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lavoir placé sur le bord d'une ean courante, dans laquelle on plonge les corbeilles; on agite bien la laine en la soulevant et en l'ouvrant sans la retourner ni la brouiller, et l'opération est finie quand l'eau s'écoule claire de la corbeille au moment où on la soulève de l'eau. On étend ensuite la laine sur des toiles pour la sécher.

Ce lavage dit lavage marchand ne dégraisse pas à fond; il reste encore une quantité de gras qui varie de sept à quinze pour cent. Le dégraissage à fond ne se fait guère qu'au moment de la mise en fabrication, parce que, si bien dégraissée que soit la laine, le gras repousse toujours à la longue, et que si le dégrais. sage a été opéré trop longtemps à l'avance, le gras repoussé peut nuire aux opérations de fabrication. Le dégraissage à fond s'opère par des lavages dans une dissolution de savon à une température de 40o à 50°. Après ce lavage la laine est fortement exprimée par torsion ou par compression entre des cylindres, pour en chasser tout le savon, et on la fait sécher comme précédemment.

Ces opérations, lavage et dégraissage, bien que constituant des industries assez importantes, sont en dehors des procédés manufacturiers. Ce n'est que quand la laine a subi ces opérations préliminaires que le manufacturier s'en empare, et lui fait subir la première opé ration, qui est la filature, dont nous allons exposer les procédés, les autres opérations, tissage, etc., faisant l'objet d'articles particuliers.

Filature de laine.

Avant d'être employée à la confection des tissus, la laine doit être convertie en fil. Nous avons à l'article FILATURE donné de ce mot une définition qui s'applique à la laine aussi bien qu'au coton. Nous avons dit également que des principes sur lesquels sont basés les procédés en usage pour convertir le coton en fil continu découlent les méthodes employées pour filer les autres matières filamenteuses, et c'est ce que démontrera, pour la laine en particulier, l'exposé des deux procédés de filature auxquels elle peut être soumise.

Nous disons les deux procédés de filature : en effet, parmi les nombreuses sortes de tissus que l'on fabrique avec la laine, il en est qui présentent entre eux des différences d'une autre nature que celles qui résulteraient d'une modification dans le procédé de tissage; telle est celle qui existe par exemple entre une pièce de casimir et une pièce de mérinos, et en général entre les tissus tirés à poil et les tissus lisses. Il a fallu pour la première un fil façonné de telle sorte que dans l'opération du lainage une partie des filaments pût se dégager du fil et couvrir le tissu, sans en altérer

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sensiblement la constitution; cela résulte d'un entortillement particulier des filaments dans la formation du til; tandis que pour la seconde les filaments sont droits et parallèles entre eux dans le fil, et le lainage ne pourrait s'opérer sans qu'il en résultât une singulière altération dans la force du tissu.

La première est fabriquée avec des fils provenant de la filature de laine cardée, l'autre avec des fils provenant de la filature de laine peignée.

1. Filature de laine cardée.

Ce genre de filature, comme l'indique son nom, repose sur l'emploi de la carde comme moyen de préparation de la laine, avant qu'elle soit soumise à l'action du métier à filer. On l'appelle aussi filature en gras, parce qu'avant de faire passer la laine dans les cardes on la lubréfie avec une certaine quantité d'huile : par opposition à cette dénomination, on appelle quelquefois filature en maigre la filature de laine peignée, qui n'emploie aucun corps lubréfiant pour faciliter ses opérations.

La filature de laine cardée comprend trois opérations principales : le battage ou louvetage, le cardage, et le filage.

Après avoir été dépouillée de son suint et teinte, lorsqu'il s'agit de faire des tissus de couleur, la laine est soumise à un premier battage, qui a pour but de la diviser et d'en faire tomber les ordures. Cette opération se fait dans une machine appelée batteuse, dont un type est représenté en coupe transversale dans notre Atlas, Arts mécaniques,pl.XXXIV, fig. 1.

La laine, placée à la main sur une toile sans fin, tendue par deux rouleaux a, b, est saisie entre deux cylindres c, d, dont le supérieur d est cannelé parallèlement à son axe et appuyé sur celui de dessous au moyen de deux leviers munis de contre-poids, qui exercent une pression sur ses tourillons. Ces cylindres sont placés à l'entrée d'une auge cylindrique en bois e ƒ I, dans laquelle se meut à très-grande vitesse un tambour A, garni à sa circonférence de rangées de dents de fer, dont la pointe passe le plus près possible des cylindres alimentaires c, d. La laine débitée par ces cylindres est saisie et divisée par les dents du tambour, qui, tournant dans le sens de la flèche, la projette dans une autre auge g h, où elle rencon. tre un cylindre B animé aussi d'une trèsgrande vitesse et armé de dents en fer C, de 0,18 à 0,20 de longueur, et disposées en hélice sur toute sa longueur. Ces dents, dans le mouvement de révolution de B, passent chacune entre des dents semblables disposées en ligne sur une traverse fixe K.

