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entièrement, suivant les besoins, le chenal laissé à la navigation, et deux écluses de chasse sont construites à l'extrémité du grand bassin d'entrée. Ce bassin n'est séparé de la Loire et de ses sables que par une digue perreyée, submersible, de 7 à 800 mètres de longueur.

Le canal, en remontant la vallée d'Aron, rencontre plusieurs cours d'eau importants, tels que l'Endrage; l'Haleine, la Canne, les ruisseaux de Moulins-Engilbert, d'Aunay, etc., et traverse le village de Cercy-la-Tour, la ville de Châtillon et quelques hameaux.

Tous les travaux exécutés ont été disposés de manière à utiliser l'Aron et ses affluents, soit à l'alimentation des biez du canal, soit au flottage des bois. C'est pour obtenir ce résultat, qu'il a été construit à Cercy-la-Tour, un bassin, où le canal, l'Aron, la Canne et l'Haleine sont réunis, et qu'un autre a été établi à Panneceaux, à la jonction du ruisseau de Moulins-Engilbert et de l'Aron.

Les travaux les plus remarquables de la vallée d'Aron, sont ceux qui se trouvent à l'embouchure du canal en Loire, ainsi qu'aux passages de Cercyla-Tour et de Panneceaux. On peut encore signaler les ponts-aquéducs de Mingot et de l'Endrage.

De Mingot à Baye, cette partie porte le nom de Vieux Canal, parce qu'elle fut commencée en 1784 et presque terminée avant 1822, époque à laquelle les travaux furent continués.

Au dessus de l'écluse de Baye, première écluse du versant de la Loire, le canal contourne l'étang de Baye, pénètre dans une tranchée et de là sous les souterrains, d'où il ne sort que pour suivre, dans une nouvelle et profonde tranchée, la vallée des Breuilles et atteindre ainsi le port brûlé où se trouve la première écluse du versant de l'Yonne. Ces tranchées, où le canal n'a que six mètres de largeur au plafond, sont en général creusées dans le roc et perreyées du côté du halage.

Le grand souterrain a 700 mètres de longueur : il est suivi de deux autres qui prennent le nom de galeries, à cause de leur moindre étendue. Ces galeries ont chacune 200 mètres de longueur environ. La construction de la voûte du souterrain présenta les plus grandes difficultés, par suite de la rupture des bancs de roche et du glissement des argiles dans lesquelles on opérait les fouilles. Les galeries dont on exécute actuellement les voûtes, présentent moins de difficultés, parce qu'on travaille à ciel ouvert; mais les obstacles provenant des mêmes causes, sont encore trèsmultipliés.

Le biez de partage est alimenté par les étangs de Baye et de Vaux, dont la capacité est de sept millions de mètres cubes d'eau. Ces étangs reçoivent leurs eaux des côteaux voisins et principalement de ceux qui séparent la vallée de Baye de celle de l'Aron. L'étang de Baye sera en outre alimenté par une rigole qui dérivera les eaux surabondantes de l'Yonne, depuis Montreuillon jusqu'au Port brûlé, d'où elles se rendront dans l'étang par le biez de partage, de manière à le remplir plusieurs fois dans une année L'étang de Vaux ne versera ses eaux dans le canal, qu'autant que la rigole de Montreuillon et l'étang de Baye seront à sec.

Une autre rigole a été étudiée pour amener les eaux du ruisseau d'Aron à l'étang de Vaux. Elle serait beaucoup moins importante que celle de l'Yonne; mais cependant elle présenterait un avantage, en ce sens, que le

produit des eaux de cette rigole, compenserait les pertes dues aux évaporations dont l'effet, dans l'étang de Vaux, est d'autant plus puissant, que la surface est très étendue, eu égard à la profondeur.

