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changement peut entraîner celui des conditions pécuniaires de
l'association conjugale (Arg. des art. 1395 et 1451 c. civ.).
En effet, lorsque la législation d'un autre pays offrirait au mari
des avantages plus grands que ceux dont il jouit d'après les lois
du pays auquel il appartient actuellement, il demanderait la na-
turalisation dans le seul but de se procurer cet accroissement
d'avantages. Que la femme mariée, integri statús, ne puisse
pas changer sa nationalité sans le consentement du mari ou l'au-
torisation de la justice, c'est, je pense, ce qui ne sera pas con-
testé; mais on fondra peut-être cette proposition sur la puis-
sance maritale; tandis que je lui suppose une autre base par cela
seul que j'établis la même règle pour le cas où c'est le mari qui
voudrait changer sa nationalité personnelle. Cette base, c'est
qu'un époux n'est pas, pour son conjoint, un créancier ordi-
naire les droits d'un époux s'arrêtent devant un mal très-grand
que leur exercice causerait à l'autre époux, témoin l'art. 310 c.
civ., qui accorde à l'époux qui a donné lieu à la séparation de
corps le droit de faire transformer la séparation en divorce; té-
moin aussi le bénéfice de compétence dont les époux jouissent
réciproquement. Ajoutons qu'on ne peut supposer que la
femme ait entendu soumettre au caprice de son mari le droit que
toute personne a, dans les États modernes, de changer de pa-
trie. - Si, malgré le refus de son conjoint non infirmé par jus-
tice, un des époux passait en pays étranger et y obtenait sa natu-
ralisation, cet événement n'en produirait pas moins ses effets
dans la nouvelle patrie de l'époux dont il s'agit; tandis que l'autre
époux pourrait, de son côté, invoquer, contre son conjoint de-
venu étranger, les lois de la patrie primitive, et agir sur la per-
sonne du naturalisé trouvée sur le territoire de cette même pa-
trie, ou sur les biens qui y sont situés. C'est un inconvénient
que les diverses législations des nations civilisées auront sans
doute soin d'éviter, en formulant bien, après les avoir restreintes
autant que le permet la théorie des attentes licites, toutes les
exceptions qu'on croira convenable d'apporter au principe que
l'individu naturalisé a tous les droits d'un sujet naturel. >>

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de la justice, le mariage n'ayant encore reçu aucune atteinte par la séparation de corps? - Sur la première question, l'affirmative ne nous paraît pas douteuse, car désormais, le mari est soumis aux lois de sa nouvelle patrie; il est étranger à celles du pays qu'il a abandonné: il peut donc invoquer l'application des lois sous l'empire desquelles il s'est placé.

La seconde et la dernière question nous semblent devoir être résolues dans le même sens, puisque la femme mariée naturalisée en pays étranger, est aussi étrangère aux lois de son ancienne patrie et peut en conséquence invoquer le bénéfice des lois nouvelles qu'elle a adoptées. · Telle est également l'epinion de M. Blondeau (p. 41 et dernière de sa dissertation).

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120. Aux termes de l'art. 22 de la loi des 9-15 déc. 1790, « toutes personnes qui, nées en pays étrangers, descendent, en quelque degré que ce soit, d'un Français ou d'une Française expatriés pour cause de religion, sont déclarés naturels français, et jouissent des droits attachés à cette qualité, si elles reviennent en France, y fixent leur domicile et prêtent le serment civique. »> 121. Comme cette loi n'avait imparti aucun délai pour le retour et la fixation en France des personnes qu'elle désignait, et qu'elle n'a été abrogée par aucune loi postérieure, qu'elle a même été confirmée par le § 4, art. 1, tit. 2, de la constitution de 1791, nous pensons, avec M. Serrigny (Traité du droit public des Français, t. 1, p. 150), que ces personnes peuvent toujours profiter de la disposition de l'art. 22, et venir réclamer en France et exercer tous les droits attachés à la qualité de citoyen français, même celui de siéger dans les chambres. C'est, au surplus, dans ce sens, qu'il a été jugé (Req., 13 juin 1811, aff. Bernard, V. n° 487).

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122. Le code civil ne parle pas de ce mode de naturalisation, et il ne pouvait guère en faire mention, car une prévision semblable eût impliqué l'idée que le gouvernement français était animé du désir d'agrandir son territoire au préjudice de ses voisins et aurait inspiré à ceux-ci de justes défiances. Aussi quand le fait se réalise, des lois spéciales ou des traités déterminent ordinairement la condition des habitants des provinces réunies, soit par la conquête, soit par une cession. Cette réunion ne peut résulter, en effet, que de la conquête ou d'une cession vo

que précaire et accidentelle.

Ce que M. Blondeau dit de la femme integri statûs, il le dit, à fortiori, de celle séparée de corps, c'est-à-dire qu'il reconnaît: 1° qu'il ne dépend pas de son mari de la faire changer de nationalité, et 2° qu'elle peut elle-même demander sa naturalisation en pays étranger. Il paraît même lui permettre cette naturalisation sans qu'elle soit tenue de demander le consentement du mari, ni, à défaut, celui de justice. Voici, en effet, comment s'ex-lontaire de territoire, mais non d'une simple invasion, qui n'est plique le savant professeur : « Réduire le pouvoir de l'homme séparé de corps à une sorte de veto, c'est-à-dire, déclarer que le droit de demander la naturalisation appartient à la femme, mais avec le concours de cet homme, ce ne serait pas assez faire. Et qu'on n'objecte pas que les intérêts du mari peuvent être froissés par le changement de nationalité opéré par sa femme; au contraire, la femme choisira, sans doute, pour y obtenir la naturalisation, le pays où elle peut augmenter sa fortune (qu'elle transmettra à ses enfants), et où elle pourra obtenir le plus de considération. La nécessité d'un concours de volonté de la part du mari ne serait donc qu'une fâcheuse entrave. »— Sur ce dernier point, nous ne saurions être de l'avis de M. Blondeau, au moins dans le sens qu'il nous paraît présenter. Il est vrai qu'on ne peut faire dépendre de la volonté du mari la demande de la femme séparée de corps; mais, d'un autre côté, il est également certain que le mariage n'est pas dissous par la séparation; qu'en conséquence, la puissance maritale subsiste, et, que, par suite, l'autorisation de justice est au moins nécessaire pour que la loi française reconnaisse les effets de la naturalisation dont la femme serait l'objet en pays étranger. V. v° Mariage. 119. La solution des questions précédentes nous conduit naturellement à l'examen de celles de savoir si: 1° dans l'hypothèse où c'est le mari qui, pendant qu'il était, par rapport au mariage, integri status, s'est fait naturaliser dans un pays où le divorce est admis, il peut, conformément aux lois de sa nouvelle patrie, provoquer le divorce? 2° si, dans l'hypothèse où la séparation de corps ayant été prononcée en France, la femme qui s'est ensuite fait naturaliser dans un pays qui reconnaît le divorce, peut aussi provoquer cette mesure; 3° enfin, si elle a le même droit alors qu'elle a obtenu Sa naturalisation en pa étranger, soit avec le consentement de son mari, soit avec celui

