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Que s'il est exact que l'usage suivi jusqu'alors à Mirecourt a été d'allouer une rémunération, il n'est pas moins certain d'autre part que dans divers tribunaux du ressort, ladite rémunération n'est pas réclamée ou n'est pas passée en taxe alors que la même formalité est cependant remplie ;

Qu'il y a donc lieu d'en induire que l'usage invoqué ne saurait lier le tribunal;

Qu'il n'est pas non plus sans intérêt de faire observer que la formalité impartie par l'ordonnance d'octobre 1841 et qui consistait à se faire délivrer un certificat par le président de la chambre des avoués, devait déjà être remplie sans l'allocation d'aucun émolument et que si le législateur avait eu l'intention de rémunérer celle qu'il y a substituée, il n'eût pas manqué de s'expliquer nettement à ce sujet comme il l'a fait pour l'accomplissement de toutes les autres formalités de procédure;

Que l'équité de la loi ne saurait d'ailleurs être contrebalancée par l'équité du juge taxateur, dont le rôle, tout de patience plutôt que d'appréciation, consiste presque uniquement à constater si le tarif est bien respecté ;

Considérant enfin que la raison de décider ainsi s'impose avec d'autant plus de force que l'attention du législateur est en ce moment appelée sur les frais considérables qui grèvent les ventes judiciaires portant sur des immeubles de minime valeur, et que la procédure suivie à la requête des consorts Rommeveaux rentre précisément dans cette catégorie ;

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PAR CES MOTIFS ; En la forme. reçoit l'opposition formée à l'ordonnance de taxe en date du 17 juillet dernier, enregistrée; — Au fond : Déclare cette opposition mal fondée et en déboute les consorts Rommeveaux ; en conséquence dit qu'il n'y a lieu d'accorder à Me Grosjean une vacation d'un franc cinquante centimes pour avoir rempli auprès du receveur de l'enregistrément de Mirecourt, la formalité impartie par le décret du 15 janvier 1853 et d'augmenter la taxe d'autant; condamne les opposants aux dépens.

MM. Adam, prés.; Baudot, proc. de la Rép.

REMARQUE. Contrairement à ce que décide le jugement ci-dessus, M. Dutruc (Traité des dépens, frais et honoraires et de la taxe, en matière civile, p. 364, no 1393) enseigne qu'en matière de vente publique d'immeubles, la déclaration à faire au bureau de l'enregistrement du nombre des affiches sur timbre et sur papier de couleur, donne droit à l'avoué poursuivant de réclamer une vacation de 2 fr. 1 fr. 801 fr. 50, par assimilation aux cas prévus soit par le § 5, soit par le 27 de

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l'ordonnance du 10 octobre 1841. Tel est aussi l'avis de MM. Chauveau et Godoffre, Commentaire du tarif, no 3177; Rousseau et Lainey, Dict. de proc. vo Vente jud. d'imm., n° 1774; Raviart, Commentaire des tarifs en matière civile, 2e édition, p. 228. Mais l'opinion, qu'a fait triompher le tribunal de Mirecourt dans l'espèce, est celle de MM. Boucher d'Argis, Dictionnaire de la taxe, 3e édition, p 352; et Tripier, Suppl. à l'ouvrage sur la taxe de M. Carré, p. 598.

ART. 8713

TRIB. CIV. DE SAINT-SEVER, 14 juin 1900.

DÉSAVEU D'OFFICIER MINISTÉRIEL, HUISSIER, AVEU, POUVOIR SPÉCIAL (DÉFAUT DE), PRÉJUDice, absence de faute, recevABILITÉ, RATIFICATION NON ÉTABLIE.

1° L'action en désaveu est ouverte contre l'huissier, qui sans s'être muni du pouvoir spécial exigé par l'art. 352 C. pr. civ., a, dans un acte de son ministère, passé au nom de son client un aveu préjudiciable à celui-ci ;

2o Et trois conditions sont nécessaires mais suffisantes, en ce cas, pour l'admissibilité du désaveu savoir: 1o préjudice résultant de l'aveu incriminé pour le désavouant; 2o défaut d'autorisation spéciale de cet aveu; 3° défaut de ratification.

Une quatrième condition, qui devrait consister dans l'existence d'une faute imputable à l'officier ministériel désavoué, ne saurait être exigée.

Spécialement le désaveu est admissible, alors même que, non seulement l'huissier a été entièrement de bonne foi en faisant l'acte incriminé, mais qu'il y a même été provoqué par un dol ou une faute imputable au mandataire de son client.

