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ou vingt ans sans être inquiété, et contre lequel l'ancien maître intentait sa réclamation après ce délai. Cette præscriptio produisait le même effet que les exceptions, en ce sens qu'elle entraînait l'absolution du défendeur, quand elle était justifiée, et l'anéantissement du droit du demandeur. Les autres prescriptions invoquées par le défendeur ne produisaient pas ces conséquences; elles retardaient seulement le litige, soit qu'il y eût lieu au renvoi devant un autre magistrat, soit que le juge saisi dût surseoir à cause d'un præjudicium opposé (L. 76, ff. de contrah. empt., et les titres de except., au Digeste et au Code).

§ 134. Intentione formulæ determinatur is cui dare oportet, et sane domino dare oportet quod servus stipulatur; at in præscriptione de pacto quæritur quod secundum naturalem significationem verum esse debet.

§ 134. L'intention de la formule détermine celui auquel il faut donner; on doit donner au maître ce que son esclave a stipulé; mais dans la prescription de pacte on recherche ce qui paraît être naturellement la vérité.

Pour donner un sens à la seconde partie du § 134, il faut supposer qu'un esclave avait stipulé une somme au profit de son maître qui, plus tard, avait fait lui-même un pacte par lequel il accordait plusieurs termes pour le payement de cette somme. Quand ce maître voulait agir ex stipulatu, il devait mettre une prescription en tête de sa formule, afin de réduire sa demande aux prescriptions échues : cette prescription s'appelait prescription de pacte (V., p. 412, Traité des actions, de M. Bonjean, l'opinion de cet auteur sur le sens du § 134).

§ 135. Quæcumque autem diximus de servis, eadem de cæteris quoque personis, quæ nostrojuri subjectæ sunt, dicta intelligimus.

§ 136. Item admonendi sumus, si cum ipso agamus, qui incertum promiserit, ita nobis formulam esse propositam, ut præscriptio incerta

§ 135. Ce que nous avons dit à propos des esclaves s'applique à toute autre personne soumise à notre puis

sance.

§ 136. Nous devons avertir que, si nous agissons contre celui qui a promis une chose incertaine, nous devons proposer la formule de manière

sit formulæ loco demonstra- à remplacer la démonstra-
tionis, hoc modo: JUDEX ESTO,
QUOD AULUS AGERIUS DE NU-
MERIO NEGIDIO INCERTUM STI-
PULATUS EST, CUJUS REI DIES
FUIT, QUIDQUID OB EAM REM
NUMERIUM NEGIDIUM AULO
AGERIO DARE, FACERE OPOR-
TET, et reliqua.

tion par la prescription suivante: SOYEZ JUGE DE CE QU'AULUS AGÉRIUS A STIPULÉ DE NUMÉRIUS NÉGIDIUS UNE CHOSE INCERTAINE, OBLIGATION QUI EST ÉCHUE; DE CE QUE, POUR CE MOTIF, NUMÉRIUS NEGIDIUS DOIT FAIRE OU DONNER POUR AULUS AGERIUS, et la suite.

Quand l'obligation était indéterminée, la démonstration, que le magistrat rédigeait habituellement, ne pouvait pas suffire, car il était de la nature de toutes les parties de la formule d'être très-concises et de ne comprendre que les prestations certaines, sauf la condamnation qui, dans certains cas, laissait au juge la faculté de l'arbitrer. Or, quand une obligation était indéterminée, elle était toujours subordonnée à des circonstances qui l'augmentaient ou la diminuaient, circonstances qu'il était nécessaire de rappeler et d'exposer devant le magistrat chargé d'en faire le résumé, la description, ce qui nécessitait une prescription qu'il mettait en tête de la formule. Les actions præscriptis verbis n'étaient rien autre chose que des actions où la démonstration était, comme dans le cas où le demandeur réclamait une chose incertaine, remplacée par une prescription; et, comme les contrats du droit civil étaient très-restreints, il arrivait que fréquemment on avait recours à ces actions præscriptis verbis naissant des contrats innomés, tels que l'échange et le contrat estimatif. Ne confondez pas ces contrats innomés avec les simples pactes, dont ils différaient en ce qu'ils avaient été consacrés par le droit civil lui-même, et n'avaient été privés d'un nom particulier que parce que l'ancien droit civil n'avait prévu qu'un nombre déterminé de contrats dans lesquels ils ne rentraient pas. Quand l'une des parties avait accompli le fait porté dans la convention, elle pouvait contraindre l'autre à exécuter son obligation; on lui donnait, à cet effet, une formule ayant une prescription, suivie d'une intention conçue in jus, mais indéterminée: QUIDQUID OB EAM REM DARE, FACERE OPORTET. Si

la partie qui avait exécuté voulait revenir sur la convention, elle pouvait réclamer l'objet fourni par elle, et avait à cet effet la condiction condictio causâ datâ, causâ non secutâ. Les pactes prétoriens donnaient naissance à une action prétorienne par le seul effet du consentement, c'est-à-dire que l'une des parties pouvait actionner l'autre avant d'avoir elle-même exécuté son obligation. Ce n'était pas par l'accomplissement d'une exécution, d'une dation, que l'action prenait naissance, mais par le seul effet du consentement, comme dans les contrats consensuels du droit civil. Ces pactes prétoriens différaient eux-mêmes des pactes nus, qui ne donnaient pas naissance à une action, mais produisaient des obligations. naturelles, qu'on pouvait seulement faire valoir par exception.

