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prime l'article cité, en faisant connoître par-là qu'elles ne regardoient pas le traité de Tolentino comme suffisant pour fournir un motif fondé d'incorporation à la France de ces deux provinces soustraites à la domination du saint Siége.

Mais ce traité de Paris, fait sans aucune intervention du saint Siége, n'a pu porter préjudice à ses droits. Si le saint Père n'a pu sans douleur voir disposer ainsi d'une portion considérable des propriétés du Siége apostolique, et si, par l'intermédiaire du soussigné, il en a formé le sujet de ses remontrances dans les notes présentées à Paris, à Londres et à Vienne, tant en particulier au gouvernement françois qu'aux ministres des puissances alliées, et au congrès en général, sa Sainteté n'a pas laissé de supposer (comme le déclare expressément le soussigné dans sa dernière note du 23 octobre) ou que la France n'auroit pas garde ces deux pays au détriment de leur souverain légitime, on que le saint Siege en auroit été indemnisé par une compensation territoriale proportionnée à la valent des provinces enlevées; compensation, il cònvient de le répéter, décrétée par cette même assemblée nationale qui . dépouillá l'élise romaine.

Cette compensation n'ayant pas eu lieu, sa Sainteté est en droit de l'obtenir, ou d'être réintégrée en possession de ces antiques domaines du saint Siege. Tant que cela n'aura pas été réalisé le saint Père sent que ses devoirs les plus pressans lui imposent l'obligation de conserver, à Pexemple de ses prédécesseurs, les droits du saint Siége apostolique sur ces provinces.

Les mêmes raisons s'appliquent à la portion de la légation ferraroise située sur la rive gauche du Pô, propriété de l'Eglise depuis tant de siecles: cette partie n'étant pas remise sous sa domination, elle ne peut être empêchée de protester. Mais la religion et la piété de sa majesté impériale et royale apestolique, et les preuves de bienveillance que S. S. en a reçues, garantissent au saint Père que, dans la contiguité des deux Etats, sa majesté trouvera facilement des moyens d'indemaiser le saint Siége.

En vertu des résolutions prises, l'Autriche aura le droit de garnison dans les places de Ferrare et de Comachio, rendues au domaine du Souverain Pontife. Cette mesure, totalement contraire à la libre et indépendante souveraineté du saint Siége et à son systême de neutralité, pouvant l'exposer à des hostilités, portant préjudice à ses droits, et en embarrassant l'exercice, le soussigné se voit obligé de protester formellement aussi contre cet article.

Le soussigné se flatte que ses justes protestations, faites au nom du saint Père pour garantir les droits du saint Siége apostolique, produiront l'effet désiré relativement aux restitutions ou compensations, et aux dispositions sur les garnisons de Ferrare et de Comachio, dont il est question dans cette note.

En attendant néanmoins, le cardinal soussigné, se conformant aux ordres de sa Sainteté, et à l'exemple des légats du saint Siege envoyés à divers congrès, et spécialement de l'évêque de Nardo, Fabio Chigi, au congrès de Westphalie, a l'honneur de remettre à S. Exc. M..... la protestation ci-jointe, relative aux déterminations du congrès sur les

intérêts temporels du saint Siége, en priant de la faire insérer au protocole des actes du congrès.

Le soussigné a l'honneur de renouveler à S. Exc. l'assurance de sa haute considération.

Vienne, 14 juin 1815.

H. cardinal CoNSALVI.

Protestation faite au nom de sa Sainteté le Pape Pie VII et du saint Siege apostolique, contre toutes les dispositions relativement à ses domaines, prises ou maintenues dans le congrès de Vienne au préjudice du saint Siége.

