions fait notre devoir; l'Assemblée a-t-elle fait le sien? On en jugera par l'extrait de quelques unes de ses séances que va renfermer cet Appendice. Les journaux aussi, ceux qui nous avaient défié de produire une idée organique, ceux qui poursuivent les écoles socialistes de toutes sortes de calomnies et d'injures, ont-ils fait ce qu'ils devaient faire, examiner sérieusement ce que nous leur soumettions? Les citations que nous allons donner de leurs jugements mettront le public à même d'en décider.

Il est aussi intéressant qu'utile de voir comment une vérité est accueillie à son entrée dans le monde.

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