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« Considérant que l'indemnité réclamée n'a pas pour objet un dommage fait aux champs, dans les termes de l'art. 5 de la loi de 1838, mais bien l'exécution de la clause d'un bail du droit de chasse, aux termes de laquelle les locataires prennent à leur charge les dommages causés par le gibier, et que, dès lors, le Tribunal civil était seul compétent pour statuer sur la demande; Au fond: Adoptant les motifs des premiers juges; Sans qu'il soit besoin de s'occuper de la fin de non-recevoir proposée contre l'appel; — Met l'appellation au néant, ordonne que le jugement sortira effet. » M. de Pontalba s'est pourvu en cassation contre cette décision.

-

ARRÊT.

LA COUR; Sur la question de compétence :

Attendu qu'il s'agissait au procés de l'application et de l'exécution du bail consenti, le 25 juin 1854, par l'Etat au sieur Trubert et à ses cofermiers, du droit de chasse dans la forêt domaniale d'Ermenonville; - Que la demande de l'Etat se fondait spécialement sur l'article 21 du cahier des charges, lequel, saus s'en tenir aux dispositions générales consacrées par la loi ou la jurisprudence concernant cette matière, rendait l'adjudicataire responsable, tant vis-a-vis de l'Etat qu'à l'égard des riverains, des dégâts causes soit aux forêts, soit aux propriétés riveraines, par les lapins, les autres animaux nuisibles et toute espèce de gibier;

Attendu qu'ainsi la demande formée contre Trubert et consorts n'avait pas pour objet, en vertu de l'article 1382 du Code Napoléon, la réparation d'un pur fait, mais l'exécution d'un contrat de droit civil pour laquelle la juridiction ordinaire était seule compétente, la demande étant de plus de 21,000 francs, et excédant ainsi la compétence habituelle du juge de paix en premier et dernier ressort; - REJETTE.

Du 17 décembre 1861-(MM. Nicias-Gaillard, pr.; de Vergés, rapp.; Blanche, av. gén. c. conf.; Groualle, av.)

No 191. COUR IMPÉRIALE DE NIMES (3o Chambre).

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Action publique, jugement correctionnel, appel, prescription
par trois ans, péremption d'instance,

L'action publique, en matière correctionnelle, se trouve éteinte par la prescription pour défaut ou discontinuation de poursuites pendant trois ans, alors même qu'il est intervenu au jugement de condamnation, si ce jugement a été frappé d'appel, et si, depuis cet appel, l'instance est restée impoursuivie depuis plus de trois ans (1).

Les règles de la péremption d'instance civile ne sont pas applicables en matière criminelle (2).

(Duplantier c. Thomas et Laurens.) ARRÊT.

La COUR; Attendu que les règles de la péremption d'instance civile ne sont pas applicables en matière criminelle; que la prescription de trois ans

(1-2) Voir, en ce sens, un arrêt de la Cour de cassation du 28 novembre 1857, affaire Leconte, portant que la prescription de la peine par cinq ans n'est point applicable dans l'espèce, attendu que cette prescription suppose un jugement non attaqué et pouvant être mis à exécution. Voir, dans le même sens, Dalloz, Rép. gen., vis PRESCRIPT. CRIM., no 122 et suiv., J. du Pal., Rép., vo PRESCRIPTION (mat. crim.), no 131; Carnot, Instr. crim., t. III, sur l'article 638, no 3; Mangin, Act. publ., . II, no 339; Morin, Rép. de Dr. crim., vo PRESCRIPTION, Section 1, § 1er, no 7; Trébutien, Cours de droit crim., p. 360; Berthauld, Cours de C. pén., p. 98; Grenoble, 23 juin 1830, affaire Archier.

Répert. de législ. forest. -SEPTEMBRE 1863.

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T. 1.-23

seule peut anéantir les poursuites en matière de délits correctionnels; que si cette prescription est applicable lorsqu'il n'y a eu que des actes de poursuite, il y a même raison pour qu'elle le soit lorsqu'un jugement frappé d'appel à évacué l'instance correctionnelle et que, après l'appel interjete de ce jugement, aucun acte de poursuite n'est intervenu depuis plus de trois ans ;

Attendu que ce dernier cas a été spécialement prévu par l'article 640 du Code d'instruction criminelle en matière de contravention de simple police; qu'on ne voit point de motifs plausibles de différence à cet égard entre les poursuites en matière de délits et les poursuites en matière de contraventions; que l'article précité doit donc aider puissamment sur la question dont il s'agit, à l'interprétation des articles 637 et 658 dudit Code;

:

En fait Attendu qu'après l'appel interjeté par Duplantier du jugement du 14 mai 1855, il n'a été fait aucun acte de continuation de poursuites dans cette affaire, ni de la part des parties intéressées, ni de la part du ministère public depuis plus de trois ans ; qu'en conséquence, le jugement, l'appel de ce jugement et toute la procédure qui les a précédés demeurent anéantis par la prescription de trois ans;

Par ces motifs, déclare anéantis par la prescription de trois ans le susdit jugement, l'appel qui en a été relevé par Duplantier et la procédure qui l'a précédé, etc.