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comme

123. Quel est l'effet de la réunion à l'égard des habitants du territoire conquis ou cédé? - Suivant Pothier (des personnes, part. 1, tit. 2, sect. 1), « il est certain que, lorsque une province est réunie à la couronne, ses habitants doivent être regardés comme Français naturels, soit qu'ils y soient nés avant ou après la réunion. Il y a même lieu de penser que les étrangers, qui seraient établis dans ces provinces, et y auraient obtenu, suivant les lois qui y sont établies, les droits de citoyen, devraient, après la réunion, être considérés comme citoyens, ainsi que les habitants originaires de ces provinces, ou du moins comme des étrangers naturalisés en France. » — - Cette solution donnée par Pothier nous semble parfaitement conforme aux principes de notre droit actuel. Nous n'hésitons même pas, paraît le faire Pothier, à déclarer Français ceux qui avaient été naturalisés dans les provinces conquises, de même que les indigènes. M. Demolombe (no 157) est du même avis; il va même plus loin en apparence, car il considère comme devenus Français tous ceux qui étaient domiciliés dans le pays réuni. Mais ceci nous paraft inexact dans tous les cas où le domicile ne suffisait pas pour conférer la nationalité aux étrangers dans le pays. Il est de principe, en effet, que la conquête ou la cession place les habitants des pays qui en sont l'objet dans la position qu'ils avaient vis-à-vis du souverain sous l'empire duquel ils vivaient avant cet événement. Or, si les simples domiciliés restaient étrangers aux regards de ce dernier, ils ne sauraient être considérés comme nationaux du souverain victorieux ou cessionnaire. Il a été jugé en ce sens : 1° que les Français domiciliés en Belgique à l'époque de l'occupation de ce pays par les troupes alliées en 1814, et qui y ont conservé leur domicile, ne sont pas devenus sujets du roi des Pays-Bas, soit par l'effet de la con

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quête, soit en vertu des traités de paix de 1814 et 1815, et qu'ils ont conservé la qualité de Français, et spécialement que le Français domicilié en Belgique, depuis plus de 20 ans, qui s'y est marié avec une Belge, et qui a continué son domicile en ce pays, après que cet état a été séparé de la France, n'est pas à considérer comme régnicole, et ne peut être témoin testamentaire (C. C. de Bruxelles, 3 janv. 1822) (1); —2° Qu'à plus forte raison la réunion d'un pays à un autre ne frappe pas sur les non-indigènes ou étrangers qui n'y ont qu'une simple résidence au moment de la réunion (Bruxelles, 30 mai 1831 (2); Colmar, 13 février 1818, aff. Mannsbendel, V. Dispos. testam.).

réunion de cette ville à la France, bien que le lieu de sa naissance ait été démembré pour faire partie d'une république étrangère; qu'en conséquence, cet individu avait, depuis cette réunion, les qualités requises pour être témoin instrumentaire (Req., 4 juill. 1810) (3). Ainsi l'habitant de Berne qui est venu s'établir à Bienne (autre ville suisse, où il avait obtenu les droits non de bourgeoisie mais de manence), avant la réunion de cette dernière ville à la France, a acquis par cette réunion la qualité de Français, encore bien qu'il fût né à Berne, ville qui n'a pas cessé d'être suisse: on opposerait en vain, en cas pareil, qu'il ne jouissait à Bienne que des droits de manant et non de bourgeois, une telle distinction n'étant point faite par le code civil; par

124. Toutefois, il a été décidé que l'individu qui, après avoir quitté le lieu de sa naissance vient habiter une ville dépen-suite, et s'il décède à Bienne, ce serait sans fondement que sa dante du même gouvernement et dans laquelle il acquiert un domicile fixe par une résidence de plus de vingt ans, par son inscription sur les rôles des contributions et de la garde nationale; un tel individu a été naturalisé Français par le seul effet de la

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(1) (Vandenhove.) LA COUR; Attendu qu'il est constant el en aveu au procès, que Pinard est né en France, et qu'il n'a pas obtenu sa .aturalisation en Belgique ou au royaume des Pays-Bas;- Attendu que 'arrêt dénoncé décide en fait qu'il n'est pas constaté et qu'il n'a pas même été articulé que ledit Pinard se soit trouvé dans l'un ou l'autre des trois cas énoncés dans l'art. 17 c. civ.; d'où il résulte qu'eût-il été allégué dans la présente instance que Pinard avait perdu la qualité de Francais, allégation qui n'y a cependant pas eu lieu, et fût-il même possible de l'avérer, ces prétendus faits ne pourraient plus servir de moyen propre à faire annuler l'arrêt dénoncé; Qu'ainsi il demeure constant entre parties que Pinard n'a perdu la qualité de Français, ni par la naturalisation acquise en pays étranger, ni par l'acceptation non autorisée par le gouvernement français de fonctions publiques conférées par un gouvernement étranger, ni enfin par un établissement fait en pays étranger, sans esprit de retour;- Attendu qu'il ne conste pas au procès qu'il aurait perdu cette qualité d'aucune autre manière; Attendu que Pinard n'ayant pas perdu la qualité de Français, et étant ainsi demeuré sujet du gouvernement français, n'a pas été, le 17 sept. 1818, date du testament dont il s'agit, sujet du roi dans le sens de l'art. 980 c. civ., Attendu qu'il suit de tout ce qui précède que la cour d'appel, en jugeant que ce testament était nul à cause que le témoin Pinard n'a pu être appelé pour y être présent, n'a violé, ni faussement interprété, ni mal appliqué aucun des articles du code civil, non plus que les traités de paix entre les Hautes-Puissances alliées et la France, en date des 30 mai 1814 et 20 nov. 1815, ni les arrêtés des 22 sept. et 19 déc. 1814, ni la loi fondamentale, ni aucune autre disposition de la législation actuelle, ni les lois romaines, ni aucune loi de la matière; enfin qu'elle n'a pas ajouté à la législation, ni commis aucun excès de pouvoir;- Par ces motifs rejette le pourvoi contre l'arrêt de la cour de Bruxelles, du 19 fév. 1820. Du 3 janv. 1822.-C. de Bruxelles, ch. de cass.

