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Si cependant un vaisseau en détresse est capturé en se rendant dans un port ennemi, et par ce moyen se trouve sauvé, c'est simplement là un cas de sauvetage civil et non militaire 1. Mais pour constituer une reprise, il est nécessaire que ceux qui la font aient une possession matérielle et effective. Il suffit que la prise soit véritablement délivrée d'entre les mains de l'ennemi qui l'avait capturée 2. Quand un bâtiment ennemi est capturé et repris par l'ennemi, puis capturé de nouveau sur l'ennemi, ceux qui ont fait la première capture n'ont pas droit à restitution en payant un droit de recousse, mais ceux qui ont fait la dernière capture jouissent de tous les droits de prise, car la première reprise a entièrement dépouillé de leur droit ceux qui avaient fait la première capture originaire 3. Quand ceux qui ont les premiers fait une capture ont abandonné leur prise, et que cette prise est ensuite capturée de nouveau par d'autres, ceux-ci seuls ont droit à la propriété 4. Mais si l'abandon a été involontaire et produit par la crainte d'une force supérieure, surtout si cette crainte vient des derniers qui font la capture, les droits des premiers renaissent complétement 5. Et quand l'ennemi a capturé un vaisseau qu'il a ensuite abandonné, et qui est repris de nouveau, cela ne doit pas être considéré comme un cas d'abandon, car le propriétaire originaire n'a jamais eu l'animus delinquendi, et alors il doit être restitué sur le payement du droit de recousse; mais comme à la rigueur ce n'est pas une reprise, dans le sens de l'acte, le taux du

1 ROBINSON'S Admiralty Reports, vol. IV, p. 147. The Franklin.

2 Ibid., vol. III, p. 305. The Edward and Mary,

3 lbid., vol. IV, p. 217, note a. WHEATON'S Reports, vol. I, p. 125. The Astrea. VALIN, Comment. sur l'ordonn. de la mar. t. II, p. 257-259. Traité des prises, chap. VI, sect. I.

Traité de la propriété, no 99.

POTHIER,

4 EDWARD'S Admiralty Reports, vol. I, p. 79. The lord Nelson. DODSON'S Admiralty Reports, vol. I, p. 404. The Diligentia.

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droit est discrétionnaire 1. Mais si l'abandon par l'ennemi a été produit par la terreur d'une force ennemie, c'est une reprise dans les termes de l'acte 2. Quand la prise est abandonnée par ceux qui l'ont faite, et qu'elle est ensuite conduite au port par un sauveteur neutre, on a soutenu que la cour d'amirauté neutre avait le pouvoir d'ordonner le payement du droit de sauvetage, mais ne pouvait pas rendre la propriété aux propriétaires originaires belligérants. Car par la capture les preneurs ont acquis un droit de propriété qu'aucune nation neutre ne saurait justement combattre ou détruire, et par conséquent le produit (déduction faite du droit de sauvetage) appartient à ceux qui ont fait la capture originaire; et les nations neutres ne doivent pas s'occuper de la validité d'une capture entre les belligérants 3. Mais si les preneurs font don du vaisseau capturé à un équipage neutre, cet équipage a droit à rémunération comme sauveteur, et après déduction faite du droit de sauvetage, le produit restant sera donné au propriétaire originaire. Une règle générale qui paraît souffrir peu d'exceptions, c'est que les droits de capture sont complétement ravis par une reprise par l'ennemi, par la fuite du vaisseau capturé, ou par son abandon volontaire de la part de ceux qui l'avaient pris 5.

Et le même principe semble applicable à une reprise hostile; mais si cette reprise est faite par l'équipage neutre d'un vaisseau neutre, il est douteux jusqu'à quel point un pareil acte illégal, qui comprend la peine de la confiscation, pourrait être soutenu dans les cours de prises du pays de celui qui a fait la capture, pour lui ravir son droit originaire en cas d'une reprise subséquente.

1 ROBINSON'S Admiralty Reports, vol. IV, p. 216. The John and Jane. 2 Ibid., vol. VI, p. 273. The Gage.

3 DALLAS' Reports, vol. III, p. 188. The Mary Ford.

4 CRANCH'S Reports, vol. VIII, p. 227. The Adventure.

3 Ibid., vol. IV, p. 293. HUDSON V. GUESTIER, Vol. VI, p. 281. S. C. DODSON'S Admiralty Reports, vol. I, p. 192. The Charlotte Caroline.

Quant à ceux qui reprennent un vaisseau, bien que leur droit au payement du sauvetage soit éteint par une reprise subséquente de la part de l'ennemi, et une sentence régulière de condamnation dépouillant les propriétaires originaires de leur propriété, néanmoins si le vaisseau était rendu au moyen de cette nouvelle capture, et reprenait son voyage en conséquence soit d'un acquittement judiciaire, soit d'une relaxation par le souverain pouvoir, ceux qui auraient fait la première reprise seraient reintégrés dans leur droit de recousse 1. Ceux qui font une reprise et ceux qui font un sauvetage ont un intérêt légal dans la propriété, qui ne peut leur être enlevé par d'autres sujets sans un jugement d'une cour compétente; et il n'appartient pas aux vaisseaux de l'État, aux officiers ou à d'autres personnes, sans le prétexte d'agir en vertu d'une autorité supérieure, de les déposséder sans cause 2.

