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n° 386; Duranton, t. IV, n° 278; Bugnet, sur Pothier, loc. cit.; Chavot, De la propriété mobilière, no 262; Dalloz, Rép. gén., vo Chasse, no 173; Demolombe, t. XIII, no 25. « La vérité est, dit ce dernier auteur, que l'animal, même poursuivi et blessé par un chasseur, ne lui appartient pas encore, et que l'occupation ne se réalise qu'autant qu'il est réellement en son pouvoir, de manière à ne pouvoir plus lui échapper; telle est la décision des Institutes de Justinien, qui ne reconnaissent au chasseur la propriété du gibier, même blessé, vulneráta, qu'autant qu'il l'a pris : Non aliter quàm si ceperis, quia mulla occidere solent ut non capias. » L. 13, De rer. divis. V. aussi L. 55, Dig., De acq. rer. dom.

Ainsi, l'animal poursuivi, blessé de manière à pouvoir s'échapper, peut être tué et pris par tout autre chasseur, malgré la poursuite dont il est l'objet, et encore que l'individu qui l'a tué ait su que sa bête était chassée, et qu'il y eût bien identité entre le gibier suivi et celui dont cet individu s'est emparé. On est ici, comme le fait remarquer M. Demolombe, en présence d'une question de droit, et non d'une question de convenance, de bons procédés ou de savoir-vivre.

A plus forte raison, le même droit appartiendra-t-il à celui sur le fonds duquel le gibier s'est réfugié. Le chasseur ne pourrait pas le suivre sur le terrain d'autrui sans le consentement du propriétaire, car le fait de chasse n'est pas consommé, à la différence du cas où l'animal aurait été mortellement blessé. Le maître du fonds, en tuant ou en s'appropriant l'animal, ne rencontre donc même plus à côté de lui un chasseur ayant comme lui la faculté de chasser cet animal. Sans doute, si, en fait, le chasseur qui a levé le gibier le suit, le tue et en prend possession sur le terrain où il n'a pas le droit de chasse, le gibier n'en sera pas moins sa propriété, parce que, dans ce cas, il n'y a qu'un fait délictueux donnant simplement lieu à l'application d'une peine et à des dommages-intérêts, comme dans l'hypothèse énoncée plus haut, de la simple introduction du chasseur sur la propriété où est allé mourir le gibier qu'il avait blessé à mort. Mais il faut au moins qu'il ait tué l'animal sur le fonds d'autrui où cet animal a pénétré, puisqu'on suppose qu'avant son entrée dans ce fonds il n'y avait qu'une poursuite ou des blessures légères n'empêchant pas le gibier de s'échapper. Jusqu'à ce moment, l'animal poursuivi était donc destiné à devenir la propriété du premier occupant, et surtout, on le répète, de celui sur le terrain duquel il a cherché un refuge et à qui seul il est permis de chasser sans délit. V. Demolombe, loc. cit.; Dijon, 2 août 1859, aff. Philippon.

L'espèce du présent arrêt offrait à la fois cette double circonstance d'un animal non blessé ou légèrement blessé, et entré dans la propriété du tiers qui l'a tué. L'un et l'autre de ces faits ont été relevés par la Cour. Toutefois, il suit de ce qui précède que le premier suffisait à la justification de la décision, toute personne pouvant tuer, soit dans son fonds, soit dans tout autre lieu, un animal simplement poursuivi, que sa blessure n'empêcherait pas de se soustraire à cette poursuite. Quant au second fait, s'il fournissait à la thèse de l'arrêt un argument, ce n'était qu'un argument à fortiori. — Aussi, encore bien que les deux raisons de décider soient placées sur la même ligne dans cet arrêt, il convient, ce nous semble, de ne considérer comme argument péremptoire, comme véritable base de la décision, que l'absence d'appréhension de l'animal, telle qu'elle a été caractérisée par la doctrine. La circonstance que celui qui a tué l'animal se trouvait sur son terrain a seulement la valeur d'une considération de nature à faire disparaître les objections puisées par le systéme opposé dans le danger des conflits que peut occasionner, entre les chasseurs, la doctrine de Gaïus et de Puffendorf, aujourd'hui sanctionnée par la Chambre des requêtes. (Observations communiquées par M. Faivre.)

No 155.- COUR IMPÉRIALE DE PARIS (Ch. corr.).— 17 juin 1862.

Chasse, délit, poursuite du gibier, terrain d'autrui.