Je soussigné, Hercule Consalvi, cardinal de la sainte église romaine, diacre de Sainte-Agathe alla Suburra, secrétaire d'Etat de sa Sainteté, Pie, Pape VII. du nom, et son ministre plénipotentiaire au congrès de Vienne, déclare et fait savoir par la présente pièce chirographaire, que j'ai agi avec tout l'empressement requis et possible auprés des princes suprêmes et de leurs ministres plénipotentiaires, rassemblés à Vienne, pour que l'on restituât au saint Siége de Rome tous les pays de la possession desquels il avoit été dépouillé, à diverses époques, par l'effet de la révolution très-connue commencée en 1789. J'avois déjà exposé par écrit, tant à Paris qu'à Londres, les instances de sa Sainteté relativement à ces pays, et les raisons infiniment solides sur lesquelles sont basés les droits du saint Siége. J'ai poursuivi et contiuué d'agir à Vienne pour le même but, en donnant plus de développement aux représentations faites par moi au congrès, le 23 du mois d'octobre de l'année dernière 1814.

Parmi les autres résolutions adoptées par ce même congrès, j'ai eu soin d'établir qu'il étoit également juste de restituer à la sainte église romaine les Marches, avec Camerino, Benevent, Ponte-Corvo, et leurs dépendances et appartenances, et que le saint Siege fût de nouveau mis en possession des provinces de Bologne, de Ferrare et de la Romagne, connues sous la dénomination des Trois Légations; mais mes instances n'ont pas eu une heureuse issue relativement aux autres possessions du saint Siege qui seront nommées plus bas, non plus qu'à Ja portion de la province de Ferrare située sur la rive gauche du Pô, qui appartiennent à aussi juste titre à la même église romaine, et dont j'avois demandé, soit la restitution, soit la compensation ou indemnité. La province d'Avignon, dont le domaine a été acquis par contrat d'achat et de vente, et confirmé par une possession de cinq cents ans; le comtat Venaissin, que le saint Siége apostolique possédoit depuis un temps encore plus reculé, et dont il a été dépouillé, en 1791, par un décret de l'assemblée nationale, avec la condition néanmoins apposée dans le même décret, qu'en considération des droits admis et reconnus du même saint Siége, il lui seroit donné une compensation ou dédommagement pour le préjudice qu'on lui causoit. Le Roi de France, Louis XVI, lui-même, avoit formellement promis de rendre ces provinces à l'église romaine, et pourtant elles restent au pouvoir de la

France; et l'on ne peut alléguer pour leur non-restitution à l'église romaine, ni la convention de Tolentino, de 1797, ni le traité de paix signé à Paris en 1814, puisque, quant à la convention de Tolentino, non-seulement elle étoit évidemment entachée de beaucoup de vices de nullité spécifiés dans mes instances; mais encore, par l'œuvre et le fait de ce même gouvernement françois, elle a été abrogée peu après, eleinte et entièrement anéantie suivant les principes les plus clairs du droit public; le même gouvernement avec lequel on avoit stipulé cette convention ayant renversé la principauté temporelle da saint Siege apostolique, en occupant, ou plutôt en usurpant tout le reste du domaiue pontifical dont la conservation avoit été le motif de la cession de ces provinces; et ensuite, quant à ce qui regarde le traité de paix de Paris, le saint Siege apostolique n'y ayant eu au cune part, ne peut manifestement être obligé par ce traité, ni en souf frir aucune altération dans ses droits.

En outre, la susdite portion de la province de Ferrare située sur la rive gauche du Pô, appartenant au saint Siege apostolique par un droit legitime, et à titre d'une possession prescrite par une si longue suite de siècles, on ne lui en restitue point la souveraineté, et on ne lui assigne aucune indemnité, quoique tout ce que l'on a dit sur la convention de Tolentino et sur le traité de Paris démontre invinciblement que les droits incontestables du saint Siége sur ce pays ne peuvent rester altérés en rien par ces actes.

Enfin l'on a établi dans le congrès, que le très-auguste empereur d'Autriche et ses successeurs doivent avoir le droit de tenir garnison autrichienne à Ferrare et à Comachio, appartenans à l'église romaine, au prejudice, tant de la principauté suprême du saint Siége apostolique, que de sa neutralité, et au péril des dommages qui pourroient en résulter, en cas de guerre, pour l'église romaine.

