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No 120.

ARRÊTÉ DES CONSULS DU 13 MESSIDOR AN IX.

Dunes de Gascogne, fixation, plantations en bois.

Mesures adoptées pour la fixation et la plantation en bois des dunes des côtes de la Gascogne.

EXPOSÉ DES MOTIFS.

L'exposé des motifs de l'arrêté des consuls, du 13 messidor an IX, se trouve daus un rapport du Ministre de l'intérieur du 9 frimaire précédent, dont le texte suit:

Le citoyen Brémontier, ingénieur en chef des ponts et chaussées du département de la Gironde, a rédigé un projet sur la fixation et la fertilisation des dunes sur les côtes de Gascogne.

« Les dunes sont composées de sables que la mer rejette journellement sur les bords. Ces sables amoncelés par les vents forment des montagnes de plus de 60 metres d'élévation qui changent souvent de direction, de position et de forme.

« Les navigateurs, lorsqu'ils sont affalés par les courants et la tempête, se jettent sur la côte qu'ils auraient évitée si le changement de position de ces montagnes ne leur donnait journellement le change sur le point où ils se trouvent sur la mer.

« Les dunes, en roulant sur elles-mêmes, avancent dans les terres et ensevelissent tout ce qu'elles rencontrent à leur passage, les forêts, les maisons et les campagnes cultivées. Elles inondent les campagnes en refoulant les eaux des ruisseaux qu'elles obstruent, et forment près de quarante lieues de lacs et de marais pestilentiels qui jettent la désolation et la mort parmi les habitants.

« Le projet de cet ingénieur en chef est basé sur le principe que les dunes sont susceptibles de devenir fertiles et d'être arrêtées dans leur marche par des plantations de pins maritimes et de genêts, protégées par quelques précautions indiquées par l'auteur.-L'expérience a justifié l'utilité de ce procédé.

Des semis furent faits en 1788, 1792 et 1793 sur 4,890 mètres de longueur. Ils occupent environ 1,200 journaux de terrain. Ces semis ont parfaitement réussi, ainsi qu'il est constaté: 1° par un procès-verbal de l'administration municipale du 9 fructidor an III, un autre de l'administration municipale de la Teste, du 13 frimaire an VII; 2o par des trouçons de pins, de genêts arrachés dans les terres ensemencées de 1791 à 1792.

Le gouvernement a fait imprimer, en l'an V, le mémoire du citoyen Brémontier sur les dunes. - Cet ingénieur vient d'y faire un supplément qur contient des observations sur le perfectionnement de son système. L'Institut national, d'après un rapport du 16 floréal an VIII, de la classe des sciences et arts, a donné à cet ouvrage le tribut d'éloges qu'il mérite. Les essais qui ont été faits, l'examen d'une commission spéciale, nommée par le ministre de l'intérieur et l'opinion de l'Institut national ne permettent aucun doute sur l'efficacité des moyens présentés pour arrêter la mobilité des dunes, ainsi que pour les rendre productives par la vente des bois qui y auront été plantés.

Ce projet mérite toute l'attention du gouvernement, et il importe de lui donner de la publicité, en livrant à l'impression le complément de ce mémoire. Son exécution rendrait à la culture des bois cent lieues carrées de terrains susceptibles de rapporter un jour plus de 5 millions de francs.

Il est nécessaire, pour l'execution de ce projet, d'établir une commission composée 1o de l'auteur qui la présidera; 2° d'un administrateur forestier pour donner les conseils sur la manière de conduire les jeunes plants d'un semis; 3° un ingénieur de la marine; 4° enfin des membres de la Société d'agriculture.

« Pour ne point rendre illusoire ce projet, il convient d'affecter annuellement à son exécution 20,000 francs pour subvenir aux dépenses des plantations des dunes entre la Gironde et l'Adour, à l'entretien des premiers semis et à leur administration. Cette dépense faisant partie de l'administration des forêts, et devant procurer des produits futurs, doit être acquittée par la régie des forêts nationales, sur les produits des départements de la Gironde et des Landes.

Les premières plantations faites par le gouvernement peuvent encourager des spéculations particulières; dans ce cas on pourrait les concéder à la charge de les planter.