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(2) (N..... C. N.....) LA COUR; Attendu qu'il est en aveu entre les parties que Joseph Biard, l'un des témoins instrumentaires du contrat de mariage dont il s'agit, est né à Fumay, commune qui, lors de la naissance dudit Biard, faisait partie du territoire français, et n'en a jamais été détachée depuis cette époque; d'où il suit que ledit Biard, Francais par sa naissance, n'aurait pu être citoyen belge à la date dudit contrat de mariage qu'autant qu'il aurait acquis cette qualité par un des moyens admis par la loi fondamentale du ci-devant royaume des PaysBas; Attendu que cette loi fondamentale n'admettait que trois moyens à l'aide desquels les personnes nées en pays étranger, pouvaient devenir régnicoles ou être réputées tels, savoir: les lettres d'indigénat, celles de naturalisation et une fiction de la loi; Attendu qu'il n'a pas été allégué que ledit Biard aurait obtenu du chef de l'Etat, à qui seul appartenait le pouvoir de conférer des lettres d'indigénat et de naturalisation, aucun autre acte d'où l'on pourrait faire résulter la qualité de Belge dans le chef dudit Biard, que l'arrêté du 16 mars 1830, produit par l'intimé; — Attendu qu'en supposant qu'on pût considérer cet arrêté comme équivalent à des lettres de naturalisation, il ne pourrait avoir effet que du jour de son émanation; que par conséquent il ne pourrait être d'aucune influence dans la cause, puisque le contrat de mariage dont il s'agit est du 3 fév. 1829, et ainsi antérieur audit arrêté de plus d'une année; Attendu que ledit Biard ne se trouve pas dans le cas prévu par l'art. 10 c. civ., ni dans aucun autre où la loi répute Belges par fiction les personnes nées à l'étranger; Attendu qu'il importe peu que lors de la réunion de la commune de Realies à la Belgique, opérée par le traité de Paris, du 20 nov. 1815, ledit Biard était domicilie dans cette commune depuis quinze ans ; Attendu que cette réunion n'a point imprimé la qualité de Belge à tous les habitants de Reulies indistinctement, mais bien à toutes les personnes nées dans cette commune, quel que fut d'ailleurs le lieu de leur domicile, par la raison que c'est la naissance, et non le domicile, qui fait qu'un individu appartient à telle nation plutôt qu'à telle autre;

Attendu que c'est en vain que l'intimé prétend que ledit Biard avait ac

veuve, appelée devant le tribunal de cette ville par un enfan naturel du défunt en partage de la succession de celui-ci, demanderait son renvoi devant les tribunaux de Berne, où elle prétend que son mari doit être réputé avoir conservé son domicile (Colmar, quis la qualité de Belge par un établissement en Belgique, sans esprit de retour de sa patrie; -Attendu, en effet, que s'il avait réellement formé en Belgique un établissement de cette espèce, cette circonstance aurait bien pu lui faire perdre sa qualité de Français, mais elle n'aurait pas été suffisante pour lui faire acquérir la qualité de Belge, ce fait seul d'un individu étranger à une nation ne suffisant pas pour le faire devenir membre de cette nation, s'il L'est adopté par elle, soit par un acte parliculier, soit par l'effet d'une mesure générale; Attendu d'ailleurs que Biard s'étant établi à Reulies, lorsque cette commune faisait partie de la France, cet établissement ne saurait être considéré comme ayant été fait sans esprit de retour, quoique ledit Biard ait continué d'habiter cette commune depuis qu'elle a été détachée du territoire français;

Attendu que l'absence d'esprit de retour ne peut pas non plus résulter de ce que Biard, en l'année 1827, avait tranféré son domicile à Beaumont, où il tient une auberge, genre d'établissement qui, par sa nature commerciale, ne peut être considéré comme ayant été fait sans esprit de retour, aux termes de l'art. 17 c. civ.; Attendu qu'il résulte des considérations qui précèdent, qu'à la date du contrat de mariage dont il s'agit, passé devant Me Cuissart, notaire à Reulies, le 3 fév. 1829, J. Biard, qui est intervenu comme témoin audit contrat, n'était point citoyen belge; d'où il suit que l'intimé n'est pas fondé dans l'appel incident par lui interjeté ;

Attendu, quant à l'appel principal, que c'est un principe universellement admis et puisé dans la loi du code De testamentis, et le § 7 aux Institutes De testam. ordin., que la capacité putative d'un témoin instrumentaire suffit pour valider l'acte auquel il est intervenu, lorsque l'erreur commune qui lui attribue cette capacité a pour base une possession d'état constante qui suppose la qualité dont résulterait la capacité réelle ;-Attendu que ce principe n'est proscrit par aucun texte de notre législation moderne; que bien loin de là, un avis du conseil d'État, du 2 juill. 1807, va même jusqu'à dire en termes généraux : « que de tout temps et dans toutes les législations, l'erreur commune et la bonne foi ont suffi pour couvrir, dans les actes et même dans les jugements, des irrégularités que les parties n'avaient pu ni prévoir ni empêcher; - Attendu que si quelques arrêts récents ont déclaré nuls des testaments auxquels des étrangers étaient intervenus comme témoins, on ne peut en conclure qu'ils se soient écartés du principe énoncé ci-dessus, car ils ont été rendus dans des espèces où l'on alléguait des faits qui prouvaient bien que les témoins possession d'état de citoyens belges; étaient domiciliés dans la Belgique, mais qui étaient loin d'établir leur Confirme.