D'autres étangs secondaires, pourraient encore servir à l'alimentation du biez de partage; mais leur ressource est peu importante, si on la compare aux produits des vastes réservoirs de Baye' et de Vaux et à ceux de la rigole de l'Yonne,

En quittant les tranchées du biez de partage, le canal suit la vallée de Sardy, où l'escarpeinent de la montagne a exigé la construction de 24 écluses, sur une étendue de 7131 mètres. Dans la partie haute de cette vallée, le canal offre des bassins successifs, que l'on a formés, en barrant complètement la vallée, et qui ne communiquent entre eux que par les écluses-très rapprochées qui s'y trouvent. En descendant, elles s'éloignent peu à peu les unes des autres, et finissent, en atteignant la valléc d'Yonne, par offrir des iez de 5 à 600 mètres.

Le ruisseau flottable de la Colancelle, débouchait jadis dans la vallée des reuilles, de là, il coulait dans celle de Sardy où il perd son nom, pour rendre celui de la vallée. La nécessité de conserver le flottage, a fait dispoer une portion des tranchées et les six premières écluses; de manière qu'il ût avoir lieu dans le canal.

Ces écluses présentent de l'intérêt, tant sous le rapport de l'art, que sous elui de la manière dont elles ont été exécutées.

De Lachaise à Basseville, le canal latéral à l'Yonne reste sur la rive gauche. A Basseville il traverse la rivière et passe sur la rive droite, qu'il suit jusqu'en face de Bazarnes; ensuite il traverse l'Yonne au Maunoir, pour reprendre la rive gauche de la vallée jusqu'à Auxerre.

Un contraste frappant se rencontre dans les deux vallées que le canal parcourt. Celle d'Aron est déserte, mais elle est fertile, d'une vaste étendue et couverte des plus belles prairies; celle de l'Yonne, au contraire, est peuplée de villages et de hameaux qui bordent la rivière. Jusqu'au confluent de la Cure elle est resserrée presque partout par des côteaux qui s'échelonnent les uns sur les autres et dont les cimes sont couvertes de bois. Depuis Cravant, la vallée s'élargit considérablement, et si, sur certains points, des côteaux bordent encore la rivière, du côté opposé se trouve une plaine belle et fertile.

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Tous les affluents de l'Yonne, et l'Yonne elle-même, étaient flottables à bûches perdues, avant la construction du canal: c'est pourquoi il a fallu en créant une communication plus facile, mais que le temps seul peut faire apprécier, en disposer les ouvrages, de manière à ne pas entraver l'ancienne industrie. De là résultent les dispositions particulières adoptées au passage de Lachaise et vis-à-vis les affluents de l'Anguison et de l'Auxois. L'attente d'une modification très-probable dans le mode actuel de l'exploitation des bois, a fait différer les améliorations que l'on pourrait désirer aux passages de Saint-Didier et de Clamecy, où l'Yonne et le canal se confondent et à la traversée du Beuvron dans la ville même de Clamecy; mais quoi qu'il arrive, ces modifications, qui peuvent être coûteuses, seront très-faciles à exécuter.

Les travaux les plus remarquables de cette partie du canal, sont le pas

sage de Lachaise et celui de Basseville, dans la Nièvre; ceux de Crain, du Maunoir et de Belombre, dans l'Yonne.

Le canal du Nivernais, commencé en 1784, au point de partage et dans la vallée de Baye, n'eut d'autre but d'abord, que de faire jouir la vallée d'Aron des avantages du flottage à bûches perdues, dont l'Yonne était en possession depuis long-temps. Mais plus tard, l'industrie se développant, fit connaître que le canal du Nivernais était appelé à de plus hautes destinées qu'à celles que lui promettaient les premiers projets. Il apparut comme devant être une importante ligne de jonction de la Loire à la Seine, qui seconderait puissamment le canal de Briare, la navigation de la Loire, et aussi, comme devant exercer la plus salutaire influence sur le commerce actuellement existant dans la vallée de l'Yonné. Dès lors, il s'étendit de la Loire à la Seine, à travers les vallées de l'Aron et de l'Yonne.'

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Comme ligne de navigation, destinée au transit, le canal du Nivernais deviendra un jour d'une haute importance, surtout si les mines de SaintEtienne amènent leur abondant produit sur la Loire et si on opère la jonction de ce fleuve avec le canal latéral.

