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veraineté ; et cette idée doit même s'appliquer à la femme de préférence aux enfants, par suite de l'unité légale qui existe entre les époux dans toutes les législations. On peut encore tirer un argument d'un décret impérial en date du 3 juin 1835 1, rendu sur la question de savoir si la femme autrichienne qui se propose d'épouser un étranger peut, en demandant la permission requise, réclamer en même temps pour elle la conservation de sa qualité d'Autrichienne. Le décret répond que non; « qu'aucune réserve ne peut être admise con» tre la disposition de la loi d'après laquelle la femme » suit la qualité du mari', et qu'en conséquence l'Au» trichienne qui épouse un étranger ne peut aucune» ment se réserver la qualité de sujet autrichien. »

En Angleterre, il est reconnu que la femme anglaise qui épouse un étranger, conserve néanmoins sa qualité d'Anglaise. Il y a lieu de présumer que la même décision serait portée à fortiori à l'égard de la femme d'un Anglais qui se ferait naturaliser en pays étranger; et nous devons laisser aux jurisconsultes anglais le soin de tirer la femme, qui se trouve dans cette hypothèse, du labyrinthe des contradictions que nous avons signalées plus haut.

5. Par suite de ce changement d'état des deux époux, qui est le résultat de la naturalisation du mari, les lois de la patrie primitive cessent de leur être applicables,

1 M. Winiwarter, Manuel (Handbuch, etc.), Additions, t. III, p. 6, Le § 92 du Code civil autrichien contient des dispositions analogues à celles des art. 213 et 214 du Code civil français.

3 Déclaration de lord Castlereagh, ministre des affaires étrangères, du 20 avril 1816; Sirey, 1819, II, 43; Mansord, Du droit d'aubaine et des étrangers en Savoie, t. II, p. 241.

et ils deviennent sujets des lois de la nouvelle patrie'.

De là il suit que l'étranger dans la patrie duquel le divorce est admis, perd le droit de le demander lorsqu'il obtient la naturalisation en France. De même chacun des époux originaires d'un État où, comme en France, le divorce n'est pas reconnu, peut, après la naturalisation acquise dans un pays dont la législation admet le divorce, invoquer ce mode de dissolution du mariage'.

6. La naturalisation du père exerce nécessairement ses effets sur l'état des enfants nés postérieurement à cette naturalisation : ces enfants auront la même nationalité que le père.

7. Mais quel sera le sort des enfants du même père nés avant la naturalisation?

Les législations de deux grands États de l'Europe, de l'Autriche et de la Prusse, renferment des dispositions positives d'après lesquelles la naturalisation du père s'étend de droit à ses enfants mineurs; et vice versa, il est admis en Autriche que les enfants mineurs d'un sujet qui perd cette qualité par la naturalisation à l'étranger, suivent le sort du père. Ces dispositions, fondées évidemment sur la circonstance que les enfants mineurs n'ont, de fait et de droit, d'autre volonté que celle du père, nous semblent devoir être érigées en prin

1 Traité du droit international privé, p. 28.

* M. Burge, p. 683, 688 et suiv. - Merlin attribue le même effet à une nouvelle loi qui prohibe ou introduit le divorce; il cite deux arrêts de la cour de Turin, conformes à son opinion. Répertoire, vo Effet rétroactif, sect. 3, § 2, art. 6.

Code civil, art. 146. V. M. de Puttlingen, § 29, p. 30. V. ci-dessus la disposition du § 10 de l'ordonnance royale du 31 décembre 1842.

5 M. de Puttlingen, § 40, p. 40.

cipe du droit international: il peut sembler contradictoire que les enfants qui ont besoin du secours physique et intellectuel du père, soient séparés de lui par la limite de la nationalité. Ceux des membres de la famille qui se trouvent dans une dépendance légale du chef, doivent suivre le sort de celui-ci.

En Autriche, les tuteurs ou autres représentants des mineurs peuvent même, en leur nom, réclamer et obtenir la naturalisation de ces derniers '.

La législation de la Russie va plus loin que celle de l'Autriche et de la Prusse. La naturalisation d'un étranger s'étend à tous les enfants du naturalisé, ou à ceux d'entre eux qu'il aura indiqués dans la déclaration qu'il est tenu de faire à cet égard'.