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Du 30 mai 1831.-C. de Bruxelles, 3 ch.-M. Colinez, c. conf. (3) (Bava C. Mercandini et cons.) LA COUR; Attendu, 1° que l'arrêt dénoncé a reconnu, au point de fait, que Jean-Baptiste Bertoglio, né à Varallo, avait acquis un domicile fixe et réel dans la ville de Turin, par la résidence qu'il y avait faite depuis plus de vingt ans, par son inscription sur les rôles des contributions et de la garde nationale, et par tous les autres faits énoncés dans ledit arrêt; 2° qu'à l'époque des conquêtes du ci-devant Piémont, faites par la France en l'an 7 et en l'an 8, le sieur Bertoglio, domicilié à Turin, n'était pas et ne pouvait y être considéré comme étranger, puisque Varallo, lieu de sa naissance, et Turin, lieu da domicile qu'il avait choisi, dépendaient également du ci-devant Piémont et se trouvaient également sous la domination du roi de Sardaigne; 3o que la réunion de la ville de Turin au territoire français a necessairement opéré, à l'égard du sieur Bertoglio, l'effet de transporter au gouvernement français les liens qui attachaient ledit Bertoglio au gouvernement sarde; qu'ainsi, dès le moment de cette réunion, ledit Bertoglio est devenu Français, et a joui en France des droits civils, quoique Varallo, lieu de sa naissance, ait été démembré du Piémont et affecté à la République Cisalpine, puisqu'il avait antérieurement et que postérieurement il a continué d'avoir son domicile dans la ville de Turin; - D'où il suit que led it Bertoglio avait, lors de l'acte de souscription dans lequel il a figuré comme témoin, les qualités requises par l'art. 980 code de Napoléon; - Rejette. Du 4 juill. 1810.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Chabot, rap.

9 mai 1812, aud. sol., aff. Moser). - Et l'enfant naturel de cet individu, né à Berne, mais amené à Bienne dès sa naissance, où il a continué de résider avec son père, et où il a satisfait à la loi du recrutement, doit être aussi réputé Français par la réunion (même arrêt. Nota. On se borne à indiquer les solutions de cet arrêt, qui, en droit, ne contient pas d'autres motifs que ceux qu'on a retracés).

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125. Suivant M. Richelot (no 72) les habitants des pays réunis à la France n'ont que la qualité de Français ; ils n'acquièrent le titre de citoyen qu'aux conditions établies pour les étrangers, eussent-ils d'ailleurs toutes les qualités qui, en France, confèrent ce titre ipso jure. Mais cette opinion est une erreur suffisamment réfutée par ce qui a été dit au no 123. On invoque vainement l'art. 1 de la loi précitée du 14 oct. 1814, qui porte: << Tous les habitants des départements qui avaient été réunis au territoire de la France depuis 1791, et qui, en vertu de cette réunion, se sont établis sur la territoire actuel de la France, et y ont résidé sans interruption depuis dix années et depuis l'age de vingt et un ans, sont censés avoir fait la déclaration exigée par l'art. 3 de la loi du 22 frim. an 8, à charge par eux de déclarer, dans le délai de trois mois, à dater de la publication des présentes, qu'ils persistent dans la volonté de se fixer en France.-lls obtiendront à cet effet de nous des lettres de déclaration de naturalité, et pourront jouir dès ce moment, des droits de citoyen français..., etc.»: car cette loi règle les droits des habitants des pays autrefois réunis, mais aujourd'hui séparés, et ne s'occupe aucunement des pays encore soumis à notre domination.

126. La loi de 1814 ne conserve la qualité de Français qu'aux habitants des territoires réunis, qui, depuis la séparation, auraient déclaré dans les trois mois de sa publication qu'ils persistaient dans l'intention de se fixer en France, il devrait en

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127. La naissance en France donnait autrefois à l'enfant de l'étranger la qualité de Français. Il résultait de là que toute personne née en France était tenue des charges qu'imposait la qualité de Français. Mais il fallait que le fait de la naissance en France fùt prouvé pour qu'il produisit une telle conséquence.-1 a été décidé à cet égard que les différences dans les noms patronymiques d'un individu né en France d'un père né lui-même en France avant la loi de déc. 1790, qu'on prétend Français et qu'on veut soumettre, en cette qualité, au recrutement, et les noms des individus étrangers desquels il se dit issu, ont pu être déclarées insuffisantes pour lui ravir le droit de se prévaloir des actes qui contiennent ces différences: et que par suite, il a pu être déclaré étranger, sans que la cour de cassation devant laquelle ces actes ne sont pas produits, puisse réformer une telle décision qui demeure ainsi souveraine (Rej., 17 juill. 1843) (1). · En Belgique, la loi fondamentale de 1815 attribuait la qualité de Belge aux individus nés en Belgique de parents étrangers qui étaient domiciliés dans le pays. · Il a été jugé: 1° que les individus de cette catégorie ont en conséquence été dispensés de la déclaration voulue par le code civil pour acquérir la qualité de Belge, et que la constitution de 1831, en abolissant la loi fondamentale de 1815, ne leur a pas enlevé les droits dont celle-ci les avait investis (C. cass. Belge, 12 nov. 1839 (2); 16 juin 1836, M. Sauvage, pr., aff. Rouzé; 29 juill. 1836; M. Sauvage, pr., dès lors a été à tort déclaré étranger par la cour de Metz. Arrêt. LA COUR; Attendu que la cour royale de Metz qui, statuant sur l'appel du jugement rendu par le tribunal de Rocroy, s'est approprié les motifs de ce jugement, a constaté que, pour justifier sa qualité d'étranger, Nicolas-Hippolyte Sieur avait produit plusieurs extraits d'actes de l'état civil qui établissaient sa filiation avec une famille belge ;— Attendu que ladite cour s'est fondée sur ces actes qui, du reste, ne sont pas produits devant la cour de cassation, et sur des circonstances graves et précises, pour décider que ledit Sieur et ses auteurs n'avaient, en aucun temps, acquis la qualité de Français; - Que, ce faisant, la cour de Metz s'est livrée à une appréciation des actes et des faits de la cause, qui n'a pas excédé la limite de ses pouvoirs, et qui échappe ainsi à toute censure; - Rejette. Du 17 juill. 1845.-C. C., ch. civ.-MM. Boyer, pr.-Bérenger, rap.Laplagne-Barris, 1er av. gén., c. conf.-Jousselin, av.

