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La chambre

menace

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gers veulent nous faire passer. La justice de << notre cause, l'esprit public de la nation, et le <«< courage de l'armée, sont de puissants motifs « pour espérer des succès. Mais si nous éprou<< vions des revers, c'est alors surtout que j'aime«< rais à voir déployer toute l'énergie de ce grand peuple. C'est alors que je retrouverais dans la <«< chambre des pairs, des preuves d'attachement << à la patrie et à son chef. C'est dans les temps « difficiles que les grandes nations, comme les grands hommes, déploient toute l'énergie de «< leur caractère, et deviennent un objet d'admi<«< ration pour la postérité. ›

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Cette postérité conviendra, en lisant ces paroles, que l'Empereur n'avait rien négligé de ce qui pouvait élever la France au niveau des dangers qui la menaçaient, et qu'il avait tout prévu. Sa réponse à la chambre des députés le prouve

encore mieux.

Cette chambre, appuyant sur la promesse de des députés coordonner les lois constitutionnelles, ne dissimude contro lait pas son impatience de s'élancer sans retard verses dogmatiques. dans cette glissante arène. « Fidèle à sa mission << elle saura remplir (disait-elle) la tâche qui lui « est dévolue dans ce noble travail : elle demande <«< que, pour satisfaire à la volonté publique, la « délibération nationale rectifie le plus tôt possi<«<ble ce que l'urgence de notre situation a pu

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produire de défectueux ou laisser d'imparfait << dans l'ensemble de nos institutions. Et tandis « que V. M. opposera à la plus injuste agression « l'honneur des armes nationales et la force de son « génie, la chambre des représentants croira mar« cher vers le méme but, en travaillant sans relá «< che au pacte dont le perfectionnement doit ci«menter encore l'union du peuple et du trône, et fortifier aux yeux de l'Europe la garantie de nos « engagements par l'amélioration de nos institu

<< tions. »

C'était annoncer assez clairement le projet de profiter de l'absence de l'Empereur pour établir publiquement des controverses constitutionnelles, sans attendre l'initiative du gouvernement, qui formait néanmoins la base fondamentale de la législation existante. C'était se reporter à l'assemblée constituante de 1789, dans des circonstances encore plus dangereuses; c'était, en un mot, un acte révolutionnaire, puisque d'un seul trait il changeait la face du gouvernement.

Ces discours attestent, d'un côté, que l'acte additionnel n'était point à considérer comme le dernier mot de Napoléon; mais ils prouvaient aussi qu'il aurait sans doute plus d'un assaut à soutenir contre ces hommes qui, s'obstinant à ne voir dans le gouvernement que l'ennemi public, rêvent sans cesse aux moyens d'enchaîner son

Réponse

remar

lui fait.

:

autorité, de manière à réduire sa sphère d'action à la plus grande nullité possible contre-sens affreux, qui sera éternellement un indice certain de la décadence d'un état, ou le signal de l'anarchie.

Bien que Napoléon appréciât ces phrases à quable qu'il leur juste valeur, il montra de la modération en applaudissant aux intentions des doctrinaires, et se bornant à rappeler leur attention sur le danger des controverses intempestives. Sa réponse doit trouver place ici, puisqu'elle achève de peindre et sa position et ses antagonistes. « Dans ces graves circonstances, ma pensée est «< absorbée par la guerre imminente, au succès <«< de laquelle sont attachés l'indépendance et << l'honneur de la France. Je partirai cette nuit << pour me mettre à la tête de mes armées... << Pendant mon absence, je verrais avec plaisir qu'une commission nommée par chaque cham«<bre méditât mûrement sur nos institutions : << la constitution est notre point de ralliement, <<< elle doit être notre étoile polaire dans ces mo«< ments d'orage. Mais toute discussion publique qui tendrait à diminuer directement ou indi<<< rectement la confiance qu'on doit avoir dans le << gouvernement et dans ses dispositions, serait << un malheur pour l'état : nous nous trouverions « au milieu des écueils, sans boussole et sans di

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«<rection. La crise où nous sommes est forte; << n'imitons pas l'exemple du Bas-Empire qui,

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pressé de toutes parts par les barbares, se <«< rendit la risée de la postérité, en s'occupant de << discussions abstraites au moment où le bélier « ennemi brisait les portes de la capitale. »

Paroles prophétiques, et bien propres à confondre tous ces déclamateurs qui, méconnaissant les principes de l'Empereur à cette mémorable époque, ont lancé tant de foudres contre lui.

Napoléon voyait ainsi avec douleur que les mesures auxquelles il avait été en quelque sorte forcé de recourir pour satisfaire à l'opinion publique, allaient produire un effet déplorable; elles mirent bientôt les phrases à la place des choses, les discussions orageuses à la place d'une administration calme et forte, enfin elles amenèrent plus tard la division dans l'état, par l'autorité que les chambres s'arrogèrent. Chacun s'apercevait déjà que les concessions, quelque étendues qu'elles fussent, trouvaient encore des détracteurs. Au moment où l'on aurait dû ajourner la liberté de la presse, jusqu'à ce que la patrie fût hors de danger, l'Empereur était réduit à solliciter des lois répressives, pour en atténuer les abus, et cette démarche même était présentée comme une tendance au despotisme. Des pamphlets de toutes les couleurs, rédigés les uns par

des démagogues, les autres par des émigrés, attaquaient toutes les mesures du gouvernement, et portaient atteinte à la confiance dont il aurait fallu plus que jamais l'entourer. La licence fut poussée à un tel excès, que des feuilles qui prêchaient l'attentat et qui promettaient l'apothéose à ceux qui délivreraient par quelque moyen que ce fût la France du joug de Napoléon, ne trouvaient pas de jurés pour les condamner. Excitation A peine était-il assis sur le trône qu'on le forpatriotique à l'intérieur. Çait déjà à regretter de n'avoir pas simplement

saisi un pouvoir discrétionnaire, en se proclamant dictateur de l'empire français, et en ajournant jusqu'à la paix toutes les lois organiques, ainsi que la nouvelle investiture du titre impérial.

Toutefois, si ses concessions, loin de satisfaire les factions, leur donnèrent plus d'importance, il faut convenir aussi que l'élan imprimé par ses promesses au parti de la révolution, ne fut pas sans avantages; car, outre les gardes nationales, dont il facilita la levée, il donna les moyens d'armer le peuple des principales villes. Celui de Paris seul forma une vingtaine de bataillons de tirailleurs fédérés, troupe peu redoutable sans doute en rase campagne, mais qui dispensait de tenir des garnisons, pouvait au besoin servir de levier au gouvernement pour l'exécution des

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