Du 27 mars 1862.-(MM. Liquier, pr.; Connelly, av. gén.; Bédarės, av.)

No 192.CONSEIL D'ETAT (Sect. du content.). 15 áoût 1860.

Maitre de forges, achat de coupes de bois, revente de bois de feu et d'industrie, patente.

Doit être considéré comme exerçant le commerce de marchand de bois, le maître de forges qui se rend chaque année adjudicataire de coupes pour l'alimentation de ses usines et qui revend habituellement à des marchands des quantités considérables de bois de construction et de bois de chauffage (1).

(Salin).

M. Salin, maître de forges, s'est pourvu devant le Conseil d'Etat contre un arrêté du 30 mars 1860, par lequel le Conseil de préfecture de la Meuse a rejeté sa demande en décharge du demi-droit fixe additionnel de patente auquel il a été imposé, pour l'année 1860, sur le rôle de la commune d'Abainville, comme exerçant la profession de marchand de bois en gros.

A l'appui de ce pourvoi, M. Salin a soutenu qu'il n'exerce pas la profession de marchand de bois, qu'il est maître de forges et soumis aux droits de patente auxquels est assujettie cette dernière industrie; que si, pour alimenter les fourneaux de son usine, il se rend adjudicataire de coupes de bois, et s'il revend les bois de construction qui ne peuvent être convertis en bois de feu, ces ventes, réalisées souvent à perte, ne sauraient le faire considérer comme exerçant la profession de marchand de bois.

Le ministre des finances a combattu le pourvoi et conclu au maintien de l'arrêté attaqué, par le motif que le requérant, qui se rend adjudicataire de nombreuses coupes de bois pour l'alimentation de ses forges, revend tous les bois de construction et les bois qui ne peuvent être convertis en charbon; que ces ventes s'élèvent, de l'aveu même du requérant, au prix de 80,000 à 100,000 francs par an; qu'à la vérité, le sieur Salin n'a pas d'emplacement

(1) Voir la décision qui suit.

pour le dépôt des bois qu'il met en vente, mais que le parterre des coupes qu'il exploite doit être considéré comme le chantier qui sert à son exploitation; qu'ainsi, le requerant exerçant deux professions, possède deux établissements industriels dans le sens de l'article 9 de la loi du 4 juin 1858; que, dès lors, il n'est pas fondé à demander décharge du demi-droit fixe additionnel de patente auquel il a été imposé, pour l'année 1860, comme exerçant la profession de marchand de bois en gros.

NAPOLÉON, etc.; du 4 juin 1858;

DÉCRET.

Vu la loi du 25 avril 1844, celle du 18 mai 1850, celle

Considérant que le sieur Salin imposé, pour l'année 1860, au droit fixe de patente, comme exerçant la profession de maitre de forges et à un demi-droit

additionnel comme marchand de bois en gros, soutient qu'il n'exerce pas cette

dernière profession;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le sieur Salin, qui, chaque année, se rend adjudicataire de coupes de bois pour l'alimentation de ses fourneaux, revend habituellement à des marchands des quantités considérables de bois de construction et de bois de chauffage; que ces ventes constituent une industrie indépendante de la profession de maître de forges; que, dans ces circonstances, c'est avec raison que, par application de l'article 9 de la loi du 4 juin 1858, le sieur Salin a été imposé au droit entier comme maitre de forges, et au demi-droit fixe additionnel comme marchand de bois ayant ses chantiers sur l'emplacement même des coupes dont il était adjudicalaire;

ART. 1. La requête du sieur Salin est rejetée.

Du 15 août 1860. (MM. Flandin, rapp.; E. Baroche, c. du gouv.).

No 193. — CONSEIL d'ETAT (Sect. du content.). 4 avril 1862.

Maitre de forges, achat de coupes de bois, revente de bois de construction, patente.

