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trimoine, améliorer sa position et celle de ses enfants; ce qui n'est certainement contraire ni à la loi naturelle, ni à l'évangile et peut en définitive procurer un grand avantage à la société. (Voyez saint Liguori, Gury, Gousset, Scavini et les autres.)

Maintenant, cher lecteur, si vous avez eu la patience de me suivre jusqu'ici, je vous ferai remarquer que déjà ces règles se rapprochent beaucoup des conclusions de M. Ch. Legay: Le riche doit aux pauvres, aux bonnes œuvres, à l'utilité générale, la plus grande partie de son superflu.

Comment se fait-il que nous combattions depuis si long. temps, pour arriver dans la pratique à penser exactement la même chose?

C'est que si la conclusion de l'auteur est vraie, ses prémisses n'étaient pas exactes. C'est qu'il nous a présenté les devoirs de la charité, comme s'ils étaieut des devoirs de justice, et c'est là ce qui nous a révoltés tout d'abord par les conséquences subversives qu'on pouvait tirer de sa thèse.

Le principal, je dirais volontiers l'unique tort de M. Ch. Legay, est d'avoir cherché à justifier cette confusion des devoirs.

En effet, il faut bien distinguer les devoirs de justice des devoirs de charité. Ils diffèrent grandement dans leurs principes et dans leurs conséquences. Les devoirs de justice imposent le respect des droits d'autrui, et ce sont ces droits extérieurs qui sont à la fois la cause, la limite et la fin des devoirs de justice. Les devoirs de charité, au contraire, sont basés sur l'obligation toute personnelle de faire jouir nos frères de notre superflu; mais ils ne constituent pour eux aucun droit sur nos biens.

Voilà le nœud de la question. Voilà la vraie distinction qui permettra de saisir le côté défectueux et faux de ce que bien à tort on voudrait appeler aujourd'hui le socialisme chrétien.

Le socialisme repose sur l'affirmation des droits de tous les hommes sur tous les biens, mème déjà possédés. Il n'est pas chrétien et ne le sera jamais, car il est la contradiction

du précepte de la nouvelle loi comme de l'ancienne : tu ne voleras pas.

Réduit aux proportions que lui donne M. Legay: « Un certain droit du pauvre sur les biens superflus du riche, » il ne serait pas plus acceptable; car ce serait entamer au moins par un coin, le droit de propriété; ce serait ouvrir une porte aux socialistes, et il serait bien difficile de leur opposer ensuite une barrière solide. Ce serait l'ouvrir toute grande aux voleurs qui dans leur métier ne manqueraier.t pas de se prévaloir de ce prétendu droit.

M. Legay rejetterait sans doute bien loin cette conséquence; mais nous ne voyons pas comment il pourrait l'éviter, à moins qu'il ne réduise, comme nous, le droit d'un pauvre au simple cas d'extrême nécessité.

(A suivre.)

CH. HELOT.

LE SUFFRAGE UNIVERSEL

LA MONARCHIE ET LE DROIT

(SUITE ET FIN)

-

ART. 3. La charte garantit en outre à tous les citoyens la liberté de faire juger leurs différends par des juges de leur choix à cet effet, la justice sera concuremment rendue:

Soit par des arbitres,

-Soit par des juges nommés par le roi sur présentation des chefs de Cour;

Soit par des juges agréés du Roi sur la dési-. gnation électorale de notables commerçants délégués à cet effet;

Soit par des juges temporaires élus souverai

nement par les électeurs politiques dans chaque département.

Les juges électifs siégeront en des lieux distincts de ceux des autres juges.

Ils statueront souverainement sans recours comme des jurés, mais seulement à l'égard des demandeurs succombant dans leurs demandes.

Toute liberté est laissée, devant eux, aux parties de présenter leurs défenses par qui bon leur semblera, avec ou sans assistance d'avocats et d'avoués, et même de s'affranchir des formalités des lois de procédure.

EXPLICATIONS

§ 4. La Monarchie ne doit pas reculer devant les réformes; elle doit même s'emparer des utopies pour en montrer l'inanité. C'est ce que fait l'article 3. Il résout sans péril le problème de la magistrature élective si chère aux radicaux la prendra pour juge qui voudra.