Le cylindre B est trois ou quatre fois plus long que le tambour A, qui se trouve en face

d'une de ses extrémités ; à l'extrémité opposée est une espèce d'entonnoir EF, par lequel la laine sort de la machine. Le tambour A est recouvert d'une enveloppe cylindrique en bois, ou capotte, dont la partie supérieure va se raccorder en h avec l'enveloppe également cylindrique du cylindre B; les faces latérales de ces enveloppes sont formées de panneaux en bois, de manière que tout le système est enfermé. Ces enveloppes sont assez légères pour être facilement enlevées quand il faut visiter l'intérieur de la machine.

La laine projetée par le tambour A est prise par les dents C et transportée, en passant entre les dents disposées tout le long de la traverse K, jusqu'à l'extrémité opposée, où elle est projetée au dehors par l'ouverture EF et reçue sur le plancher préparé à cet effet. En passant entre les dents de la traverse K elle reçoit de fortes secousses qui font tomber les ordures, lesquelles passent à travers un grillage gh, placé dans la partie inférieure de l'auge. Un grillage semblable et destiné au même usage est établi sous le tambour A.

En sortant de la batteuse la laine est étendue sur un plancher spécial; et on procède à l'encémage ou grainage, c'est-à-dire qu'on l'arrose d'une certaine quantité d'huile d'olive qui varie de dix-huit à vingt-cinq pour cent, suivant les tissus que l'on veut fabriquer et la finesse du fil qu'on veut obtenir. Aujourd'hui on diminue la proportion d'huile en la mélangeant avec une certaine quantité d'eau de savon. La laine encémée, et retournée pour que l'huile se partage uniformément dans la masse, passe ensuite dans la machine appelée loup.

Cette machine est presque identique au premier élément de la batteuse que nous venons de décrire. Le loup, en effet, se compose d'un tambour garni de dents en fer sur toute sa surface, au lieu de n'en avoir que sur une partie, comme on le voit au tambour A. Il est du reste enfermé comme celui-ci dans une auge recouverte d'une capote cylindrique, avec un grillage à la partie inférieure pour laisser pas. ser les ordures; mais il tourne en sens inverse de celui qui est indiqué dans la batteuse; et la partie inférieure de l'auge est ouverte en ƒ I. La laine est placée sur une toile sans fin disposée de la même manière; elle est prise par deux cylindres alimentaires dont l'inférieur est cannelé; elle est saisie à la sortie des cylindres alimentaires par les dents du tambour, qui après l'avoir mise dans un état de division convenable pour passer à l'opération du cardage, la lancent au dehors par l'ouverture laissée en ƒ I.

La carde à laine ne diffère guère de la carde à coton que par la substitution de cy. lindres mobiles, garnis de rubans de carde, aux chapeaux fixes dont nous avons parlé à

