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-néraux d'administration dont il est investi. Il ne pourrait pas plus prescrire aujourd'hui aux habitants de détruire les chardons sur leurs propriétés, une telle mesure n'étant justifiée ni par l'intérêt de la salubrité, ni par celui de la sûreté générale (Civ.rej. 27 janvier 1866), qu'il ne pouvait, avant une loi spéciale du 9 juillet 1889, imposer aux chevriers l'obligation de munir de clochettes et de muselières les chèvres conduites au pâturage (Crim. rej. 6 juillet 1866),

Mais il pourrait prendre un règlement analogue à l'arrêté susvisé du 23 janvier 1892, si, au lieu de motiver la défense de laisser divaguer les chiens par des considérations relatives à la conservation des produits du sol ou à la conservation du gibier, il se fondait sur les dangers de la rage, par exemple, ce qui rentrerait dans le cadre de ses attributions de police, au titre de la sécurité publique. C'est ce procédé détourné que préconise une circulaire récente du Ministère de l'intérieur:

!

Monsieur le préfet,

Paris, 27 avril 1894,

« La Société centrale des chasseurs de France vient « d'appeler de nouveau mon intention sur les inconvé<< nients qui résultent de la divagation des chiens dans << les champs pendant les périodes de clôture de la chasse « où s'effectue la reproduction du gibier.

La Société fait remarquer que la question soulevée << n'intéresse pas seulement les chasseurs, mais aussi l'agriculture et la sécurité publique. Les chiens errants

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« en effet, détériorent les récoltes, détruisent les animaux utiles, et peuvent compromettre la sécurité pu<< blique en propageant la rage dont les symptômes ne << peuvent être constatés qu'au prix d'une surveillance << quotidienne.

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« Les plaintes réitérées de la Société centrale des chas<«<seurs me paraissent dignes d'attention et j'estime qu'il << y aurait lieu de rechercher les moyens d'écarter, ou, << tout au moins, d'atténuer les dangers qu'elle signale. « J'inclinerai à penser que le moyen le plus efficace << pour atteindre le but poursuivi par la requérante con« sisterait dans l'application de l'article 99 de la loi du «< 5 avril 1884 qui vous confère le droit de prendre des << arrêtés réglementaires sur les divers objets relatifs à la <<< salubrité et à la sécurité publiques, et dans lesquels on << pourrait, semble-t-il, faire rentrer la divagation des < chiens en dehors des agglomérations et son interdiction dans toute l'étendue de votre département.

<«< Je vous prie, en conséquence, de vouloir bien me << faire connaître, dans le plus court délai possible, votre << avis personnel sur l'opportunuité et l'efficacité de ces « mesures qui, d'ailleurs, ont déjà été prises par plu«<sieurs de vos collègues.

Recevez, etc...

« Raynal

Avant de quitter la question des pouvoirs du préfet en. matière de police rurale, tels qu'ils dérivent de l'article 99, il n'est peut être pas sans intérêt d'examiner rapide

ment les droits que lui reconnaît la loi, dans les cas spéciaux où le pouvoir réglementaire appartient au conseil municipal.

1° En ce qui concerne les règlements de pâturages dans les terrains en montagne, la loi du 4 avril 1882 confère expressément au préfet le droit d'agir aux lieu et place des Conseils municipaux. « Si, à l'expiration du <«< délai fixé, porte l'article 13, les communes n'ont pas << soumis à l'approbation préfectorale le projet de règle<ment, il y sera pourvu d'office par le préfet, après avis << d'une commission spéciale. Il en sera de même dans le cas où les communes n'auraient pas consenti à << modifier le règlement proposé par elles, conformément « aux observations de l'administration ». Aux termes de l'article 26, § 2 du décret du 11 juillet 1882, les règlements ainsi établis ou modifiés par le préfet sont exécutoires après notification au maire de la commune intéressée.

Ainsi, en cette matière, il appartient au préfet de faire le règlement aux lieu et place du Conseil municipal lorsque celui-ci a refusé ou négligé de le préparer ou u'a édicté que des mesures insuffisantes. Le législateur s'est évidemment inspiré des dangers que présenterait pour la conservation des terrains en montagne, l'exercice du pâturage en l'absence d'une règlementation convenable. Il est à remarquer que si le règlement avait dû émaner du maire et non du Conseil municipal, les dispositions de la loi de 1882 eussent été inutiles, le préfet se trou

vant suffisamment armé par l'article 85, aux termes duquel dans le cas où le maire refuserait ou négligerait <de faire un des actes, qui lui sont prescrits par la loi, <«<le préfet peut, après l'en avoir requis, y procéder << d'office par lui-même ou par un délégué spécial.

2o Pour la vaine pâture, le système est tout différent. Sans doute, le préfet en conseil de préfecture peut, conformément à l'article 69 § 6 de la loi de 1884, donner ou refuser son approbation à la délibération du Conseil municipal. Mais il ne peut substituer sa décision à celle de cette assemblée. Il ne peut pas modifier la délibération du Conseil municipal.

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Les deux cas que nous venons d'examiner sont les seuls où le Conseil municipal ait à s'immiscer dans l'exercice du pouvoir réglementaire. Le préfet n'a le droit d'initiative que dans la première hypothèse.

B) Sanction et recours.

L'étude des travaux préparatoires de la loi de 1884 et l'analyse de la jurisprudence relative à l'article 99 nous ont amené à conclure que le préfet se trouvait aujourd'hui investi de pouvoirs considérables en matière de règlements de police municipaux. C'est là une conséquence directe de la thèse que nous soutenons, d'après laquelle la police municipale présente un caractère mixte qui ne permet pas à l'Etat de se désintéresser des questions

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relatives au maintien de la sécurité et de la salubrité dans une commune, et qui l'oblige à ressaisir les pouvoirs concédés aux municipalités d'une façon précaire, aussitôt que celles-ci négligent ou refusent de s'en servir.

C'est bien là le contre-pied de la théorie de Henrion de Pansey qui croyait, nous l'avons vu, à l'existence d'un pouvoir municipal propre, c'est-à-dire, indépendant de l'Etat et de la loi.

Le point que nous abordons maintenant démontre encore la fausseté de cette doctrine. L'Etat, tout en concédant à l'autorité municipale le droit de faire des règlements obligatoires pour les particuliers s'est réservé celui d'attacher une sanction pénale à ces règlements. C'est la loi elle-même qui a pris soin de déterminer la peine applicable aux contrevenants. (C. p. art. 471 et suiv.) (1).

Le juge appelé à réprimer une contravention aura donc à se mettre à la fois en présence du règlement applicable et de la loi qui édicte une pénalité susceptible d'être graduée suivant la gravité de l'infraction. En ce qui concerne cette dernière partie de la tâche, nulle question d'appréciation. Mais, quant au règlement, le juge est appelé à en vérifier le caractère et la légalité. Il

(1) Art. 471. Seront punis d'une amende, depuis un franc jusqu'à cinq francs inclusivement:

...15°). Ceux qui auront contrevenu aux règlements légalement faits par l'autorité administrative et ceux qui ne se seront pas conformés aux règlements ou arrêtés publiés par l'autorité municipale en vertu des art. 3 et 4 du titre XI de la loi du 16-24 août 1790 et de l'article 46, Titre 1er de la loi du 19-22 juillet 1791.

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