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Les gardes pourvus du titre qui les accrédite prêteront serment devant l'Autorité compétente du Pays où s'exerce la jouissance, et ils lui adresseront les plaintes que de droit.

PROPRIÉTÉS COUPÉES PAR LA FRONTIÈRE.

ART. 7. Quoique la limite internationale partage diverses propriétés appartenant les unes à des Français, les autres à des Espagnols et que chaque fraction de ces propriétés conserve la nationalité du Pays où elle se trouve, les propriétaires n'en auront pas moins le droit de cultiver en toute franchise les fractions situées dans l'État voisin, pouvant passer librement la frontière soit à l'aller soit au retour, avec tout ce qui concerne cette culture et avec les produits de la terre. Toutefois, les intéressés restent libres de ne pas user du bénéfice de la franchise accordée à l'entrée de ces produits dans leur Pays, les laissant alors soumis au droit commun du territoire où ils sont recueillis. Dans le cas où le propriétaire serait établi sur la partie de son bien située dans l'autre État, il y pourra réunir et garder en toute liberté et franchise les produits de tout le bien avec faculté de les introduire ensuite dans son propre Pays sans être assujetti à aucun droit d'entrée ou de sortie.

RÉGIME ET JOUISSANCE DES EAUX D'un usage commun entre les deux PAYS.

ART. 8. Toutes les eaux stagnantes et courantes, qu'elles soient du domaine public ou privé, sont soumises à la souveraineté du Pays où elles se trouvent, et par suite à sa législation, sauf les modifications convenues entre les deux Gouvernements.

Les eaux courantes changent de juridiction du moment où elles passent d'un Pays dans l'autre et quand les cours d'eau servent de frontière, chaque Etat y exerce sa juridiction jusqu'au milieu du courant.

ART. 9. Pour les cours d'eau qui passent d'un Pays dans l'autre ou qui servent de frontière, chaque Gouvernement reconnaît, sauf à en faire quand il y aura utilité, une vérification contradictoire, la légalité des irrigations, des usines et des jouissances pour usages domestiques existantes actuellement dans F'autre État, en vertu de concession, de titre ou par prescription, sous la réserve qu'il n'y sera employé que l'eau nécessaire à la satisfaction des besoins réels, que les abus devront être supprimés, et que cette reconnaissance ne portera point atteinte aux droits respectifs des Gouvernements d'autoriser des travaux d'utilité publique, à condition des indemnités légitimes.

ART. 10. Si après avoir satisfait aux besoins réels des usages reconnus respectivement de part et d'autre comme réguliers, il reste à l'étiage des eaux disponibles au passage de la frontière, on les partagera d'avance entre les

deux Pays, en proportion de l'étendue des fonds arrosables appartenant aux riverains respectifs immédiats, défalcation faite des terres déjà irriguées.

ART. 11. Lorsque dans l'un des deux États, on se proposera de faire des travaux ou de nouvelles concessions susceptibles de changer le régime ou le volume d'un cours d'eau dont la partie inférieure ou opposée est à l'usage des riverains de l'autre Pays, il en sera donné préalablement avis à l'autorité administrative supérieure du département ou de la province de qui ces riverains dépendent par l'autorité correspondante dans la juridiction de laquelle on se propose de tels projets, afin que, s'ils doivent porter atteinte aux droits. des riverains de la Souveraineté limitrophe, on puisse réclamer en temps utile à qui de droit, et sauvegarder ainsi tous les intérêts qui pourraient se trouver engagés de part et d'autre. Si les travaux et concessions doivent avoir lieu dans une commune contiguë à la frontière, les ingénieurs de l'autre Pays auront la faculté, sur avertissement régulier à eux donné en temps opportun, de concourir à la visite des lieux avec ceux qui en seront chargés.

ART. 12. Les fonds inférieurs sont assujettis à recevoir des fonds plus élevés du Pays voisin les eaux qui en découlent naturellement avec ce qu'elles charrient, sans que la main de l'homme y ait contribué. On n'y peut construire ni digue, ni obstacle quelconque susceptible de porter préjudice aux riverains supérieurs, auxquels il est également défendu de rien faire qui aggrave la servitude des fonds inférieurs.