l'article FILATURE DE COTON. Elle se compose d'un tambour A (fig. 2, planche XXXIV) garni de dents de cardes sûr toute sa circonférence. Autour de ce tambour sont disposés des organes composés chacun de deux cylindres a, b, garnis aussi de dents de cardes, tangents entre eux et au tambour A, le sens suivant lequel sont placés les crochets qui forment les dents ainsi que le sens de rotation concourant aux effets que nous expliquerons plus bas. L'usage des cylindres c et d, d sera expliqué en même temps. A la suite de la série de cylindres a, b, se présente un autre cylindre B, garni de dents qui ne font pas le crochel, mais sont seulement inclinées sur la surface. Ce cylindre, appelé volant, sert à détacher la laine engagée dans les dents du tambour A, et facilite la prise de cette laine par un autre tambour C placé au-dessous, lequel se nomme peigneur. Enfin la laine est détachée du peigneur par un petit cylindre g et s'attache à la circonférence d'un tambour en bois lisse D, tandis qu'un rouleau h, également en bois lisse, la maintient sur ce tambour. La laine est placée à la main, et le plus uniformément possible sur une toile sans fin tendue par deux rouleaux e, ƒ; conduite par le mouvement progressif de la toile, elle passe sous une tablette c, et est amenée entre deux cylindres d,d garnis de rubans de carde, et que l'on nomme alimentaires ou entrée de carde, animés d'un mouvement inverse de rotation très-lent; à sa sortie des alimentaires, elle est saisie par les dents d'un premier cylindre qui tourne avec rapidité et que l'on nomme roule ta-bosse; elle se présente dans un grand état de division sur ce cylindre, dont l'action est de la débarrasser d'une grande partie des ordures qu'ont pu y laisser la batteuse et le loup : de là elle est saisie par les crochets du tambour principal ou gros tambour A, lequel se meut aussi avec une grande rapidité; en passant devant le premier cylindre b, appelé travailleur, une partie de la laine est saisie par ce cylindre, auquel le reprend le cylindre a, qui se nomme indistinctement nettoyeur, balayeur, ou débourreur. Celui-ci la rend au tambour, qui la reporte au second travailleur, et ainsi de suite jusqu'au dernier. La laine se trouve ainsi d'autant plus uniformément divisée et répartie sur le tambour A, que le nombre de travailleurs et balayeurs est plus grand. Ce nombre était de trois dans l'origine, on l'a depuis porté jusqu'à cinq. Le travail que subit ainsi la laine s'explique parfaitement, si, outre le sens du mouvement des différents orga. nes indiqué par des flèches et celui de la direction des crochets, on considère que les travailleurs b reçoivent un mouvement trèslent, et que les nettoyeurs a sont animés d'un mouvement rapide, quoique moindre que celui

du tambour C; en effet les premiers reçoivent leur mouvement d'une chaîne sans fin commandée par une roue k placée sur l'arbre du tambour A, dont le mouvement est très-lent relativement à celui du tambour A, tandis que les seconds le reçoivent d'une courroie sans fin commandée par une grande poulie E, fixée sur l'arbre du tambour A, laquelle donne en même temps le mouvement au roule-ta-bosse c et au volant B. Faisons observer en passant que nous parlons de mouvement tangentiel et non de mouvement angulaire.

La laine reçue par le tambour A, à sa sortie du dernier travailleur, passe devant les dents du volant B, dont la vitesse est plus considérable que celle du tambour; les dents longues et flexibles de cet organe pénètrent légèrement dans celles du tambour (au contraire des autres organes, qui en passent le plus près possible, mais ne doivent pas le toucher), et en rabattent la laine, qui est immédiatement reçue par le peigneur B, d'où elle se détache en une nappe mince qui vient s'appliquer, comme nous l'avons expliqué tout à l'heure, sur le tambour D, dit tambour à malelas ou à peau de mouton. Quand le matelas de laine formé par la superposition de la nappe sortie du peigneur a l'épaisseur voulue, on le fend en travers, et on va le poser sur la toile sans fin d'une seconde carde, où la laine subit exactement le même travail.

La première carde se nomme carde briseuse ou simplement brisoir; la seconde prend la dénomination de repasseuse. Tous les matelas doivent contenir le même poids de laine. Pour cela, on prend un poids constant de laine, lequel est déterminé d'après la finesse du fil que l'on veut obtenir. La quantité de laine ainsi posée sert à former un matelas; et c'est quand tonte une pesée est passée dans le brisoir que l'on enlève le matelas du tambour à peau de mouton. Quant à la repasseuse, elle donne également des matelas uniformes, puisqu'ils sont formés chacun d'un matelas provenant du brisoir.

Ces derniers, à leur tour, sont placés derrière une troisième carde, dite finisseuse ou boudineuse, dans laquelle ils se travaillent de la même manière que dans la précédente, jusqu'au moment où la laine est reçue par le peigneur. Autrefois, et aujourd'hui encore dans plusieurs filatures, le peigneur (fig. 3, pl. XXXIV), au lieu d'être garni sur toute sa circonférence de rubans de cardes, ne recevait qu'un certain nombre de plaques transversales, espacées entre elles par un intervalle; toute la laine reçue sur une de ces plaques se trouvait détachée par un peigne, formé d'une lame de scie, placée transversalement très près du peigneur, et animée d'un mouvement alternatif vertical. La nappe ainsi détachée et divisée ENCYCL. MOD. - T. XIX,

