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commis quelque acte d'hostilité, ils ne sont pas responsables, à moins qu'on ne puisse imputer leur ignorance à leur faute ou à leur négligence. Mais comme le pouvoir suprême de l'État est obligé de remplir ses propres engagements, ou ceux contractés avec son autorisation expresse ou tacite, le gouvernement de celui qui fait une capture est obligé, dans le cas d'une suspension d'hostilités maritimes, de restituer toutes les prises faites en contravention à l'armistice. Pour prévenir les disputes et les difficultés s'élevant de pareilles questions, il est d'usage de stipuler dans la convention de l'armistice comme dans les traités de paix une période future dans laquelle les hostilités doivent cesser en rapport, nécessaire avec la situation et la distance des lieux 1.

$ 22. Règles prétation des

conventions

de trêves.

Outre les maximes générales applicables à l'interprétation de tous les traités internationaux, il y a quelques pour l'interrègles particulières applicables aux conventions de suspension d'hostilités. La première de ces règles particulières, comme l'expose Vattel, c'est que chaque partie peut faire dans son territoire ou dans les limites prescrites par l'armistice tout ce qu'elle pourrait faire en temps de paix. Ainsi chacune des parties belligérantes peut lever des troupes, les mettre en marche, réunir des provisions et autres munitions de guerre, recevoir des renforts de ses alliés ou réparer les fortifications d'une place non absolument assiégée.

La seconde règle c'est qu'aucune des parties ne peut profiter de la trêve pour exécuter sans péril pour ellemême ce que la continuation des hostilités l'aurait empêchée de faire. Un pareil acte serait une violation frauduleuse de l'armistice. Par exemple, dans le cas d'une trêve entre le commandant d'une ville fortifiée et l'armée assiégeante, aucune des parties n'est libre de continuer les

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1 GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. III, cap. XXI, § 5. Droit des gens, liv. III, chap. XVI, § 239.

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ouvrages construits soit pour l'attaque soit par la défense, ni d'ériger dans ce but de nouvelles fortifications. La garnison ne peut pas non plus profiter de la trêve pour introduire des provisions ou des secours dans la place, par les passages ou autres moyens que l'armée assiégeante aurait pu rompre ou

empêcher si les hostilités n'avaient été interrompues par l'armistice.

La troisième règle établie par Vattel est plutôt un corollaire des règles précédentes qu'un principe distinct capable d'une application séparée. Comme la trêve ne fait que suspendre les hostilités sans terminer la guerre, toutes les choses doivent rester dans leur précédent état dans les lieux dont la possession était spécialement contestée à l'époque de la conclusion de l'armistice 1.

Il est évident que les parties contractantes peuvent par convention expresse déroger à certains égards et à tous égards à ces conditions générales.

A l'expiration de la période stipulée dans la trêve, les hostilités recommencent naturellement sans nouvelle dé claration de guerre. Mais si la trêve a été conclue pour un temps indéterminé ou pour une très-longue période, la bonne foi et l'humanité concourent pour exiger qu'un avis préalable soit donné à l'ennemi de l'intention de terminer une trêve qu'il peut justement regarder comme équivalente à un traité de paix. Tel fut le devoir imprimé par le collége des Féciaux aux Romains à l'expiration de la longue trêve qu'ils avaient faite avec le peuple de Veies. Ce peuple avait recommencé les hostilités avant l'expiration du temps limité dans la trêve. Cependant les Romains jugèrent nécessaire de lui envoyer des hérauts, et de demander satisfaction avant de reprendre la guerre 2.

1 VATTEL, Droit des gens, liv. III, chap. xvi, § 245–251. 2 TITE-LIVE, Hist., lib. IV, cap. xxx. Pour les lois de la guerre observées par les Romains, voyez WHEATON, Histoire du droit des gens, t. I, p. 17.

§ 24. Capitulareddition des troupes et des forteresses.

Les capitulations pour la reddition des troupes et des forteresses, et des provinces particulières d'un pays, tombent ions pour la naturellement dans les pouvoirs généraux confiés aux commandants de terre et de mer. Les stipulations entre le gouverneur d'une place assiégée et le général ou l'amiral commandant les forces assiégeantes, si elles se rattachent nécessairement à la reddition, n'ont pas besoin de la sanction subséquente de leurs souverains respectifs. Telles sont les stipulations ordinaires pour la sûreté de la religion et les priviléges des habitants; la condition que la garnison ne portera pas les armes contre les vainqueurs pendant un temps limité, et autres clauses semblables, se rattachant particulièrement à la transaction. Mais si le commandant d'une ville fortifiée s'aventure à stipuler la cession perpétuelle de cette place, ou à entrer dans d'autres engagements complétement en dehors de son autorité implicite, sa promesse se réduit à une simple sponsion 1.