«Les semis faits en 1788 entre la grande et la petite forêt d'Arcachon y sont d'une beauté rare. Les sables sont devenus si fertiles, que ces plantations ont besoin d'être éclaircies et essartées; les branchages qui en proviendront deviennent indispensables à la propagation des semis; ce travail ne peut être différé, et rend encore indispensable le fonds annuel de 20,000 francs. «Enfin, les plantations des dunes indiquées depuis longtemps comme une mesure aussi bonne en administration qu'en finance, est un objet digne du gouvernement, qui, par cet acte éclatant, signalera son désir d'assurer des propriétés menacées de l'envahissement, et de favoriser la multiplication des bois.

« C'est dans ces vues de bien public que je vous propose le projet d'arrêté ci-joint.

«Salut et respect.

ARRÊTÉ.

Signé: CHAPTAL. »

LES CONSULS de la République ; le Conseil d'Etat entendu, ARRETENT: ART. 1er. Il sera pris des mesures pour continuer de fixer et planter en bois les dunes des côtes de la Gascogne, en commençant par celles de La Teste, d'après les plans présentés par le citoyen Brémontier, ingénieur, et le préfet du département de la Gironde.

Sur le rapport du ministre de l'intérieur,

ART. 2. Il sera, à cet effet, établi une commission composée de l'ingénieur en chef du département, qui la présidera, d'un administrateur forestier, et de trois membres pris dans la Société des sciences, arts et belles-lettres de Bordeaux, section de l'agriculture; lesquels seront nommés par le préfet, et sur la présentation de la Société.

Ladite commission dirigera et surveillera l'exécution des travaux, ainsi que l'emploi des fonds qui y seront affectés, le tout sous l'autorité et sauf l'approbation du préfet.

Les fonctions de commissaires seront gratuites; il est seulement alloué une somme annuelle de 1,500 francs pour dépenses de voyages et autres frais, laquelle somme sera prise sur celle de 50,000 francs, dont il sera parlé aux articles suivants..

ART. 3. Il sera nommé par le préfet un inspecteur et un garde forestier qui résideront à la proximité des travaux.

Le traitement de l'inspecteur sera de 1,200 francs, et celui du garde de 600 francs.

ART. 4. — Il sera fait fonds d'une somme annuelle de 50,000 franes pour être employée aux dépenses de plantations des dunes situées entre la Gironde et l'Adour, à l'entretien des plantations et à leur administration.

L'état des dépenses sera dressé par la commission, et acquitté sur les ordonnances du préfet, qui réglera, chaque année, le compte général.

Les ministres de l'intérieur et des finances demeureront chargés de l'exécution du présent arrêté.

Le Premier consul,

Du 13 messidor an IX (2 juillet 1801).

Signé: BONAPARTE.

N° 121. ARRÊTÉ DES CONSULS DU 3e JOUR COMPLÉMENTAIRE AN IX.

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Dunes de Gascogne, fixation, semis et plantations.

L'administration des forêts est appelée à concourir aux travaux de plantation et d'ensemencement des dunes de Gascogne.

LES CONSULS de la République, sur le rapport du ministre des finances, ARRÊTENT :

ART. 1er. Les mesures prescrites par l'article 1er de l'arrêté du 13 messidor an IX pour la fixation et plantation des dunes des côtes de la Gascogne seront, en ce qui concerne les clayonnages et autres ouvrages d'art qu'elles exigeront, délibérées sur les plans du citoyen Brémontier, ingénieur en chef, et approuvées par le préfet du département de la Gironde, et, en ce qui aura rapport aux semis et plantations, ces mesures seront concertées avec l'administration générale des forêts.

ART. 2. Les dépenses pour les clayonnages et autres ouvrages d'art seront faites sur les fonds du département de l'intérieur, et celles pour les plantations et traitements des agents forestiers sur les fonds affectés aux forêts. ART. 3. - Les agents forestiers seront nommés par l'administration des forêts, et ceux pour là confection des clayonnages et ouvrages d'art par le préfet du département de la Gironde.

ART. 4. - Le préfet présidera la commission établie par l'article 2 de l'arrêté, et à son défaut, elle sera présidée par l'ingénieur en chef des ponts et chaussées, lorsque la délibération aura pour objet des ouvrages d'art, ou par le conservateur, lorsqu'il s'agira de semis et plantations.