Comme donc il résulte de ces résolutions, prises en congrès, un dommage grave, ainsi que beaucoup de préjudice pour le saint Siege et la sainte église romaine: afin qu'il soit notoire à tous, que non-seulement j'ai refusé de prêter à ces résolutions toute espèce de consentement ou de connivence, mais qu'au contraire je les ai combattues et contredites antant qu'il a été en moi; restant inviolablement attaché aux exemples don nés antérieurement par les légats du susdit Siége romain, qui sont intervenns dans de semblables congrès, et particulièrement à celui de Fabio Chigi, évêque que de Nardo, nonce apostolique au célèbre congrés de Munster, en Westphalie, lequel fit une solennelle protestation contre les dommages et préjudices apportés en ce congrès, tant aux droits temporels de l'Eglise qu'à ses droits spirituels, et moi aussi, soussigné, proteste formellement contre toutes ces résolutions prises ou maintenues en vigueur dans ce présent congrès, desquelles, de quelque manière que ce soit ou puisse être, résultent des préjudices aux domaines, Possessions et droits du saint Siége sur les pays ci-dessus mentionnés, et généralement contre tous les autres actes préjudiciant à la sainte Eghse, au nom du saint Siege apostolique et de notre très-saint Pers rt seigneur Pie VII, Pape par là divine Providence, et ce publiquefaent, par le présent acte chirographaire, et dans le mode le meil

leur, & la forme la plus valide, desquels, par l'autorité du carass tère dont je suis revêtu, je puis et dois me servir. Encore une fois je proteste, combats et contredis; et afin d'assurer une autorité ou counoissance encore plus étendue des actes conservatoires ici faits par moi pour les absens et la postérité, j'ai signé la présente pièce de ma main, et ai revêtu de mon sceau cette protestation, en requérant formellement qu'elle soit insérée au protocole des actes du présent congrès. Donné à Vienne, au palais de la nonciature apostolique, le 14 juin 1815.

Signé, H. cardinal CONSALV1.

Note sur les affaires spirituelles et temporelles des églises d'Al'emagne, accompagnie de la protestation latine adressée à toutes les hautes puissances qui ont signé le traité de Paris, du 30 mai 1814, confirmé par le traité de Vienne, du 9 juin 1815.

Le cardinal soussigné, secrétaire d'Etat de sa Sainteté le pape Pie VII, et son plénipotentiaire au congrès de Vicone, conformément aux ordres de sa Sainteté, a, par sa note du 17 novembre 1814, adressée à S. A. le prince de Metternich, président de la commission des affaires des églises d'Allemagne, fait connoître les réclamations du saint Pere sar les pertes et les atteintes qu'ont éprouvées les églises d'Allemague, soit dans leurs droits et prérogatives, soit dans leurs possessions.

Sa Sainteté a déjà fait connoître, par un acte public, la vive douleur qu'elle ressentoit en voyant sanctionner et exécuter, par divers traites, notamment par celui de Ratisbonne, en 1803, tant et de si graves changemens, si préjudiciables aux églises, évêchés, chapitres, monastères et autres institutions ecclésiastiques, préjudiciables même à l'empire romain; changemens qui ont des conséquences si funestes pour les intérêts spirituels et temporels de l'Eglise, pour le salut des ames et pour les droits du saint Siege apostolique, que les empereurs et les princes ont respectés depuis une longue suite de siècles.

Durant tout le cours de ses calamités, le saint Père, prosterné devant Dieu, a demandé, dans de ferventes prières, l'esprit de paix et de concorde pour tous les royaumes et les peuples chrétiens; il a fait les vœux les plus ardens, afin que son pontificat, au commencement duquel il a été accablé, en sa personne, des épreuves les plus amères, fut, à l'occasion du rétablissement de l'ordre et de la paix genérale, l'époque fortunée du triomphe de la religion, et de la réintégration de P'Eglise dans tout ce dont elle avoit été dépouillée.

