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ajoute le ministère éclairé par le passé, est impossible avec ce chef, qui profiterait de la trève pour se préparer à des hostilités nouvelles. On a au contraire saisi toutes les occasions de faire savoir qu'on ne traiterait point avec Abd-elKader, mais qu'on recevrait avec bienveillance les chefs et les populations qui, se séparant de sa cause, demanderaient à traiter pour leur compte. Ces documents apprennent également que la cause française gagnait alors de nouveaux défenseurs, et que le nombre des troupes indigènes à notre solde croissait sans cesse.

Telle était donc, au commencement de cette année, la situation de l'Algérie, les espérances et la politique du gouvernement. Toutefois, les symptômes heureux qu'il se plaisait à trouver dans cette situation avaient besoin d'être secondés par de puissants efforts, avant d'amener à des résultats définitivement positifs. La guerre n'avait point encore été assez activement conduite, pour que l'on pût croire à une défaite prochaine et décisive d'Abd-el-Kader. Du reste, sous ce rapport, lá nomination du général Bugeaud au gouvernement de la colonie était d'un bon augure; car on sait que le système du général est une guerre à outrance, et qu'il ne croit pas que l'on puisse soumettre les Arabes, sans les traquer sur tous les points. Les connaissances du général en agriculture, pouvaient également n'être pas inutiles, dans un pays où la colonisation est encore à son berceau, et a besoin d'être guidée dans sa marche. Peu de temps après l'arrivée du nouveau gouverneur, les opérations militaires, interrompues ou ralenties par les difficultés de la saison, purent être reprises avec une vigueur nouvelle.

Le 30 mars, commença la campagne de printemps. L'armée expéditionnaire se mit en marche dans la direction. du désert. Plusieurs forteresses d'Abd-el-Kader furent occupées et détruites, et Mascara tomba définitivement en notre pouvoir: l'émir fut repoussé jusqu'au désert: des tribus qui n'avaient point encore vu les baïonnettes françaises, et

avaient jusqu'alors le plus contribué à élever et à soutenir la puissance d'Abd-el-Kader, commencèrent à douter de lui, et à craindre sérieusement cette force envahissante, que ne rebutent ni les lenteurs du temps ni les périls d'une guerre sanglante, et les dangers plus inévitables d'un climat pour elle encore aujourd'hui mortel. De ce nombre, fut la tribu des Medgehers, dont une partie se rallia à la cause française; on espéra même quelque temps que la tribu entière suivrait celte impulsion, et cet espoir fut un des grands résultats de cette campagne et ensuite l'un des plus puissants mobiles de la campagne d'automne.

En effet, deux nouvelles tribus vinrent demander le pardon (aman); mais celle qu'il importait le plus de s'attacher, celle sur laquelle repose surtout la force d'Abd-elKader, et lui a fourni ses meilleurs guerriers, ses plus fermes soutiens, la tribu des Hachem prit la route du désert, et alla s'y préparer à une nouvelle résistance, ou mieux à de nouvelles attaques. D'autre part, au point de vue militaire, l'armée avait été fidèle à son passé; des actions brillantes avaient continué à signaler sa marche. Mascara avait été ravitaillé avec succès et aux dépens de l'ennemi qui s'était laissé enlever ses provisions; six mille hommes avaient été appelés à la défense de cette ville. Ainsi se termina cette active campagne d'automne, trop tôt interrompue par les intempéries de la saison d'hiver. Aussi, le gouverneur comprenant l'avantage qu'il y aurait à continuer de poursuivre les tribus ébranlées, et à ne point leur laisser le temps de se réorganiser, prit immédiatement des mesures pour pouvoir agir, sinon en masse, au moins isolément, au sein même deces tribus, et c'est ainsi qu'il continuait à justifier le surnom d'homme de fer, que lui a donné l'armée d'Afrique.

