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et bien que nous n'ayons fait qu'un commencement, les bases ont été jetés, et ceux qui seront appelés à continuer notre entreprise rendront sans doute justice aux ouvriers de la première heure.

"Je ne reviendrai qu'un instant sur l'esprit de concorde et d'entente qui a caractérisé les dispositions de tous les membres de ces Commissions. Quand des personnes étrangères à nos travaux jugent l'activité de la Conférence, elles perdent trop souvent de vue que nous ne sommes pas appelés à élaborer des théories abstraites, à rechercher par les spéculations de l'esprit les solutions idéales des problèmes qui nous sont soumis. Nous sommes des mandataires de nos Gouvernements et agissons en vertu d'instructions spéciales, basées avant tout sur les intérêts de nos pays respectifs. Les considérations supérieures du bien de l'humanité en général doivent sans doute nous y servir de guides, mais nous ne pouvons, dans leur application, avoir en vue avant tout que les intentions de ceux qui dirigent nos Gouvernements. Or, les intérêts directs des divers États sont souvent diamétralement opposés. C'est à chercher de les concilier et de les mettre d'accord avec les exigences théoriques du droit et de la justice absolus, que s'est exercé l'esprit d'entente que je viens de signaler et qui, apprécié à ce point de vue, acquiert une valeur redoublée.

"Les progrès réalisés par la Conférence dans le domaine préventif-moyens d'empêcher et d'écarter les conflits internationaux-ont été moins considérables. C'est que sur ce terrain le temps d'expérience a manqué pour attribuer un caractère d'urgence à de nouvelles solutions et en indiquer des conditions pratiques d'application, universellement reconnues. Les importants projets qui ont été présentés à la Première Commission pour l'institution d'un Tribunal de Justice Arbitrale et de l'arbitrage obligatoire étaient issus de combinaisons théoriques qui se sont heurtées dans l'exécution à des difficultés insurmontables. La question de la Cour des Prises, au contraire, dont la création s'était révélée hautement désirable, a pu aboutir à une solution satisfaisante qui restera un des monuments de cette Conférence. On peut être assuré qu'elle ne manquera pas de trouver une utile application, qui contribuera indirectement à empêcher une plus grande extension des guerres.

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Cependant le travail accompli par la Première Commission, sous l'habile et savante direction de son illustre Président, pour l'institution tant d'un Tribunal Permanent que de l'arbitrage obligatoire ne sera pas perdu. Lorsque l'heure viendra de continuer l'œuvre que nous avons entreprise, on consultera avec avidité les procèsverbaux des séances de cette Commission et du Comité d'Examen, on y trouvera une étude aussi consciencieuse qu'approfondie de ces questions sous toutes leurs faces, et on y puisera des éléments précieux pour les décisions futures.

"Mais ce n'est point là-dedans, Messieurs, que gît, à mon avis la principale signification de la Deuxième Conférence de la Paix. On ne saurait méconnaître qu'une des principales garanties du maintien des rapports pacifiques entre les peuples ne soit la connaissance plus intime des intérêts et besoins réciproques, l'établissement de relations multiples et variées, dont le réseau, toujours plus étendu, finit par créer entre eux une solidarité morale et matérielle, de plus en plus réfractaire à toute entreprise guerrière. La Conférence actuelle a réalisé sous ce rapport le plus grand progrès que l'humanité ait fait dans cette direction. C'est pour la première fois que les Représentants de tous les États constitués se sont trouvés réunis pour la discussion des intérêts qui leur sont communs et qui visent au bien de l'humanité tout entière. Avec cela l'association à nos travaux des Représentants de l'Amérique Latine a incontestablement versé dans le trésor commun de la science politique internationale des éléments nouveaux et fort précieux, dont la valeur ne nous était jusqu'à présent qu'imparfaitement connue. (Applaudissements.) De leur côté, les Représentants de l'Amérique Centrale et Méridionale ont eu l'occasion de connaître de plus près la situation intérieure et les relations réciproques des États Européens, qui, avec leurs institutions diverses, historiquement développées, leurs traditions et leurs particularités individuelles, présentent des conditions politiques sensiblement différentes de celles sous lesquelles vivent et progressent les jeunes peuples du Nouveau Monde. (Applaudissements.) Il y a eu ainsi avantage de part et d'autre à cette connaissance plus intime, et à la collaboration à laquelle la Conférence a donné lieu, et qui constituera un vrai progrès pour l'humanité.

