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impartial ne peut-être douteux, savoir que l'Autriche avait depuis « la paix de Presbourg préparé les moyens de se débarrasser de ce traité, et de reprendre son ancien rang dans le système politique de l'Europe, et que, voyant Bonaparte occupé en Espagne, elle avait pensé que le moment d'éclater était arrivé. »

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L'Empereur avait annoncé qu'il serait prêt; il l'était. Trois semaines après il était au milieu de l'Allemagne; il annonçait par une proclamation à son armée qu'elle allait entrer une seconde fois en Autriche. Déjà le 25 octobre précédent, il avait écrit à l'empereur d'Autriche la lettre qu'on va lire et qui commence la série des pièces relatives à la guerre d'Autriche en 1809.

Lettre de Sa Majesté l'empereur Napoléon à Sa Majesté l'Empereur d'Autriche.

Monsieur mon frère, je remercie Votre Majesté Impériale et Royale de la lettre qu'elle a bien voulu m'écrire et que M. le baron Vincent m'a remise. Je n'ai jamais douté des intentions droites de votre Majesté; mais je n'en ai pas moins craint un moment de voir les hostilités se renouveler entre nous. Il est à Vienne une faction qui affecte la peur pour précipiter votre cabinet dans des mesures violentes qui feraient l'origine de malheurs plus grands que ceux qui ont précédé. J'ai été le maître de démembrer la monarchie de Votre Majesté ou du moins de la laisser moins puissante. Je ne l'ai pas voulu : ce qu'elle est, elle l'est de mon vou. C'est la plus évidente preuve que nos comptes sont soldés et que je ne veux rien d'elle. Je suis toujours prêt à garantir l'intégrité de sa monarchie; je ne ferai jamais rien contre les principaux intérêts de ses Etats; mais Votre Majesté ne doit pas mettre en discussion ce que quinze ans de guerre ont terminé; elle doit défendre toute proclamation ou démarche provoquant la guerre. La dernière levée en masse aurait produit la guerre si j'avais pu craindre que cette levée et ces préparatifs fussent combinés avec la Russie. Je viens de licencier les camps de la confédération. Cent mille hommes de mes troupes vont à Boulogne pour renouveler mes projets sur l'Angleterre ; j'ai dû croire, lorsque j'ai eu le bonheur de voir Votre Majesté, et que j'ai conclu le traité de Presbourg, que nos affaires étaient terminées pour toujours, et que je pourrais me livrer à la guerre maritime sans être inquiété ni troublé. Que Votre Majesté se méfie de ceux qui, lui parlant des dangers de sa monarchie, troublent ainsi son bonheur, celui de sa famille et de ses peuples. Ceux-là seuls sont dangereux, ceux-là seuls appellent les dangers qu'ils feignent de craindre. Avec une conduite droite, franche et simple, Votre Majesté rendra ses peuples heureux, jouira elle-même du bonheur dont elle doit sentir le besoin après tant de troubles, et sera sûre d'avoir en moi un homme décidé à ne jamais rien faire contre ses principaux intérêts. Que ses démarches montrent de la confiance, elles en

inspireront. La meilleure politique aujourd'hui, c'est la simplicité et la vérité. Qu'elle me confie ses inquiétudes lorsqu'on parviendra à lui en donner; je les dissiperai sur-le-champ. Que Votre Majesté me permette un dernier mot : qu'elle écoute son opinion, son sentiment; il est bien supérieur à celui de ses conseillers.

Je prie Votre Majesté de lire ma lettre dans un bon sens, et de n'y voir rien qui ne soit pour le bien et la tranquillité de l'Europe et de Votre Majesté.

Paris, 25 octobre 1808.

NAPOLÉON.

Donawerth, 17 avril 1809.

Soldats!

Proclamation à l'armée

Le territoire de la confédération a été violé. Le général autrichien veut que nous fuyions à l'aspect de ses armes et que nous lui abandonnions nos alliés ; j'arrive avec la rapidité de l'éclair.

Soldats, j'étais entouré de vous lorsque le souverain d'Autriche vint à mon bivouac de Moravie; vous l'avez entendu implorer ma clémence et me jurer une amitié éternelle. Vainqueurs dans trois guerres, l'Autriche a dû tout à notre générosité; trois fois elle a été parjure!!! Nos succès passés sont un sûr garant de la victoire qui nous attend.

Marchons donc, et qu'à notre aspect l'ennemi reconnaisse son vainqueur.

NAPOLÉON.

DÉPART DE L'EMPEREUR DE PARIS, LE 13.