(1) Espèce: — ( Préf. des Ardennes C. Sieur.) - Nicolas-Hippolyte Sieur, appelé au recrutement en 1840, prétendait, comme étranger, devoir y échapper. A cet effet, il assigna le préfet des Ardennes devant le tribunal de Rocroy, pour entendre reconnaître cette qualité d'étranger: il produisait plusieurs actes de l'état civil et plusieurs certificats à l'aide desquels il cherchait à établir qu'il était petit-fils de Nicolas Lesieur, Belge d'origine, qui n'avait jamais acquis la qualité de Français, et que son père était la même personne que celle désignée dans un acte de bapême du 1 fév. 1781, comme née à Bevin (canton de Fumay) du mariage de Nicolas Lesieur avec Marie-Josèphe Thomé; enfin il soutenait que son père n'avait jamais reçu la qualité de Français, et que lui-même n'avait rempli aucune des formalités nécessaires pour l'acquérir.-19 août 1841, jugement qui déclare Nicolas-Hippolyte Sieur, étranger par les motifs suivants :- « - Attendu que, pour justifier sa qualité d'étranger NicolasHippolyte Sieur a produit plusieurs extraits d'actes de l'état civil qui établissent sa filiation avec une famille belge;- Attendu que ces actes qui présentent, il est vrai, des différences dans l'orthographe du nom patronymique, s'appliquent néanmoins aux auteurs du demandeur; - Que toute incertitude à cet égard disparaît en présence des circonstances graves, précises et concordantes qui dominent la cause et sur lesquelles la décision actuelle peut s'appuyer par application des principes consacrés dans les art. 321, 322, 352 c. civ.;- Attendu qu'il est également constant que le demandeur et ses auteurs n'ont, en aucun temps, acquis la qualité de Français. Sur l'appel du préfet des Ardennes, arrêt confirmatif de la cour de Metz, du 15 déc. 1841, avec adoption de motifs. Pourvoi du préfet des Ardennes pour violation de l'ancien principe de droit public que tout individu né en France est sujet du roi. A l'appui du pourvoi, le préfet a dit: La cour d'appel s'est fondée sur ce que les actes de l'état civil produits par Sieur justifient sa filiation avec une famille belge, nonobstant les irrégularités d'orthographe dans les noms patronymiques et les omissions de prénoms qui se rencontrent dans lesdits actes. Mais il résulte de ces mêmes actes que l'aïeul de Sieur s'est marié à Bevin, canton de Fumay (France), en 1780, et que son père est né dans cette commune en 1781, et, par conséquent, à une époque antérieure à la loi du 30 avril 1790 où la législation reconnaissait la qualité de Français à l'enfant né, même d'un étranger, sur le territoire de France. Cette doctrine qu'enseignent en termes positifs, Domat, Tr. du droit pub., tit. 6, sect. 4, n° 5; Pothier, Tr. des pers., tit. 2, sect. 1; Bacquet, Tr. du droit d'aubaine, 4 part., et d'Aguesseau, dans son trente-ion de la loi fondamentale; qu'en effet l'art. 1 de l'arrêté-loi du 15 août deuxième plaidoyer, a été consacrée par un arrêt de la cour de cassation du 8 therm. an 11, et implicitement par un autre arrêt de la même cour du 14 juillet 1840. De plus, ce principe de l'ancien droit relativement à la qualité de Français n'a été nullement changé par les constitutions de 1791 et 1799; il avait même été conservé dans le projet du code, et il n'a été modifié que par la réduction dernière de l'art. 9 de ce code. D'où il faut conclure que le père de Nicolas-Hippolyte Sieur est Français, et que, par conséquent, il en a transmis la qualité à ce dernier qui

TOME XVIII.

(2) (N... C. N...) LA COUR; Sur le premier moyen, fondé sur la violation des art. 980 et 1001 c. civ.; la fausse interprétation et violation de l'art. 8 de la loi fondamentale de 1815, et des art. 8 et 9 c. civ.: :- « Attendu qu'il est reconnu en fait par l'arrêt dénoncé qu'Oscar Noël, l'un des témoins au testament authentique de Françoise Beaufayt, est né à Charleroy le 22 oct. 1810, d'un père né Français et d'une mère Belge y domiciliés; - Qu'il est également reconnu que depuis sa naissance il a, sans interruption, habité ladite ville de Charleroy;-Attendu que telle était la position dudit Oscar Noël, lorsque, le 24 août 1815, fut proclamée la loi fondamentale du royaume des Pays-Bas, dont l'art. 8 a déclaré, en termes généraux et sans distinction, quant à l'origine de leurs parents, ceux des habitants de ce royaume qui étaient nés dans les Pays-Bas de parents y domiciliés, aptes à être nommés aux hautes fonctions politiques énumérées audit article;- Attendu que cette loi constitutionnelle destinée, comme l'indique clairement l'intitulé de son ch. 1, à constituer l'État, tant sous le rapport matériel, en fixant ses limites et ses divisions, que sous le rapport personnel, en fixant les droits et les obligations de ses habitants, en admettant ainsi à ces hautes fonctions publiques ceux desdits habitants qui réunissaient, en leur personne, les deux conditions que l'art. 8 exige, les reconnaît par là même comme citoyens des Pays-Bas, jouissant de tous les droits accordés aux indigènes; Que l'interprétation en ce sens dudit art. 8 se déduit d'ailleurs encore de la législation qui a précédé et de celle qui a suivi la promulga

1815, qui a précédé cette promulgation, considère déjà comme indigènes, investis du droit de cité, et capables de remplir les plus hautes fonctions politiques, les individos nés de parents domiciliés dans le royaume, et que si pour être considérés comme tels il eût fallu de plus qu'ils fussent nes de parents néerlandais ou belges, il eut été inutile d'ajouter, de parents domiciliés dans nos États, puisqu'un enfant né de parents de cette qualité était incontestablement Néerlandais ou Belge indigène;- Et que, d'autre part, le législateur, appelé, après cette promulgation à déterminer

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aff. Léger);-2° Que la loi du 27 sept. 1835 n'a porté aucune atteinte à ce droit: « Attendu qu'il se voit, au contraire, des discussions qui eurent lieu sur cette loi à la chambre des représenfants et au sénat qu'on n'a pas voulu de rétroactivité, et que l'on n'a rien préjugé quant aux droits acquis dont l'appréciation était laissée aux tribunaux »> (7 fév. 1838, C. de Bruxelles, 1re ch., aff. Monnon).