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"Nous pouvons donc repousser l'accusation que l'on essaie déjà de jeter contre nous, en prétendant que nous n'avons rien fait pour le maintien de la paix, rien pour progrès de la solidarité humaine. Il y a sans doute beaucoup à faire encore dans cette voie. Les peuples doivent être éduqués de façon à pouvoir, tout en gardant chacun ses particularités et les traditions qui lui sont chères, apprendre à s'estimer et à s'aimer. Aussi devons-nous bien reconnaître que les voix qui se sont élevées autour de nous et dans la presse connexe à la Conférence, pour faire dans ce sens une recommandation aux

Gouvernements, proclameraient certainement un principe, dont les dirigeants des affaires du monde pourront faire le profit. Du reste, il est trop tôt pour apprécier à sa juste valeur la signification de ce qu'a fourni la Deuxième Conférence de la Paix. La presse qui s'y intéressait a été régulièrement et largement tenue au courant de ses travaux par les soins du Secrétaire-Rédacteur. Elle a pu en faire part au monde entier à mesure de leur développement progressif, mais les conclusions en doivent être abandonnées à une appréciation d'ensemble, plus éloignée, et partant plus objective. Les vrais amis de la paix et du développement de l'humanité dans la voie de la solidarité morale, du droit, et de la justice ne manqueront pas de se livrer à ce travail avec sincérité et bonne foi. Puissent leurs efforts servir à arrêter les débordements d'un certain genre de publicité, qui ne vise qu'à exciter, dans des vues intéressées, les nations les unes contre les autres, soufflant la haîne, envenimant à dessein les moindres incidents politiques, et créant par là ou aggravant les dangers qui peuvent menacer la paix du monde, au maintien de laquelle nous sommes appelés à travailler. (Applaudissements.)

"Notre œuvre est là. Nous avons tous le sentiment d'y avoir collaboré consciencieusement et d'avoir travaillé de notre mieux. Il ne nous a pas été possible de tout faire. Laissons à ceux qui viendront après nous le soin de développer ce que nous n'avons pu qu'ébaucher, et de préparer à leur tour pour les Conférences futures les éléments des travaux qu'ils n'auront pas réussi à accomplir eux-mêmes. Quant à nous, la Conférence actuelle aura, en tous cas, marqué dans l'histoire de l'humanité, car elle a pour la première fois assumé un caractère universel, en faisant marcher la main dans la main dans la voie du progrès les Délégués du monde entier. (Applaudissements.)

"Ai-je besoin d'ajouter que, en ce qui me concerne personnellement je considère comme le plus beau couronnement d'une longue carrière diplomatique l'honneur qui m'était échu de présider aux travaux de cette Assemblée illustre. J'y ai voué toutes mes forces, j'y ai apporté toute ra meilleure volonté ; j'ai été heureux et fier de la concorde qui n'a cessé de régner entre nous durant ces quatre mois; et j'emporte de notre longue collaboration le souvenir le plus glorieux de mon existence. Vous m'avez rendu la tâche facile, Messieurs, par votre bienveillance, par votre indulgence, et je tiens à vous en offrir à tous ensemble et à chacun séparément mes remercîments les plus cordiaux. (Applaudissements.) Dois-je mentionner plus particulièrement mes collaborateurs les plus intimes, MM. le Vice-Président de la Conférence, les Présidents et Vice-Présidents, Rapporteurs et Secrétaires des Commissions et Sous-Commissions, et surtout l'infatigable Secrétariat avec son chef le Secrétaire-Général. Leur rude travail, accompli avec ardeur, et secondé par une organisation d'imprimerie admirable, a été un modèle d'ordre, de système, et d'exactitude. (Applaudissements répétés.)