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§ 137. Quand on agit contre un sponsor ou contre un fidéjusseur, la prescription a trait à la personne du sponsor de la sorte: IL S'AGIT DE CE QU'AULUS AGÉRIUS A STIPULE UNE CHOSE INCERTAINE DE LUCIUS TITIUS, QUI A POUR SPONSOR NUMÉRIUS NÉGIDIUS, STIPULA

TION DONT LE TERME EST ÉCHU. La prescription relative à la personne du fidéjusseur se fait ainsi

IL S'AGIT DE CE QUE NUMERIUS NEGIDIUS A GARANTI D'INCERTAIN, PAR FIDEJUSSION, POUR LUCIUS TITIUS, STIPULATION DONT LE TERME EST ÉCHU; la formule est ensuite rédigée.

§ 138. Il nous reste à parler des interdits.

$139. Dans certains cas, le préteur ou le proconsul interposent leur autorité, dès le début, pour faire cesser des controverses, intervention qui a lieu le plus souvent lorsqu'il y a entre personnes une contestation relative à la possession

aut jubet aliquid fieri, aut fieri prohibet: formulæ autem verborum et conceptiones quibus in ea re utitur, interdicta decretave vocantur.

ou à la quasi-possession. Par son interdit, le préteur ordonne de faire certaine chose, ou défend de faire telle autre chose; les formules et les phrases qu'on emploie à cet effet prennent le nom d'interdits ou de décrets.

Le but des interdits était soit de protéger directement, dès le début, et dans un intérêt d'ordre public, les citoyens contre la violence ou la violation des lieux sacrés, soit de garantir leurs intérêts privés dans les causes urgentes, et de prévenir ou réparer des rixes ou des voies de fait, notamment quant à la possession (L. 1, ff. de interd.). Dans une thèse remarquée en 1860, à la faculté de Paris, M. Barkausen enseigne que les interdits furent imaginés à l'effet d'éviter une condamnation pécuniaire et d'assurer l'exécution en nature. Si l'on remarque qu'au temps des legis actionibus cette exécution était admise, on ne saurait accepter une telle manière de voir, les interdits n'étant pas antérieurs à cette procédure. Il nous paraît plus probable que l'introduction des interdits vient de la nécessité de suppléer aux lacunes du droit civil. Ils furent le moyen employé par le préteur à une époque où les actions formulaires n'étant pas en usage, ce magistrat n'avait pas imaginé l'action in factum. On en continua l'usage après l'introduction de ce système, quoiqu'ils fussent d'une utilité moindre qu'auparavant (M. Machelard, Revue critique de législ., t. XXIV, p. 417 et suiv.).

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§ 140. Vocantur autem decreta, quum fieri aliquid jubet, velut quum præcipit ut aliquid exhibeatur, aut restituatur; interdicta vero, quum prohibet fieri, velut quum præcipit ne sine vitio possidenti vis fiat, neve in loco sacro aliquid fiat: unde omnia interdicta aut restitutoria, aut exhibitoria, aut prohibitoria vocantur.

140. Par les décrets le préteur ordonne de faire par exemple, il enjoint d'exhiber ou de restituer telle chose; par les interdits il défend de faire par exemple, il défend de faire violence à celui qui possède sans vice, ou de rien faire dans un lieu sacré. De là la division des interdits en restitutoires, exhibitoires et prohibitoires.

Le préteur rendait des édits particuliers par lesquels il défendait de faire telle ou telle chose, par exemple de rien faire dans un lieu sacré, ou d'employer la violence à l'égard de celui dont la possession n'était pas vicieuse. Ces édits s'appelaient spécialement interdits, de interdicere, défendre. Les édits rendus en matière d'ordre public, et ceux qui étaient relatifs aux intérêts privés, quand le magistrat prohibait la violence, prenaient toujours le nom d'interdits; ainsi l'on disait l'interdit uti possidetis, l'interdit utrubi. Mais le magistrat ordonnait aussi souvent d'exhiber ou de restituer une chose déterminée, et, dans ces cas, son édit prenait le nom de décret.

A peine est-il besoin de dire que le magistrat n'accordait pas toujours un interdit alors qu'on le lui demandait. Dans certaines hypothèses, il le refusait péremptoirement, par exemple quand le défendeur reconnaissait les faits allégués par son adversaire (L. 6, § 2, ff. de confes.). — Dans d'autres, il ne l'accordait qu'après examen de certaines circonstances, par exemple celle de savoir si le demandeur qui n'était pas en situation actuelle de l'obtenir pouvait réclamer une restitutio in integrum, à l'aide de laquelle il se plaçait dans une telle condition (L. 1, § 9, ff. de itin. act.); ou encore lorsque le défendeur invoquait un pacte qui, justifié, aurait rendu l'interdit invoqué non recevable (L. 1, § 6, ff. ne quid in flum. publ.). Ce n'était qu'autant que le demandeur se trouvait dans les prévisions de l'interdit, qu'il offrait la preuve des faits qui le mettaient dans cette situation, et que l'adversaire les déniait. que le magistrat rendait son interdit immédiatement.

Quand les faits allégués n'avaient pas été directement prévus par l'édit, mais présentaient de l'analogie avec ceux qu'il avait indiqués, le magistrat pouvait rendre un interdit utile (L. 15, ff. ad exhib.; — L, 9, § 1, ff. de damno infect.), après examen des faits avancés.

Dans les diverses hypothèses que nous venons de prévoir, l'examen (causæ cognitio) était fait tantôt par le magistrat lui-même, qui remettait les parties à revenir vers lui à un jour qu'il indiquait (infrà, § 184), tantôt par le juge, qui ne devait s'occuper de l'instance organisée pour l'exécution de l'interdit qu'après avoir vérifié les circonstances qui rendaient l'ordre ou

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