naturellement par les solutions de continuité existant entre les plaques, tombait dans une auge cylindrique, dans laquelle elle se trouvait roulée en boudins par un cylindre en bois, et venait tomber sur une toile sans fin tendue par deux rouleaux. Ces boudins ou loquettes (d'où le nom de carde à loquettes, que l'on donne à cette sorte de cardes), étaient pris par des enfants qui les attachaient derrière le métier dit en gros, pour en former un premier fil, lequel se plaçait der. rière le métier en fin, qui en faisait un fil de la grosseur demandée. Ces loquettes n'avaient qu'une longueur égale à la largeur de la carde, ce qui exigeait des rattaches multipliées : cet inconvénient, ajouté à celui qui résultait de l'allongement des loquettes par l'effet des secousses que leur imprimait le mouvement du rattacheur, a fait abandonner généralement ce mode, pour la carde que l'on appela d'abord américaine, et qui diffère de la carde briseuse et repasseuse par l'addition d'un appareil qui remplace le métier en gros, et qui est représenté en coupe dans la fig. 4, pl. XXXIV.

La laine, détachée du tambour A par le volant B, est reçue sur un premier peigneur C, qui, au lieu d'être garni de dents de cardes sur toute sa surface, ne porte que des anneaux ou manchons d'une certaine largeur, et espacés entre eux d'une quantité à peu près égale à leur largeur. Ce peigneur ne dépouille le tambour A que suivant des zones circulaires correspondantes aux manchons. Un autre peigneur C', semblable, mais dont les manchons correspondent aux intervalles laissés entre ceux du premier, dépouille le tambour A de ce qu'a laissé le peigneur C; de sorte que le tambour A se trouve complétement dépouillé par les deux peigneurs C et C'. En face de chaque manchon de l'un et de l'autre peigneur sont disposés des tubes c,c', analogues à ceux que l'on emploie dans le banc à tubes (Voy. FILAture de coton), et qui reçoivent leur mouvement de rotation d'une poulie b, au moyen de deux courroies sans fin fc, ec'. Les filaments se trouvent ainsi comprimés en même temps que détachés du peigneur, par la torsion qu'ils reçoivent entre le peigneur et le tube; et ils conservent assez d'adhérence entre eux à la sortie du tube pour que le boudin continu que l'on obtient puisse, tout détordu qu'il est à la sortie du tube, être enroulé sur des bobines gg', qui se placent derrière le métier en fin, ces boudins étant d'assez faible section pour remplacer complétement le fil obtenu autrefois sur le métier en gros.

On voit que la laine, avant de passer sur le métier en fin, passe sur trois cardes; l'ensemble de ces trois cardes constitue ce que l'on appelle un assortiment.

Il est essentiel que tous les organes des 2

cardes, sauf le volant, soient embourrés, c'està dire qu'il faut introduire entre les dents ou crochets des cardes, de la laine extrêmement divisée, telle que les tontisses ou extrémités de poils qui tombent sous l'action des lames des machines à tondre les draps. On mélange ces tontisses avec une certaine quantité d'huile de lin lithargée, et on l'entasse dans les garnitures des cardes, en appuyant avec une brosse, jusqu'à l'extrémité des dents; il en résulte une espèce de mastic élastique, qui soutient les dents des cardes et ne laisse agir sur la laine que leur extrémité.

Nous voilà arrivés à la dernière opération ou filage. Nous ne parlerons que pour mémoire du métier en gros, presque généralement abandouné aujourd'hui; il est basé sur le principe de la jeannette, qui a été décrite à l'article FILATURE DE COTON, et il n'eu diffère guère que parce qu'au lieu d'être alimenté par des bobines sur lesquelles se trouve déjà un fil formé, il est alimenté par les loquettes fournies par la carde à loquettes; il ne nous reste qu'à donner une idée du métier en fin.