Les ministres des finances et de l'intérieur sont chargés chacun en ce qui le concerne de l'exécution du présent arrêté.

Le Premier consul,

Signé BONAPARte.

Du troisième jour complémentaire an IX (20 septembre 1801).

N° 122.

DECRET DU 12 JUILLET 1808.

(Extrait.)

Dunes, fixation, plantation, département des Landes.

Application au département des Landes des mesures adoptées pour la fixation et l'ensemencement des dunes dans le département de la Gironde.

TITRE II. CHAPITRE VI.

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PLANTATION DES DUNES.

ART. 22. Il sera établi dans le département des Landes une commission pour la plantation des dunes.

Cette commission sera organisée de la même manière que celle qui a été établie à Bordeaux, en exécution de notre décret du 13 messidor an IX. ART. 23. - Il sera nommé par le préfet un inspecteur et un garde forestier, qui résideront à la proximité des travaux. Le traitement de l'inspecteur sera de 800 francs, et celui du garde forestier de 400 francs.

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ART. 24. — L'état des dépenses sera dressé par la commission, et acquitté sur les ordonnances du préfet.

ART. 25. Chaque année au mois de décembre la commission des Landes se réunira à celle de Bordeaux, sous la présidence du préfet de la Gironde. Le compte général des dépenses sera dressé. L'état des travaux de la campagne, ceux projetés pour la campagne suivante et les observations des commissions réunies seront transmis, ainsi que ledit compte général, à nos ministres de l'intérieur et des finances.

ART. 26.

- Toutes demandes en concession des dunes qui viendraient à

être faites par des communes ou des particuliers, seront adressées à l'une ou à l'autre commission, lesquelles donneront leur avis qui sera remis au préfet, et transmis à notre ministre des finances.

Du 12 juillet 1808.

N° 123.

Signé : NAPOLÉON.

DECRET DU 14 DÉCEMBRE 1810 (1).
Dunes, fixation et ensemencement.

Mesures prescrites pour l'ensemencement, la plantation et la culture des végétaux reconnus les plus favorables à la fixation des dunes, dans les départements maritimes.

EXPOSÉ DES MOTIFS.

L'exposé des motifs du décret du 14 décembre 1810 se trouve dans un rapport adressé par le ministre de l'intérieur à l'Empereur, et dont le texte suit:

« SIRE, Depuis quelques années l'administration des ponts et chaussées s'est occupée d'étendre et de multiplier les plantations propres à fixer les sables qui regnent sur plusieurs points des côtes maritimes, et qui, fréquemment déplacées par les vents, deviennent très-funestes, tantôt à l'agriculture, dont ils envahissent le domaine sur une étendue considérable et toujours croissante, tantôt aux ports où ils forment des encombrements successifs auxquels l'art oppose des efforts souvent inutiles.

«. Des circulaires ont été adressées, à cet effet, aux préfets et ingénieurs des départements maritimes, pour qu'ils indiquassent les points sur la côte que l'on pourrait utilement planter, et l'espèce d'arbres et de plantes qui y réussiraient le mieux, d'après la nature du sol et du climat.

« Ces recherches ont déjà produit quelques heureux résultats dans les départements du Nord, du Finistère, du Gard et de l'Hérault. Dans plusieurs autres départements on lève des plans des dunes où des plantations de même nature présentent des avantages certains.

Ces plantations des dunes qu'il ne faut pas confondre avec celles qui s'exécutent plus en grand sur les côtes de Gascogne et par les soins de l'administration forestière, consistent en oyats, espèce de roseaux maritimes, tamaris, genêts, pins, chiendents et autres végétaux qui, croissant dans les terrains sablonneux, et poussant en peu de temps une grande quantité de racines et de petits rameaux, affaiblissent l'action des vents et anéantissent les sables.

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« Quelques-uns de MM. les préfets ont déjà pris des arrêtés pour la conservation de ces précieux végétaux, et pour en interdire l'accès aux troupeaux de gros et de menu bétail. Ces mesures, qui ne renferment que des dispositions de simple police, ne sont pas de nature à être soumises à Votre Majesté pour être converties en décrets impériaux; mais il devient nécessaire que quelques dispositions générales prescrivent la plantation de toutes les dunes. C'est l'objet du décret que j'ai l'honneur de proposer ci-joint à Votre Majesté. »

DÉCRET.