L'Empereur apprit par le télégraphe, dans la soirée du 12, le passage de l'Inn par l'armée autrichienne, et partit de Paris un instant après. Il arriva le 16 à trois heures du matin à Louisbourg, et dans la soirée du même jour à Dilingen, où il vit le roi de Bavière. Il passa une demi-heure avec ce prince et lui pro

mit de le ramener en quinze jours dans sa capitale et de venger l'affront fait à sa maison en le faisant plus grand que ne furent jamais aucun de ses ancêtres. Le 17, à sept heures du matin, S. M. arriva à Donawerth, où était établi le quartier général, et donna sur-le-champ les ordres nécessaires.

Le 18, le quartier général fut transporté à Ingolstadt.

BATAILLE DE TANN, LE 19.

Le 19, à la pointe du jour, le duc d'Auerstaedt se mit en marche sur deux colonnes. Les divisions Morand et Gudin formaient sa droite; les divisions Saint-Hilaire et Friant formaient sa gauche. La division Saint-Hilaire, arrivée au village de Peissing, y rencontra l'ennemi plus fort en nombre, mais bien inférieur en bravoure, et là s'ouvrit la campagne par un combat glorieux pour nos armées. Le général Saint-Hilaire, soutenu par le général Friant, culbuta tout ce qui était devant lui, enleva les positions de l'ennemi, lui tua une grande quantité de monde et lui fit six à sept cents prisonniers.

Le 72 se distingua dans cette journée, et le 57o soutint son ancienne réputation. Il y a seize ans ce régiment avait été surnommé en Italie le Terrible, et il a bien justifié ce surnom dans cette affaire, où seul il a abordé et successivement défait six régiments autrichiens.

Sur la gauche, à deux heures après midi, le général Morand rencontra également une division autrichienne, qu'il attaqua en tête, tandis que le duc de Dantzick, avec un corps bavarois, parti d'Abensberg, vint la prendre en queue. Cette division fut bientôt débusquée de toutes ses positions, et laissa quelques centaines de morts et de prisonniers. Le régiment entier des dragons de Levenher fut détruit par les chevau-légers bavarois, et son colonel fut tué.

A la chute du jour, le corps du due de Dantzick fit sa jonction avec celui du duc d'Auerstaedt.

Dans toutes ces affaires les généraux Saint-Hilaire et Friant se sont particulièrement distingués.

Ces malheureuses troupes autrichiennes, qu'on avait amenées de Vienne au bruit des chansons et des fifres, en leur faisant

croire qu'il n'y avait plus d'armée française en Allemagne et qu'elles n'auraient affaire qu'aux Bavarois et aux Wurtembergois, montrèrent tout le ressentiment qu'elles concevaient contre leurs chefs des erreurs où ils les avaient entretenues, et leur terreur ne fut que plus grande à la vue de ces vieilles bandes qu'elles étaient accoutumées à considérer comme leurs maîtres.

Dans tous ces combats notre perte fut peu considérable en comparaison de celle de l'ennemi, qui surtout perdit beaucoup d'officiers et de généraux, obligés de se mettre en avant pour donner de l'élan à leurs troupes. Le prince de Lichtenstein, le général de Lusignan et plusieurs autres furent blessés. La perte des Autrichiens en colonels et officiers de moindre grade est extrêmement considérable.

BATAILLE D'ABENSBERG, LE 20.

L'Empereur résolut de battre et de détruire le corps de l'archiduc Louis et celui du général Hiller, forts ensemble de soixante mille hommes. Le 20, Sa Majesté se porta à Abensberg; elle donna ordre au duc d'Auerstaedt de tenir en respect les corps de Hohenzollern, Rosemberg et de Lichtenstein, pendant qu'avec les deux divisions Morand et Gudin, les Bavarois et les Wurtembergeois elle attaquait de front l'armée de l'archiduc Louis et du général Hiller, et faisait couper les communications de l'ennemi par le duc de Rivoli, en le faisant passer à Freysing, et de là sur les derrières de l'arinée autrichienne.

Les divisions Morand et Gudin formèrent la gauche et manouvrèrent sous les ordres du duc de Montebello. L'Empereur se décida à combattre ce jour-là à la tête des Bavarois et des Wurtembergeois. Il fit réunir en cercle les officiers de ces deux armées et leur parla longtemps. Le prince royal de Bavière traduisait en allemand ce qu'il disait en français. L'Empereur leur fit sentir la marque de confiance qu'il leur donnait. Il dit aux officiers bavarois que les Autrichiens avaient toujours été leurs ennemis; que c'était à leur indépendance qu'ils en voulaient; que, depuis plus de deux cents ans, les drapeaux bavarois étaient déployés contre la maison d'Autriche; mais que cette fois il les

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