128. Si le code civil a dérogé à l'ancien droit, c'est que le hasard de l'origine, qui n'est suivie d'aucun domicile, ne garantit pas assez l'attachement à la patrie natale. L'étranger né en France peut, dans l'année qui suit l'époque de sa majorité, réclamer la qualité de Français; mais il doit déclarer que son intention est de fixer son domicile en France, et l'y fixer en effet, dans l'année de cette déclaration, s'il réside en pays étranger (c. civ. 9). Par application de cet article, il a été décidé que tout individu né en France d'un étranger est Français, et jouit, par suite, des droits civils et politiques attachés à cette qualité, par cela seul qu'il a rempli les conditions prescrites par l'art. 2 de la constitution de l'an 8 et par l'art. 9 c. civ., c'est-à-dire a déclaré, dans l'année de sa majorité, sa volonté d'être Français, a fait soumission de fixer son domicile en France, et s'y est établi réellement dans l'année : on objecterait en vain : 1° que l'art. 15 c. civ. impose d'une manière absolue à l'étranger, pour pou

par la loi, au vœu de l'art. 5 de la loi constitutionnelle, l'exercice des droits civils statue, en termes exprès et identiques avec ceux de l'art. 8 de cette loi, que les individus nés dans le royaume ou ses colonies de parents qui y sent domiciliés sont Belges (art. 2, tit. 2 du projet du code civil des Pays-Bas);

Que ce qui achève enfin de démontrer que le sens et la portée de l'art. 8 de la loi fondamentale était de reconnaître en même temps comme Belges les habitants qu'il admettait aux hautes fonctions de l'Etat, c'est qu'il conste du rapport général fait à la section centrale des États-généraux, des observations des sections sur le projet des trois premiers titres du livre 1 c. civ. ; que deux sections ayant proposé de ne pas déclarer Belges les individus nés dans les colonies, de crainte d'une fausse application de l'article, d'une part, parce que l'esclavage y était encore en usage, et d'autre part parce que le mouvement dans la population y était continuel par la foule d'étrangers que leur commerce y conduirait, le gouvernement répondit seulement à ces observations, que l'expression du projet était en conformité avec celle de l'art. 8 de la loi fondamentale, co qui prouve à l'évidence que le législateur n'entendait que de déclarer explicitement ce qui était déjà reconnu implicitement par ledit article, c'est-à-dire que les habitants nés dans les colonies de parents y domiciliés étaient, par cet article, reconnus Belges comme ceux nés de parents de cette catégorie dans le royaume ;-Qu'il suit de ce qui précède qu'Oscar Noël, réunissant en sa personne, au moment de la promulgation de la loi fondamentale, les conditions requises par l'art. S de cette loi, était investi de la qualité de Belge par le fait seul de cette promulgation, sans être tenu à faire encore aucune déclaration pour réclamer cette qualité, et que la formalité de cette déclaration, requise par l'art. 9 c. civ., n'a pu demeurer obligatoire que pour l'individu né dans les Pays-Bas de parents étrangers non domiciliés.

Sur le second moyen tiré de la violation de l'art. 2 c. civ., et de la fausse application de la loi fondamentale de 1815; en ce que, supposant à l'art. 8 de cette dernière loi la portée que l'arrêt dénoncé lui attribue, il ne pouvait en tout cas s'appliquer à Oscar Noël, qui n'est point né sous son empire, sans le faire rétroagir et enlever audit Noël un droit acquis à Ja qualité de Français que lui attribuait sa naissance durant la réunion de la Belgique à la France: :- Attendu que la loi fondamentale ne fait aucune distinction entre les habitants des Pays-Bas, nés dans ce royaume, soit avant, soit après sa promulgation, de parents y domiciliés, auxquels elle confère l'aptitude à être nommés aux hautes fonctions politiques de 'État et par suite le droit de cité;-Attendu, d'autre part, que l'application de cette loi en ce sens à un habitant né en Belgique de parents y domiciliés sous l'empire de la loi française, loin de lui enlever un droit acquis, lui accorde au contraire une faveur que, dans sa position, il doit être présumé désirer, et que d'ailleurs celui qui répudiait le bienfait pouvait toujours y renoncer et reprendre une qualité ancienne qu'il lui convenait de préférer;-Qu'ainsi l'arrêt dénoncé, en appliquant à Oscar Noël, bien que né avant la promulgation de la loi fondamentale, l'art. 8 de cette loi, n'en a fait qu'une juste application, sans contrevenir à l'art. 2 c. civ.

Sur le troisième moyen, pris de la violation des art. 4 et 157 de laconstitution belge de 1831, et de l'art. 9 c. civ., en ce qu'en tout cas l'arrêt dénoncé, qui reconnait que par suite de l'abolition de la loi fondamentale prononcée par la constitution belge, l'art. 4 de cette loi avait fait revivre pour l'avenir l'art. 9 c. civ., en n'appliquant point cet article à Oscar Noël, qui n'avait pas atteint sa majorité lors de la promulgation de ladite constitution, a violé les articles invoqués à l'appui de co moyen:-Attendu que l'art. 8 de la loi fondamentale étant applicable à Oscar Noël, il en résulte

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voir jouir, en France, de tous les droits civils, l'obligation d'ob tenir l'autorisation d'y établir son domicile, cette disposition n'étant applicable qu'à l'étranger qui n'est pas né en France; 2° que l'art. 1 du décret du 17 mars 1809, a ajouté aux conditions exigées par la constitution de l'an 8, pour devenir citoyen français, l'obligation d'obtenir des lettres de naturalisation, ce décret ne concernant que l'étranger né hors de France, jouissant de dix années de résidence, après déclaration de l'intention de s'y fixer (Rej., 19 août 1844) (1). Dans ce système, le mot réclamer de l'art. 9 est regardé comme synonyme du mot obtenir, puisqu'il est jugé qu'il est inutile qu'il soit répondu à la réclamation par la concession de lettres de naturalité; mais l'interprétation contraire avait paru pouvoir être induite de la discussion au conseil d'État, rapportée par Locré, Législ. civ., t. 2, sur l'art. 10 (V. plus bas, no 149). Au reste, ce qui peut sembler déterminant en faveur de la solution donnée par l'arrêt ci-dessus, c'est que le garde des sceaux, consulté dans l'espèce, par la défense, sur la pratique de la chancellerie dans l'exécution del'art. 9, a répondu, le 13 juill. 1844, « que l'individu qui a usé en temps utile de la faculté accordée par l'art. 9 c. civ. peut, sans le secours des lettres de naturalité, se prévaloir de la qualité de Français, sauf à lui, en cas de contestation, à se pourvoir devant les Le réclamant tribunaux, pour statuer sur la question d'état. » —

qu'il avait acquis de plein droit, depuis 1815, la qualité de citoyen Belge, par le fait seul de sa naissance, et de la promulgation de cette loi; que dès lors on ne peut prétendre que celui qui a acquis irrévocablement la qualité de Belge par la loi de 1815 aurait encore eu une déclaration a faire pour devenir Belge en 1851;-Que ce serait évidemment donner à la constitution de 1851 un effet rétroactif qu'aucune disposition de cette loi ne comporte; Qu'il suit de tout ce qui précède que l'arrêt attaqué, en décidant qu'au 28 oct. 1835, date du testament de Françoise Beanfayt, Oscar Noël avait les qualités requises pour y être présent comme témoin, n'a ni faussement interprété l'art. 8 de la loi fondamentale de 1815, ni contrevenu à aucune des autres dispositions de loi invoquées à l'appui du pourvoi; - Rejette, etc.