"Il nous reste, Messieurs, avant de nous séparer, un dernier devoir à remplir, un devoir de cœur par lequel vous voudrez certainement me permettre de clore mes fonctions de Président. Je vous demande la permission d'adresser, au nom de la Conférence, le télégramme suivant à Sa Majesté la Reine des Pays-Bas :

"Au moment de se séparer après avoir achevé leurs travaux, les Délégués des Puissances réunis à la Deuxième Conférence de la Paix prient votre Majesté Royale de vouloir bien agréer l'expression respectueuse de leur reconnaissance pour l'auguste intérêt qu'elle n'a cessé de porter à leurs occupations, ainsi que pour la gracieuse hospitalité qui leur a été accordée par le Gouvernement Néerlandais et que votre Majesté a daigné nous promettre également pour l'éventualité des Conférences futures. Ils forment les vœux les plus chaleureux pour votre Majesté Royale et la prospérité de son règne.' (Applaudissements répétés.)

"Dans une de nos dernières séances des remercîments ont été exprimés à l'auguste initiateur des Conférences de la Paix, Sa Majesté l'Empereur de Russie. La Conférence voudra, j'espère, rendre aujourd'hui hommage au Président des États-Unis d'Amérique du Nord, qui le premier avait proposé la réunion de la Deuxième Conférence, et m'autoriser à lui adresser le télégramme suivant :

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Ayant terminé leurs travaux, les Délégués à la Deuxième Conférence de la Paix se souviennent avec reconnaissance de la proposition initiale qui a été faite pour sa convocation par le Président des États-Unis et lui présentent leurs respectueux hommages.' (Applaudissements.)

"Permettez-moi, enfin, Messieurs, d'offrir l'expression de notre profonde reconnaissance à M. le Président d'Honneur de la Conférence, son Excellence le Ministre des Affaires Étrangères des Pays-Bas, ainsi qu'à tous les organes du Gouvernement Royal dont nous avons, je le crains, abusant de l'hospitalité qui nous était offerte, trop longtemps gêné la libre activité. (Applaudissement.)

"Notre Conférence actuelle entrant ainsi dans le domaine du passé, laissez-moi jeter un coup d'œil dans d'avenir.

"Beaucoup d'entre nous se retrouveront ici probablement dans quelques années à la prochaine réunion mondiale; plusieurs, et je serai sans doute du nombre, n'y paraîtront plus; mais laissez-nous espérer qu'en travaillant à la continuation de notre œuvre commune vous vous souviendrez avec sympathie de notre collaboration et enverrez quelquefois une pensée bienveillante à celui qui a eu l'honneur d'y présider (applaudissements) et qui forme les voeux les plus sincères pour le succès des Conférences futures de la Paix et le développement toujours croissant de la solidarité humaine dans les rapports internationaux basés sur la justice et le droit. (Applaudissements prolongés.) "La parole est à M. le Vice-Président de la Conférence, son Excellence M. de Beaufort."

Son Excellence M. de Beaufort: "Je prie M. le Président de vouloir agréer tous les remercîments pour les paroles cordiales et bienveillantes qu'il a bien voulu prononcer au Vice-Président. Ma tâche n'a pas été difficile, car la vice-présidence n'est pas un fardeau très lourd quand on a l'avantage d'avoir un Président comme son Excellence M. Nélidow. (Applaudissements.)

"Je ne ferai pas ici son éloge, cet éloge est sur toutes les lèvres et dans tous les cœurs de ceux qui se trouvent dans cette enceinte. Nous avons tous été à même d'apprécier les éminentes qualités de notre Président, nous avons tous admiré son zèle infatigable, son savoir, son activité, son tact, son esprit de conciliation. Nous avons vu notre Président toujours au milieu de nous assistant dans la mesure du possible à toutes les réunions de nos Commissions et de nos Comités d'Examen. Je serais presque tenté de dire, au risque de me servir d'une expression qui pourrait être considérée comme un dissonant dans une Conférence de la Paix: notre Président était toujours sur la brèche.