Comme ouvrage d'utilité locale, ses avantages seront encore plus grands; car il livrera à l'industrie toutes les ressources de la vallée d'Aron, en ouvrant un vaste débouché à ses houilles, plâtres, bois et charbons qui jusqu'alors étaient sans valeur bien constatée, et il modifiera, de la manière la plus heureuse, le flottage des bois de l'Yonne, en réduisant celui à bûches perdues; de telle sorte que les bois conserveront les qualités du bois neuf; que les pertes seront presqu'annulées, et que le flottage en trains pourra partir de Lachaise, où le canal quitte la vallée de l'Yonne. Enfin, il entraînera un nouveau mode dans la dépense des eaux de la rivière en améliorant le système des éclusées, et les trains ne seront plus exposés à des temps d'arrêt coûteux et dangereux pour les marchandises.

Comme produits secondaires, on doit ajouter aux bois et aux houilles les vins, les pierres et le fourrage, qui tous déjà s'exportent pour Paris.

Cependant, les modifications que l'établissement du canal apportera à l'exploitation des bois, et les avantages qui en résulteront pour le commerce de transit, seront toujours subordonnés à l'amélioration de la navigation de la basse Yonne comprise entre Auxerre et Montereau.

SITUATION GÉOLOGIQUE.

Après avoir parcouru, dans le département de l'Yonne, les groupes de terrains oolithiques et supercrétacés, qui forment le noyau de toutes les montagnes bordant la vallée, et les terrains d'alluvion qui sont au pied de ces montagnes, le canal du Nivernais les rencontre encore à Basseville où les rochers qui surplombent sur l'Yonne ne sont que des dépôts d'eau douce; mais presque immédiatement, il se plonge dans le groupe oolithique, parce que le crétacé parait ne point exister dans cet endroit du départe

ment.

groupe

Le groupe oolithique dont la puissance est très-grande, contient le canal jusqu'à Marigny-sur-Yonne, endroit où l'on est arrivé à sa base, après avoir traversé les diverses, couches d'oolithes supérieures et inférieures, ainsi que les liais.

Près de Marigny, on atteint le groupe du grès rouge, dont la présence est caractérisée par des argiles vertes, rouges et jaunes, offrant des couches qui se succèdent dans l'ordre ci-dessus et qui toutes sont très dures, quand elles sont soustraites à l'influence atmosphérique; mais qui se fendillent et se liquéfient sous l'action du soleil et de la pluie, en perdant toute espèce de consistance. Ces argiles ont occasionné les plus grandes difficultés dans les vallées d'Yonne et d'Aron, particulièrement au point de partage.

Au-dessous de ces argiles, on trouve constamment, dans la vallée de l'Aron, et dans celle de l'Yonne jusqu'à Chitry, ainsi qu'au point de partage, une roche à laquelle M. Dufresnoy a donné le nom d'arkose et qui paraît composée de grains-quartzeux et feld-spathiques, réunis par un ciment siliceux, de telle sorte que la roche a le caractère assez prononcé de quartz-jaspe. Cette roche contient des fragments assez volumineux de granit.

Vers Chitry-les-Mines, on reconnaît encore des traces d'exploitation anciennement faites, pour extraire du plomb-argentifère dont la mine, d'ailleurs, paraît peu abondante. Un peu au-dessus de Chitry, on tombe dans les roches de granit que l'on quitte bientôt, pour se trouver à la base du groupe oolithique. L'on ne sort de cette roche qu'en approchant de la partie la plus élevée de la vallée de Sardy et de la grande tranchée qui conduit aux galeries où l'on rencontre les arkoses, et au-dessous les rochers granitiques et porphyriques.

Bientôt les couches cessent d'avoir la même continuité et des failles nombreuses font disparaître les roches primitives, pour les remplacer par les couches inférieures du groupe oolithique.

Cette alternation des terrains solides et des roches inférieures; des dernières couches du groupe oolithique et des argiles, explique les difficultés qu'on a éprouvées au point de partage et les dispositions particulières du souterrain et des deux galeries isolées qui y font suite. Ces couches diverses sont inclinées de l'est à l'ouest, et leur continuité est interrompue fréquemment par des failles plus ou moins importantes, qui font disparaître les terrains d'une couche, pour les remplacer par ceux d'une couche supérieure, en gardant toujours le même ordre de superposition.

