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(Applaudissements.)

Ce mode était consacré à la plainte du choeur dans la tragédie, à cause de son caractère larmoyant et peu héroïque. Suivant M. Gevaert, le mixolydien se rencontre très rarement parmi les mélodies populaires; il n'en cite qu'une dans son ouvrage et dit qu'il n'en connaît pas d'autre; c'est une mélodie suédoise. J'ai été assez heureux pour en recueillir plusieurs en Orient. En voici une dont la terminaison a bien l'expression suppliante qui caractérise le mode. Le rythme en est non moins curieux que le contour mélodique.

Je vais vous en lire les paroles :

Mais pourquoi ta mère a-t-elle besoin d'une lampe pendant la nuit. . . Allons, allons, je t'en prie, ne me tyrannise pas pour que je pleure!

Puisqu'elle a dans sa maison le soleil et la lune? Allons, allons, je t'en prie, ne me tyrannise pas pour que je pleure!)

(Exécution. Bravos et applaudissements.)

Ici s'arrête la liste des sept modes diatoniques principaux. Je n'ai pu vous donner qu'un aperçu très sommaire du caractère expressif que les anciens leur attribuent. Les personnes que cette étude intéresse trouveront de quoi satisfaire amplement leur curiosité dans le beau livre de Gevaert : Histoire et théorie de la musique de l'antiquité. Dans ce livre, dont l'existence est un bienfait pour l'art, la théorie antique, naguère si rebutante, est devenue abordable à tous. M. Gevaert est le premier qui ait parlé de la musique antique en musicien. Il a traité les questions ardues non seulement avec la sûreté que donne une vaste érudition, mais encore avec le discernement et le tact d'un compositeur éminent.

Les sept modes diatoniques que nous avons passés en revue étaient les principaux modes usités dans l'antiquité, mais ce n'étaient pas les seuls; il y en avait d'autres encore dont nous ne ferons que mentionner le nom : le syntono-lydien, gamme de fa terminée sur la tierce :

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le mode locrien, gamme de ré sans accident avec dominante la,

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(1) N° 22 du Recueil de Mélodies populaires de Grèce et d'Orient.

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y avait en outre tous les modes du genre chromatique dont voici l'échelle ordinaire :

Ex. 55.

Vous le voyez, cette gamme est la gamme de la dans laquelle le sol et le ré sont abaissés d'un demi-ton; le sol est devenu un fa dièse et le ré un ut dièse. Cette gamme a un caractère de mélancolie qui n'est pas sans charme. Je crois être le premier à en avoir fait usage à notre époque; je l'ai employée dans une mélodie intitulée Primavera (1).

Il y avait enfin les modes du genre enharmonique avec les quarts de ton, dont nous ne parlerons pas.

Avant de terminer, je vais vous dire quelques mots d'une gamme qui est peut-être antique d'origine, mais qui est d'un emploi absolument moderne et très fréquent en Orient dans les mélodies populaires; elle est trop caractéristique pour que je puisse la passer sous silence. C'est le chromatique oriental.

Notre mineur a une seule quarte chromatique; l'autre est diatonique. Dans le chromatique oriental, les deux quartes sont chromatiques; de plus, cette gamme est basée sur la dominante.

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Je vais vous faire entendre, comme exemple de mélodie construite avec cette échelle, une berceuse chypriote que j'ai recueillie à Smyrne, et dont voici les paroles:

(E. et A. Girod, éditeurs à Paris.

Allons! dors, ma fille, et moi je te donnerai la ville d'Alexandrie en sucre, le Caire en riz et Constantinople pour que tu y règnes pendant trois années (").

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La présence des deux trihémitons dans l'octave donne à cette gamme un sentiment de mélancolie intense, auquel ajoute le caractère rêveur de la terminaison sur la dominante. Il y a bien des enfants en Grèce qui se sont endormis au son de cette berceuse. Des Grecs à qui je l'ai fait entendre à Paris se sont souvenus qu'ils avaient été bercés dans leur enfance avec ce chant. M. Saint-Saëns a fait un emploi très heureux du chromatique oriental dans le remarquable ballet de son opéra biblique : Samson et Dalila.

Nous venons de dire que le mode mineur est un mode hybride, mélangé de diatonique et de chromatique. Nous avons trouvé en Orient bien d'autres hybrides, entre autres le mélange du chromatique et du majeur.