ART. 13. Quand les cours d'eau servent de frontière, tout riverain pourra, sauf l'autorisation qui serait nécessaire d'après la législation de son Pays, faire sur sa rive des plantations, des travaux de réparation et de défense, pourvu qu'ils n'apportent au cours des eaux aucun changement préjudiciable aux voisins, et qu'ils n'empiètent pas sur le lit, c'est-à-dire sur le terrain que l'eau baigne dans les crues ordinaires.

Quant à la rivière de la Raour qui sert de frontière entre les territoires de Bourg-Madame et de Puycerda, et qui, par des circonstances particulières, n'a point de bords naturels bien déterminés, on procédera à la démarcation de la zone où il sera interdit de faire des plantations et des ouvrages, en prenant pour base ce qui a été convenu entre les deux Gouvernements en 1750 et renouvelé en 1820, mais avec la faculté d'y apporter des modifications, si on le peut, sans nuire au régime de la rivière, ni aux terrains contigus, afin que, lors de l'exécution du présent acte additionnel, on cause le moins de préjudice possible aux riverains, en débarrassant le lit, qui sera fixé, des obstacles qu'ils y auraient élevés.

ART. 14. Si par des éboulements de berges, par des objets charriés ou déposés, ou par d'autres causes naturelles, il peut résulter quelque altération

ou embarras dans le cours de l'eau, au détriment des riverains de l'autre Pays, les individus lésés pourront recourir à la juridiction compétente pour obtenir que les réparations et déblaiements soient exécutés par qui il appartiendra.

ART. 15. Quand en dehors des questions contentieuses du ressort exclusif des tribunaux ordinaires, il s'élèvera entre riverains de nationalité différente des difficultés ou des sujets de réclamation touchant l'usage des eaux, les intéressés s'adresseront de part et d'autre à leurs autorités respectives, afin qu'elles s'entendent entre elles pour résoudre le différend, si c'est de leur juridiction, et dans le cas d'incompétence ou de désaccord, comme dans celui où les intéressés n'accepteraient pas la solution prononcée, on aura recours à l'autorité administrative supérieure du département et de la province.

ART. 16. Les administrations supérieures des départements et provinces limitrophes se concerteront dans l'exercice de leur droit de réglementation des intérêts généraux et d'interprétation ou de modification de leurs règlements toutes les fois que les intérêts respectifs seront engagés, et dans le cas où elles ne pourraient pas s'entendre, le différend sera soumis aux deux Gouvernements.

ART. 17. Les Préfets et les Gouverneurs civils des deux côtés de la frontière, pourront, s'ils le jugent convenable, instituer de concert, avec l'approbation des Gouvernements, des syndicats électifs mi-partie de riverains français et de riverains espagnols, pour veiller à l'exécution des règlements et pour déférer les contrevenants aux tribunaux compétents.

ART. 18. Une Commission internationale d'ingénieurs constatera, où elle le jugera utile, sur la frontière du département des Pyrénées-Orientales avec la province de Girone, et sur tous les points de la frontière où il y aura lieu, T'emploi actuel des eaux dans les communes frontalières respectives et autres, s'il est besoin, soit pour irrigations, soit pour usines, soit pour usages domestiques, afin de n'accorder dans chaque cas que la quantité d'eau nécessaire, et de pouvoir supprimer les abus; elle déterminera, pour chaque cours d'eau, à l'étiage et au passage de la frontière, le volume d'eau disponible et l'étendue des fonds arrosables appartenant aux riverains respectifs immédiats qui ne sont pas encore irrigués; elle procédera aux opérations concernant la Raour indiquées à l'article 13; elle proposera les mesures et précautions propres assurer de part et d'autre la bonne exécution des règlements et à prévenir, autant que possible, toute querelle entre riverains respectifs; elle examinera enfin, pour le cas où on établirait des syndicats mixtes quelle serait l'étendue à donner à leurs attributions.

ART. 19. Aussitôt que le présent acte aura été ratifié, on pourra nommer la Commission d'ingénieurs dont il est parlé à l'article 18 pour qu'elle procède immédiatement à ses travaux, en commençant par la Raour et la Vanera, où c'est le plus urgent.