Le métier actuellement employé diffère peu, dans sa forme générale, du mull-jenny décrit dans l'article FILATURE DE COTON; seulement ici l'étirage ne se fait pas entre des cylindres cannelés. Les bobines garnies de boudins sortis de la carde finisseuse sont placées sur un rouleau conducteur A (fig. 1, planche XXXV), placé à l'arrière du métier. Le boudin passe de là sur un cylindre en fer a, uni ou cannelé à volonté, et est maintenu par la pression d'un rouleau métallique superposé. Le cylindre a reçoit son mouvement d'engrenages communiquant avec l'arbre de la roue de volée B, qui reçoit le mouvement du moteur, par la poulie C; il communique aussi par une petite courroie ou par une chaîne avec le rouleau A, auquel il communique un mouvement tangen. tiel égal au sien. Si maintenant on fait tourner la roue de volée, le cylindre a tournant dans le sens de la flèche ainsi que le rouleau A, va débiter une longueur de boudin égale au développement de sa surface pendant le mouvement de rotation, et le chariot D reculera de la même quantité; quand la longueur de boudin déterminée suivant le fil à obtenir est débitée, les engrenages qui communiquaient le mouvement de la roue de volée au cylindre a se désengrènent par un moyen quelconque, et il ne se débite plus de boudin; le fileur saisit alors le chariot par la baguette, et l'amène en arrière jusqu'au bout de sa course en étirant ainsi le boudin pendant que la roue de volée, continuant son mouvement de rotation, donne la torsion aux fils, au moyen des cardes qui, par des renvois divers, donnent le mou vement au cylindre E placé dans le chariot, lequel le donne aux broches sur lesquelles

s'opère le renvidage. La torsion se communique d'abord aux parties les plus minces du fil, les parties les plus grosses n'étant pas autant tordues, permettent l'étirage sous la tension imprimée par le mouvement du chariot, et un fileur attentif obtient ainsi un fil trèségal. Le renvidage s'opère absolument comme pour le coton, sauf la forme de la bobine, qui est ici cylindrique dans la partie inférieure et conique dans la partie supérieure seulement.

D'après la manière dont on obtient un fil régulier, le mouvement du chariot doit être continuellement ralenti. On a cherché à obtenir ce résultat indépendamment de la main du fileur, en communiquant le mouvement au chariot par l'intermédiaire d'une poulie spirale, dont le diamètre allait en décroissant suivant une certaine loi. Nous avons vu des métiers montés ainsi, qui fonctionnaient assez bien; mais il faut dire que le problème n'est pas entièrement résolu, attendu qu'il n'y a rien d'absolu dans la loi de ralentissement du chariot et qu'elle est subordonnée à des circonstances que le fileur apprécie, et qui lui font modifier la marche quand il le faut.

En sortant du métier, le fil est dévidé et mis en écheveau pour passer au dégraissage, qui se fait avec de l'eau de savon, comme pour le dégraissage à fond de la laine.

Frappés des inconvénients qu'entraîne le dégraissage mécanique, MM. Péligot et Alcan ont substitué l'acide oléique à l'huile pour l'encémage. Il suffit alors pour le dégraissage de plonger le fil dans une dissolution alcaline. Une action chimique se trouve ainsi substituée à l'action mécanique du dégraissage. Nous ne nions pas les avantages de ce procédé; mais il paraît qu'il offre quelques inconvénients, puisqu'après avoir été adopté dans presque tous les établissements de Louviers et d'Elbeuf, un grand nombre de ces établissements y ont renoncé pour revenir à l'ancien mode de graissage. Il paraît qu'entre autres inconvénients l'acide oléique corrodait les mains des ouvriers, dont une grande partie refusaient de travailler dans les établissements où ce procédé était employé.

Filature de laine peignée.

Toutes les laines, quelles que soient leur nature et leurs qualités particulières, peuvent être traitées par la carde. Il suffit pour cela de quelques modifications dans l'écartement des organes des machines et dans la grosseur des dents de carde: elles n'ont pas d'ailleurs à subir d'autre opération préalable que celle du dégraissage.

Il n'en est pas de même pour celles qui doivent être traitées par le second procédé de filature ou filature en peigne. Elles doivent

d'abord être choisies parmi les plus longues et les plus fortes, les laines courtes ou trop ten. dres étant réservées pour la carde. Après avoir été dégraissées à fond et battues, elles sont soumises à une opération préalable qui est le peignage. Cette opération, qui a pour but de démêler les filaments et de les placer parallèlement entre eux, se fait, soit à la main, soit mécaniquement.

Le peignage à la main est encore aujourd'hui le plus en usage. Il se fait au moyen de deux instruments appelés peignes, représentés par la figure 2, planche XXXV. Le peigne se compose de deux ou trois rangées parallèles de broches aiguës en acier, de 0,20 à 0m,25 de longueur, rivées par la base dans une pièce de bois revêtue de corne ab, assemblée avec un manche en bois cd, de manière que les broches forment avec ce manche un angle droit. Dans certaines localités cet angle est de 75 à 80 degrés. Les rangées sont d'inégale hauteur; elles décroissent de 0m,015 à 0,020, en se rapprochant du manche.