"Le nom de M. Nélidow, j'en suis sûr, restera gravé dans vos souvenirs comme il le sera dans les miens, et sans avoir un mandat spécial je suis convaincu d'être votre interprète en priant notre éminent Président de vouloir accepter l'assurance de nos sentiments de sympathie, de gratitude, et de vénération, et de vouloir agréer nos meilleurs vœux pour son bonheur. (Applaudissements.) Je vous propose, Messieurs, de vous lever tous en l'honneur de notre digne et vénéré Président, son Excellence M. Nélidow. [L'Assemblée se lève.] (Applaudissements.)

"Permettez-moi, Messieurs, d'ajouter encore quelques paroles à ce que je viens de dire. Nous sommes sur le point de nous séparer et, quant à moi, j'éprouve un sentiment pénible en prenant congé de tant d'hommes distingués de toutes les parties du globe avec lesquels j'ai eu le bonheur et l'avantage d'avoir été en rapport pendant plus de quatre mois.

"En se séparant après avoir travaillé ensemble à une grande œuvre, on se demande quel a été le fruit de ces travaux. Je ne me dissimule pas que, d'après les avis de quelques organes de l'opinion publique, les fruits de nos travaux n'ont pas répondu à l'attente; mais n'oublions pas que ceux qui fixeut leurs regards exclusivement sur tout ce que la Conférence aurait pu faire, perdent de vue par cela même tout ce que la Conférence a fait. Je n'ai pas besoin d'énumérer ici toutes les Conventions et les Déclarations pour vous démontrer l'importance de nos travaux. Je dirai seulement que personnellement je ne me sens nullement découragé.

"J'en appelle ici à tous ceux de nos collègues qui ont l'expérience des travaux parlementaires. Ils savent comme moi que des plaintes sur la lenteur de la marche de ces travaux sont à l'ordre du jour dans tous les pays, et que les efforts pour accélérer cette marche demeurent presque toujours infructueux. Ils connaissent les obstacles qui se présentent sans cesse pendant l'élaboration de lois importantes et qui ont pour effet que cette élaboration, même si elle mène à bonne fin, demande en général un temps démesuré.

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Cependant, ces Parlements sont composés d'hommes se connaissant entre eux, tous parlant la même langue, vivant sous la même législation, ayant des intérêts communs et la pleine liberté d'agir.

"Au contraire, la Conférence à laquelle nous avons pris part, qualifiée non sans raison comme Parlement mondial, était composée d'hommes qui pour la plupart ne se connaissaient pas, qui parlaient des langues différentes, d'hommes vivant sous des législations divergentes et munis d'instructions précises basées sur les intérêts de leurs Gouvernements, et cette Conférence avait pour tâche de résoudre des questions difficiles, délicates, et souvent nouvelles, des questions qui mettent en cause les plus hauts intérêts et qui ne pouvaient être résolues que par des concessions mutuelles.

"Je crois donc qu'ils n'y a pas lieu de s'étonner que l'élaboration de la tâche soumise à cette Conférence ait été difficile et de longue durée.

"A mon avis, on devrait plutôt s'étonner de ce que la Conférence a pu accomplir en quatre mois, et de l'entente qui s'est produite sur divers points de haute importance, sur lesquelles les opinions étaient d'abord très partagées.

"Permettez-moi, Messieurs, de vous rappeler à ce sujet un mot célèbre d'un homme d'État connu dans l'histoire qui répondit à un interrogateur indiscret qui lui avait demandé s'il croyait avoir beaucoup achevé pendant sa longue carrière :

"Peu quand je me considère, un peu quand je me compare.'

"Au risque d'abuser de votre patience, je me permettrai dans ces ordre d'idées encore une observation qui, peut-être, pourra être de quelque utilité dans l'avenir.

