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saisie immobilière en vente volontaire aux enchères publiques, ou s'adjoindre à cette demande, et cela dans le cas même où il s'agit d'un immeuble appartenant au mineur et saisi sur lui (1). Et cependant nous avons vu que, dans tous les cas de conversion de cette nature, le même article 744 exige que le tuteur soit autorisé par un avis de parents (comp. ci-dessus, p. 252, note 1). On n'a donc pas maintenu ici la parité de garantie qui résulte du texte de notre article 484 au profit de chacune des classes de mineurs. Au contraire, l'article 13 de la loi du 3 mai 1841, sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, n'établit rien de spécial quant aux mineurs émancipés, et, par suite, les laisse sous l'empire des règles générales; ainsi l'autorisation du tribunal obtenue sur requête (sans avis du conseil de famille) leur est nécessaire tout comme elle l'est aux tuteurs, pour consentir l'aliénation à l'amiable des biens dont ils sont expropriés (même note 1 de la p. 252).

XCV. A la suite de l'aliénation des immeubles, il faut placer l'hypothèque conventionnelle (V. art. 457 et 458). Nous avons déjà dit, à la fin du no XC, que le mineur émancipé (pas plus que le tuteur) n'a le droit de consentir une hypothèque sans l'autorisation du conseil de famille et l'homologation du tribunal, même pour la garantie des obligations dont il est

(1) On se rappelle que la saisie immobilière doit être précédée de la discussion du mobilier appartenant au mineur (V. art. 2206, et, ci-dessus, no XXXII, p. 251 et 252).

capable. L'hypothèque grève les immeubles d'un droit réel (V. art. 2114), lequel est même rendu public (art. 2134), et dès lors altère, d'une manière plus ou moins notable, le crédit du propriétaire. De là le principe général que « les hypothèques conventionnelles »> ne peuvent être consenties que par ceux qui ont la » capacité d'aliéner les immeubles qu'ils y soumet» tent» (art. 2124). Nous trouvons, en outre, dans l'article 2126, que « les biens des mineurs (sans dis»tinction)... ne peuvent être hypothéqués que pour » les causes et dans les formes établies par la loi, etc.>> (comp. aussi art. 1554, 1988, et MM. Aubry et Rau, t. I, § 132, p. 494) (1).

Ce que nous disons de l'hypothèque s'applique aussi à l'antichrèse; car le créancier antichrésiste acquiert sur l'immeuble, pour le payement des intérêts et même du capital de sa créance, un droit de rétention, véritable droit réel immobilier (comp. art. 2072, 2085, 2087 et 2089; C. de comm., art. 446, à la

(1) Quelques auteurs ont prétendu que le mineur émancipé peut hypothéquer, en contractant une obligation dans les limites de sa capacité. Mais cette opinion est aujourd'hui presque abandonnée. En réalité, elle n'a guère d'intérêt pratique, car il est très-rare que les majeurs eux-mêmes hypothèquent leurs biens pour des actes de pure administration. La question a été résolue d'une manière très-exacte par Proudhon (t. II, p. 435 et suiv.); mais il omet de citer les articles 2124 et 2126. Dans notre note (ibid., p. 438), nous avons, par erreur, cité Toullier (t. II, no 1298) comme partageant l'avis de Proudhon, tandis que, au contraire, Toullier admet la validité de l'hypothèque consentie par le mineur émancipé.

fin), soumis à la transcription au bureau des hypothèques (loi du 23 mars 1855, art. 2).

XCVI. Par exception, les mineurs autorisés à faire le commerce << peuvent engager et hypothéquer leurs immeubles » (C. de comm., art. 5), sans néanmoins avoir le droit de les aliéner, si ce n'est « en suivant >> les formalités prescrites par les articles 457 et sui» vants du Code civil » (ibid., art. 6). Ici on abandonne la règle qui exige pour l'hypothèque la même capacité que pour l'aliénation (C. Nap., art. 2124). Le législateur juge nécessaire d'accorder aux mineurs commerçants la faculté d'engager et d'hypothéquer leurs immeubles, afin qu'ils puissent, en cas de besoin, recourir à leur crédit immobilier et se procurer ainsi des ressources pour leur commerce (1): mais il ne suit pas cette idée logiquement; il s'arrête, pour ainsi dire, en chemin, et refuse aux mineurs le droit de recourir à une aliénation faite à l'amiable et de gré à gré, quels que soient leur situation pécuniaire et l'’intérêt qu'ils auraient à vendre sans aucun délai (2).

