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force de lois, les lois proprement dites devinrent plus rares et furent réservées à certains objets. Ainsi les comices par centuries nommaient les magistrats et statuaient sur certaines accusations.

Sous les empereurs, l'intervention des comices n'eut guère lieu que pour la forme et afin de ratifier les volontés de l'empereur et du sénat (Tacite, Annales, 1, 15). — Les lois Julia, de maritandis ordinibus, en 736; — Papia Poppœa, en 762; Julia, de adulteriis, en 737;—Elia Sentia, en 757; Julia, de vicesima, en 759, peuvent être citées.

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Les plébiscites étaient les résolutions décrétées par les plébéiens seuls, dans les comices assemblés par tribus. Servius Tullius avait organisé la plebs en trente tribus (Denys d'Halicarnasse, liv. IV, § 19). Ce nombre fut plus tard porté à 35 (Tite-Live, liv. vi, § 5).

Le plébiscite était voté sur la proposition de l'un des tribuns du peuple (Justin., Instit., tit. II, § 4). Chaque tribu avait une voix les suffrages se comptaient par tête (Denys d'Halicarnasse, VII, 64).

Les tribuns, d'abord au nombre de deux, furent portés à cinq en 283, puis à dix en 297. Ils étaient nommés par les curies et choisis parmi les plébéiens.

L'inscription sur les tables de la tribu, d'abord faite par les consuls, fut confiée aux censeurs en 311 (Varron, de lingua latina, liv. v, § 81). C'étaient des magistrats élus dans les comices par centuries; ils devaient être pris parmi les sénateurs il y en avait deux.

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Les tribus ne comprenaient pas toutes le même nombre de citoyens, et comme chacune n'avait qu'une voix, il fut facile d'assurer la prépondérance à une classe sur l'autre. Ainsi, les quatre tribus urbaines se composaient de tous ceux qui n'avaient aucune propriété rurale, c'est-à-dire du plus grand nombre, et n'avaient que quatre voix à opposer à trente et une (Tite-Live, liv. XIX, § 46).

Les patriciens refusèrent d'abord d'obéir aux plébiscites, comme rendus sans leur participation. Ce n'est qu'en l'an 468 de Rome que la légitimité et la force obligatoire des plébiscites fut reconnue par eux. C'est la loi Hortensia qui régla cet état de choses.

§ 4. Senatusconsultum est quod senatus jubet atque constituit: idque legis vicem obtinet, quamvis fuit quæsitum.

§ 4. Un sénatus-consulte est ce que le sénat ordonne et établit; les sénatus-consultes obtiennent force de loi, quoique cela ait fait question.

On appelait sénatus-consultes les décisions prises par le sénat sans la participation de la plebs. Le sénat, institué par Romulus, fut d'abord composé de cent membres. TullusHostilius en porta le nombre à 200, Tarquin l'Ancien à 300. Sous la république, les membres de ce corps arrivèrent successivement au chiffre de 600, et à celui de 1,000 sous César. Mais Auguste revint au chiffre normal de 600. Dans le principe, les sénateurs étaient choisis par les curies et par les tribus. Ils le furent ensuite par les consuls. Le tribunat, l'édilité curule et les autres grandes charges donnaient droit de siéger au sénat. Après l'établissement de la censure, l'inscription des sénateurs fut attribuée aux censeurs, qui avaient le droit de rayer les membres indignes. Sous la monarchie, le sénat partageait le pouvoir avec les rois. Au commencement de la république, son autorité était sans bornes. Il délibérait sur la paix et la guerre, faisait les lois, réglait les impôts, distribuait les provinces et rendait la justice. Mais le peuple et les tribuns ne tardèrent pas à diminuer son autorité. Il conserva néanmoins la direction politique et administrative des affaires publiques.

Mais on s'est demandé si le sénat avait conservé, sous la république, le droit de faire des règlements obligatoires pour les intérêts privés, de même que la plebs avait celui de faire des plébiscites. Heineccius, Histor. juris, et Antiquit. rom., p. 66 et suiv., a soutenu la négative. D'après cet auteur, ce n'est que sous Tibère que le sénat fit des règlements relatifs aux intérêts privés. Cette opinion nous paraît difficile à admettre, en présence de la corrélation que Gaïus et Théophile établissent entre la résistance du sénat à l'égard des plébiscites et celle de la plebs à l'égard des sénatusconsultes. Il n'est pas douteux que les décisions du sénat ont toujours été considérées comme obligatoires quant à la direction politique et administrative de la république. Ce n'est donc que relativement aux sénatus-consultes portant règle

ment d'intérêts privés que l'opposition de la plebs pouvait se produire. Au surplus, Cicéron, Topica, V, dit textuellement que les sénatus-consultes étaient une source du droit privé, en ces termes : « Jus civile id esse quod in legibus, SENATUSCONSULTIS... æquitate consistat. » Pomponius dit aussi (L. 2, § 9, ff. de origine juris) que la population ayant considérablement augmenté à Rome, il devint difficile d'assembler la plebs; qu'en conséquence le sénat s'interposa, et qu'on se soumit à tout ce qu'il ordonnait : « Quidquid constituisset observabatur. »

On doit reconnaître, au surplus, qu'on a peu d'exemples de sénatus-consultes rendus sur le droit privé pendant la période républicaine.

§ 5. Constitutio principis est quod imperator decreto, vel edicto, vel epistola constituit; nec unquam dubitatum est, quin id legis vicem obtineat, quum ipse imperator per legem imperium accipiat.

du

§ 5. La constitution prince est ce que l'empereur établit par un décret, par un édit, ou par lettre (rescrit). On n'a jamais douté que la volonté du prince n'obtint force de loi, puisque l'empereur reçoit lui-même l'empire (imperium) par une loi.

