Page images
PDF
EPUB

avant l'an 1809. Notre ministre de l'intérieur sera chargé de tous les détails relatifs à la construction du monument, et le directeur général de nos musées, de tous les détails des bas-reliefs, statues et tableaux.

7. Il sera acheté cent mille francs de rente en inscriptions sur le grand-livre, pour servir à la dotation du monument et à son entretien annuel.

8. Une fois le monument construit, le grand conseil de la Légion d'honneur sera spécialement chargé de sa garde, de sa conservation, et de tout ce qui est relatif au concours annuel.

9. Notre ministre de l'intérieur et l'intendant des biens de notre couronne sont chargés de l'exécution du présent décret. NAPOLÉON.

Au ministre de l'intérieur.

Posen, 6 décembre 1806.

La littérature a besoin d'encouragements, vous en êtes le ministre. Proposez-moi quelques moyens pour donner une secousse à toutes les différentes branches des belles-lettres, qui ont de tout temps illustré la nation.

Vous aurez reçu le décret que j'ai pris sur le monument de la Madeleine, et celui qui rapporte l'établissement de la Bourse sur cet emplacement. Il est cependant nécessaire d'avoir une Bourse à Paris. Mon intention est de faire construire une Bourse qui réponde à la grandeur de la capitale, et au nombre des af faires qui doivent s'y faire un jour. Proposez-moi un local convenable. Il faut qu'il soit vaste, afin d'avoir des promenades autour. Je voudrais un emplacement isolé.

Quand j'ai assigné un fonds de trois millions pour la construction du monument de la Madeleine, je n'ai voulu parler que du bâtiment, et non des ornements, auxquels, avec le temps, je veux employer une bien plus forte somme. Je désire qu'au préalable on achète les chantiers environnants, afin de faire une grande place circulaire au milieu de laquelle se trouvera le monument, et autour de laquelle je ferai bâtir des maisons sur un plan uniforme.

Il n'y aurait pas d'inconvénient à nommer le pont de l'école militaire, le pont d'léna. Proposez-moi un décret pour donner les noms des généraux et des colonels qui ont été tués à cette bataille aux différentes nouvelles rues.

Sur ce, etc.

Au ministre de l'intérieur.

NAPOLÉON.

Finkenstein, le 30 mai 1807.

Après avoir examiné attentivement les différents plans du mo nument dédié à la grande armée, je n'ai pas été un moment en doute. Celui de M. Vignon est le seul qui remplisse mes intentions. C'est un temple que j'avais demandé, et non une église. Que pourrait-on faire, dans le genre des églises, qui fùt dans le cas de lutter avec Sainte-Geneviève, même avec Notre-Dame, et surtout avec Saint-Pierre de Rome? Le projet de M. Vignon réunit à beaucoup d'autres avantages celui de s'accorder beaucoup mieux avec le Corps législatif et de ne pas écraser les Tuileries.

Je ne veux rien en bois. Les spectateurs doivent être placés, comme je l'ai dit, sur des gradins de marbre formant les amphithéâtres destinés au public.... Rien dans ce temple ne doit être mobile et changeant; tout, au contraire, doit être fixé à sa place. S'il était possible de placer à l'entrée du temple le Nil et le Tibre, qui ont été apportés de Rome, cela serait d'un trèsbon effet. Il faut que M. Vignon tâche de les faire entrer dans son projet définitif, ainsi que des statues équestres qu'on placerait au dehors, puisque réellement elles seraient mal dans l'intérieur. Il faut aussi désigner le lieu où l'on placera l'armure de François Ier prise à Vienne et le quadrige de Berlin.

Il ne faut pas de bois dans la construction de ce temple..... du granit et du fer tels doivent être les matériaux de ce monument. On objectera que les colonnes actuelles ne sont pas de granit; mais cette objection ne serait pas bonne, puisque, avec le temps, on peut renouveler ces colonnes sans nuire au monument. Cependant, si l'on prouvait que l'emploi du granit entraî

il est

nerait dans une trop grande dépense et dans de longs délais, il faudrait y renoncer, car la condition principale du projet, c'est qu'il soit exécuté dans trois ou quatre ans, et, au plus, en cinq ans. Ce monument tient en quelque chose à la politique ; dès lors du nombre de ceux qui doivent se faire vite. Il convient néanmoins de s'occuper à chercher du granit pour d'autres monuments que j'ordonnerai, et qui, par leur nature, peuvent permettre de donner trente, quarante ou cinquante ans à leur construction.

Je suppose que toutes les sculptures intérieures seront en marbre, et qu'on ne me propose pas des sculptures propres aux salons et aux salles à manger des femmes des banquiers de Paris. Tout ce qui est futile n'est pas simple et noble; tout ce qui n'est pas de longue durée ne doit pas être employé dans ce monument. Je répète qu'il n'y faut aucun espèce de meubles, pas même des rideaux.