3o S'il est généralement admis que le paiement, sans réserves, de tous les frais, par la partie qui a succombé, équivaut à acquiescement au jugement, et par suite à la ratification tacite des aveux, qui peuvent s'y trouver consignés, il n'en saurait être ainsi d'une simple déclaration, qu'a pu faire cette partie, de son intention, qu'elle n'a d'ailleurs pas mise à exécution, de payer lesdits frais;

4o Le mandant est responsable du dommage occasionné à des tiers de bonne foi par le dol ou même par la simple faute de son mandataire dans l'exécution de son mandat (art. 1384. C. civ.) (Grimaldi c. Me Brethons et autres).

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LE TRIBUNAL; Attendu que, dans l'exploit introductif de l'instance qui a donné lieu au jugement, non encore passé en force de

chose jugée, rendu le 13 août 1898, par le Tribunal civil de SaintSever contradictoirement entre Jean-Baptiste Grimaldi et la veuve de Chauton, pour laquelle les époux de Tavernier et de Cardaillac s'étaient portés garants, ledit exploit, du ministère de Brethons, huissier à Aire, signifié à la veuve de Chauton le 9 mai précédent, se trouve le motif dont extrait suit : « Attendu que plus tard le << requérant apprit par son frère, Ange-François-Gabriel, lorsqu'il « réclama à ce dernier l'affecttaion hypothécaire desdits immeubles « pour assurer le paiement des 22,000 fr. versés en son acquit à << Mme de Chauton, etc. » ; que par acte, au greffe, du 24 mars 1900, restrictif d'un précédent à la date du 4 janvier même année, qui avait été signifié à Brethons, huissier susnommé et aux consorts de Chauton, les 6 et 8 janvier, par exploits de Descazeaux, Lassalle et Bronzeilles, Grimaldi, pour éviter l'effet du jugement précité, a, au sujet de la déclaration ou aveu ci-dessus, tranché le désaveu contre l'huissier Brethons;

Attendu que, par ses conclusions d'audience, tout en demandant acte, qu'il échet de lui accorder, de sa restriction, il persiste à soutenir que Brethons n'avait pas, pour faire cet aveu, reçu le pouvoir spécial prescrit par l'art. 352 du C. pr. civ.;

Attendu, en principe, que, pour la recevabilité d'une pareille demande en désaveu, trois conditions sont nécessaires : 1o un préjudice résultant de cet aveu pour le désavouant; 2o défaut d'autorisation spéciale de cet aveu; 3o défaut de ratification;

Attendu qu'à ces conditions, les défendeurs prétendent, avec partie des auteurs et de la jurisprudence qu'il faudrait en ajouter une quatrième, dont il est certain que, dans l'espèce, le demandeur ne pourrait pas justifier: la faute de l'officier ministériel désavoué;

Mais attendu que cette dernière condition n'est nullement nécessaire; qu'elle ne résulte d'aucun texte et pourrait, du reste parfois conduire, ce qui serait inadmissible, à une véritable iniquité, celle par exemple, de faire supporter irrémissiblement par le client les conséquences d'une erreur fatale et invincible de l'officier ministériel, qui, trompé lui-même dans sa bonne foi par la supercherie et les agissements dolosifs d'un tiers, a dû être absolument convaincu qu'il avait bien reçu mandat formel de faire l'aveu reproché, et qu'il échet donc de l'écarter. Voy. Garsonnet, Trailé théorique et pratique de procédure, t. 2, p. 644 et 645; Dalloz, Rép., vo Désaveu, nos 12 et 143; Lyon 1er avril 1824 (S. 25. 2. 107); Chambéry 9 août 1876 (Pand. franç., vo Désaveu, no 21); Alger 24 février 1897 (D. P. 1900. 1. 65 et notes 8 et 9 sous cet arrêt);

Première condition :

Attendu que la simple lecture du jugement du 13 août 1898, qui déboute le demandeur, démontre suffisamment qu'il a pour base unique l'aveu dont il s'agit, lequel considéré comme commencement de preuve par écrit, a permis de faire valoir d'autres présomptions favorables aux consorts de Chauton; d'où il suit, que cet aveu a causé à Jean-Baptiste Grimaldi un préjudice certain;

Deuxième condition : Attendu qu'il est constant que l'huissier Brethons a reçu par la poste, tout préparés, non pas, comme d'après les circonstances, il devait le penser, de Jean-Baptiste Grimaldi, qui lui aurait ainsi donné implicitement le pouvoir spécial de faire l'aveu consigné dans ces documents, mais bien de son frère, Ferdinand Grimaldi, de Paris, l'original et la copie de l'assignation qu'il a signifiée le 9 mai 1898 à Mme veuve de Chauton; que Jean-Baptiste Grimaldi soutient qu'il avait donné à son frère, qui aurait exclusivement dirigé tous les actes de procédure, seulement mandat ordinaire pour s'occuper de son procès et nullement mandat spécial pour faire l'aveu en question, et que les défendeurs, à qui incomberait la preuve de ce mandat spécial, émanant bien réellement de Jean-Baptiste Grimaldi, ne la rapportent pas;

