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déclarant : « Que le défaut de complément de l'instruction à l'égard de quelques-uns des prévenus, ne s'oppose pas à ce que la Cour statue sur le sort de chacun des individus soumis à la prévention qui peuvent se trouver dans le cas d'être d'ores et déjà mis en liberté, et à l'égard desquels rien n'indique possibilité de charges nouvelles'. »

III. L'art. 61 du C. d'instr. crim., prescrit au juge d'instruction de donner communication de la procédure au procureur impérial lorsqu'elle sera terminée; et l'art. 127 répète que le juge d'instruction rendra compte des affaires à la chambre du conseil, communication préalablement donnée auprocureur impérial. Cette communication est faite par une ordonnance, de soit communiqué, qui doit indiquer toutefois qu'elle a pour objet de mettre le ministère public à même de prendre ses conclusions, tant sur la prévention que sur le réglement de la compétence.

Il résulte de ces textes que c'est au juge d'instruction qu'il appartient d'apprécier si l'instruction est complète, si elle est terminée. Et en effet, chargé de diriger cette instruction et d'en recueillir tous les éléments, il peut seul décider si de nouvelles investigations sont possibles, si elles auraient un résultat utile. Le ministère public conserve d'ailleurs le droit, soit de requérir un supplément d'information, soit de former opposition aux ordonnances qui ne se seraient pas arrêtées à ses réquisitions. Ainsi, lorsque, sur la communication que lui a faite le juge d'instruction, le ministère public, au lieu de prendre des conclusions au fond, se borne à requérir que l'instruction soit continuée, le juge demeure le maître ou de continuer l'instruction, ou de faire immédiatement son rapport. Il a satisfait au vœu de la loi par la communication; il n'est point tenu de déférer aux conclusions de la partie publique. Nous verrons

Toulouse, Ch. d'acc., 6 sept. 1841. J. P. 41, 2, 730, et conf. Duverger,

0510.

* Conf. Mangin, t. 2, p. 42. Arr. cass., 1er avril 1813 et 25 sept. 1824, cités infra, § 401.

tout à l'heure que, dans ce cas, la chambre du conseil peut, soit ordonner elle-même un supplément d'instruction, soit prononcer immédiatement au fond, sans attendre de nouvelles conclusions.

$ 401.

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I. Communication de la procédure au ministère public. II. Formes de ses réquisitions. III. Délai dans lequel elles doivent être

données.

I. La communication de la procédure que le juge d'instruction est tenu de donner au procureur impérial lorsqu'elle est terminée, a pour but de mettre ce magistrat à même de prendre ses réquisitions. L'art. 61 porte: « Le procureur impérial fera les réquisitions qu'il jugera convenables; » et l'art. 127 « Communication préalablement donnée au procureur impérial, pour être par lui requis ce qu'il appartiendra. » Quelle doit être la forme de ce réquisitoire, et dans quel délai doit-il être donné?

II. Il doit, en premier lieu, être fait par écrit. C'est là une règle générale qui s'applique à toutes les réquisitions du ministère public; elle est fondée sur ce que ces réquisitions font partie essentielle de la procédure, que le juge ne peut procéder à son examen qu'en constatant leur existence, et que le plus sûr moyen de constatation est leur jonction en original au dossier. L'art. 224 porte, en conséquence, que la réquisition du procureur général devant la chambre d'accusation doit être. écrite et signée, et l'art. 277 veut que toutes les réquisitions qui sont faites à la Cour d'assises, même dans le cours du débat, soient signées.

Cette forme est particulièrement nécessaire en ce qui concerne les réquisitions prises devant la chambre du conseil, puisque le ministère public, comme on l'a vu ', n'assiste pas

1 Voy. suprà, p.

aux délibérations de cette chambre, et qu'il importe que ses réquisitions soient sous les yeux des juges lorsqu'ils délibèrent. Tel est aussi l'esprit de l'art. 127; car, lorsqu'il veut que communication préalable soit donnée au ministère public, n'est-ce pas pour qu'il puisse préparer et rédiger ses conclusions 1?

Le réquisitoire définitif est un acte important qui doit être rédigé avec le plus grand soin. Son but étant de régler la marche de la procédure, il doit porter en lui-même la preuve de l'examen scrupuleux auquel elle a été soumise. Il est nécessaire qu'il contienne : 1o l'exposé détaillé du fait incriminé et des circonstances qui l'ont accompagné; 2° l'indication, à la suite de chaque articulation, des actes de l'instruction sur lesquels elle est fondée; 3° la qualification du fait, en distinguant les circonstances constitutives et les circonstances aggravantes. Les articles de la loi qui fondent cette qualification doivent toujours être cités.