Il y a délit de chasse sur le terrain d'autrui de la part du chasseur qui, posté sur son héritage, fait poursuivre le gibier par son chien sur une propriété dans laquelle il n'a pas le droit de chasse (1). Mais il n'y a pas délit dans le fait du chasseur, muni de permis, qui tire, sur sa propriété, dans le temps où la chasse est ouverte, une pièce de gibier poursuivie par le chien d'un autre chasseur qui l'a levée et lancée sur son propre terrain (2).

(De Brossin c. Boullard et Cothias.)

Le garde des propriétés de M. de Brossin chassait, le 15 février 1862, dans les bois de son maître, lorsque son chien, qui venait de lancer un lievre, fut rejoint par un autre chien courant que le garde reconnut pour celui du sieur Boullard.

A quelques pas de la forêt se tenaient les sieurs Boullard et Cothias, attendant la sortie du liévre. Leur attente ne fut pas trompée. Après une demiheure de chasse environ, le liévre, toujours poursuivi par les deux chiens, gagna la campagne. Il passa à proximité du sieur Boullard, qui lui tira deux coups de fusil, mais ne fit que le blesser. A quelques centaines de mètres plus loin, il fut achevé et emporté par un troisième chasseur demeuré in

connu.

Le garde constata ces faits par un procès-verbal en suite duquel les sicurs Boullard et Cothias furent traduits devant le tribunal correctionnel de Sens, à la requête de M. de Brossin, pour avoir chassé sans autorisation sur son terrain, délit résultant de cette double circonstance: 1° qu'ils avaient tiré un lievre, lancé sur sa propriété, alors que ce lièvre était poursuivi et sur le point d'être atteint par le chien de son garde; 2° qu'ils avaient introduit un chien courant dans cette propriété, pour en faire sortir le gibier et le tuer.

Le tribunal a statué sur ces conclusions par un jugement dont suit la te

neur :

Attendu que le fait par un chasseur, muni d'un permis de chasse, d'avoir tiré sur sa propriété, dans le temps où la chasse est autorisée, une pièce de gibier qui la traversait après avoir été levée par un autre chasseur sur son propre terrain, et lorsque le chien courant de ce dernier chasseur était encore à la poursuite du gibier, ne saurait constituer un délit de chasse;

Que c'est au contraire le fait du passage du chien courant, appartenant au second chasseur, sur l'héritage du premier, qui pourrait être considéré, aux termes de l'article 11, § 2, de la loi du 3 mai 1844, comme un délit de chasse ; —Que les prévenus ne sauraient donc être atteints par ce motif;

(1) Voir, en ce sens, crim. cass., 26 septembre 1840, affaire Scheppert c. Martin; Rouen, 17 juin 1831, et 12 janvier 1843, affaire Mahieux; crim. cass., 18 mars 1853, affaire Roslin d'Ivry.

Il a été jugé toutefois qu'il n'y a pas délit de chasse de la part du chasseur qui attend, sur son héritage, le retour d'une pièce de gibier que ses chiens ont lancée sur cet héritage et qu'ils poursuivent sur la propriété d'autrui. Orléans, 10 juin 1861, affaire Jarry, ci-dessus, p. 106.

(2) Ce fait ne constitue pas même un quasi-délit donnant ouverture à des dommages-intérêts au profit du chasseur dont les chiens poursuivent la pièce de g¡ bier qu'ils ont lancée sur son terrain. C'est ce qui résulte formellement d'un arr'êt de la Cour de Dijon du 2 août 1859, affaire Suschetet, et d'un arrêt de la Chambre des requêtes, du 29 avril 1862, affaire Cooper, rapportés ci-dessus, p. 282 et 284.

RÉPERT, DE LÉGISL. FOREST.

MAI 1863.

T. 1.-19

«Mais attendu qu'il est dès à présent établi que Boullard a laissé son chien courant battre les bois du sieur de Brossin pendant une demi-heure à la poursuite d'une pièce de gibier;

Qu'il s'est tenu pendant cet espace de temps à la portée de son chien, à la lisière du bois, et qu'aussitôt que le gibier poursuivi par ce chien a débouché du bois en plaine, il a tiré immédiatement deux coups de fusil sur ce gibier; Que ce fait constitue un délit de chasse prévu et puni par le paragraphe 2 de l'article 11 de la loi précitée;

Attendu qu'il n'est pas établi que Cothias ait chassé conjointement avec Boullard; qu'aucun fait spécial n'est d'abord relevé contre lui;

« Vu les articles 11 de ladite loi et 196 du Code, le tribunal renvoie Cothias de la poursuite sans dépens; condamne la partie civile aux frais en ce qui concerne ce prévenu; Et, faisant application à Boullard des articles ci-dessus, le condamne à 16 francs d'amende et 10 francs de dommages-in

térêts. »