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Troisième condition : Attendu, tout d'abord, qu'il convient de poser en principe que la ratification par le mandant d'un acte du mandataire, accompli en dehors des pouvoirs à lui confiés, ne doit pas se présumer facilement (Garsonnet, t. 2. p. 645 et Dalloz, vo Désaveu, no 62), et qu'elle ne saurait résulter que des faits et circonstances manifestant, de la part du mandant, la volonté certaine de ratifier (Cass. 5 avril 1893 D. P. 92.1.352);

Attendu, dans l'espèce, que les défendeurs, pour justifier que Jean-Baptiste Grimaldi a ratifié l'aveu aujourd'hui contesté, tirent argument: 1o de ce que, dans les conclusions signifiées le 26 juillet 1898, par l'avoué de Jean-Baptiste Grimaldi à son adversaire dans les qualités du jugement du 13 août de la même année, et dans l'acte d'appel, signifié par exploit de Brethons en date du 23 novembre suivant, ce qui est encore demandé pour le désavouant, c'est l'allocation des conclusions de l'exploit introductif d'instance; 2o du long laps de temps qui s'est écoulé entre le 26 octobre 1898, date de la signification du jugement du 13 août précédent, et le 3 janvier 1900, date du premier acte de désaveu; 3o et de ce que, le 30 octobre 1898, quatre jours après la signification du jugement précité du 13 août, Jean-Baptiste Grimaldi écrivait à Me Caumont, avoué de ses adversaires, le priant de lui faire connaître, pour les payer, le montant total des frais du procès, qui n'était pas indiqué dans le Jugement;

Sur la première objection : Attendu, toutefois, que par ces conclusions de l'exploit introductif, dont, dans lesdits documents l'allocation est demandée, il faut évidemment entendre non pas les moyens invoqués dans l'exploit mais seulement son dispositif, la chose essentielle, l'unique objet du procès, c'est-à-dire la condamnation de la veuve de Chauton au remboursement des 22,000 fr., interprétation dont on trouve bien la preuve dans les conclusions signifiées, qui, sans contenir d'aveux, ont leurs moyens propres précédant ladite demande ;

Sur la deuxième objection: - Attendu que le pen d'empressement à faire l'acte de désaveu s'explique et se comprend, si l'on considère que le 23 novembre 1898, moins d'un mois après la signification du jugement du 13 août, Jean-Baptiste Grimaldi, en interjetait appel ! que, devant la Cour d'appel de Pau, ainsi que le constate la grosse de l'arrêt de sursis rendu le 15 janvier 1900, il a conclu, au principal, à la réformation dudit jugement par interprétation différente des termes mêmes de l'aveu, quoique, disait-il, il lui fùt à tort attribué, et subsidiairement au sursis pour faire trancher le désaveu; qu'à ce moment, il est incontestable qu'il s'attachait surtout à faire vider l'appel à son profit, réservant au second plan, pour ne l'utiliser qu'en cas de besoin, l'action en désaveu, qu'il estimait peut-être plus difficile ou trop rigoureuse, et qu'il a bien pu, dès le début, sous l'influence du même raisonnement, penser, tout en protestant in petto contre l'aveu qui lui était prêté, que l'appel suffirait pour la sauvegarde de ses droits;

Sur la troisième objection: Attendu que, si la jurisprudence admet généralement que le paiement sans réserves de tous les frais par la partie qui a succombé équivaut à acquiescement au jugement et par suite à la ratification tacite des aveux qui peuvent s'y trouver consignés, il n'en saurait être ainsi d'une simple déclaration, d'ailleurs non suivie d'exécution, qu'a pu faire le perdant, de son intention de payer les frais, d'autant moins, qu'en admettant que cette déclaration fût sérieuse, il n'est pas possible de savoir si, dans la pensée du déclarant, le paiement devait être fait avec ou sans réserves;

Attendu, que ni la lettre du 30 octobre 1898 ni les faits et circonstances qui précèdent n'impliquent nécessairement de la part de Jean-Baptiste Grimaldi une ratification de l'aveu aujourd'hui contesté; qu'il n'en résulte pas la volonté certaine chez le demandeur de ratifier cet aveu; qu'à cet égard il subsiste, au moins des doutes, et que, dans ces conditions, on ne peut pas dire qu'il y ait ratification;

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