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celui de la souveraineté nationale, ait suffi pour motiver une coalition aussi extraordinaire; car, après tout, ce principe dissolvant ne saurait se répandre en Europe par l'application partielle qui en serait faite dans un pays quelconque; et, si l'on avait peur de l'ambition de la France, on ne pouvait rien faire de mieux que de lui léguer des causes de déchirements futurs en lui laissant ce gouvernement électif. Du reste, lorsqu'un principe est jugé funeste aux états, ce n'est pas avec du canon qu'il faut le combattre, mais avec de sages discussions, de l'expérience et du temps. Napoléon acceptant les traités de Paris et maintenu sur le trône, aurait affermi les gouvernements, en général, comprimé les idées révolutionnaires, et détourné les crises qui faillirent bouleverser l'Europe deux ou trois fois depuis sa chute; le volcan, qui fume encore plus menaçant qu'on ne le pense, eût été éteint ou étouffé pour longtemps; enfin l'équilibre européen eût été plus sûrement rétabli.

A la vérité, il était difficile de supposer que Napoléon maintiendrait longtemps les stipulations des traités de Paris : l'indignation excitée dans le pays par ces traités, avait été une des causes de l'expulsion des Bourbons... Aurait-il osé les regarder comme un engagement éternel?... La nation, l'armée surtout, dont la force mise sur le pied

de guerre eût excité l'ambition, n'auraient-elles pas entraîné le chef de l'état à saisir la première occasion de reprendre au moins la ligne du Rhin et des Alpes?

En pesant ces diverses considérations, on concevra aisément le double embarras dans lequel ce retour plongea les puissances coalisées, et les résolutions qui en furent la conséquence naturelle. La conviction que l'armée seule avait causé cette révolution, et la crainte de voir les trônes à la merci des chefs militaires, jointe au désir de consolider le partage des conquêtes faites sur l'empire; tels furent certainement les véritables mobiles des monarques; l'un et l'autre étaient assez puissants pour les déterminer; mais il semble fort difficile de décider si le danger de substituer à Napoléon un gouvernement faible et imposé, n'était pas pire que le mal causé par son retour, en assurant de nouvelles révolutions.

du duc d'Au

goulême

Les embarras extérieurs qui résultèrent des Campagne actes du congrès de Vienne n'étaient pas les seuls qu'éprouvât Bonaparte, car le duc d'An- dans le Midi. goulême, se trouvant à Bordeaux au moment de son débarquement, prit aussitôt des mesures pour lui disputer l'empire. Louis XVIII avait ordonné à ce prince d'établir à Toulouse le siége d'un gouvernement royal, et l'avait nommé son

lieutenant dans le midi de la France. - De Toulouse, où il avait organisé rapidement la résistance, de concert avec M. de Vitrolles et avec le comte de Damas, le duc s'était rendu à Marseille, où il avait trouvé les mêmes ovations de la part de cette population parasite, pour qui le lucre mercantile et l'intérêt matériel sont les premiers besoins. A l'aide de quelques régiments qui lui étaient restés fidèles, et surtout des habitants fanatisés du Languedoc, où les dissensions religieuses s'alliaient aux querelles politiques, le duc organisa trois colonnes, avec lesquelles il remonta le Rhône pour reprendre Lyon et Grenoble; mais la défection se mit aussi dans cette troupe; deux régiments se déclarèrent pour Napoléon, et le 10 de ligne seul conserva un millier de soldats au prince, qui y joignit six à sept mille gardes nationaux. Après avoir battu le général Debelle à Loriol, sur la Drôme, il s'avança sur Valence; mais les officiers impériaux, envoyés à Toulouse et à Montpellier, avaient réussi à faire arborer le drapeau tricolore dans ces deux villes, et à faire prononcer leurs garnisons. En même temps, le Dauphiné se prononçait aussi contre les Bourbons, et Grouchy, envoyé à Lyon, préparait les moyens d'étouffer ce faible noyau de guerre civile, en dirigeant plusieurs petites colonnes sur Valence. Le duc, serré de près

par le général Gilly, et instruit que les départements sur ses derrières avaient reconnu le gouvernement impérial, signa, le 9 avril, au PontSaint-Esprit, une convention par laquelle il consentit à évacuer la France et à s'embarquer. Grouchy, d'après l'ordre qu'il en avait reçu, refusa d'abord de ratifier cet acte, auquel Napoléon se hâta néanmoins de donner sa sanction.

dans

Dans le même temps, des troubles inquiétants, Troubles éclatés en Vendée, avaient forcé d'y détacher la Vendée. 15 mille hommes de vieilles troupes, sous le général Lamarque; cet officier distingué parvint, par son activité, et celle du général Fravot, à y comprimer le feu de la guerre civile, bien plus redoutable dans ces contrées que dans le reste de la France, tant à cause des localités que par le caractère opiniâtre et dévoué de ses habitants. Cependant, malgré la mort de Larochejacquelin, tué au combat de Mathes, et les succès remportés à Saint-Gilles et à Roche-Servières, les hostiliés ne cessèrent de fait qu'après la bataille de Waterloo.

Tandis que ces choses se passaient en France et au congrès de Vienne, Murat vint encore compliquer la position de son beau-frère, par une levée de boucliers tout à fait digne de son caractère bizarre et aventureux. Instruit des négociations qui avaient eu lieu entre la France et

Levée intempestive de boucliers

faite

par Murat.

l'Autriche pour le déposséder, il demanda à celleci un passage en Italie pour tirer vengeance des menaces du ministère de Louis XVIII: on peut bien penser qu'il lui fut refusé. A la nouvelle du débarquement de Napoléon, Murat se flatte tout à coup de réparer à ses yeux sa défection de 1814. Il se persuade que le moment est venu de jouer un grand rôle, et qu'en promettant aux peuples d'Italie une résurrection nationale, il peut encore se rendre l'arbitre de grands événements. Il débouche, le 22 mars, d'Ancône avec 40 mille hommes, chasse les Autrichiens de Césène, et, favorisé par les populations de Bologne et de Modène, envahit avec rapidité les pays situés à la rive du Pô jusqu'aux portes de Plaisance, tandis qu'une autre colonne envahit les États romains et la Toscane. Partout il sème des proclamations annonçant qu'il vient réunir les Italiens sous un même drapeau, et prend possession, en son nom, des provinces qu'il traverse: il médite même l'invasion de la Lombardie à travers le Piémont, quand il est arrêté par les déclarations du ministre Il est battu anglais, qui le menace de guerre. Les Autrichiens, bientôt rassemblés, lancent contre lui le général Bianchi avec 25 ou 30 mille hommes. Parti de Florence avec le gros de ses forces, ce général marche par Foligno, afin de couper la retraite de Murat, en même temps que Neipperg l'inquiétera par

et détrôné

par les

Autrichiens.

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