ART. 20. Les dispositions précédentes seront applicables à toute la frontière d'une mer à l'autre, aussi bien qu'à l'enclave de Llivia, et auront la même force et valeur que si elles étaient insérées textuellement dans les deux premiers traités de Bayonne des 2 Décembre 1856 et 14 Avril 1862, et dans le troisième qui les complète sous la date de ce jour, restant abrogées toutes stipulations différentes ou contraires des deux premiers traités précités.

RECTIFICATION DE L'ARTICLE 15 DU TRAITÉ DE LIMITES DE 1862.

ART. 21. Le troisième paragraphe de l'article 15 du traité de limites du 14 avril 1862 n'étant pas conforme à l'usage alors existant, lequel la Commission mixte a entendu maintenir sans y rien changer, ledit paragraphe est déclaré nul et il est rectifié ainsi qu'il suit, pour avoir, dans sa nouvelle rédaction, la même force et valeur que s'il faisait partie intégrante dudit traité : Les troupeaux de Barèges et de Broto pourront jouir en commun, tous les ans, des sept quartiers d'Ossoue jusqu'au 11 juin; mais à partir de ce jour, les fermiers et sous-fermiers auront seuls le droit de pacager dans les quartiers qui leur seront dévolus. »

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ART. 22. Le présent Acte sera ratifié et les ratifications en seront échangées à Paris aussitôt que faire se pourra.

En foi de quoi les Plénipotentiaires respectifs l'ont signé et y ont apposé le cachet de leurs armes.

Fait en double expédition à Bayonne le vingt-sixième jour du mois de mai de l'an de grâce mil huit cent soixante-six.

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Général CALLIER.

Comte SÉRURIER.

El

M

marques DE LA FRONTERA.
MONTEVERDE.

11 juillet 1868. Acte final de la délimitation

de la frontière internationale des Pyrénées, signé à Bayonne.

(R. 11 janvier 1869 à Paris. -- Décret du 25 janvier 1869. B. L., 1869, n° 1678, p. 49.)

S. M. l'Empereur des Français et S. M. la Reine des Espagnes, voulant régler d'une manière définitive l'exécution du Traité de limites conclu à

Bayonne, le 26 mai 1866, modifier certaines dispositions de cet acte pour les mettre en harmonie avec les aspirations plus clairement formulées des intéressés, compléter l'énumération des chemins libres, consacrer certains usages existants ou convenus de part et d'autre, et sanctionner les règlements élaborés par la Commission internationale d'ingénieurs dont il est parlé à l'article 18 de l'acte additionnel signé à Bayonne, le 26 mai 1866, ont nommé pour leurs Plénipotentiaires, savoir:

S. M. l'Empereur des Français, le sieur Camille-Antoine Callier, Général de division....;

Et S. M. la Reine des Espagnes, don Francisco-Maria Marin, Marquis de la Frontera....

Et don Manuel de Monteverde y Bethancourt, Maréchal de camp des armées nationales....

Lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs respectifs, trouvés en bonne et due forme, ont dressé et réuni dans la première partie du présent acte final les cinq annexes suivantes au Traité signé à Bayonne le 26 mai 1866, et ont inséré dans la seconde les règlements pour le régime des eaux préparés par la Commission d'ingénieurs précitée.

PREMIÈRE PARTIE.

ANNEXE PREMIÈRE.

PROCÈS-VERBAL D'ABORNEMENT ENTRE LE DÉPARTEMENT DES PYRÉNÉES-Orientales ET LA PROVINCE DE GIRONE.

En exécution de l'article 17 du Traité de limites signé à Bayonne, le 26 mai 1866, les Plénipotentiaires de France et d'Espagne, assistés, d'une part du sieur Pierre-Gustave baron Hulot, chef d'escadron d'état-major..., et du sieur Pierre-Antoine-Bruno Boudet, chef d'escadron d'état-major..., et d'autre part de don Angel Alvarez d'Araujo, colonel d'état-major..., et de don Juan Pacheco y Rodrigo, capitaine d'état-major, etc., ont procédé, en présence des délégués des communes françaises et espagnoles intéressées, à la détermination définitive et à l'abornement de la frontière internationale entre le département français des Pyrénées-Orientales et la province espagnole de Girone.

PREMIERE SECTION.

Abornement de la frontière depuis le val d'Andorre jusqu'à la Méditerranée.

Les signaux de démarcation consistent en bornes et en croix, à l'exception de ceux autour du fort de Bellegarde. Les bornes sont de forme prismatique.

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