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len, et ensuite l'abbé de Bonald, qui fut, un jour, archevêque de Lyon 1.

Comme tous ceux qui tenaient à l'empereur par quelque lien de parenté, le cardinal Fesch, près de Bonaparte, jouissait d'un crédit que sa piété corroborait. Mais, parce qu'il était son oncle, frère de sa mère, il se croyait permis des observations, des conseils, et même des remontrances qui fatiguèrent son impérial neveu, etle mettaient presque toujours en grande colère. Lorsque la tempête était apaisée, on entendait ces mots : « Il me fait dire ce que je ne devrais jamais dire, et ce que je ne pense

pas».

Tel fut ce clergé que le Concordat établit comme une nouvelle puissance dans l'Etat. Pour quelles raisons, ce Concordat fut tel qu'on le connaît, l'abbé de Pradt l'explique.

« Napoléon, né dans une époque d'irrévérence religieuse, nourri au milieu du déchaînement dont

1. De Pradt, Les Quatre Concordats (t. XI, p. 251). « Le cardinal Fesch, oncle de Napoléon, d'un homme sur lequel les affections de famille avaient beaucoup d'empire, ne pouvait manquer d'être très influent dans la cause de la religion.... Il vivait dans une retraite absolue, étranger au monde et borné à sa famille. Jamais il ne fut accessible qu'aux ecclésiastiques. Auprès de lui se sont formés plusieurs membres de l'épiscopat ancien et nouveau. Les évêques de Gand, de Troyes, eurent la plus grande part à sa faveur. Les évêques de Nantes, de Trèves et M. Emery, à sa confiance. Il se montra inébranlable dans son attachement, pour le Pape, et pour le défendre, il ne craignit pas de se compromettre avec son neveu, que son opposition irritait. »

2. Chateaubriand qui eut, avec Fesch, à Rome, des démêlés pendant qu'il était secrétaire de la légation, décrit ainsi, d'après un auteur anglais, la résidence du cardinal, tandis qu'il n'était qu'abbé à Ajaccio. << En allant le long du rivage de la mer d'Ajaccio, vers l'île Sanguinaire, à environ un mille de la ville, on rencontre deux piliers de pierre, fragments d'une porte qui s'ouvrait sur le chemin ; elle conduisait à une villa en ruine, autrefois résidence du demi-frère utérin de Mme Bonaparte, que Napoléon créa cardinal Fesch. Les restes d'un petit pavillon sont visibles audessous d'un rocher; l'entrée en est quasi obstruée par un figuier touffu: c'était la retraite accoutumée de Bonaparte, quand les vacances de l'école dans laquelle il étudiait, lui permettaient de revenir chez lui. »

le clergé était l'objet depuis cinquante ans, élevé dans l'étude de la guerre, la tête remplie des soins de la restauration de la France, de celui de son propre établissement, les épaules chargées du fardeau du monde, Napoléon pouvait-il avoir donné aux choses religieuses cette application, qui les fait connaître et qui conduit à les aimer? Rendons à chaque chose ce qui lui appartient. Napoléon n'était, en religion, ni plus, ni moins que ne doivent l'être des militaires, et les jeunes gens, tous à peu près, également lestes sur cet article, soit pour s'exempter de ses contraintes, soit recherche de bon ton. Mais de plus que le vulgaire, il était politique et observateur. Il savait qu'un grand corps de clergé n'est pas une chose indifférente dans un grand Etat, et que lorsqu'il n'aide point au mouvement, il l'entrave beaucoup... En France, comme en Italie, Napoléon a donné au clergé plus qu'il n'avait promis. Il ne s'est refusé à aucune des demandes qui lui ont été faites en sa faveur. Il l'a admis au partage de tous les honneurs de l'Etat. >

LIVRE III

LA MAGISTRATURE

SOMMAIRE,

ture.

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I. - La Révolution détruit l'ancienne magistraLoi du 24 août 1790. Principes sur lesquels va être fondée la nouvelle organisation judiciaire. Costume imposé aux nouveaux magistrats. Durant l'époque transitoire, avant le Consulat, le juge est forcé de déclarer, à haute voix, les motifs de sa décision. Opinion de Dupin sur cette époque anarNomination des magis

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chique. Coup d'Etat de Brumaire.

trats, réservée au Premier Consul.

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Distribution des tribunaux.

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II. Loi du 27 ventôse an VIII. de première instance par arrondissement; criminel, au cheflieu de chaque département; vingt-sept tribunaux d'appel. Au sommet de la hiérarchie judiciaire, un grand Juge. — Désirs de Bonaparte de rendre à la nouvelle magistrature la splendeur de l'ancienne. Création d'auditeurs » dans les tribunaux. Nouveau costume imposé aux magistrats. Rétablissement de l'ordre des avocats, malgré le peu de sympathie de Bonaparte, pour cet ordre.

III. Quelques magistrats indignes dans la nouvelle magistrature. Insuffisance du traitement des nouveaux magistrats, aussi bien que des anciens.

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IV. Situation dans l'État des anciens parlementaires. abus dans l'ancienne organisation judiciaire. dor an VIII, nomination d'une commission, composée de Tronchet, Bigot de Préameneu et Portalis, pour la codification de toutes les lois. Nécessité de cette codification. - Travail préparatoire de cette commission, soumis à la section de législation, au Conseil d'État. Treilhard, Berlier, Abrial, Émery. Discussion sur la mort civile. Paroles de Bonaparte sur ce sujet, au Conseil d'État. Le travail de Locré, rédacteur des procès-verbaux des discussions au Conseil d'État.

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Merlin de Douai.
Opinion d'Abrial, sur le même sujet.

VI. Le tribunal de cassation.

Target. La lettre à Maupeou sur l'exil des parlementaires. Son admission à l'Académie. Dérogation, à cet égard, des coutumes suivies par les avocats. TronRefus de Target de défendre Louis XVI. chet, avocat consultant plus qu'avocat plaidant. La défense de Louis XVI, à la Convention. Henrion de Pansey; son salon; les hommes qui le fréquentaient. Son ouvrage sur l'autorité judiciaire en France. Brillat-Savarin; son ouvrage sur la Physiologie du goût.

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C'était inévitable. La Révolution devait renverser l'ordre judiciaire établi, comme toutes les vieilles institutions de la Monarchie. Les avocats, devenus hommes politiques, étaient trop jaloux de la magistrature pour la laisser jouir en paix de ses privi lèges, de ses honneurs, de son influence; elle succomba sous les efforts de Lameth, de Bergasse, de Thouret, d'Adrien Duport, malgré l'éloquence vigilante de Cazalès, qui ne put annihiler les attaques de ses adversaires. Bergasse et Thouret avaient produit, l'un et l'autre, un projet contre les charges vénales des magistrats. Les parlements abolis, ils réclamaient, pour remplacer les bailliages, des tribunaux de district; pour tenir lieu de présidiaux, des tribunaux de département; pour faire office de parlements, des cours supérieures et une cour suprême de revision; au-dessous de cette hiérarchie de judicature, des tribunaux de paix et des tribunaux de famille.

De ces débats sortit la loi du 24 août 1790, portant que l'ordre judiciaire serait reconstitué en entier. Ce jour-là, les parlements furent dissous, entraînant

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