"Tous les Parlements possèdent des Règlements détaillés qui contiennent des dispositions sur la procédure de leurs travaux. Je crois que la nécessité d'un pareil Règlement pour les Conférences de la Paix s'impose de plus en plus. Pendant le cours de nos délibérations des questions de procédure se sont parfois présentées qui offraient de sérieuses difficultés et qui ont dû être écartées ou bien tranchées à l'improviste. Je crois qu'il sera utile d'établir des règles fermes qui pourront donner à ces questions une solution fixe et permanente. Aux nombreux vœux énoncés dans le sein de la Conférence je voudrais donc ajouter le suivant que l'élaboration d'un Règlement détaillé pour la ia Conférence soit mise à l'étude pour être soumise à la prochaine Conférence à sa première réunion.

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"Messieurs, quand on se dit 'adieu' on y ajoute toujours au revoir.' Cet au revoir' dans ce moment n'implique pas seulement l'espoir d'un revoir personnel, mais aussi d'un revoir de la Conférence, il dénote la continuité de notre œuvre.

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Permettez-moi, en vous disant au revoir, d'y joindre le vœu que la Conférence du 1907 ouvre une ère de paix pour le monde entier qui se prolonge sans interruption jusqu'à la prochaine Conférence de la Paix." (Applaudissements.)

Le Président: "La parole est à son Excellence Sir Edward Fry, Premier Délégué de la Grande-Bretagne."

Son Excellence Sir Edward Fry: "En ma qualité de doyen d'âge de cette Conférence j'ai, je crois, le droit et le devoir de répondre aux belles paroles de notre Président et de notre Vice-Président, tout en les remerciant avec la sincérité la plus profonde de leurs travaux prolongés.

"Son Excellence M. Nélidow a présidé nos séances avec une dignité et une impartialité absolues, et la courtoisie et bonne volonté dont il a toujours fait preuve dans ses relations avec tous les membres de la Conférence méritent tous les éloges que nous pouvons lui décerner.

"M. de Nélidow a été appelé à remplir un des postes les plus élevés du monde entier; il a exercé ses fonctions d'une manière digne de son haut emploi, de son pays, et de lui-même.

"Son Excellence n'a pas seulement présidé nos séances, il a très volontiers donné son aide pour le projet relatif à la réunion et l'organisation d'une Troisième Conférence de la Paix; et Sa Majesté l'Empereur de Russie a, de nouveau, signalé son intérêt dans cette institution en donnant son autorisation à M. de Nélidow lui-même de nous faire cette proposition.

"Son Excellence M. de Beaufort, qui déjà comme Ministre des Affaires Étrangères en 1899 a été associé aux travaux de la Première Conférence, a cette fois-ci encore bien mérité de la Conférence, par la manière si digne dont il a rempli les fonctions de VicePrésident et de Président du Comité des Adresses.

"Je lui adresse, en votre nom, Messieurs, nos plus sincères remercîments. (Applaudissements.)

"J'offre en votre nom nos hommages les plus respectueux à Sa Majesté la Reine des Pays-Bas, qui nous a reçus avec une hospitalité qui demande nos remercîments les plus sincères. (Applaudissements.)

"Je me hâte de m'associer également en votre nom aux remercîments exprimés par son Excellence M. Nélidow aux Présidents, Rapporteurs, et Secrétaires des Commissions et Sous-Commissions; ils ont bien travaillé jour et nuit pendant de longs mois et nous ne pourrons jamais les remercier assez de tout ce qu'ils ont fait. (Applaudissements.)

"Je n'ai pas l'intention de passer en revue les travaux de cette Conférence. Je me bornerai à faire remarquer que, de tous les projets que nous avons adoptés, le plus remarquable, à mon avis, est celui de la Cour des Prises, parce que c'est la première fois dans l'histoire du monde qu'on a organisé une Cour vraiment internationale. La loi internationale d'aujourd'hui n'est guère autre chose qu'un chaos

d'opinions qui souvent se contredisent, et des décisions des Cours Nationales basées sur les lois nationales. Nous espérons voir peu à peu se former dans l'avenir autour de cette Cour un système de lois vraiment internationales qui ne devra son existence qu'aux principes de justice et d'équité et qui, par conséquent, aura droit non seulement. à l'admiration du monde, mais au respect et à l'obéissance des nations civilisées. (Applaudissements.)

