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que par cette donation Rome ne cessa point de faire partie de son empire.

« Que, depuis, ce mélange d'un pouvoir spirituel avec une autorité temporelle a été, comme il l'est encore, une source de discussions et a porté trop souvent les pontifes à employer l'influence de l'un pour soutenir les prétentions de l'autre; qu'ainsi les intérêts spirituels et les affaires du Ciel, qui sont immuables, se sont trouvés mêlés aux affaires terrestres, qui, par leur nature, changent selon les circonstances et la politique des temps.

<< Que tout ce que nous avons proposé pour concilier la sûreté de nos armées, la tranquilité et le bien-être de nos peuples, la dignité et l'intégrité de notre empire, avec les prétentions temporelles des papes, n'a pu se réaliser. << Nous avons décrété et décrétons ce qui suit: « ART. 1o. — Les États du Pape sont réunis à l'empire français.

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« ART. 2.- La ville de Rome, si célèbre par les grands souvenirs dont elle est remplie, et premier siège de la chrétienté, est déclarée ville impériale et libre.

<< Le gouvernement et l'administration de ladite ville seront organisés par un statut spécial.

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<< ART. 3. Les restes des monuments élevés par les Romains seront entretenus et conservés aux frais de notre trésor.

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<< ART. 4. La dette publique est constituée dette impériale.

« ART. 5. -Les terres et domaines du Pape seront augmentés jusqu'à concurrence d'un revenu net annuel de deux millions.

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<< ART. 6. Les terres et domaines du Pape, ainsi que ses palais, seront exempts de toutes impositions, jurisdictions et visites, et ils jouiront d'immunités particulières.

<< ART. 7. Le premier juin de la présente année, une consulte extraordinaire prendra, en notre nom, possession des États du Pape et fera les dispositions nécessaires pour que le régime constitutionnel soit organisé et puisse être mis en vigeur le 1er janvier 1810. Signé NAPOLÉON. »

L'ukase, basé sur des considérants dont on a démontré depuis longtemps l'inexactitude historique, était daté du 17 mai 1809, « en notre camp impérial de Vienne » (1).

1. L'affiche, conservée dans les papiers du cardinal Fesch, est en deux langues, français et italien. Elle porte

Il fut affiché le 10 juin, à Rome, par les soins du général Miollis.

Dès le lendemain, on trouvait affichée dans tous les lieux ordinaires la bulle pontificale de Pie VII, qui excommuniait tous les auteurs et fauteurs des spoliations que subissait le SaintSiège.

Un mois après, dans la nuit du 5 au 6 juillet, le général Radet enlevait le Pape, sous prétexte de le conduire, avec le cardinal Pacca, chez le général Miollis, en réalité pour le déporter en exil, à Savone.

Le 26 août suivant, répondant au cardinal Caprara, archevêque de Milan, qui lui avait demandé, de la part de Napoléon, « d'accorder l'institution canonique aux évêques désignés pour remplir les sièges vacants dans ses Etats », le pape écrivait :

...

«< Après tant d'innovations funestes à la religion, que l'empereur s'est permises, et contre lesquelles j'ai si souvent et si inutilement réclamé; après ces vexations exercées contre tant d'ecclésiastiques de mes États; après la déportation de tant d'évêques et de la moyenne

la mention d'imprimeur: Presso Luigi Perego Salvioni stampatore in Roma.

partie des cardinaux; après l'emprisonnement du cardinal Pacca à Fénestrelles; après l'usurpation du patrimoine de saint Pierre; après m'être vu moi-même assailli à main armée dans mon palais, traîné de ville en ville sous une garde si étroite, que les évêques, en plusieurs lieux qu'on m'a fait traverser, n'avaient pas la liberté de m'approcher et ne pouvaient me dire un mot sans témoin...

<< Comment donc aujourd'hui pourrais-je reconnaître dans l'auteur de toutes ces violences le droit en question, et consentir à ce qu'il l'exerce? Le pourrais-je sans me rendre coupable de prévarication, sans me contredire moi-même, et sans donner, avec scandale, aux fidèles, lieu de croire qu'abattu par les maux que j'ai soufferts et par la crainte de plus grands encore, je suis assez lâche pour trahir ma conscience et pour approuver ce qu'elle me force de proscrire?

<< Dieu sait cependant, au milieu de ces cruelles agitations, combien vivement je désirerais pourvoir aux sièges vacants de cette Église de France que j'ai toujours chérie de prédilection; avec quelle ardeur j'adopterais un expédient qui me permettrait de remplir mon ministère sans blesser mon devoir!

< Mais comment, seul et sans secours, puisje prendre un parti dans une affaire de cette importance? On m'a enlevé tous mes conseillers, on les a éloignés de moi, on m'a mis dans l'impuissance de communiquer librement avec aucun d'eux. Il ne me reste personne qui, dans une discussion si épineuse, puisse m'aider de ses lumières; on ne m'a pas même laissé la ressource d'un secrétaire. Mais si l'empereur a un véritable attachement pour l'Église catholique, qu'il commence par se réconcilier avec son chef; qu'il abroge ses funestes innovations religieuses, contre lesquelles je n'ai cessé de réclamer; qu'il me rende ma liberté, mon siège, mes officiers; qu'il restitue les propriétés qui formaient, non mon patrimoine, mais celui de saint Pierre; qu'il replace sur la chaire de saint Pierre un chef suprême dont elle est veuve depuis sa captivité; qu'il ramène auprès de moi quarante cardinaux que ses ordres en ont arrachés; qu'il rappelle à leurs diocèses tous les évêques exilés, et sur-le-champ l'harmonie sera rétablie (1). »

1. Le texte de cette lettre, soigneusement dérobé à ce moment au public, fut imprimé dans une brochure, sans nom d'imprimerie ni de lieu, envoyée par des voies sûres à l'adresse des évêques de France, chez qui, comme nous

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