Dans tous les cas de sauvetage où le taux n'est pas déterminé par une loi positive, il est laissé à la discrétion de la cour, tant pour les reprises que pour les autres cas 3. Quant en vertu d'une reprise les parties se sont acquis un droit à une recousse militaire d'après l'acte de prise, la cour peut aussi leur accorder en sus un droit de sauvetage civil, si elles ont ensuite rendu des services extraordinaires en arrachant le vaisseau en détresse aux périls de la mer 4.

La validité des captures maritimes doit être déterminée par une cour du gouvernement de celui qui a fait la capture, siégeant soit dans son pays même, soit dans le pays de son allié. Cette règle de juridiction s'applique, soit que la propriété capturée ait été conduite dans le port de celui

1 DODSON'S Admiralty Reports, vol. I, p. 192. La Charlotte Caroline. 2 Ibid. vol. I, p. 414. The Blendenhale.

3 CRANCH'S Reports, vol. I, p. 1. TALBOT V. SEEMANN. ROBINSON'S Admiralty Reports, vol. III, p. 308. BYNKERSHOEK, Quæstionum

juris publici lib. I, cap. v.

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4 DODSON'S Admiralty Reports, vol. I, p. 347. The Louisa.

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a fait la capture.

Condam

nation de propriété

qui a fait la capture, soit qu'elle ait été conduite dans le port d'un allié ou dans un port neutre.

A l'égard du premier cas il ne peut y avoir de doute. Dans le second cas, quand la propriété est conduite dans ports d'un le port d'un allié, rien n'empêche le gouvernement de ce

se trouvant dans les

allié.

conduite

neutre.

pays, quoiqu'il ne puisse lui-même condamner, de permettre l'exercice de cet acte final d'hostilité: la condamnation de la propriété de l'un des belligérants au profit de l'autre. Il existe un intérêt commun entre les deux gouvernements, et tous deux sont présumés autoriser toutes mesures donnant un résultat à leurs armes, et considérer les ports de chacun d'eux comme servant mutuellement à cet effet. Un pareil jugement suffit donc à l'égard des propriétés prises dans le cours des opérations d'une Propriété guerre commune. Mais quand la propriété est conduite dans un port dans un port neutre, il peut paraître en principe plus douteux que la validité d'une capture puisse être décidée même par une cour de prise établie dans le pays de celui qui a capturé cette propriété. Le raisonnement de sir W. Scott dans le cas du Henrik and Maria est certainement très-propre à prouver l'irrégularité de cette pratique. Il regarde que la cour d'amirauté anglaise a été trop loin dans sa propre pratique, en condamnant les vaisseaux capturés se trouvant dans les ports neutres, pour la rappeler à la pureté convenable du principe originaire. En donnant le jugement de la cour des appels sur le même cas, sir W. Grant soutint aussi que la Grande-Bretagne était estimée d'après sa vieille pratique, et que les marchands neutres étaient suffisamment garantis en achetant en vertu d'une pareille sentence de condamnation, par les arrêts constants des tribunaux anglais. La même règle a été adoptée par la cour suprême des États-Unis comme étant justifiable sur les principes de convenance aussi bien pour les belligérants que pour les neutres. Et quoiqu'en fait la prise fût sous la juridiction neutre, on devait cependant

la considérer comme sous le contrôle de celui qui a fait la capture et dont la possession est regardée comme celle de son souverain 1.

$14. Juridiction des tribunaux

qui fait la

capture.

Cette juridiction des cours nationales du bâtiment preneur pour décider de la validité des captures faites en guerre sous l'autorité de son gouvernement, exclut l'autorité judi- de la partie ciaire de tout autre pays, à deux exceptions près seulement: 1o Quand la capture est faite dans les limites territoriales d'un État neutre. 2o Quand elle est faite par des vaisseaux de guerre armés dans le territoire neutre 2.

Dans ces deux cas les tribunaux judiciaires de l'État neutre ont pouvoir juridique de déterminer la validité des captures ainsi faites, et de maintenir sa neutralité, en restituant la propriété des ses sujets ou de ceux d'autres États amis aux propriétaires originaires. Ces exceptions à la juridiction exclusive des cours nationales de celui qui a fait la capture ont été étendues, par les règlements civils de quelques pays, à la restitution de la propriété de leurs propres sujets dans tous les cas où cette même propriété a été capturée illégalement, et amenée ensuite dans leurs ports. Ils attribuent ainsi au tribunal neutre la juridiction de la question de prise ou de non-prise, toutes les fois que la propriété capturée est amenée dans le territoire neutre. L'ordonnance sur la marine de Louis XIV, de 1681, contient un semblable règlement. Valin en justifie l'équité, en se fondant sur ce qu'il est établi par voie de compensation pour le privilége d'asile accordé au bâtiment preneur et à ses prises dans le port neutre. Il n'est pas douteux qu'une pareille condition puisse être expressément annexée par l'État neutre au privilége d'amener dans ses

1 ROBINSON'S Admiralty Reports, vol. IV, p. 43; vol. VI, p. 138, note (a). BYNKERSHOEK, Quæstionum juris publici lib. I, cap. v. Traduction de DUPONCEAU, p. 38, note. KENT'S Commentaries on American law, vol. I, p. 103. 5e éd. WHEATON, Histoire du droit

des gens, p. 321.

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WHEATON'S Reports, vol. IV, p. 298. The Estrella. Vol. VII, p. 283. The Santissima Trinidad.

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