Quant à la colonisation, un projet préalable avait été conçu pour mettre la plaine de la Mitidja à l'abri d'une subite incursion des Arabes; avant l'exécution de ce projet, les cultivateurs de cette partie féconde du sol algérien, ouverte à

une attaque soudaine, ne pouvaient jouir de cette sécurité, qui est la condition première du travail. Le gouvernement facilita l'émigration des ouvriers français qui consentaient à coopérer à l'objet proposé: il s'agissait d'un fossé protégé de place en place par des postes et des blokaus, et devant enfermer un espace de quarante lieues carrées. Rassurés par l'espoir de n'être plus en butte au pillage, et de pouvoir cultiver sans risquer leurs jours, de nouveaux colons se portèrent sur ce point. Aussi bien, d'autres travaux d'intérêt public se continuaient-ils en même temps; travaux maritimes ou de communication et de dessèchement; il importe toutefois d'ajouter que les routes et les dessèchements durent être conduits avec moins de vigueur qu'on ne l'espérait, à cause des dangers que présente l'intérieur des terres, traversé sans cesse par la guerre ; mais en revanche on poursuivit avec activité les travaux du port d'Alger.

En résumé, les résultats moraux obtenus pendant l'année dont nous esquissons l'histoire, étaient de nature à donner quelque satisfaction aux partisans de la colonie, et à corroborer leur confiance dans son avenir. Et quand nous parlons des partisans de la colonie, nous entendons la grande majorité des Français. A part, en effet, quelques convictions sincères, mais isolées dans la Chambre des députés, le pays semble tenir à sa conquête comme à son honneur, comme à une possession utile pour son commerce, pour sa marine, et indispensable au maintien de son influence dans la Méditerranée. Il s'y attache surtout lorsqu'il entend les cris de détresse qui lui arrivent de l'île Bourbon et de nos colonies américaines; et si parfois il a cru pouvoir accuser le gouvernement d'avoir fait des fautes en Algérie, s'il a critiqué souvent avec vivacité les lenteurs de la guerre, s'il a par intervalles gémi en payant les tributs d'argent ou de sang que la conquête réclame, ce ne fut jamais dans un but hostile à la colonie, ce fut pour protester contre un système politique qu'il croyait blåmable. D'ailleurs, le pays a trouvé

cette année l'occasion de témoigner toute sa susceptibilité à cet égard dans l'affaire des lettres attribuées au roi; et le gouvernement, répondant à un vœu général, a répété en termes nouveaux la promesse faite à une autre époque: l'Afrique est désormais et pour toujours française!

DEUXIÈME PARTIE.

HISTOIRE ÉTRANGÈRE.

CHAPITRE PREMIER.

BELGIQUE. État des choses. Lutte entre le parti libéral et le parti catholique. Conflit entre les deux Chambres. -Adresse du sénat pour demander la modification du ministère. - Crise ministérielle. — Manifestation en faveur du cabinet. — Nomination d'un ministère de coalition. -Programme politique. - Élections partielles. - Projet d'association douanière avec la France. - Négociations sans résultat. Conspiration orangiste découverte et déjouée.-Ouverture des Chambres. Discours du roi. Travaux législatifs. - Interpellations.

HOLLANDE. Politique libérale du nouveau roi. Négociations avec la cour de Rome. Mécontentement des protestants. - Plan de réforme financière élaborée par M. de Rochussen. Réformes administratives. Mise en vigueur du traité de commerce conclu avec la France. - Voyage de S. A. R. le prince de Joinville. - Voyage du roi dans le Limbourg et le Luxembourg.--Adresse des habitants. - Vœux.-Répouse favorable. - Non ratification du traité d'alliance commerciale entre le Luxembourg et l'Union douanière. — Démission du ministre des affaires étrangères.Travaux législatifs. — Adoption des plans de M. de Rochussen. — Rejet de la loi sur la Chambre des comptes. · Commission du gouvernement. -Clôture de la session. Ouverture de la session nouvelle. - Discours du roi. Adresse. - Octroi d'une charte constitutionnelle au grandduché de Luxembourg. - Note adressée au corps diplomatique. — Suppression des droits différentiels précédemment accordés à la Prusse. Budget.

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BELGIQUE.

Depuis la chute du ministère de Theux, une sorte de suspension d'hostilités parlementaires avait eu licuentre les libé

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