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Le deuxième corps, commandé par le maréchal duc de Reggio, sur la Drissa.

Le dixième corps, commandé par le duc de Tarente, était sur Dunabourg et Riga.

Le 8 douze mille hommes de cavalerie ennemie se portèrent sur Inkovo et attaquèrent la division du général comte Sébastiani, qui fut obligé de battre en retraite l'espace d'une demilieue, pendant toute la journée, en éprouvant et faisant éprouver à l'ennemi des pertes à peu près égales. Une compagnie de voltigeurs du vingt-quatrième régiment d'infanterie légère, faisant partie d'un bataillon de ce régiment qui avait été confié à la cavalerie pour tenir position dans le bois, a été prise. Nous avons eu deux cents hommes environ tués et blessés; l'ennemi peut avoir perdu le même nombre d'hommes.

Le 22 l'armée ennemie partit de Smolensk et marcha par différentes directions avec autant de lenteur que d'hésitation sur Porietch et Nadra.

Le 10 l'Empereur résolut de marcher à l'ennemi et de s'emparer de Smolensk en s'y portant par l'autre rive du Borysthène. Le roi de Naples et le maréchal duc d'Elchingen partirent de Lioznau et se rendirent sur le Borysthène près de l'embouchure de la Bérésina, vis-à-vis de Khomino, où, dans la nuit du 23 au 24, ils jetèrent deux ponts sur le Borysthène.

Le vice-roi partit de Souraj et se rendit par Janavitsko et Lunwavitschi à Rasasna, où il arriva le 14.

Le prince d'Eckmülh réunit tout son corps à Doubrowna le 13.

Le général comte Grouchy réunit le troisième corps de cavalerie à Rasasna le 12.

Le général comte Éblé fit jeter trois ponts à Rasasna le 12. Le quartier général partit de Witepsk et arriva à Rasasna le 15. Le prince Poniatowski partit de Mohilow et arriva le 13 à Romanew.

Le 14, à la pointe du jour, le général Grouchy marcha sur Leodié; il en chassa deux régiments de Cosaques, et s'y réunit avec le corps de cavalerie du général comte Nansouty.

Le même jour le roi de Naples, appuyé par le maréchal duc

d'Elchingen, arrivaà Krasnoi : la septième division ennemie, forte de cinq mille hommes et soutenue par deux mille chevaux et douze pièces de canon, était en position devant cette ville. Elle fut attaquée et dispersée en un instant par le duc d'Elchingen. Le vingt-huitième régiment d'infanterie légère attaqua la petite ville de Krasnoi à la baïonnette avec intrépidité; la cavalerie exécuta des charges admirables. Le général de brigade baron Bordesoulle et le troisième régiment de chasseurs se distinguèrent. La prise de huit pièces d'artillerie, dont cinq de douze et deux licornes, et de quatorze caissons attelés, quinze cents prisonniers, un champ de bataille jonché de plus de mille cadavres russes, tels furent les avantages du combat de Krasnoi, où la division russe, qui était de cinq mille hommes, perdit la moitié de son monde.

S. M. avait, le 15, son quartier général à la porte de Kovonitava.

Le 16 au matin les hauteurs de Smolensk furent couron⚫ nées; la ville présenta à nos yeux une enceinte de murailles de quatre mille toises de tour, épaisses de dix pieds et hautes de vingt-cinq, entremêlées de tours, dont plusieurs étaient armées de canons de gros calibre.

Sur la droite du Borysthène on apercevait et l'on savait que les corps ennemis tournés revenaient en grande hâte sur leurs pas pour défendre Smolensk. On savait que les généraux ennemis avaient des ordres réitérés de leur maître de livrer bataille et de sauver Smolensk. L'Empereur reconnut la ville, et plaça son armée, qui fut en position dans la journée du 16. Le maréchal duc d'Elchingen eut la gauche appuyant au Borysthène; le maréchal prince d'Eckmlüh, le centre; le prince Poniatowski, la droite; la garde fut mise en réserve au centre; le vice-roi en réserve à la droite, et la cavalerie sous les ordres du roi de Naples, à l'extrême droite : le duc d'Abrantès, avec le huitième corps, s'était égaré et avait fait un faux mouvement.

Le 16 et pendant la moitié de la journée du 17 on resta en observation. La fusillade se soutint sur la ligne. L'ennemi occupait Smolensk avec trente mille hommes, et le reste de son armée se formait sur les belles positions de la rive droite du fleuve, vis-à-vis de la ville, communiquant par trois ponts. Smo

lensk est considéré par les Russes comme ville forte et comme le boulevard de Moscou.

Le 17, à deux heures après midi, voyant que l'ennemi n'avait pas débouché, qu'il se fortifiait dans Smolensk et qu'il refusait la bataille; que malgré les ordres qu'il avait et la belle position qu'il pouvait prendre, sa droite à Smolensk et sa gauche au cours du Borysthène, le général ennemi manquait de résolution, l'Empereur se porta sur la droite, et ordonna au prince Poniatowski de faire un changement de front, la droite en avant, et de placer sa droite au Borysthène, en occupant un des faubourgs par des postes et des batteries pour détruire le pont et intercepter la communication de la ville avec la rive droite. Pendant ce temps la maréchal prince d'Eckmülh eut ordre de faire attaquer deux faubourgs que l'ennemi avait retranchés à deux cents toises de la place et qui étaient défendus chacun par sept ou huit mille hommes d'infanterie et par du gros canon. Le général comte Friant eut ordre d'achever l'investissement, en appuyant sa droite au corps du prince Poniatowski et sa gauche à la droite de l'attaque que faisait le prince d'Eckmülh.