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Du 12 nov. 1859.-C. C. de Belgique, ch. civ.-MM. Vanmeenen, pr. (1) Espice : (Maire de Saint-Florent C. Malfalti.) — Ces questions se sont élevées à l'occasion de la formation de la liste des électeurs communaux pour l'année 1845, de la commune de Saint-Florent en Corse. L'inscription du sieur Malfalti avait été repoussée sous prétexte que, fils d'étranger, il n'avait point acquis la qualité de Français par le seul mode légal possible, ou en d'autres termes par l'obtention de lettres de naturalité. Le sieur Malfalti justifiait du fait de sa naissance sur le sol francais et de sa déclaration fournie dans l'année qui avait suivi sa vingt et unième année (époque de la majorité d'après la loi française), à la municipalité du lieu de sa résidence. Cette déclaration avait été accompagnée d'exécution et même Malfalti avait subi la loi du recrutement, et s'il ne partit point, c'est qu'il obtint un numéro favorable. Dans ces circonstances, et sur le recours de Malfalti, un jugement du tribunal de Bastia, du 1er avril 1843, a ordonné son inscription. Pourvoi. Arrêt LA COUR ; Attendu qu'aux termes de l'art. 2 de la constitution du 22 frim. an 8 : « Tout homme né et résidant en France, qui, àgé de vingt et un ans accomplis, s'est fait inscrire sur le registre civique de l'arrondissement communal, et qui a demeuré pendant un an sur le territoire de la République, est citoyens français; >> - Attendu que cet article n'a pas été abrogé; que, loin de là, il a été confirmé par l'art. 9 c. civ., qui accorde à tout individu né en France d'un, étranger la faculté de réclamer la qualité de Français, dans l'année qui suit sa majorité. pourvu que, s'il réside en France, il déclare que son intention est d'y fixet son domicile; Attendu que l'art. 13 du même code qui impose à l'és tranger, pour pouvoir jouir, en France, de tous les droits civils, l'obligation d'obtenir du roi l'autorisation d'y établir son domicile, n'est relatif qu'à l'étranger qui n'est pas né en France; Attendu que, si le décret du 17 mars 1809, se référant à la constitution du 22 frim, an 8, dispose que la naturalisation de l'étranger qui aura rempli les conditions exigéet par cette constitution pour devenir citoyen français, sera prononcée par le chef de l'Etat, ce décret ne s'applique encore qu'à l'étranger, né hors de France, qui, aux termes de la même constitution, y a résidé pendan dix années consécutives, après avoir déclaré l'intention de s'y fixer; Attendu, dès lors, que tout individu né en France d'un étranger est Frans çais par cela seul qu'il a rempli les conditions prescrites par l'art. 2 de la constitution de l'an 8 et par l'art. 9 c. civ., sans qu'il ait besoin de demander et d'obtenir des lettres de déclaration de naturalité; - Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Malfalti a rempli ces conditions, et qu'il réunit d'ailleurs les qualités exigées par les art. 11 et 13 de la loi du 21 mars 1831; - D'où il suit qu'il a capacité pour concourir à l'élection municipale de sa commune; Par ces motifs, rejette.

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Du 19 août 1844.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Bérenger, rap.Pascalis, 1 av. gén., c. conf.-Gueny, av.

avait formé, dans l'espèce, la déclaration exigée par l'art. 9, dans l'année qui avait suivi sa majorité, d'après la loi française, c'està-dire dans l'année qui avait suivi sa vingt et unième année. Cependant V. n° 149.

129. D'après le droit des gens, l'hôtel d'un ambassadeur étant considéré comme faisant partie du territoire de la nation que cet ambassadeur représente, l'enfant né en France, dans cet hôtel, pourrait-il réclamer le bénéfice de l'art. 9? Oui, parce que la fiction, que cet hôtel est censé un sol étranger, ne peut exister que relativement à l'ambassadeur, dans la personne duquel on ne voit que le représentant de sa nation, et non point l'individu revêtu des fonctions d'un ambassadeur, tellement que les assignations qui lui sont données ne sont point remises à son hôtel, mais bien au parquet du procureur de la République. A l'égard de l'enfant né dans cet hôtel, on ne peut appliquer ces principes du droit des gens, qui n'influent en rien sur une question de droit civil. Telle est l'opinion enseignée par MM. Legat (p. 10), Delvincourt, p. 15, notes, 2o édit.), Duranton (t. 1,❘ n° 129) et Arm. Dalloz (Dict., vo Naturalisat., nos 34 et 35).

130. La loi du 22 mars 1849 (D. P. 49. 4. 72) a modifié ces dispositions de l'art. 9: 1o Pour le cas où l'individu né en France d'un étranger, sert ou a servi dans les armées françaises de terre ou de mer; · 2° Lorsqu'il a satisfait à la loi du recrutement sans exciper de son extranéité. Cette loi autorise, pour les deux hypothèses qu'elle prévoit, la déclaration de l'art. 9, même après l'année qui suit la majorité.

131. En quel lieu et dans quelle forme doit être faite la soumission imposée par l'art. 9? Il est naturel de croire, dit M. Demolombe (no 162) qu'elle devra être faite à la municipalité de la résidence actuelle du déclarant ou de celle dans laquelle il se proposera d'établir son domicile. Cette opinion est fondée sur le décret du 17 mars 1809 qui prescrit les formalités relatives à la naturalisation des étrangers et dont l'art. 2 dispose: « La demande en naturalisation et les pièces à l'appui seront transmises par le maire du domicile du pétitionnaire au préfet, qui les adressera, avec son avis, à notre grand-juge, ministre de la justice... » 132. La loi ne distingue pas entre les enfants légitimes et les enfants naturels. En conséquence, par cela seul qu'on est né en France, on se trouve dans le cas prévu par l'art. 9; on peut réclamer la qualité de Français. Cette solution ne fait pas difficulté; elle est admise par tous les auteurs, notamment MM. Duranton (no 122) et Demolombe (no 162).

