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» En transportant aux conseils et aux directoires de département une autorité et des fonctions dont ils ne devraient avoir que le contrôle vous vous êtes privés de la meilleure forme d'administration qui peut exister, celle qui place la surveillance à côté de l'action, et l'inspection des dépenses à la suite de leur exécution: c'est ainsi que vous pouviez assurer la meilleure et la plus exacte comptabilité; car l'ins titution des chambres des comptes, si importante dans son objet, si bien combinée dans son organisation primitive, pouvait être encore plus utilement remplacée par les dépar

temens.

» La charte, en n'assignant aucune fonction précise aux municipalités, semble reconnaître le danger de cette puissance royale dont elles sont aujourd'hui investies, et de leur insuffisance pour l'exercer; mais si la constitution ne guérit pas ces deux plaies qui pourra les guérir?

» Enfin, messieurs, si à la suite de tant d'entraves mises au pouvoir exécutif et à sa direction centrale, si après les mesures extraordinaires récemment adoptées, et contre lesquelles je ne cesse de réclamer, je considère les cas de déchéance du trône que vous avez décrétés, et qu'aucun législateur avant vous n'avait ainsi multipliés et déterminés, je trouve que la royauté, dépouillée dans l'opinion et en réalité de tout ce qu'elle avait d'imposant, n'a plus les moyens d'acquitter ce que vous lui demandez.

» Je ne dis rien du nouvel ordre judiciaire; le silence de la charte semble un aveu tacite de ses inconvéniens.

>> Mais l'organisation et l'emploi de la force publique présentent de bien graves considérations. Voilà donc la nation tout entière constituée en armée permanente! Quel a pu être l'objet de cette étrange et dangereuse innovation, qui rappelle parmi nous les mœurs des Germains, lorsque tant d'autres habitudes et d'institutions les repoussent?

» Il était sans doute utile d'avoir une milice non soldée proportionnée à l'armée de ligne; mais tous les citoyens actifs convertis en gardes nationales, l'usage habituel des armes séparé d'une discipline sévère, les fonctions, les travaux militaires se mêlant à tous les actes, à toutes les professions civiles!

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Je vois dans ces nouvelles dispositions plus d'inquiétude que de sûreté, plus de mouvement que d'harmonie, et une perte immense de temps et de travail, qui sont la seule propriété du pauvre.

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Quant à l'action et à la direction de la force publique pour l'ordre intérieur, la condition d'être requis par les officiers municipaux est une sage mesure; mais la tranquillité publique ne doit cependant pas dépendre de la complicité, de la faiblesse ou de la terreur des officiers du peuple; et le pouvoir exécutif, sous sa responsabilité, doit être autorisé, comme en Angleterre, à l'emploi de la force lorsqu'elle est nécessaire.

» Si des principaux points de la constitution je passais aux détails et au classement des objets, j'adopterais une autre méthode et plus de concision, car il est des détails qui me paraissent inutiles.

» Je termine ici mes observations, et je ne me flatte pas de faire adopter les amendemens qui en résultent; mais je ne saurais accorder mon suffrage à une constitution contraire aux principes que je viens d'exposer : j'y soumettrai ma conduite en me rangeant désormais en silence dans la classe de ceux qui obéissent. Je me borne à demander, si l'Assemblée ne juge pas à propos de délibérer sur mes observations, qu'on accélère les mesures qui doivent assurer la plus parfaite liberté du roi, et que la délibération sur la charte constitutionnelle se termine par un appel nominal. »

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M. Malouet ne parvint à prononcer qu'une partie de ce discours (1); vivement interrompu par M. Chapelier, il se hâta d'arriver à sa conclusion, applaudie du côté droit, improuvée du côté gauche; puis il resta à la tribune, où

(1) Il le fit aussitôt imprimer avec cet envoie

Envoi à M. Chapelier, qui m'a interrompu,"

» Vous n'avez pas voulu m'entendre, monsieur; vous aurez la peine de me lire, et vous me feriez grand plaisir de me répondre.

Je vous ai laissé travailler sans interruption pendant deux ans et demi à un ouvrage que vous appelez super be; il eût été juste de m'acune demi-heure pour en dire mon avis. Je vous prouverais

corder

il brava longtemps les murmures et le trouble. insistant ou pour reprendre la parole ou pour obtenir un décret qui la lui olât formellement; il n'obtint ni l'un ni l'autre. M. Chapelier, qui s'était étonné qu'à propos de l'ordre et de la distribution du projet de constitution l'orateur se fût livré à la critique des décrets constitutionnels, demanda qu'on mît aux voix la question principale, et l'Assemblée, immédiatement consultée, « déclara qu'elle adoptait l'ordonnance générale du travail et la distribution des matières présentées par ses comités. » Cette décision proclamée, la discussion s'établit successivement sur chaque partie du projet.auty 1 smakong bingol, nollettavo kalbh

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« La Déclaration des Droits est en tête de notre travail tellé qu'elle a été décrétée par l'Assemblée; les comités n'ont pas cru qu'il leur fût permis d'y faire aucun changement : elle a acquis un caractère religieux et sacré; elle est devenue le symbole de la foi politique; elle est imprimée dans tous les lieux publics, affichée dans la demeure des citoyens de la campagne, et les et les enfans y apprennent à lire è il serait dangereux d'établir en parallèle une déclaration différente, ou même d'en changer la rédaction. Nous croyons qu'elle contient tous les germes d'où dérivent les conséquences utiles au bonheur de la société; c'est pourquoi je proposerai dé passer au titre qui garantit les droits qui en émanent.