On ne peut considérer comme exerçant le commerce de marchand de bois, le maître de forges qui revend accidentellement une faible quantité de bois de construction compris dans les coupes dont il s'est rendu adjudicataire pour l'alimentation de ses fourneaux (1).

(Bradser et Viry).

Par arrêté du 13 septembre 1861, le Conseil de préfecture de la Meuse a rejeté la demande formée par MM. Bradser et Viry, maîtres de forges, en décharge du demi-droit et du quart de droit fixe auquel ils ont été imposés, pour l'année 1861, sur le rôle de la commune de Savonnieres, comme exerçant la profession de marchands de bois adjudicataires associés (tableau A, 1re classe). MM. Bradser et Viry se sont pourvus devant le Conseil d'Etat contre cet arrêté, en se fondant sur ce qu'ils n'exercent pas la profession de marchands de bois, qu'ils sont maîtres de forges et soumis aux droits de patente aux quels est assujettie cette derniere industrie; que si, après s'être rendus adjudicataires de deux coupes de bois pour alimenter le haut fourneau de leur usine, ils ont vendu le bois de construction compris dans les coupes, cette vente était un fait isolé, qui ne saurait les faire considérer comme exerçant la profession de marchands de bois.

(1) Voir la décision qui précède.

NAPOLÉON, etc.; sens du pourvoi;

ᎠᎬᏟᎡᎬᎢ .

- Vu les observations du ministre des finances dans le Vu les lois du 25 avril 1844, du 18 mai 1850 et du 4 juin

1858; Considérant qu'il résulte de l'instruction que si, pendant l'année 1861, les requérants ont vendu le bois de construction compris dans les coupes dont ils s'étaient rendus adjudicataires pour l'alimentation du haut fourneau de leur usine, cette vente accidentelle et peu importante ne peut les faire considérer comme ayant exercé le commerce de marchands de bois; que, des lors, les sieurs Bradser et Viry sont fondés à demander décharge des droits de patente auxquels ils ont été imposés pour l'année 1861, sur le rôle de la commune de Savonnières, comme exerçant la profession de marchands de bois adjudicataires associés.

ART. 1. L'arrêté du Conseil de préfecture de la Meuse du 13 septembre 1861 est annulé.

Du 4 avril 1862

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No 194.- CONSEIL D'ETAT (Sect. du content.). 5 avril 1862. Chemins vicinaux, dégradations, subventions spéciales, fixation,

expertise préalable.

Est entaché d'excès de pouvoir l'arrêté par lequel un Conseil de préfec ture décide, préalablement à l'expertise prescrite par l'article 14 de la loi du 21 mai 1836, qu'une subvention spéciale est due par un propriétaire de bois pour la réparation des dégradations extraordinaires causées à un chemin vicinal.

(Crémieux).

M. Crémieux, propriétaire de la forêt de Saou, s'est pourvu devant le Conseil d'Etat contre un arrêté du 16 janvier 1862 par lequel le Conseil de préfecture de la Drôme, sans attendre qu'il ait été procédé à l'expertise prescrite par l'article 14 de la loi du 21 mai 1836, l'a déclaré en principe passible d'une subvention spéciale pour l'entretien d'un chemin vicinal servant à l'exploitation de ses bois.

Ce pourvoi est motivé sur ce que le chemin dont il s'agit n'est pas entretenu à l'état de viabilité; que le nombre des voitures servant aux transports de bois ne dépasse pas 300 par année; que les transports ne sont pas faits pour le compte du requérant, et qu'enfin ce dernier fournit, comme propriétaire, des prestations en nature.

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DÉCRET.

NAPOLÉON, etc.; - Vu la loi du 21 mai 1836, notamment l'article 14; Considérant que, d'après l'article 14 de la loi du 21 mai 1836, les subventions spéciales qui peuvent être dues pour la réparation des dégradations extraordinaires causées aux chemins vicinaux, doivent être réglées par les Conseils de préfecture, après des expertises contradictoires; que ces expertises ont pour objet, non-seulement de fixer la quotité de la subvention, mais de constater si des dégradations extraordinaires ont été réellement causées au chemin, et si la subvention est due;

Considérant que l'arrêté du Conseil de préfecture de la Drôme, qui déclare le sieur Crémieux passible d'une subvention spéciale à raison des dégradations extraordinaires qui auraient été causées au chemin vicinal de grande communication, no 12, pour le transport des bois provenant de la forêt de Saou, n'a pas été précédé de l'expertise prescrite par la loi;

ART. 1er. est annulé.