En France, la loi garde le silence sur la question. M. Duranton et M. Boileux tiennent pour la négative. Un arrêt de la cour royale de Grenoble du 16 décembre 1828' a également jugé que la naturalisation du père ne s'étend pas à ses enfants mineurs, et que la naturalisation est un droit purement personnel. Notre savant ami M. Duvergier a exprimé un avis opposé dans une consultation imprimée. La naturalisation du père ou de la mère veuve, dit-il, entraîne de droit celle de leurs enfants mineurs habitant avec eux. L'auteur fait observer qu'aucune disposition législative ne limite au père seul la naturalisation obtenue par lui; que dans le silence de

'M. de Puttlingen, S 40, p. 40.

'Digeste, lois personnelles, IX, 916. V. la Revue étrangère et française, t. III, p. 552.

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la loi il faut se déterminer par les règles générales touchant le droit de puissance paternelle. « Or, dit M. Duvergier, les rapports qui existent entre le père et ses enfants mineurs, soit que l'on consulte la législation, soit qu'on considère les mœurs des nations civilisées, sont tellement intimes que la condition ou le rang social, les titres, le domicile de l'un appartiennent aux autres. »> «< Lorsqu'un père de famille abdique sa patrie, dit l'auteur, qu'il en choisit une nouvelle, on ne peut supposer qu'il ait entendu s'isoler de ses enfants, d'être réuni avec eux de fait et séparé de droit. » Cet avis, conforme aux lois de l'Autriche et de la Prusse, nous semble devoir être suivi en France : nous le regardons comme étant en parfaite harmonie avec les rapports existant, de fait et de droit, entre les père et mère d'une part, et leurs enfants mineurs d'autre part.

La législation de la Belgique n'a pas adopté le principe reçu en Autriche et en Prusse : elle s'est bornée à rendre la disposition de l'art. 9 du Code civil français commune aux enfants du père naturalisé qui étaient mineurs à l'époque de la naturalisation. L'art. 4 de la loi du 27 septembre 1835 est ainsi conçu : « La naturalisa» tion du père assure à ses enfants mineurs la faculté de jouir du même avantage, pourvu qu'ils déclarent, dans » l'année de leur majorité, devant l'autorité communale » du lieu où ils ont leur domicile ou leur résidence..... » que leur intention est de jouir du bénéfice de la pré>> sente disposition. >>

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8. Les enfants majeurs conservent partout leur naturalité d'origine malgré le changement d'état du père ou de la mère. Ce principe résulte des législations de l'Autriche et de la Prusse nous l'admettons également en France. En effet, les enfants majeurs ne se trouvent

plus dans une entière dépendance du père, et ils ont légalement leur propre volonté.

En Belgique, le second paragraphe de l'art. 4 de la loi de 1835 renferme une disposition spéciale en faveur des enfants ou descendants majeurs de l'étranger naturalisé. « Si les enfants et descendants,» y est-il dit, «< sont » majeurs, ils pourront, dans le cas où leur père obtien› drait la grande naturalisation, obtenir la même faveur » pour services éminents rendus à l'État par leur père. »

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FŒLIX.

XXXV. Du notariat et de l'insinuation dans les Etats du roi de Sardaigne.

Par un Jurisconsulte sarde.

Nous nous proposons de tracer un exposé sommaire des règles relatives au notariat qui ont été successivement établies par les princes de la maison de Savoie, dont le gouvernement éclairé et paternel a produit, dès l'époque la plus reculée, des dispositions pleines de sagesse et d'avenir.

Sans nous occuper des anciennes lois romaines sur les argentarii, les notarii et les tabelliones, lois qui, dans les premiers siècles de notre monarchie, furent imparfaitement observées, et qui furent d'ailleurs modifiées de diverses manières selon les divers statuts locaux, nous mentionnerons la première loi organique qui fut promulguée chez nous sur le notariat; elle est d'Amédée VIII, et date du 17 juin 1430 '.

1 V. Dizionario teorico-pratico del notariato, ossia elementi della scienza notarile, di Giovanni Calza, regio notaio. 3 vol. in-8°. Torino, 1826. Al vol. II, Verb. Insinuazione.— Notajo — etc.

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