»

M. Dupont (de Nemours) rappela à l'Assemblée qu'en décrétant la Déclaration des Droits elle s'était réservé de

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bien par vos propres axiomes. s que le refus est déloyal et inconstitutionnel; mais j'aime autant que nous restions chargés vis a vis de nos contemporains et de la postérité, vous de la responsabilité de votre admiration, moi de celle de mes censures.

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AKS MALOUET. »

(1) Voyez, tome I, liv. 2, les discussions relatives à la Déclaration

des Droits.

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la compléter lorsque la constitution serait terminée. «Depuis cette époque, dit-il, vous êtes devenus' bien grands; il faut que le portique soit digne en tout de l'édifice. Les développemens demandés par M. Dupont se retrouvant dans plusieurs parties de l'acte constitutionnel, l'Assemblée adopta la Déclaration telle qu'elle l'avait décrétée au mois d'août 1789.

SUR LE PRÉAMBULE DE LA CONSTITUTION. (1) —( Méme séance.)

M. Thouret soumit ensuite à la délibération le préambule de la constitution, lequel proclame l'abolition de la féodalité, des priviléges et distinctions, de la vénalité des offices, des vœux religieux, de la pairie, de la noblesse, etc., etc.

M. Dharambure. « Je demande la parole... ( Ah, ah, ah! du côté gauche.) Tant que l'Assemblée n'aura pas statué sur le premier article (titre I°) de l'acte constitutionnel, qui porte que tous les citoyens sont admissibles aux places et

emplois, sans autre distinction que celle des vertus et des » talens », mon engagement solennel d'honneur envers ceux qui m'ont envoyé pour soutenir lá noblesse subsiste toujours. Je pense que je n'ai rien de mieux à faire que de m'en remettre aux lumières de cette Assemblée; elle examinera quelle influence peut avoir cette suppression sur le bonheur du peuple, unique objet de mes vœux et de ceux de mes com

mettans. »

M. Decroix. « Quant à moi, si je n'avais point été absent de l'Assemblée le 19 juin 1790, je me serais opposé de toutes mes forces à l'anéantissement de la noblesse héréditaire ; l'honneur et la délicatesse m'auraient obligé... ( Murmures.) Si vous ne voulez pas m'entendre je déclare que je ne prends nulle part à la délibération. » (On rit.)

(1) Voyez, tome I, Abolition de la féodalité, des priviléges, de la vénalité des offices, etc.; tome II, Abolition de la noblesse, Abolition des ordres et des vœux religieux; tome III, Suppression des

ordres de chevalerie, etc.

MM. Crussol d'Amboise, Lusignan, Chatenay, et plusieurs autres membres du côté droit, se justifient également du décret du 19 juin 1790, et adhèrent à la déclaration de M. Decroix.

M. Ræderer. « Je propose une addition à l'article qui concerne les ordres de chevalerie. Il ne me semble pas inutile d'insérer dans ce préambule les termes précis du décret rendu il y a huit jours, et qui supprime tout ordre, toute corporation, toute décoration, tout signe extérieur qui supposait des distinctions de naissance. La noblesse est dans l'esprit de bien des gens une maladie incurable... »

M. Chatenay. « M. Roederer ne l'a peut-être pas dans le

cœur. »

M. Roederer. Tant que cette maladie est attaquée par la loi sous une certaine forme elle trouve les moyens dé reparaître sous une autre. Il serait possible, par exemple, qu'à la longue on instituât un ordre en France pour faire revivre cette noblesse alors peut-être oubliée par bien du monde ; des ordres semblables à ceux qui existent en Espagne, tel que celui de la Toison-d'Or, pour lequel on n'exige point de preuves de noblesse, parce que, dit-on, cet ordre est au-dessus de toute noblesse; et il pourrait même s'introduire une autre sorte de noblesse telle qu'elle existait dans plusieurs parlemens du royaume, qui ne consentaient à ouvrir les cours qu'aux gens possédant la noblesse proprement dite, à ceux qui comptaient quatre à cinq générations de roture vivant noblement. Pour prévenir ces inconvéniens je crois donc qu'il faut ajouter après ces mots : on exigeait des preuves de noblesse, ceux-ci : ou qui supposaient des distinctions de

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naissance. »

Le préambule de la constitution fut adopté avec l'amendement de M. Roederer.

SUR LE TITRE Ir. Dispositions fondamentales garanties par la Constitution. (Méme séance.)

Des amendemens notables ayant été faits à ce titre.

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