L'arrêté ci-dessus visé du Conseil de préfecture de la Drôme

ART. 2. Le sieur Cremieux est renvoyé devant le même Conseil de préfecture pour y être statué sur la subvention spéciale à laquelle il peut être impose, après qu'il aura été procédé à l'expertise prescrite par l'article 11 de la loi du 21 mai 1836.

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Du 5 avril 1862. (MM. de Raynal, rapp.; L'Hôpital, e. du gouv.; Larnac, avocat).

No 195. COUR IMPÉRIALE DE PARIS (Ch. corr.).

8 fevrier 1862.

Chasse, délit, engins prohibės, complicité, achat.

Celui qui sciemment achète du gibier pris avec des engins prohibés se rend complice par recel du délit prévu et puni par l'art. 12 de la loi du 3 mai 1844 (C pén., 62) (1).

(Min. pub. c. Clément.) — ARRÊT.

LA COUR ; Considérant qu'il résulte de l'instruction, des débats, et des aveux mêmes de Clément, qu'en décembre 1861, à Reims, et à trois reprises

(1) Il a été décidé d'une manière générale que les règles établies par le Code pénal sur la complicité sont applicables aux délits de chasse (Crim. cass., 6 décembre 1839, affaire Creuzet, D. P., 40, 1, 388; Amiens, 13 janvier 1853, affaire Beguin, D. P., 53, 2, 172; Limoges, 28 décembre 1854, affaire Hubert). Cette doctrine est admise aussi par MM. Gillon et de Villepin, Code des chasses, n° 244; Chardon, Droit de chasse, ch. XIV; Camusat-Busseroles, Police de la chasse, p. 177; Perreyve, Tr. des délits de chasse, p. 347; Duvergier, Coll. des lois, 1844, p. 136, et par M. Dalloz, Jur. gen., vo CHASSE, no 357. Et il en a été fait application par un arrêt qui a décidé que le traqueur peut être réputé complice d'un délit de chasse commis par le chasseur qu'il accompagne, et, par exemple, du délit de chasse sur le terrain d'autrui sans le consentement du propriétaire (Rouen, 26 avril 1849, affaire Bourienne, D. P., 50, 2. 69).

Mais la doctrine opposée a pour elle MM. Petit, du Droit de chasse, t. III, p. 261 et suivantes, et Rogron, Code de la chasse, p. 186. Elle semble aussi s'induire d'un arrêt qui a décidé que le propriétaire qui a consenti à ce qu'on chassât sur ses terres en temps prohibé, qui a même prêté pour cela ses gardes et piqueurs, n'est pas néanmoins punissable, s'il n'a pas pris personnellement part à cette chasse, effectuée dans l'intérêt d'un tiers, et s'il s'est borné y assister comme curieux (Dijon, 28 novembre 1845, affaire Gardier, D. P., 46, 2, 5), et que l'individu qui a pris part, mais seulement en qualité de traqueur, à une chasse faite en temps probibé, n'est pareillement passible d'aucune peine, s'il n'a fait aucun acte complet de chasse et n'a été que l'auxiliaire du véritable chasseur (même arrêt). M. Dalloz a critiqué ces décisions (Jur. gén., vo CHASSE, loc. cit.), comme refusant à tort d'appliquer la disposition des articles 59, 60 et 62, du Code pénal, à des individus qui s'étaient bien volontairement rendus les complices du délit de chasse, soit en fournissant à l'auteur les moyens de le commettre, soit en l'assistant dans les faits qui l'avaient consominé.

M. Ch. Berriat Saint-Prix (Législ. de la chasse, p. 237), tout en reconnaissant qu'on peut se rendre complice d'un délit de chasse par provocation ou assistance, est d'avis qu'on ne peut s'en rendre complice par recėlė, attendu que, le gibier pris, même en délit, appartenant au chasseur, il ne saurait y avoir délit de la part d'un tiers à s'en rendre dépositaire. Mais cette opinion paraît condamnée par les termes de l'article 62 du Code pénal, qui punit comme complice d'un crime ou d'un delit ceux qui sciemment auront recélé, en tout ou en partic, des choses enlevées, détournées ou obtenues à l'aide d'un crime ou d'un délit. Ces dernières expressions s'appliquent évidemment à notre hypothèse. Et il a été jugé, en effet, que celui qui achète du gibier qu'il sait avoir été tué en délit doit être poursuivi comme complice du délinquant (Crim. cass., 6 décembre 1839, précité; Amiens, 13 janvier 1853, également précité).

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