(1) Car pour les faits relatifs à son commerce, le mineur est réputé majeur (art. 487; aj. art. 1308, et C. de comm., art 1).

(2) La femme majeure qui fait le commerce avec le consentement de son mari (V. C. de comm., art. 4) peut, au contraire, sans autorisation spéciale du mari ou de justice, aliéner ses immeubles, aussi bien que les engager et les hypothéquer, à l'exception de ceux que leur dotalité rend inaliénables (C. de comm., art. 7; comp. Code Nap., art. 220, et, ci-dessus, p. 120, 4°). Pourquoi cette concession faite à la femme mariée et non au mineur émancipé? On n'en voit pas trop le motif; ce serait plutôt la décision exactement inverse qui eût paru na

Nous allons revenir là-dessus en traitant de la présomption qui, dans ce cas et dans les cas analogues, doit, suivant nous, protéger les personnes qui traitent avec le mineur commerçant.

XCVII. Le mineur émancipé, de même que le tuteur (comp. n° XXXIII, p. 252), ne peut transiger, sinon en se conformant aux dispositions de l'article 467. C'est là encore une application du principe énoncé dans le premier alinéa de l'article 484.

Pourra-t-il compromettre, c'est-à-dire se soumettre à la décision de simples arbitres, sur une contestation dans laquelle il est intéressé (comp. art. 1989, et C. de pr., art. 1003-4 028)? Non, dirons-nous, car le ministère public doit être entendu dans les causes des mineurs (C. de pr., art. 83, n° 6); d'où il résulte que ces causes ne sont point susceptibles de compromis (V. C. de pr., art. 1004; comp. le même no XXXIII).

Sur ces deux points, il faut décider autrement lorsqu'il s'agit de difficultés qui intéressent le commerce du mineur, puisque, d'après l'article 487, il « est ré» puté majeur pour les faits relatifs à ce commerce >> (comp. art. 1308, C. de com., art. 1, et nos no XCVI et CC)(1). Seulement, il lui est interdit d'abandonner ses

turelle en présence de l'article 1538 du Code Napoléon, ainsi conçu : « Dans aucun cas, ni à la faveur d'aucune stipulation, » la femme ne peut aliéner ses immeubles, etc. Toute autorisation » générale d'aliéner les immeubles donnée à la femme, etc., est » nulle. »

(1) Ajoutons, relativement aux mineurs commerçants, que, lorsqu'ils plaidenț devant les tribunaux de commerce (on en

droits à titre de libéralité, puisqu'il est incapable de donner, si ce n'est par testament (V. art. 903 et 904).

Mais nous n'oserions, malgré l'autorité de M. Demolombe (t. VIII, no 282), en dire autant de la transaction ou du compromis relatifs aux actes de pure administration dont parle l'article 481. Nous ne voyons pas que le mineur émancipé ait plus de pouvoirs que le tuteur à l'effet de transiger (comp. art. 467 et 484) (1). Et quant au compromis, nous nous regardons comme lié par le texte formel des articles 83, no 6, et 1004 du Code de procédure, que nous avons plusieurs fois cités (2).

XCVIII. En principe, tous les actes faits par le mi

compte deux cent vingt et un en France) et non devant les tribunaux civils jugeant les affaires commerciales (ce qui n'a lieu que dans cent soixante-dix arrondissements), l'application de l'article 83 du Code de procédure civile est forcément écartée, puisqu'il n'y a pas de ministère public auprès des tribunaux de commerce.

(1) M. Demolombe (t. VII, n° 747) déclare formellement que les termes de l'article 467 sont absolus, et que « le tuteur ne » pourra transiger en aucun cas, quel que soit l'objet de la contes» tation, meuble ou immeuble. » Comment, dès lors, en présence de l'article 484, le mineur émancipé serait-il capable de transiger sur tous les intérêts, même les plus graves, qui se rattachent à des actes d'administration, par exemple, sur la responsabilité du locataire en cas d'incendie de la maison louée (comp. art. 1733 et 1734)?

(2) Le savant auteur reconnaît lui-même (t. IV, no 160) que la combinaison de ces deux articles du Code de procédure est un des motifs qui s'opposent à ce que la femme séparée de biens puisse, sans l'autorisation du mari, compromettre sur les actes de son administration (comp. C. Nap., art. 1449, 1536 et 1576).

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