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M. de Brossin a interjeté appel de ce jugement. Son avocat a reconnu avec le tribunal qu'il n'y a pas délit de chasse, de la part du chasseur, muni d'un permis, qui tire sur son terrain une pièce de gibier levée sur le terrain d'autrui; mais il a soutenu qu'en se postant près du bois de M. de Brossin, pour tirer le gibier qu'en ferait sortir le chien du sieur Boullard, le sieur Cothias avait commis, comme ce dernier, le délit prévu par l'article 44, n° 2 de la loi du 3 mai 1844.

ARRÊT.

LA COUR; Adoptant les motifs des premiers juges, CONFIRME.

Du 17 juin 1862.

(MM. de Gaujal, pr.; Puissan, rapp.; Roussel, av, gén. c. conf.; Boulloche et Taillandier, av.)

N° 156. CIRCULAIRE DU MINISTRE DE LA JUSTICE.

6 mars 1863.

Fêche fluviale, police et surveillance, constatation et poursuite des délits, payement des frais. Etat trimestriel des procès-verbaux mis en poursuite.

Le décret du 29 avril 1862 qui a placé dans les attributions de l'administration des ponts et chaussées la surveillance, la police et l'exploi tation de la pêche fluviale, n'a rien changé aux règles et aux principes concernant les attributions des agents ordinaires de la police judiciaire et des officiers du ministère public, pour la constatation et la poursuite des délits et contraventions en matière de pêche (1). Les poursuites contre les délinquants seront exercées par le ministère public, au nom de l'administration des ponts et chaussées, et les frais en résultant seront payés, soit sur simple taxe, soit sur mémoire séparé, selon leur nature, pour le compte du ministère des travaux publics (2). Les procureurs généraux devront adresser tous les trois mois, au ministre de la justice, un tableau indiquant, d'une part, le nombre des procèsverbaux dressés pour infraction aux règlements sur la police de la pêche, et suivis de poursuite, et d'autre part, la qualité des agents

(1) Voir le décret du 29 avril 1862, ci-dessus, p. 126.

(2) Ces instructions sont conformes à l'opinion que nous avons émise ci-dessus, p. 247 et 248, en note, sous la circulaire de la comptabilité générale des finances, du 15 décembre 1862.

qui les auront rédigés, en distinguant les gardes forestiers, les agents des ponts et chaussées, et les autres officiers de police judiciaire.

Monsieur le procureur général, en vertu d'un décret du 29 avril 1862, la surveillance, la police et l'exploitation de la pêche fluviale se trouvent aujour d'hui placées exclusivement dans les attributions du ministère de l'agriculture, du commerce et des travaux publics, et confiées à l'administration des ponts et chaussées.

J'ai appris que des divergences s'étaient manifestées dans les parquets quant à l'appréciation des conséquences de la décision de Sa Majesté ; je vous recommande de rétablir partout l'uniformité dans la pratique.

Le décret dont le but a été de substituer les agents de l'administration des ponts et chaussées à ceux de l'administration forestière, n'a rien changé aux règles et aux principes adoptés jusqu'à ce jour en ce qui concerne les attributions des agents ordinaires de la police judiciaire et des officiers du ministére public pour la constatation et la poursuite des infractions en matière de pêche.

Les poursuites qu'ils ont à diriger contre les délinquants seront faites au nom de l'administration des ponts et chaussées, ainsi qu'elles avaient lieu au nom de l'administration forestière, avant le décret du 29 avril. Les frais, dans ce cas, continueront à être acquittés soit sur simple taxe, soit sur mémoire séparé, selon leur nature, pour le compte du ministère chargé du service.

Je regretterai donc toute taxe et tout article de dépense qui figureraient de ce chef dans les états de frais urgents soumis à ma régularisation par les receveurs de l'enregistrement ou dans les mémoires ordonnancés par les magistrats, dont la responsabilité serait engagée s'ils ne se conformaient pas à l'instruction du 30 septembre 1826, et à l'article 158 du décret du 18 juin 1811 concernant les frais de justice.

