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SOMMAIRE DU NUMÉRO DE JUILLET 1904

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Le Mariage chez tous les peuples, par M. Henri d'Alméras. Compte rendu

par M. LR...

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JOURNAL

DES

ÉCONOMISTES

L'AGRICULTURE ET LA LIBERTÉ

I

De toutes les industries, l'industrie agricole est celle dont le progrès ont été les plus tardifs et les plus lents dans la voie de la liberté. Comme nourricière du genre humain, elle a été pen dant longtemps (ne l'est-elle pas encore ?), la victime tour à tour de la réglementation arbitraire des gouvernements et des préjugés de la population. L'histoire du commerce des blés et de la culture des céréales nous montre, dès les temps les plus reculés, les gouvernements occupés à varier les formes de leurs prohibitions et leurs règlements vexatoires.

Au moyen âge, cette réglementation couvrait le pays d'un réseau de barrières et de défenses, destinées à assurer la subsistance du peuple et à empêcher qu'aucune quantité en fût distraite. Chaque province était entourée d'une ceinture de douanes, que les grains ne pouvaient franchir, ni pour entrer, ni pour sortir, à moins d'une permission spéciale. Dans l'intérieur de ce cercle, les agriculteurs ne pouvaient porter leurs grains que sur certains marchés, qui étaient désignés par l'autorité, et des pénalités menaçaient ceux qui s'avisaient de les porter ailleurs ou d'atten

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dre chez eux les acheteurs. Ils étaient obligés de conduire eux mêmes les grains aux marchés, et, dès qu'ils les avaient mis en vente, ils ne pouvaient plus les remporter.

Dans les années de disette, on établissait un maximum sur le prix des grains, au-dessus duquel il n'était pas permis de vendre. Si les agriculteurs refusaient de livrer au taux du maximum, on envahissait leurs fermes, on recensait leur récolte et on les obligeait à la tenir à la disposition des autorités.

Quand, mécontentés et ruinés par tant d'entraves, ils laissaient en friche une partie de leurs champs, on leur prescrivait l'étendue qu'ils en devaient cultiver, on réglementait les assolements; parfois même, quand les semailles n'avaient pas réussi, on les contraignait d'ensemencer une seconde fois.

Les marchands n'étaient pas moins asservis que les cultivateurs. Ils ne pouvaient opérer leurs achats que dans une circonscription déterminée, ni se présenter sur les marchés avant ou après certaines heures.

La boulangerie avait aussi son règlement le pain était taxé en tout temps. Quand l'autorité redoutait un déficit, elle défendait la vente du pain tendre et de qualité supérieure. Rien n'échappait à son œil vigilant.

De tels règlements tracassiers entretenaient de continuels soup çons dans l'esprit du peuple, qui se croyait tous les jours à la veille de manquer de pain. Il accusait les commerçants de chercher à l'affamer pour s'enrichir, et les flétrissait du nom d'accapareurs. Dès que l'un d'eux faisait mine d'augmenter ses approvisionnements, malgré les défenses de l'autorité, il arrêtait ses charrettes et ses bateaux, pillait les grains ou les jetait à la rivière.

Le résultat de ce système devait être naturellement la disette et la famine. En Angleterre, en 306 ans, de 1049 à 1355, on en compte 121; en France, à la même époque, il y avait famine une année sur deux.

Après la disparition des règlements gothiques, les gouvernements n'en restèrent pas moins pénétrés de l'idée qu'ils pouvaient, par des mesures arbitraires, faire régner l'abondance. Ils continuèrent à réglementer la production, le commerce et la consommation des céréales, sans se douter qu'ils provoquaient eux-mêmes, par leurs prohibitions et leurs entraves, les disettes qu'ils voulaient prévenir et que les émeutes du peuple aggra vaient à leur tour.

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