NAPOLÉON, etc.; Sur le rapport de notre ministre de l'intérieur ; - Notre conseil d'Etat entendu, avons décrété et décrétons ce qui suit :

(1) Le décret du 14 décembre 1810 n'a été inséré au Bulletin des Lois qu'en 1847, à la suite d'une ordonnance royale des 13 octobre-27 novembre de ladite année, no 1434. Antérieurement, la légalité de ce décret avait été plusieurs fois contestée. Voir notamment l'affaire Marsillon, sur laquelle sont intervenus deux arrêts de la Cour de cassation des 7 mai 1835 et 1er juillet 1836.

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ART. 1er. Dans les départements maritimes, il sera pris des mesures pour l'ensemencement, la plantation et la culture des végétaux reconnus les plus favorables à la fixation des dunes.

ART. 2. A cet effet, les préfets de tous les départements dans lesquels se trouvent des dunes feront dresser, dans leurs départements respectifs, par les ingénieurs des ponts et chaussées, un plan des dunes qui sont susceptibles d'être fixées par des plantations appropriées à leur nature; ils feront distinguer, sur ce plan, les dunes qui appartiennent au domaine, celles qui appartiennent aux communes, et celles enfin qui sont la propriété des particuliers.

ART. 3. Chaque préfet rédigera ou fera rédiger, à l'appai de ces plans, un mémoire sur la manière la plus avantageuse de procéder, suivant les localités, à l'ensemencement et à la plantation des dunes; il joindra à ce rapport un projet de règlement, lequel contiendra les mesures d'administration publique les plus appropriées à son département, et qui pourront être utilement employées pour arriver au but désiré.

ART. 4. Les plans, mémoires et projets de règlements, levés et rédigés en exécution des articles précédents, seront envoyés par les préfets à notre ministre de l'intérieur, lequel pourra, sur le rapport de notre directeur général des ponts et chaussées, ordonner la plantation, si les dunes ne renferment aucune propriété, et, dans le cas contraire, nous en fera son rapport, pour être par nous statue en Conseil d'Etat, dans la forme adoptée pour les règlements d'administration publique.

ART. 5. Dans les cas où les dunes seraient la propriété de particuliers ou de communes, les plans devront être publiés et affichés dans les formes prescrites par la loi du 8 mars 1810 (1); et si lesdits particuliers ou communes se trouvaient hors d'état d'exécuter les travaux commandés, on s'y refusaient, l'administration publique pourra être autorisée à pourvoir à la plantation à ses frais; alors elle couservera la jouissance des dunes, et recueillera les fruits des coupes qui pourront y être faites jusqu'à l'entier recouvrement des dépenses qu'elle aura été dans le cas de faire et des interêts, après quoi lesdites dunes retourneront aux propriétaires, à la charge d'entretenir convenablement les plantations.

ART. 6. — A l'avenir, aucune coupe de plants d'oyats, roseaux de sable, épines maritimes, pins, sapins. mélezes et autres plantes aréneuses, conservatrices des dunes, ne pourra être faite que d'après une autorisation spéciale du directeur général des ponts et chaussées, et sur l'avis des préfets.

ART. 7. Il pourra être établi des gardes pour la conservation des plantations existantes actuellement sur les dunes, ou qui y seraient faites à l'avenir leur nomination, leur nombre, leurs fonctions, leur traitement, leur uniforme seront réglés d'après le mode usité pour les gardes des bois com

munaux.

Les délits seront poursuivis devant les tribuuaux et punis conformément aux dispositions du Code pénal. ART. 8. N'entendons en rien innover, par le présent décret, à ce qui se pratique pour les plantations qui s'exécutent sur les dunes du département de la Gironde.

ART. 9. Nos ministres de l'intérieur et des finances sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.

Du 14 décembre 1810.

Signé NAPOLEON.

(1) La loi applicable serait aujourd'hui celle du 3 mai 1841, sur l'expropriation pour cause d'utilité publique.

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