Encore un seul mot. Nous allons nous séparer tout à l'heure, et je suis bien sûr que chacun de nous souhaitera pcur tous les autres et pour leurs pays les bénédictions

du ciel.

"Enfin, je vous dis de mon cœur et en me rappelant tout ce que le mot importe: Adieu." (Applaudissements répétés.)

Le Président: "La parole est à son Excellence M. le Premier Délégué d'Italie, son Excellence le Comte Tornielli."

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Son Excellence le Comte Tornielli: Messieurs, Permettez au Délégué de l'Italie, qui, dans l'ancien temps, fut l'émule des Pays-Bas dans l'art de la typographie, de porter ici une parole d'admiration pour l'œuvre accomplie par l'imprimerie de la Conférence.

"Au moment où les travaux de la Première Conférence de la Paix finissaient, mon prédécesseur eut à cœur d'appeler l'attention de ses collègues sur ce qu'il désigna comme un miracle de labeur typographique. Que devons-nous dire aujourd'hui de l'effort doublé, triplé peut-être, soutenu depuis quatre longs mois toujours avec le même entrain, sans aucune défaillance, dont nous fûmes, à juste raison, constamment étonnés ?

"Le spectacle de cette masse énorme de travail exquis, bien ordonné, supérieurement dirigé, fait grand honneur aux ouvriers et à leurs chefs. Grâce à eux, non seulement notre besogne a été facilitée, mais nous n'avons jamais chômé un seul jour.

"Rendons hommage à l'administration si parfaitement réglée qui obtient ces merveilleux résultats et adressons-lui la prière de porter à la connaissance des modestes travailleurs l'expression de notre vive reconnaissance." (Applaudissements répétés.)

Le Président: "La parole est à son Excellence M. le Premier Délégué de la République Argentine."

Son Excellence M. Saenz Peña: "M. le Président,-Au nom du Gouvernement de mon pays, je dois exprimer toute sa reconnaissance aux Gouvernements de Russie et des Pays-Bas pour l'invitation adressée aux nations de l'Amérique Latine, en tant que cet acte politique a permis à la République Argentine de prendre part à la Deuxième Conférence de la Paix.

"C'est la première fois que les Représentants de l'Amérique Méridionale sont venus délibérer parmi vous; l'appel a été amical de la part des Etats qui assistèrent à la Première Conférence et si cet appel ne crée pas pour nous une situation juridique ou une condition politique différente, il a pu mettre en évidence la position existante et fondre en un sentiment solidaire la cordialité heureuse de la grande famille humaine. La justice trouve souvent ses récompenses et cette convocation a eu la sienne. Elle signale un bienfait qui nous est commun, marque un progrès et accuse un perfectionnement du droit public, lequel, en raison de sa nature universelle, réclamait le consensus de toutes les souverainetés sans distinctions d'États ou de continents. Nous pourrons affirmer désormais que l'égalité politique des États a cessé d'être une fiction et demeure consacrée comme une évidente réalité. Selon le vœu de Lawrence, il n'existera plus, à l'avenir, un droit des gens pour l'Europe et un autre droit des gens pour l'Amérique.

"L'histoire de la Grande-Bretagne enregistra cette sentence mémorable proférée au Parlement de Westminster, par la voix d'un précurseur: J'ai appelé à la vie le Nouveau Monde pour rétablir l'équilibre de l'Ancien.' Ces mots furent prononcés dans le premier tiers du dix-neuvième siècle; et à l'aube du vingtième siècle l'évolution s'est accomplie, et les Souverains de Russie et des Pays-Bas, en nous appelant dans cette enceinte, sont les exécuteurs testamentaires de la prophétie de George Canning. L'équilibre est établi par la vertu du droit et par l'harmonie des lois historiques qui concertent et ajustent les deux mondes comme les deux moitiés d'une seule sphère qui demande à être éclairée par une seule justice et par une même civilisation.

"Il est évident que nous avons marché vite, puisque nous sommes arrivés et le premier centenaire de notre vie nationale n'est pas encore révolu; mais, si notre

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