A deux heures après midi la division de cavalerie du comte Bruyères, ayant chassé les Cosaques et la cavalerie ennemie, occupa le plateau qui se rapproche le plus du pont en amont. Une batterie de soixante pièces d'artillerie fut établie sur ce plateau, et tira à mitraille sur la partie de l'armée ennemie restée sur la rive droite de la rivière, ce qui obligea bientôt les masses d'infanterie russe à évacuer cette position.

L'ennemi plaça alors deux batteries et vingt pièces de canon à un couvent pour inquiéter la batterie qui la foudroyait et celles qui tiraient sur le pont. Le prince d'Eckmülh confia l'attaque du faubourg de droite au général comte Morand, et celle du faubourg de gauche au général comte Gudin. A trois heures la canonnade s'engagea ; à quatre heures et demie commença une vive fusillade, et à cinq heures les divisions Morand et Gudin enlevèrent les faubourgs retranchés de l'ennemi avec une froide et rare intrépidité, et le poursuivirent jusque sur le chemin couvert, qui fut jonché de cadavres russes.

Sur notre gauche, le duc d'Elchingen attaqua la position que

l'ennemi avait hors de la ville, s'empara de cette position, et poursuivit l'ennemi jusque sur le glacis.

A cinq heures la communication de la ville avec la rive droite devint difficile, et ne se fit plus que par des hommes isolés.

Trois batteries de pièces de douze, de brèche, furent placées contre les murailles à six heures du soir, l'une par la division Friant et les deux autres par les divisions Morand et Gudin. On déposta l'ennemi des tours qu'il occupait par des obus qui y mirent le feu. Le général d'artillerie comte Sorbier rendit impraticable à l'ennemi l'occupation de ses chemins couverts, par des batteries d'enfilades.

Cependant, dès deux heures après midi, le général ennemi, aussitôt qu'il s'aperçut qu'on avait des projets sérieux sur la ville, fit passer deux divisions et deux régiments d'infanterie de la garde pour renforcer les quatre divisions qui étaient dans la ville. Ces forces réunies composaient la moitié de l'arméc russe. Le combat continua toute la nuit; les trois batteries de brèche tirèrent avec la plus grande activité. Deux compagnies de mineurs furent attachées aux remparts.

Cependant la ville était en feu. Au milieu d'une belle nuit d'août Smolensk offrait aux Français le spectacle qu'offre aux habitants de Naples une éruption du Vésuve.

A une heure après minuit l'ennemi abandorna la ville et rcpassa la rivière. A deux heures les premiers grenadiers qui montèrent à l'assaut ne trouvèrent plus de résistance; la place était évacuée; deux cents pièces de canon et mortiers de gros calibre et une des plus belles villes de la Russie étaient en notre pouvoir, et cela à la vue de toute l'armée ennemie.

Le combat de Smolensk, qu'on peut à juste titre appeler bataille, puisque cent mille hommes ont été engagés de part et d'autre, coûte aux Russes la perte de quatre mille sept cents hommes restés sur le champ de bataille, de deux mille prisonniers la plupart blessés et de sept à huit mille blessés. Parmi les morts se trouvent cinq généraux russes. Notre perte se monte à sept cents morts et à trois mille cent ou trois mille deux cents blessés. Le général de brigade Grabouski a été tué; les généraux de brigade Grandeau et Dalton ont été blessés. Toutes les trou

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pes ont rivalisé d'intrépidité. Le champ de bataille a offert aux yeux de deux cent mille personnes qui peuvent l'attester le spectacle d'un cadavre français sur sept ou huit cadavres russes. Cependant les Russes ont été pendant une partie des journées du 16 et du 17 retranchés et protégés par la fusillade de leurs créneaux. Le 18 on a rétabli les ponts sur le Borysthène que l'ennemi avait brûlés; on n'est parvenu à maîtriser le feu qui consumait la ville que dans la journée du 18, les sapeurs français ayant travaillé avec activité. Les maisons de la ville sont remplies de Russes morts et mourants.

Sur douze divisions qui composaient la grande armée russe, deux divisions ont été entamées et défaites aux combats d'Ostrowno; deux l'ont été au combat de Mohilow, et six au combat de Smolensk. Il n'y a que deux divisions et la garde qui soient restées entières.

Les traits de courage qui honorent l'armée et qui ont distingué tant de soldats au combat de Smolensk seront l'objet d'un rapport particulier. Jamais l'armée française n'a montré plus d'intrépidité que dans cette campagne.

Smolensk, le 23 août 1812.

Quatorzième bulletin de la grande armée.

Smolensk peut être considérée comme une des belles villes de la Russie. Sans les circonstances de la guerre qui y ont mis le feu, ce qui a consumé d'immenses magasins de marchandises coloniales et de denrées de toute espèce, cette ville eût été d'une grande ressource pour l'armée. Même dans l'état où elle se trouve, elle sera de la plus grande utilité sous le point de vue militaire. Il reste de grandes maisons qui offrent de beaux emplacements pour les hôpitaux. La province de Smolensk est trèsfertile et très-belle, et fournira de grandes ressources pour les subsistances et les fourrages.

Les Russes ont voulu, depuis les événements de la guerre, lever une milice d'esclaves paysans, qu'ils ont armés de mauvaises piques. Il y en avait déjà cinq mille réunis ici; c'était un objet de

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