La célèbre convention faite par les consuls romains avec les Samnites aux Fourches Caudines était de cette nature. La conduite du sénat romain en désavouant ce traité ignominieux, est approuvée par Grotius et Vattel, qui soutiennent que les Samnites n'avaient pas droit à être placés, in statu quo, parce qu'ils devaient savoir que les consuls romains n'avaient aucune autorisation de faire une pareille convention. Cette considération paraît suffisante pour justifier la conduite des Romains, agissant dans cette circonstance d'après leur politique uniformément implacable, livrant aux Samnites les auteurs du traité, et persévérant dans la guerre jusqu'à ce que ce formidable ennemi fût définitivement subjugué 2.

La convention conclue à Closter - Seven, pendant la

1 Vide ante, pt. III, chap. II, § 4, p. 229.

2 Voyez le Compte rendu de cette transaction remarquable par Tite-Live.

guerre de sept ans, entre le duc de Cumberland, commandant les forces anglaises en Hanovre, et le maréchal de Richelieu, commandant l'armée française, pour une suspension d'armes dans le nord de l'Allemagne, est un des plus remarquables traités de cette espèce que fournisse l'histoire moderne. Il ne paraît pas résulter des discussions qui eurent lieu entre les deux gouvernements à cette occasion, qu'il y ait eu aucun désaccord entre eux quant aux vrais principes de guerre internationale applicables à ces transactions. La conduite, sinon le langage des deux parties implique l'admission mutuelle que la convention était de nature à exiger ratification, comme excédant les pouvoirs ordinaires des commandants militaires relatifs à de simples capitulations militaires. La même remarque s'applique à la convention signée à ElArich, en 1800, pour l'évacuation de l'Égypte par l'armée française, quoique la position des deux gouvernements pour la convention de Closter-Seven fût l'inverse de celle d'El-Arich. Dans le premier exemple le gouvernement britannique refusait de permettre l'exécution du dernier traité, en se fondant sur le défaut de pouvoirs de sir Sidney-Smith, et après la bataille d'Héliopolis, il insistait sur son accomplissement par les Français, alors que les circonstances avaient changé et rendu son exécution désormais incompatible avec leur politique et leur intérêt. La bonne foi peut avoir caractérisé la conduite du gouvernement britannique dans ce cas, ainsi que le soutinrent vigoureusement les ministres, dans les discussions parlementaires que fit naître le traité, mais il n'y a néanmoins aucune évidence de perfidie de la part du général Kléber. Sa conduite peut plutôt être comparée à celle du duc de Cumberland à Closter - Seven (et certes elle ne doit pas souffrir de comparaison), en concluant une convention adaptée aux circonstances existantes, qu'il était de son intérêt de mettre à effet quand elle fut signée, et ensuite

en refusant de la maintenir quand ces circonstances étaient matériellement changées. Dans ces conventions le temps est important, on peut même dire qu'il est l'essence même du contrat. S'il arrive quelque chose qui rende impraticable son exécution immédiate, le traité devient nul, ou du moins est susceptible d'être changé par de nouvelles négociations 1.

$ 25.

Passeports sauf

et licences.

Les passeports, les sauf-conduits, et les licences, sont des documents accordés, pendant la guerre, pour protéger conduits les personnes et les propriétés contre l'action générale des hostilités. La compétence de l'autorité pour les accorder dépend des principes généraux déjà cités. Cette autorité souveraine peut reposer sur les commandants de terre ou de mer, ou sur certains officiers civils, soit expressément soit d'une manière implicite, résultant inévitablement de la nature et de l'étendue de leur crédit général. De pareils documents doivent être interprétés d'après les mêmes règles de franchise et de bonne foi que les autres actes du souverain pouvoir 2.

Ainsi une licence accordée par l'État belligérant à ses sujets ou aux sujets de son ennemi, pour poursuivre un commerce interdit par la guerre, a l'effet de dispenser des lois de la guerre, dans toute l'extension qui peut ressortir de la claire interprétation de ses termes. La partie belligérante adverse peut justement considérer de tels documents de protection comme étant per se un motif de capture et de confiscation, mais les tribunaux maritimes de l'État sous l'autorité duquel ils sont accordés, sont forcés de les considérer comme des relâchements légaux à l'état de guerre ordinaire. Une licence est un acte procédant de l'autorité souveraine de l'État, qui seul est com

1 FLASSAN, Histoire de la diplomatie française, t. VI, p. 97-107. - Annual Register, vol. I, p. 209-213, 228-234; vol. XLII, p. (209), p. 223, 233. State Papers, vol. XLIII, p. (28-34).

2GROTIUS, de Jure belli ac pacis, lib. III, cap. xxi, § 14. Droit des gens, liv. III, chap. xvii, § 265—277.

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VATTEL,

$ 26. Licence pour commercer

avec l'ennemi.

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