133. Si l'enfant n'avait été que conçu en France et qu'il fût né en pays étranger d'un étranger, pourrait-il invoquer le bénéfice de l'art. 9? Nous avons déjà démontré au no 74 que cet article ne serait pas applicable à l'enfant naturel conçu en France mais né en pays étranger, et ce, parce que la maxime Infans conceptus pro nato habetur quoties de commodo ejus agitur ne peut être revendiquée que par l'enfant né d'un mariage légitime. Nous allons plus loin, et nous croyons que cette maxime ne doit pas recevoir d'application, dans les cas prévus par l'art. 9, alors même que l'enfant aurait été conçu en mariage en France, s'il était né postérieurement à l'étranger. Pourquoi le législateur a-t-il facilité à l'individu né en France l'acquisition de la qualité de Français? C'est parce que la nature nous attache toujours au lieu qui nous a vus naître, et que l'éducation, jointe à cet attrait instinctif, a pu, en communiquant à l'étranger dès son enfance notre langue et nos habitudes, développer son affection pour la France. Mais quelle garantie de patriotisme offre l'unique circonstance de la conception? - Ajoutons qu'il n'est pas facile de constater l'impossibilité physique de cette conception en pays étranger, et que la naissance étant le signe le moins équivoque de l'agrégation à d'autres hommes, une sage politique ne devait pas lui préférer un fait obscur, susceptible de mille contestations, pour fixer une qualité aussi, importante que la nationalité. Cette opinion est aussi celle de M. Duranton, t. 1, no 130. — Elle a été adoptée par M. Demolombe, no 164, et par M. Marcadé, art. 9, no 3.M. Richelot paraît plus porté à embrasser l'opinion contraire (t. 1, p. 115). — V. nos 68 et 69.

134. De quelle majorité entend parler l'art. 9, c. civ.? est-ce de la majorité française, ou de celle fixée par les lois du pays de l'étranger?-Suivant quelques auteurs, notamment MM. DuranWon, no 129; Delvincourt (2o édit., p. 15, notes); Zachariæ,

t. 1, p. 157; Coin-Delisle, no 25; et suivant ce que nous avions dit nous-mêmes dans notre première édition (vo Dr. civ. et polit., sect. 2, art. 1, n° 16), il s'agit ici de la majorité telle qu'elle est fixée par la foi française, celle de 21 ans.-Qu'on rapproche, dit-on, dans ce système, l'art. 9 c. civ. de la constitution de l'an 8, qui exigeait l'âge de 21 ans pour la capacité de déclarer qu'on veut devenir Français, et l'on comprendra que, s'il eût eu l'intention de déroger à cette loi, le législateur se fût exprimé en termes plus explicites. L'âge déterminé, pour la majorité, par les usages ou les lois de tous les pays, est variable et difficile à prouver. N'était-il pas plus simple, qu'au lieu de se livrer à des enquêtes hors de France, on se bornât à consulter dans les archives de nos municipalités, l'acte de naissance du réclamant. D'ailleurs, de deux choses l'une ou la majorité étrangère serait en deçà de 21 ans, et, dans ce cas, il convenait de ne pas permettre l'option: le législateur reconnaît, qu'à cet âge, on n'a pas assez de lumières ou d'expérience pour contracter l'engagement le plus simple dans ses conséquences, le plus facile à discerner, et il autoriserait, à la même époque, un des actes les plus importants de la vie, le changement de patrie, qui peut, en temps de guerre ou sous l'empire du droit d'aubaine, modifier si gravement notre existence! Ou la majorité étrangère serait au delà de 21 ans, et, dans ce cas, comment se fait-il, qu'exigeant 21 ans seulement de l'étranger, né en pays étranger, pour recevoir sa déclaration de la volonté d'être Français, la loi so montre plus sévère envers l'étranger né en France, qu'elle a cependant pour but de traiter avec plus de faveur? On objecte que l'enfant restera peut-être jusqu'à 25 ans, enchaîné dans les liens de la tutelle, sans liberté de ses actions, et qu'il dépendra de son tuteur de rendre illusoire le bienfait de l'art. 9. Mais on répond que la loi statue sur ce qui arrive le plus ordinairement, de eo quod plerumque fit; elle présume le père ou le tuteur dévoués aux intérêts de son fils ou de son pupille. Si donc il est utile à l'étranger de se faire naturaliser en France, il est probable que ceux qui le dirigent ne s'y opposeront pas.

On dit, dans le système opposé: Le texte de l'art. 9 est formel en effet, il parle de la majorité de l'étranger et non en général de la majorité. Or, la majorité de l'étranger est celle que fixe sa loi personnelle. D'un autre côté, on tient trop de compte de la disposition de l'art. 5 de la constitution de l'an 8. Cet ar ticle, en effet, bien différent de l'art. 9 c. civ., déterminait luimême expressément l'âge de 21 ans, mais il ne disait pas que l'étranger pût toujours faire sa déclaration à 21 ans; il voulait seulement qu'on ne pùt la faire qu'à partir de cet âge, mais qu'elle pût toujours être faite, après cette époque i ne posait aucun terme fatal, d'où cette conséquence qu'aucune déchéance ne pouvait atteindre l'étranger qui, retenu dans les liens de la tutelle après l'âge de 21 ans, ne se présentait qu'à vingt-cinq ou trente. On comprend alors pourquoi le législateur de l'an 8 avait pris le terme fixe de 21 ans vis-à-vis de tous les étrangers indistinctement: c'était une disposition toute de faveur, qui leur ouvrait une porte le plus tôt possible, sans jamais la refermer sur eux. L'art. 9, au contraire, pose un délai rigoureux après lequel il y a déchéance; il était donc de toute équité de fixer le point de départ de ce délai à un moment où chaque intéressé est en mesure de choisir et de se prononcer. - Les paroles suivantes de M. Treilhard, chargé de présenter le projet de loi au corps légisgislatif et d'en exposer les motifs, nous paraissent lever tous les doutes: « Quant au fils de l'étranger, dit-il (Fenet, t. 7, p. 628), qui reçoit accidentellement le jour en France, on ne peut pas dire qu'il ne nait pas étranger; mais..... pourquoi lui refuserait-on le droit de réclamer, à sa majorité la qualité de Français, que tant et de si doux souvenirs pourront lui rendre chère....? C'est donc quand il sera majeur dans son pays qu'il pourra invoquer le bénéfice de l'art. 9. Tel est l'avis de MM. Valette (sur Proudhon, t. 1, p. 180); Marcadé, sur l'art. 9, no 2; Demolombe, no 165; Duvergier (sur Toullier, t. 1, no 261, note). — Devant ces raisons tirées soit de l'intention libérale du législateur, soit des termes du discours de M. Treilhard, nous croyons qu'on doit se ranger à cette dernière interprétation.

135. L'option pour la qualité de Français rétroagit-elle au point de faire considérer l'étranger né en France, comme Français depuis sa naissance, et de l'appeler ainsi au partage de succes

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