Pour peigner la laine, l'ouvrier commence par chauffer le peigne, en engageant les broches dans les ouvertures d'un fourneau disposé pour cet usage; puis il le fixe par le manche, les dents tournées en haut, à un poteau. Alors il prend une poignée de laine de 10 à 12 grammes, qu'il roule dans ses mains, après l'avoir légèrement graissée avec un peu d'huile ou de beurre, et l'engage dans le peigne en la retirant à lui de manière à y laisser quelques filaments, et réitère ainsi jusqu'à ce que le peigne soit suffisamment chargé. Cela fait il prend le second peigne également chauffé, et peigne la laine engagée dans le premier; la laine se distribue sur les deux peignes, et cette opération se continue jusqu'à ce que les filaments soient parfaitement démêlés. Quand ce résultat est obtenu, le peigneur rassemble entre ses doigts les extrémités de la mèche ainsi formée, et tire à lui peu à peu toute la masse, qui s'allonge en un ruban ou peignon plus ou moins long; ce qui reste dans le peigne forme ce que l'on appelle les blouses et est employé à la carde. Les peignons sont ensuite dégraissés à fond dans un bain de savon, puis séchés et mis en paquets, pour être envoyés en filature.

Ce procédé ne permet pas à un ouvrier de préparer plus de 1 à 2 kilog. de laine par jour : aussi a-t-on cherché à faire cette opération mécaniquement. En 1827 M. J. Collier inventa une peigneuse mécanique, composée de deux grands anneaux en fonte, garnis de dents de peigne à la circonférence, et chauffés intérieurement par de la vapeur. Ces peignes se chargent à la manière ordinaire; puis le peignage s'opère en donnant un mouvement de rotation capide aux deux anneaux, qui, par un méca.

nisme particulier, se rapprochent de manière à engager réciproquement leurs dents dans la laine l'un de l'autre et à la peigner ainsi trèsrapidement. Le tirage du ruban s'y fait aussi mécaniquement, entre deux rouleaux d'appel. On a reproché à cette machine de rompre les filaments de la laine; cependant son usage s'est assez répandu.

Une fois la laine obtenue en peignons ou en rubans, toutes les opérations successives sont analogues entre elles, et aux procédés employés pour le coton à partir du banc d'étirage. Quel que soit le nombre des machines par lesquelles on fait passer la laine peignée, tout le procédé se réduit à des doublages et étirages successifs, qui s'opèrent partout au moyen de l'appareil représenté en coupe et en plan fig. 3, pl. XXXV. Il se compose d'un premier cylindre a, dit cylindre alimentaire : ce cylindre est en fer et cannelé parallèlement à son axe, pour augmenter l'énergie de la pression exercée sur lui par un rouleau b en bois recouvert de peau de veau glacée : en avant du cylindre a, il s'en trouve un second b, dit engageur, placé dans des conditions identiques; puis vient un organe particulier e, appelé peigne ou hérisson, qui consiste en un cylindre métallique, à la surface duquel sont implantées des aiguilles plus ou moins fines et plus ou moins serrées; ces aiguilles sont rangées soit en quinconce sur la surface, soit en rangs parallèles à l'axe du cylindre. Enfin, en avant du peigne se trouve un troisième cylindre cannelé ƒ, appelé cylindre étireur, sur lequel s'exerce une forte pression, par l'intermédiaire d'un rouleau en bois g, reconvert de drap d'un tissu épais et serré, par. dessus lequel sont fixées par un bord des bandes de parchemin de la largeur du rouleau, et dont la somme l'enveloppe entièrement. L'action du parchemin consiste à rabattre les filament qui tendent, en vertu de leur élasticité, à se relever pendant l'étirage, et à les ramener sous le rouleau g. La pression sur les rouleaux b, d, s'exerce au moyen d'une traverse qui s'appuye sur les deux axes, et à laquelle est suspendu un poids P; sur le cylindre étireur g, elle s'exerce au moyen d'un poids Q, suspendu à un levier i h, lequel agit de haut en bas sur un tirant 7 m, qui presse sur l'axe en fer du rouleau de pression g. Tout le système de cylindre et peigne est animé d'un mouvement de rotation dont le sens est indiqué par des flèches.

Le ruban de laine étant présenté devant le cylindre a s'engage entre ce cylindre et le rouleau b, et passe de là entre le cylindre c et le rouleau d; le cylindre c, de même diamètre que le cylindre a, se meut un peu plus vite que celui-ci, de sorte que le ruban éprouve une légère tension entre ces deux organes; ceci a pour but d'empêcher le ruban d'arriver

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