Quant au projet qui a obtenu le prix, il n'atteint pas mon but; c'est le premier que j'ai écarté. Il est vrai que j'ai donné pour base de conserver la partie du bâtiment de la Madeleine qui existe aujourd'hui ; mais cette expression est une ellipse. Il était sous-entendu que l'on conserverait de ce bâtiment le plus possible; autrement il n'y aurait pas eu besoin de programme, il n'y avait qu'à se borner à suivre le plan primitif. Mon intention était de n'avoir pas une église, mais un temple, et je ne voulais ni qu'on rasât tout, ni qu'on conservât tout. Si ces deux propositions étaient incompatibles, savoir, celle d'avoir un temple et celle de conserver les constructions actuelles de la Madeleine, il était simple de s'attacher à la définition d'un temple. Par temple, j'ai entendu un monument tel qu'il y en avait à Athènes, et qu'il n'y en a pas à Paris. Il y a beaucoup d'églises à Paris; il y en a dans tous les villages. Je n'aurais assurément pas trouvé mauvais que les architectes eussent fait observer qu'il y avait une contradiction entre l'idée d'avoir un temple et l'intention de conserver les constructions faites pour une église. La première était l'idée principale, la seconde était l'idée accessoire. M. Vignon a donc deviné ce que je voulais.....

NAPOLÉON.

Haluski, le 27 décembre 1806.

Quarante-cinquième bulletin de la grande armée.

Le général russe Benigsen commandait une armée que l'on évaluait à soixante mille hommes. Il avait d'abord le projet de couvrir Varsovie, mais la renommée des événements qui s'étaient passés en Prusse lui porta conseil, et il prit le parti de se retirer sur la frontière russe. Sans presque aucun engagement, les armées françaises entrèrent dans Varsovie, passèrent la Vistule et occupèrent Prag. Sur ces entrefaites, le feld-maréchal Kaminski arriva à l'armée russe au moment même où la jonction du corps de Benigsen avec celui de Buxhowden s'opérait. Il s'indignait de la marche rétrograde des Russes (1). Il crut qu'elle compromettait l'honneur des armes de sa nation, et marcha en avant. La Prusse faisait instances sur instances, se plaignant qu'on l'abandonnait après lui avoir promis de la soutenir, et disant que le chemin de Berlin n'était ni par Grodno, ni par Olita, ni par Brezsc; que ses sujets se désaffectionnaient; que l'habitude de voir le trône de Berlin occupé par des Français était dangereuse pour elle et favorable à l'ennemi. Non-seulement le mouvement rétrograde des Russes cessa, mais ils se reportèrent en avant. Le 5 décembre, le général Benig

(1) On se rappellè, en effet, la scène de Potsdam et l'alliance jurée entre la Russie et la Prusse. Les Russes avaient promis de soutenir leurs alliés; on sait comment ils les avaient secourus. L'armée russe, qui ne s'était mise en marche que pour assister de loin aux combats qui allaient se livrer, comme si son dessein eût été de laisser à l'Empereur le temps d'accabler les Prussiens, s'était empressée de rétrograder à la première nouvelle de la bataille d'léna. L'empereur de Russie, suivant toute apparence, ne voulait pas s'exposer de nouveau avant d'avoir vu de quel côté pencherait la fortune. Il voulait attendre l'effet des victoires promises par les Prussiens: c'est alors qu'il serait arrivé pour en partager la gloire et les avantages au moins de frais possible. Il n'y a là rien de blâmable, puisqu'enfin c'est de la politique, et que la politique ne se compose pas d'autre chose, dit on Mais que devenaient les serments de Potsdam? Ona vu que l'empereur de Russie avait traité avec la France, après Iéna, et que l'Angleterre lui remit les armes à la main en lui faisant violer le traité. Il est vrai que la cour de Russie dit que son ambassadeur n'avait pas eu de pouvoirs pour conclure.

sen rétablit son quartier général à Pultusk. Les ordres étaient d'empêcher les Français de passer la Narew, de reprendre Prag, et d'occuper la Vistule jusqu'au moment où l'on pourrait effectuer des opérations offensives d'une plus grande impor

tance.

La réunion des généraux Kaminski, Buxhowden et Benigsen, fut célébrée au château de Sierock par des réjouissances et des illuminations qui furent aperçues du haut des tours de Varsovie.

Cependant, au moment même où l'ennemi s'encourageait par des fêtes, la Narew se passait huit cents Français jetés de l'autre côté de cette rivière, à l'embouchure de la Wrka, s'y retranchèrent cette même nuit ; et lorsque l'ennemi se présenta le matin pour les rejeter dans la rivière, il n'était plus temps; ils se trouvaient à l'abri de tout événement.

Instruit de ce changement survenu dans les opérations de l'ennemi, l'Empereur partit de Posen le 16. Au même moment il avait mis en mouvement son armée. Tout ce qui revenait des discours des Russes faisait comprendre qu'ils voulaient reprendre l'offensive.

Le maréchal Ney était depuis plusieurs jours maître de Thorn. Il réunit son corps d'armée à Gallup. Le maréchal Bessières, avec le deuxième corps de la cavalerie de la réserve, composé des divisions de dragons des généraux Sahuc et Grouchy, et de la division des cuirassiers d'Hautpoult, partit de Thorn pour se porter sur Biezun. Le maréchal prince de PonteCorvo partit avec son corps d'armée pour le soutenir. Le maréchal Soult passait la Vistule vis-à-vis de Plock; le maréchal Augereau la passait vis-à-vis de Zakroczym, où l'on travaillait à force à établir un pont. Celui de la Narew se poussait aussi vi

vement.

Le 22, le pont de la Narew fut terminé. Toute la réserve de cavalerie passa sur-le-champ la Vistule à Prag, pour se rendre sur la Narew. Le maréchal Davoust y réunit tout son corps. Le 23, à une heure du matin, l'Empereur partit de Varsovie, et passa la Narew à neuf heures. Après avoir reconnu l'Wrka et les retranchements considérables qu'avait élevés l'ennemi, il fit

« PreviousContinue »