Cette faculté d'associer dans la même octave deux tronçons de gammes différentes augmente prodigieusement le nombre des modes ou des variétés de modes. Une aussi grande diversité d'échelles est évidemment une cause de variété dans l'expression mélodique. Or, toutes ces échelles peuvent s'harmoniser. La polyphonie est assez bien outillée de nos jours pour qu'on puisse renforcer l'expression d'une mélodie, quelle qu'elle soit, par une harmonie appropriée à son caractère modal.

Donc, aucun élément expressif existant dans une mélodie quelconque, quelle que soit l'époque à laquelle elle remonte, quel que soit le pays d'où elle provienne, ne doit être banni de la langue musicale. (Bravos et applaudissements.)

Tous les modes, anciens ou modernes, européens ou étrangers, par cela seul qu'ils sont aptes à engendrer une impression, doivent conquérir droit de cité parmi nous et peuvent être employés par les compositeurs. (Nouveaux applaudissements.)

Nous avons cité, dans le cours de cette étude, plusieurs passages tirés des maîtres, où ils ont secoué le joug du majeur et du mineur pour élargir le cercle trop étroit de la modalité moderne. Il est un homme dont les travaux contribueront puissamment à jeter dans la circulation musicale le riche trésor des modes diatoniques antiques. M. Lemmens, l'éminent organiste et compositeur, fondateur de la nouvelle école de musique religieuse de Malines, dont l'enseignement sera basé sur la diatonie, s'est voué à la restauration rythmique du chant grégorien et à l'harmonisation de ces mélodies sublimes, suivant un système à la fois rationnel et musical. (Applaudissements.)

En appliquant à des compositions originales les modes du plain-chant qui, nous l'avons vu, sont les mêmes que ceux de la musique grecque, M. Lemmens a montré le parti qu'en peut tirer la langue moderne.

(1) N° 1 du Recueil de Mélodies populaires de Grèce et d'Orient.

Des efforts ont été faits dans la même voie par d'autres compositeurs en France et à l'étranger. En Russie, la plupart des chants nationaux sont construits avec les gammes grecques. Ces chants ont été recueillis pieusement par les compositeurs russes et admirablement harmonisés par quelques-uns d'entre eux. Citons les intéressants recueils de RimskyKorsakof et de Balaklireff.

Dans un article publié récemment par la Gazette musicale, M. Kui, compositeur russe, s'exprime ainsi, en parlant des mélodies populaires de son pays construites dans les modes antiques :

Ces admirables matériaux, traités dans les plus hautes conditions de l'art, et mis en œuvre par une intelligence apte à comprendre les divers côtés du génie national, ont été l'occasion et le point de départ de plus d'une œuvre capitale.

Plus loin, il ajoute :

Le compositeur en quête d'effets nouveaux, fatigué de l'uniformité de nos constructions harmoniques et mélodiques, ne pourrait-il exploiter cette mine féconde? Le nouveau n'est-il pas appelé à sortir de l'ancien, dans une certaine mesure, et n'y aurait-il pas dans ce qu'on appelle décrépitude les germes d'une florissante jeunesse?

Cette conclusion est la nôtre.

Quand des idées nouvelles et semblables surgissent sur différents points de l'Europe; quand des efforts sont faits dans une voie identique par des hommes qui ne se sont pas donné le mot, n'y a-t-il pas là un symptôme évident que ces idées sont appelées un jour à triompher?

Ce jour, nous en appelons l'heureux avènement. Nous avons foi dans le principe de l'application de la polyphonie à toutes les gammes.

Nos deux modes, majeur et mineur, ont été tellement exploités, qu'il y a lieu d'accueillir tous les éléments d'expression propres à rajeunir la langue musicale. Il ne s'agit ici de renoncer à aucune des conquêtes déjà faites, ni de rien retrancher aux ressources de la musique moderne, mais bien au contraire d'agrandir le domaine de l'expression mélodique et de fournir de nouvelles couleurs à la palette musicale. (Applaudissements.)

De cette manière, on pourra résoudre ce problème qui est actuellement plus difficile que jamais : être neuf, tout en restant simple. (Nouveaux applaudissements.)

M. GOUNOD, président. Mesdames, Messieurs, au nom du bureau que j'ai l'honneur de présider aujourd'hui devant vous, et en votre nom aussi, je tiens à remercier ces dames et ces messieurs qui ont bien voulu prêter à M. Bourgault-Ducoudray le concours de leur talent et de leur bonne volonté afin de nous faire entendre ces chants qui viennent de nous charmer tous. (Applaudissements.)

La séance est levée à 3 heures 40 minutes.

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