A cette fin, le soussigné, en exécution des ordres du saint Père, ne sesse de joindre les plus vives prières à ses réclamations, afin d'obtenir une juste réparation des maux qui ont été mis sous les yeux de la commission germanique dans la note ci-dessus énoncée, et qui a dû lui être communiquée.

Quant à ce qui regarde les droits et priviléges des églises d'Allemague, ces droits et ces priviléges appartiennent en partie et intrinsċquement à la constitution générale de l'Eglise, et de l'autre sont fon

dés sur la légitime et canonique possession des églises d'Allemagne. Sa bainteté s'appuyant sur ce qu'ont souvent dit les illustres princes qui gouvernent l'Allemagne, a lieu d'espérer que ces princes magnanimes Youdront bien l'appuyer de tout leur pouvoir, afin d'établir, pour cette illustre nation, an ordre ecclésiastique conforme aux lois de l'Eglise. Mais pour ce qui regarde les possessions de l'Eglise en Allemagne, et les diverses dispositions que le congrès de Vienne a cru devoir laisser subsister ou même établir, ce n'est qu'avec une vive douleur que le saint Fere a vu que ces Etats et ces principautés ecclésiastiques, détruits par la violence révolutionnaire, en faveur de qui s'élevoient (au moins également les mêmes principes et les mêmes droits que l'on a admis en fayeur de tant de princes séculiers que l'on a rétabli dans leurs domaines, ne sont pas seulement réintégrés dans leurs Etats, mais encore ont été donnés et assignés à divers princes catholiques et non catholiques. Ces biens, qui forment le patrimoine de ces grandes, antiques et illustres églises, sont nécessaires pour le culte divin ou pour soutenir le sacerdoce, et servent de dotation à plusieurs établissemens nécessaires et infiniment utiles au clergé régulier et séculier de l'un et de l'autre sexe; et cependant ces biens sont, en partie, abandonnés à leurs nonveaux possesseurs, sans aucun recours à l'autorité légitime, ou sont distraits de leur destination respective. Le Saint-Empire romain, ce centre de l'unité politique, vénérable et par son antiquité et par l'auguste caractère dont l'a revêtu la religion, et dont la destruction est un des plus funestes résultats de la révolution, n'est pas encore sorti de ses ruines.

Les devoirs inhérens au titre de chef visible de l'Eglise, et le serment qu'a prononcé le saint Père à l'époque de son avénement au siége apostolique, lui tracent la conduite qu'il a à tenir dans une circoustance si difficile.

Il a considéré aussi l'exemple que lui ont donné plusieurs de ses illustres prédécesseurs, qui, dans des cas d'une bien moindre importance, n'ont rien négligé afin de conserver les droits de la religion et du saint Siége. Comme il seroit trop long de les rapporter tous, nous nous contenterons de citer les plus récens; Innocent X, après le congrès et la paix de Westphalie, en 1649, Clément XI, après le traité d'Alt, Rastadt, en 1707, et de Baden en 1714, et Benoît XIV, en 1744. Leurs représentans, dans les susdits congrès, protestèrent contre toutes les innovations préjudiciables à l'Eglise et aux droits du saint Siége, contenues dans ces traités.

Le saint Père, responsable à Dieu, à l'Eglise et aux fidèles, ne pouvoit, sans manquer à son devoir, garder le silence sur une résolution de cette nature. En conséquence, le cardinal soussigné, conformément aux ordres de sa Sainteté, et à l'exemple des légats que le saint Siége a envoyés aux divers congrés, et surtout de l'évêque de Nardo, Fabio Chigi, au congrès de Westphalie, a l'honneur de transmettre à S. E... la protestation ci-jointe contre toutes les délibérations et autres acies contraires aux intérêts de la religion catholique, aux droits de l'Eglise et du saint Siége, qui sout émanés du congrès de Vienne, ou qui y ont eté maintenus.

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