Je désire d'ailleurs suivre de plus près l'exercice de l'action publique en cette matière, et je vous prie de m'adresser tous les trois mois un tableau indiquant, d'une part, le nombre des procès-verbaux constatant des infractions à la police de la pêche, et suivis de poursuites, d'autre part la qualité des agents qui les auront rédigés, en distinguant les gardes forestiers, les agents des ponts et chaussées, et les autres officiers de police judiciaire. - Recevez, etc. Du 6 mars 1863. Signé: DELANGLE,

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N° 157.- DECRET DU 25 MARS 1863. (Promulg. le 15 avril suiv.). Rivières navigables et flottables, pêche et chasse, francs-bords, prises d'eau, permissions d'usines, produits, recouvrement, administration des contributions indirectes.

L'administration des contributions indirectes est chargée, à partir du 1er juillet 1863, du recouvrement des fermages de la pêche et de la chasse sur les fleuves et rivières navigables et flottables, des produits de la récolte des francs-bords, et des redevances pour prises d'eau et permissions d'usines (1).

NAPOLÉON, etc.; Sur le rapport de notre ministre secrétaire d'Etat au département des finances; Avons décrété et décrétons ce qui suit :

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(1) L'administration des contributions indirectes était chargée déjà du reconvrement des produits de la pêche, de ceux des francs-bords, plantations, etc., dans les canaux et rivières canalisées (décret du 23 décembre 1810, art. 2, Vécis.

ART. 1er. - A partir du 1er juillet 1863, les fermages de la pêche et de la chasse sur les cours d'eau, les produits de la récolte des francs-bords et les redevances pour prises d'eau et permissions d'usine, seront recouvrés par l'administration des contributions indirectes dans les fleuves et riviéres navigables et flottables comme dans les canaux et rivières canalisées.

ART. 2. Un arrêté de notre ministre des finances réglera les mesures à prendre pour l'exécution du présent décret.

Du 25 mars 1863.

Signé NAPOLEON.

N° 158. CIRCULAIRE DE L'ADMINIST. des forêts, no 831.- 28 mars 1863.

Forêts domaniales, travaux d'exploitation, cahier des charges.

Envoi d'un cahier des charges pour l'adjudication des travaux d'exploitation dans les forêts domaniales.

Monsieur le conservateur, le cahier des charges pour l'adjudication des travaux d'exploitation dans les forêts domaniales a paru susceptible de diverses modifications sur lesquelles je crois devoir appeler votre attention.

Afin de donner plus de force aux clauses du nouveau cahier des charges, le ministre l'a revêtu de son approbation. L'utilité de cette sanction avait été déjà reconnue à l'occasion de l'adjudication des travaux d'amélioration.

ART. 1. L'adjudication au rabais, à l'extinction des feux, était le seul mode précédemment autorisé. Pour prévenir les effets des entraînements irréfléchis auxquels s'abandonnaient parfois les concurrents, les agents auront désormais la faculté de recourir, selon les circonstances, soit à'la soumission directe, en cas d'exploitations urgentes ou de difficultés nécessitant le concours d'un entrepreneur avantageusement connu des agents; soit aux soumissions cachetées qui assurent la production d'offres mûrement réfléchies; soit enfin à l'extinction des feux, lorsque la rédaction des soumissions cachetées présenterait des difficultés aux concurrents ou leur causerait des répugnances.

La faculté dont il s'agit est mentionnée dans l'article 1er du nouveau cahier des charges.

ART. 2. Les dispositions antérieures imposaient à l'entrepreneur l'obligation de donner une caution et un certificateur de caution. Aux termes de l'article 2 du nouveau cahier des charges, la production d'une caution sera seule exigée à l'avenir. L'entrepreneur et la caution devront être acceptés par le président de l'adjudication.

ART. 4. L'expérience faite pour les adjudications de travaux d'amélioration ayant fait ressortir l'avantage de composer le bureau uniquement d'agents forestiers, cette disposition a été adoptée pour les adjudications de travaux d'exploitation. Elle fait l'objet de l'article 4.

ART. 15 et 16. Aux termes des articles 15 et 16 du nouveau cahier des charges, il est fait défense à l'entrepreneur de sous-traiter et de s'éloigner du lieu des travaux, sans s'être fait préalablement remplacer par un représentant dûment agréé.

ART. 31. En cas de fraude, de malfaçon ou de retards préjudiciables aux intérêts de l'Etat, il sera pris des mesures pour la mise en régie des travaux.

du ministre des finances du 26 décembre 1831). La nouvelle mesure qui vient d'être adoptée est la conséquence du décret du 29 avril 1862, qui a confié à l'administration des ponts et chaussées le service de la pêche dans tous les autres cours d'eau. C'est l'administration des domaines qui avait été chargée, jusqu'à présent, du recouvrement du produit de la pêche et de la chasse dans les fleuves et rivières navigables et flottables non canalisées.

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