La nécessité de ces détails est évidente. Le procureur général ne siégeant pas dans la chambre du conseil, il importe que cette chambre trouve dans ses conclusions des notions nettes et précises sur l'affaire qui puissent éclairer sa décision ou qui, si elle ne les adopte pas, la mettent à même d'expliquer les motifs qui la portent à s'en écarter. Quand les faits sont sainement articulés et qualifiés dans le réquisitoire, l'ordonnance, quelle que soit sa décision, reflète le travail de cette rédaction, et toute la procédure en est éclairée. Quand, au contraire, le réquisitoire est rédigé avec quelque négligence, il y a lieu de craindre que l'ordonnance ne rectifie pas l'inexactitade de ses énonciations, et qu'une qualification erronée ne produise une procédure vicieuse.

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III. L'art. 61, après avoir dit que le procureur impérial fera les réquisitions qu'il jugera convenables, ajoute : sans pouvoir retenir la procédure plus de trois jours. Ce délai suffit à ce

'Conf. Legraverend, t. 1, p. 393; Bourguignon, t. 1, p. 269; Boitard, p. 202; Arr. cass., 19 sept. 1839. J. P. 40, 2. 52.

gistrat pour examiner les pièces, arrêter les conclusions 'il doit prendre et les rédiger. L'intérêt qui s'attache à la ›mpte expédition des affaires criminelles lui fait un devoir ne pas le dépasser.

Que s'il enfreint néanmoins cette règle et laisse passer plus trois jours sans rétablir les pièces, que doit faire le juge nstruction? Cette question s'était présentée dans notre ann droit, et voici dans quels termes Jousse l'avait résolue : Lorsque le procureur du roi ou fiscal refuse de donner des clusions dans les trois jours ou dans la huitaine, sur une lonnance de soit communiqué, le juge d'instruction ne peut il lui faire des injonctions d'en donner, ni à son refus comttre un autre officier pour donner ces conclusions; mais il it assembler les juges, qui, sur son rapport, doivent mander la chambre du conseil le procureur du roi, et, après l'avoir !endu, ils peuvent ordonner ce qu'ils jugeront convenable... y a deux partis à prendre le premier est d'en écrire au ocureur général et au président de la Tournelle; le second t que le tribunal ordonne que, faute par le procureur du i d'avoir donné ses conclusions dans un temps fixé, il en ra donné sur-le-champ par un des officiers du siége prént'. » Ces règles ne seraient plus applicables aujourd'hui. Le ge d'instruction n'aurait point à rendre compte de cet incint à la chambre du conseil, puisque la chambre du conseil peut ni adresser une injonction au procureur impérial ni mmettre un juge pour remplacer ce magistrat. Il ne pourit, après une mise en demeure officieuse, que faire connaître u procureur général la date de l'ordonnance de soit commuiqué. Il ne peut appartenir qu'à ce dernier magistrat de onner les ordres et de prendre les mesures nécessaires pour ire cesser un retard préjudiciable à la justice.

1 J. 3, p. 68.

* Conf. Duverger, no 514.

$ 402.

1. Droit du prévenu de produire un mémoire devant la Chambre du conseil. II. Le juge d'instruction doit-il lui communiquer les pièces de la procédure?

I. Le prévenu a le droit de produire des mémoires, soit devant le juge d'instruction, soit devant la chambre du conseil. Le droit de la défense, en effet, est le droit commun; il peut toujours s'exercer là où il ne rencontre pas une entrave dans la loi. Le secret de la procédure peut faire obstacle à la communication des pièces; il n'en fait aucun à la production des mémoires. « Dénier un tel droit au prévenu, ce ne serait pas seulement étouffer sa défense pendant toute l'instruction, ce serait encore priver la justice d'un des éléments qui peuvent contribuer le plus efficacement à la manifestation de la vérité. La loi ne pouvait pas interdire l'exercice de ce droit, car elle n'avait aucun intérêt à le faire; il doit donc librement l'exercer, et les mémoires produits doivent être joints aux dossiers. »

Ce point a été nettement reconnu par la jurisprudence. La Cour de cassation a jugé : « que la production d'un mémoire devant le juge d'instruction, faite par le prévenu, rentrait, à l'égard de ce dernier, dans l'exercice de sa légitime défense; qu'aucun article de la loi ne lui interdisait la faculté d'en faire la production; que dès lors le juge d'instruction ne contrevient point, à la loi en recevant le mémoire et en le joignant à la procédure. »

Dans l'espèce où cet arrêt a été rendu, le ministère public avait cru pouvoir disjoindre le mémoire de la procédure, parce qu'il contenait des imputations diffamatoires contre un officier de gendarmerie ; mais la chambre d'accusation ordonna qu'il

Arr. cass., 29 déc. 1832. J. P., t. 24, p. 1711.

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