:

Dans la théorie radicale, la justice et les juges émanant du peuple souverain participent de sa nature et sont, par suite, souverains. Il s'ensuit que leurs décisions doivent être souveraines; souveraines, c'est-à-dire sans motifs et sans appels, comme les verdicts du jury; mais elles ne doivent être telles qu'à l'égard seulement de ceux qui, ayant confiance en leur juridiction, l'auront choisie de préférence à toute autre, c'est-à-dire à l'égard des demandeurs, car il serait inique de soumettre à l'omnipotence des juges élus, ceux qui n'iraient devant eux que contraints par la citation du demandeur. En conséquence à l'égard des défendeurs condamnés, les décisions devront être motivées et soumises à l'appel: elles ne le seront pas contre les demandeurs perdants.

Dans la doctrine et le système de l'élection des juges par le peuple, l'appel ne se comprendrait pas: comment et pourquoi les suffrages conféreraient-ils aux juges du second degré plus de mérite et de capacité qu'aux juges élus du 1er degré?

On peut, ici, objecter que les juges consulaires sont élus et que leurs jugements sont néanmoins motivés et soumis à l'appel. La raison en est que ces juges sont recrutés par des notables ou des commerçants patentés et que leur élection est fondée, non sur la souveraineté du peuple, mais sur la souveraineté du chef de l'Etat qui est censé déléguer, à cet effet, son droit de choisir ses juges à des élec teurs spéciaux chargés alors de les désigner en son lieu et place.

L'origine souveraine des juges électifs commande enfin de les affranchir du Code de procédure et du ministère des avocats et des avoués. Liberté et toute liberté devant eux, on ne saurait, je crois, aller plus loin dans la voie de cette réforme.

Ce sera absolument sans danger. On peut être, en effet, certain que les justiciables, qui n'aiment pas déjà fort les arbitres, continueront à donner leur préférence aux juges de la loi et du roi. Leur dédain des juges élus en sera pour toujours la condamnation: on ne parlera plus de cette plateforme électorale que dans les cabinets d'agents d'affaires véreux qui l'ont inventée pour l'exploiter. C'est en marchant sur les fantômes radicaux qu'on les fait évanouir.

ART. 4. La charte garantit la plus entière liberté d'enseignement. Il y aura, à cet effet, dans chaque commune établies à leurs frais :

- Une ou plusieurs écoles congréganistes gratuites;

Et en nombre égal des écoles laïques gratuites. Liberté d'ouvrir des écoles privées en se conformant aux lois.

Liberté aux pères de famille d'envoyer leurs enfants aux écoles de leur choix ou de les faire élever et instruire chez eux.

EXPLICATION

Dans son manifeste du 14 septembre 1887, M. le comte de Paris a solennellement promis la liberté d'enseigne

ment. «En restituant, dit-il, aux communes dans le domaine « des choses scolaires l'indépendance qu'une législation << tyrannique leur a ravie, la Monarchie rendra à la France << la liberté de l'éducation chrétienne. Elle assurera aux << associations religieuses, comme aux autres, la liberté qui << deviendra sous certaines conditions d'ordre public le << droit commun de tous les Français, au lieu d'ètre, comme « aujourd'hui le privilège d'un parti. Ainsi sera rétablie la << paix religieuse qu'une politique intolérante a si profondé<<ment troublée. »

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ART. 5. La proportionalité reste la règle des impôts. Toutefois, à titre d'essai, l'impôt progressif sur le revenu pourra être établi sur un ou plusieurs départements aux conditions suivantes, savoir:

1o Que la majorité des conseils élus de ces départements et de leurs députés en feront la demande signée en assurant que cet impôt rendrait autant que les autres ;

2o Que les signataires s'engageront à payer le déficit s'il rendait moins et les frais de l'essai, s'il ne réussissait pas ;

3o Que le maximum de la progression ne dépassera pas 70 p. %;

4° Que cet impôt ne frappera pas le nécessaire à la vie, à l'entretien, à l'éducation de la famille des imposés. Cette part non imposable ne dépassera pas 3,600 francs par chaque membre de la famille ;

5o Enfin que cet impôt les remplacera tous, même les droits de mutation et d'enregistrement qui seront réduits à 0 fr. 25 pour tous actes, comme droits de statistique.

EXPLICATION

Il faut aussi marcher sur les utopies économiques pour en avoir raison. Le § 2 fera réfléchir. On y regardera à deux fois avant de demander l'essai du plus absurde des impôts

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