Les décrets, les édits et les lettres des empereurs furent, sous l'empire, une autre source du droit. Les décrets étaient, les décisions rendues par le prince sur les difficultés qui lui étaient soumises (Instit. de Justinien, liv. I, tit. II, § 6, et liv. II, tit. xv, § 4). Les édits étaient les lois générales promulguées spontanément par l'empereur et pour l'avenir (Instit. de Justinien, liv. 1, tit. 11, §6). Les lettres étaient les consultations données par l'empereur sur les questions de droit privé qui lui étaient adressées soit par de simples particuliers, soit par les consuls, les préteurs ou les administrateurs des provinces, à l'exemple des consultations que donnaient les jurisconsultes. Elles avaient force obligatoire (Instit. de Justinien, liv. I, tit. VIII, § 2; liv. II, tit. XI, § 1; Nov. 74, ch. 1 et 2; L. 6, ff. de pecul. leg., et L. 17, ff. de jure patron.) même pour l'avenir, ainsi que l'enseigne M. Demangeat, Cours élémentaire de droit romain, t. 1, p. 101.

Faut-il entendre les mots de notre texte : imperator per

legem accipiat imperium, en ce sens que le pouvoir législatif soit passé tout entier dans les mains de l'empereur? C'est ce que semble dire Justinien au § 6 de ses Institutes, titre de jure natur. gent. et civil. : « Quod principi placuit legis habet vigorem, cum lege Regia, quæ de ejus imperio lata est, populus ei et in eum omne imperium suum et potestatem concessit. » Mais on a vu que, sous l'empire, la loi, le plébiscite et le sénatus-consulte étaient encore des sources du droit. Il faut donc expliquer notre paragraphe en disant que l'empereur, ayant reçu l'imperium comme autrefois les magistrats ayant le jus edicendi, pouvait poser des règles obligatoires, comme les dispositions d'une véritable loi.

§ 6. Jus autem edicendi habent magistratus populi Romani; sed amplissimum jus est in edictis duorum prætorum, urbani et peregrini: quorum in provinciis jurisdictionem præsides earum habent; item in edictis ædilium curulium, quorum jurisdictionem in provinciis populi Romani quæstores habent, nam in provincias Cæsaris omnino quæstores non mittuntur, et ob id hoc edictum in his provinciis non proponitur.

§ 6. Les magistrats du peuple romain ont le droit de faire des édits; mais ce droit réside surtout dans les édits des deux préteurs, le préteur urbain et le préteur étranger (dont la juridiction appartient, dans les provinces, aux présidents); et dans les édits des édiles curules, dont la juridiction est exercée, dans les provinces du peuple romain, par des questeurs; car, dans les provinces de César, on n'envoie point de questeurs: c'est pour cela que l'édit n'est point proposé dans ces pro

vinces.

Le droit honoraire, qui tirait son origine des édits des magistrats, fut une source abondante du droit privé. Les préteurs, urbain ou pérégrin, à Rome, les édiles curules, les présidents des provinces, établissaient, par forme de règlement général, les principes d'après lesquels la justice serait rendue dans le ressort de leur juridiction pendant la durée de leur magistrature. L'objet de ces édits était quelquefois d'assurer l'exécution de l'ancien droit, mais le plus souvent de corriger la rigueur du droit primitif. Ils suivaient les progrès de la civilisation et s'adaptaient aux besoins nouveaux.

Au surplus, les magistrats ne dérogeaient pas ouvertement à la loi; ils en tempéraient l'exécution au moyen de fictions habiles, à l'aide desquelles ils substituaient l'équité à la sévérité de l'ancien droit.

Le droit honoraire se forma peu à peu. Dans l'origine, les magistrats se bornèrent à poser, à leur entrée en charge, quelques maximes comme devant servir de base à leur conduite. Plus tard, ils en vinrent à établir un droit distinct. Jusqu'à l'année 687 de Rome, le magistrat qui avait rendu un édit pouvait y déroger par un autre qu'on appelait repentinum; mais la loi Cornelia voulut que les édits fussent perpétuels, c'est-à-dire qu'ils ne pussent être changés pendant toute la durée de la magistrature de leur auteur. Il arriva même que les successeurs se bornèrent souvent à reproduire l'édit de leurs prédécesseurs, avec ou sans changements.

Le préteur Salvius Julianus, qui vivait au temps d'Adrien, résuma en un seul édit tous les édits précédents. L'édit de Julien fut approuvé par le sénat, et l'on ne connaît aucune modification au droit prétorien qui soit postérieure à cette époque.

§ 7. Responsa prudentium. sunt sententiæ et opiniones eorum quibus permissum est jura condere; quorum omnium si in unum sententiæ concurrant, id quod ita sentiunt legis vicem obtinet; si vero dissentiunt, judici licet, quam velit, sententiam sequi: idque rescripto divi Hadriani significatur.

§ 7. Les réponses des prudents sont les sentences et opinions de ceux auxquels il est permis de fonder le droit. Si tous leurs avis concourent et n'en font qu'un, cette décision unanime obtient force de loi; mais, si les avis diffèrent, il est permis au juge de faire un choix entre tous : cela ressort d'un rescrit du divin Adrien.

Dès que Rome eut des lois, les jurisconsultes les interprétèrent, et leur doctrine, adoptée et confirmée par l'usage, eut, sous la république, une autorité d'opinion que le magistrat consultait sans doute, mais qu'il n'était pas tenu de suivre. Auguste voulut qu'un nombre limité de prudents pût seul prononcer d'une manière officielle. Adrien alla plus loin il ordonna que le juge fût tenu de suivre l'avis des jurisconsultes, s'il était unanime. Il est à croire que ce pouvoir

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