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cérémonies qui l'accompagnent; dans les images qu'elle expofe à la vûe de fes enfans; dans le figne de la croix, dont elle fait & nous fait faire un fi fréquent ufage, conformément à la plus ancienne Tradition. Qu'a-t'elle en vûe & que fe propofe-t'elle dans tout cet appareil extérieur & fenfible? finon que ce que nous voyons, ce que nous entendons, ce que nous faifons comme chrétiens par nos fens & par le miniftére de nos corps, ferve d'appui à notre foi, & avertiffe continuellement nos ames, de rendre à Dieu le culte fpirituel de la foi, de l'efpérance, & de la charité que nous lui devons & qu'il exige principalement de nous. Qu'on fup. prime cet extérieur fi vénérable, qu'on le méprife, ou même qu'on le néglige, & qu'on n'y prenne que peu ou point de part, que deviendra la Religion? Quel appui fenfible trouvera la piété ? & quelle entrée pourront avoir dans des ames dépendantes des fens & liées à des corps matériels, des vérités & des affec&tions fpirituelles, fi on les dépouille de toute image & de tout figne fenfible?

XI. Différence des an

Il eft vrai que ces fignes fenfibles néceffaires pour former une Religion, felon S. Auguftin, n'opérent rien fur ciens & des nos amės, fi la grace de J. C. qui com

nouveaux Sacremens.

la

mence par la foi, ne s'y joint: elle feule peut nous les rendre véritablement utiles, & nous en faire recueillir le fruit du falut. C'eft ce que Dieu nous a fait connoître par la maniére différente dont il a difpofé l'ancienne & la nouvelle loi, la Religion des Juifs & celle des Chrétiens. Dans la premiére, tout étoit énigme & figure; tout annonçoit & prédifoit J. C. & fes myftéres; mais fous des ombres & des voiles obfcurs. Les Sacremens, c'eft-à-dire, les figures mystérieuses de la loi évangélique, de grace & de la vérité que J. C. devoit apporter au monde, y étoient multipliés. Mais c'étoient des fignes & des Sacremens foibles & pauvres, comme les appelle S. Paul, infirma & egena elementa, c'est-à-dire, vuides de vertu & de grace, & incapables de conduire les hommes à la juftice & au falut. Car, dit le même Apôtre, il eft impoffible que les péchés foient effacés & détruits par le fang des taureaux & des béliers qui étoient offerts en facrifice. En un mot les purifications fréquentes, les of randes multipliées, l'abstinence de certaines viandes jugées immondes, l'Agneau pafcal & les azymes avec lefquels il falloit le manger, & toutes les œuvres ordonnées par la loi cérémoniale,

Gal. 4. 9.

Hebr. 10.

4.

n'ont pû produire par elles-mêmes qu'une juftice charnelle; & jamais perfonne n'a été juftifié devant Dieu par ces œuvres & ces facrifices, dont la multiplication formoit un joug, que nous n'avons pû porter ni nous ni nos peres, difoit S. Pierre. Il n'y avoit que ceux 48. 15.10. qui par la foi pénétroient le vrai fens de ces figures, qui y découvroient J. C. & fes myftéres, qui croyoient en lui, qui l'attendoient & qui mettoient en lui toute leur confiance; il n'y avoit que ceux-là qui arrivoient à la juftice & au falut, par les mérites anticipés de fon facrifice & de fa mort. Mais le nombre en étoit petit, parce que la grace n'étoit pas encore commune & populaire, fuivant l'expreffion de S. Auguftin; & qu'elle ne devoit l'être qu'après la confommation des mystéres de J. C. afin que nous compriffions mieux que cette grace en eft le prix, & que c'eft lui qui nous l'a méritée en mourant pour nous fur la croix.

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» Auffi ces premiers Sacremens qui s. Aug. conétoient célébrés &obfervés, dit S. Au- tra Fauft. L. 19. cap. guftin, dans la loi ancienne, ayant 14.

» été destinés à annoncer l'avénement » futur de J. C. il les a abolis par fa préfence, après avoir accompli ce qu'ils fignifioient; & à leur place il en a in

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رو

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» ftitué d'autres, dont la vertu eft plus grande, l'utilité plus falutaire, l'ob» fervance plus facile, & le nombre plus petit. Et c'est par l'excellence de ces facremens, qu'il a formé & lié la focié"té du nouveau peuple. » Sacramentis... ad Januar. fignificatione præftantissimis, focietatem noEp. 54. n. vi populi colligavit.

7.

S. Aug.

XII.

mens de la

chée.

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La nouvelle loi n'eft donc point déExcellence gagée de Sacremens & de fignes fenfides Sacre- bles. Mais quel fujet n'avons-nous pas nouvelle d'admirer la divine economie qui à loi. La gra- fubftitué les nouveaux aux anciens, & ce y eft cal'abondance des biens fpirituels, dont J. C. a voulu nous enrichir par le canal fenfible des Sacremens, dont il eft l'inftituteur. » Si vous étiez tout efprit, S. Chryfoft. dit S. Chryfoftôme, Dieu vous au»roit donné les biens fpirituels nuds » & fans enveloppe. Mais comme votre "ame fpirituelle & intelligente eft unie » à un corps, ces biens qui ne font con"nus que par l'intelligence, vous font communiqués par le canal des chofes » fenfibles. »

in Matt.

Hom. 83.

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C'est encore ici une fuite & comme une extension du myftére de l'Incarna tion. Dans ce mystére, l'éclat de la divinité est voilé & couvert fous le nuage d'un corps mortel. Dans les Sacremens, la grace fpirituelle & invifible eft ca

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chée fous des fymboles fenfibles & expofés à nos yeux. En J. C. la nature humaine étoit unie à la nature divine dans l'unité d'une même perfonne. Dans les Sacremens, la grace eft attachée par l'inftitution de J. C. aux fignes vifibles qui non feulement la figurent mais qui la contiennent, & la communiquent à ceux qui les reçoivent avec les difpofitions néceffaires. La chofe fignifiée n'eft pas féparée du figne : la vérité eft jointe avec la figure, & la réalité avec l'ombre. Ainfi dans le Baptême, l'eau propre à laver & à effacer les taches du corps, efface celles des ames, & les purifie de la fouillure du péché. Dans la Confirmation, l'impofition des mains & l'onction du S. Chrême, ajoutent à la grace du Baptême un nouveau dégré de force, qui fait du Chrétien un foldat de J. C. comme les anciens faifoient des onctions aux Athletes pour les fortifier & les préparer au combat. Dans l'Euchariftie, le pain & le vin deftinés à nourrir les corps, font convertis au corps & au fang de J. C. vraie & fainte nourriture des ames, & qui les fait vivre de la vie même de J. C. La Pénitence, est un fecond Baptême de larmes, qui abolit les nouvelles taches contractées après le premier. L'Extrême

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