Quand le souterrain fut commencé du côté de l'ouest, il fut creusé dans le calcaire à griphites dont la solidité était du meilleur augure; mais bientôt cette couche fut remplacée par des couches alternant entre elles, d'argile grise et de rocher argilo-calcaire, de moins en moins résistantes.

On eut à lutter, pendant la construction du souterrain, contre les éboulements qui s'opéraient dans les couches d'argiles grises et de rocher argilo-calcaire et on fut assez heureux pour ne point rencontrer, au milieu des plus incroyables difficultés, les argiles rouges fluentes.

Cet état de choses se maintint jusqu'à une centaine de mètres au-delà de l'extrémité ouest du souterrain; mais alors un changement provenant d'une nouvelle disposition du sol et occasionné par les failles qui rompent les couches et par leur inclinaison, fit apparaître, au-dessus du plafond du canal, ces argiles fluentes, quí, entraînant avec elles les roches argilo-calcaires supérieures, comblèrent les fouilles déjà faites. Ce fut alors qu'on résolut de les contenir par des voûtes, qui prirent le nom de galeries, et qui ne furent établies que là où la présence des argiles les fit reconnaître indispensables.

Les couches d'argiles grises et de roches argilo-calcaires furent maintenues et défendues contre l'action de l'atmosphère, par des murs de soutènement ou de revêtement.

Au-delà du souterrain, le canal se maintient dans la plus grande partie de la vallée, à la base inférieure du groupe oolithique ou dans les marnes irisées, superposées à l'arkose. Cependant, il est curieux d'observer que sur ce versant les marnes irisées n'ont point cette fluidité dangereuse qu'on avait eu à combattre sur le versant de l'Yonne.

Le groupe oolithique paraît renfermer le canal dans toute la vallée d'Aron; car on rencontre du calcaire à griphites en plusieurs endroits de cette vallée et très près de Decise. Cependant on remarque sur quelques points de la ligne des amorces du groupe carbonifère, qui d'ailleurs sont justifiées par le voisinage du bassin houiller en exploitation à la machine, près Decise.

Les sables sont, en général, fort peu répandus sur la ligne que suit le canal du Nivernais, dans le département de la Nièvre: on y rencontre seulement quelques parties de roches fendi!lécs, soit par l'effet des eaux ou de l'influence atmosphérique, soit par l'effet des commotions souterraines; de sorte que les biez du canal sont fort étanches et qu'alors on est à l'abri des filtrations. Si l'on a quelques travaux d'étanchements à faire, ce ne sera que dans les terrains crétacés qui se rapprochent du département de l'Yonne, ou dans les arkoses, dont la contexture est un peu poreuse et qui sont percés d'anciennes galeries d'exploitation.

ÉTAT ACTUEL DES TRAVAUX.

La partie du canal, comprise dans le département de l'Yonne, est ouverte à la navigation depuis le premier mai 1834. De Pousseaux à Tannay, les bateaux peuvent passer depuis plus d'un an; de Tannay à Lachaise, tous les travaux sont terminés et les premiers essais de navigation seront tentés à la fin de l'année.

Dans la vallée de Sardy, les travaux sont amenés au point de pouvoir naviguer dans le canal, si on pouvait employer les eaux des étangs de Baye et de Vaux.

Le biez de partage qui comprend le souterrain, les galeries, les tranchées qui y font suite, les étangs et la rigole d'Yonne, est la partie la moins avancée. Il faut encore deux ans pour achever les galeries, les tranchées, les radiers du souterrain, ainsi que pour creuser la rigole et mettre en état les levées et les épanchoirs des étangs.

De Baye à Châtillon, le canal est achevé et navigable; déjà même on s'en est servi pour remonter le bois de la vallée d'Aron au ruisseau de la Colancelle.

Entre Châtillon et Panneceaux, le canal est en construction et il pourra être rendu navigable à la fin de 1837. De Panneceaux à Cercy-la-Tour, il est assez avancé pour être navigable à la fin de cette campagne.

Enfin, depuis deux ans, plusieurs bateaux sont descendus de Cercy-laTour pour prendre la Loire, à Decise.

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