Page images
PDF
EPUB

- MM. Sigaudy,

Du 19 décembre 1871. C. de Montpellier (1re Ch.) fer prés.; Melcot, subst.; Lisbonne, Génie, av. ; Méjan et Arnal, avoués.

No 81.

TRIBUNAL DE PERPIGNAN.

7 juillet 1871.

Chasse, ouverture, clôture, suspension, décret du 13 septembre 1870, commission départementale.

Le décret du 13 septembre 1870, qui modifie la loi du 3 mai 1844, sur la chasse, ne fait que suspendre momentanément l'exercice de la chasse, c'est-à-dire pendant la durée de la guerre.

Le droit de clôturer l'exercice de la chasse appartient au préfet seul ; il faut donc considérer comme non avenu l'arrêté pris par trois citoyens qui, après le 4 septembre 1870, se sont constitués, de leur propre autorité, en commission départementale.

(Ministère public c. Henri Joffre.) — Jugement.

LE TRIBUNAL : Attendu qu'il est établi que deux gendarmes de Rivesaltes trouvèrent, le 18 juin 1871, Henri Joffre se livrant, sur le territoire de ladite commune, à l'exercice de la chasse; que celui-ci, sur leur demande, exhiba un permis de chasse en règle, et qu'un procès-verbal lui fut dressé, par la raison d'après les termes textuels dudit procès-verbal que la chasse était prohibée sur l'avis de M. le préfet, en date du 16 mai 1871; · Attendu qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 3 mai 1844, les préfets doivent déterminér, par des arrêtés publiés au moins dix jours à l'avance, l'époque de l'ouverture et celle de la clôture de la chasse dans chaque dépar tement; Attendu qu'en exécution de cet article, le préfet des PyrénéesOrientales, par un arrêté en date du 7 juillet 1870, approuvé le 30 du même mois par M. le ministre de l'intérieur, déclara la chasse ouverte à partir du 16 août 1870; que le département est et sera régi par cet arrêté jusqu'à ce qu'un autre arrêté en la forme obligée ou un texte formel de la loi aura changé la situation; - Attendu que, même en admettant que le décret du gouvernement de la défense nationale, daté du 13 septembre 1870, ait pu modifier la loi du 3 mai, il faut reconnaitre qu'il n'est plus applicable, puisqu'il avait un caractère essentiellement provisoire, et que le considérant qui le précède indique qu'il n'a eu d'autre objet que de suspendre l'exercice de la chasse momentanément. c'est-à-dire pendant la durée de la guerre; que le ministere public l'a lui-même interprété ainsi, en s'abstenant à la fois de le viser dans le libellé de la citation, et de requérir à l'audience la peine exceptionnelle qu'il édicte, laquelle devrait être nécessairement appliquée, si le décret dont s'agit était encore en vigueur, puisque ses articles i et 2 sont liés par la plus intimne corrélation; Attendu que le 10 septembre 1870 fut publié et affiché une proclamation: Aux habitants des Pyrénées-Orientales, signée par trois citoyens s'étant d'eux-mêmes constitués en commission départementale; Attendu que, par arrêté du lendemain 11 septembre, cette commission, en vue « de réserver toutes les munitions pour chasser l'ennemi de la France », déclara la chasse fermée dans les Pyrénées-Orientales, à partir du 21 septembre même année, et donna publicité à cette prohibition par son insertion au Recueil des actes administratifs, et par l'affichage sur les points habituels; Attendu que le préfet ayant seul le droit d'ouvrir et de clore la chasse, sans même pouvoir le déléguer, il serait arbitraire d'en considérer comme investis ceux qui se le sont arrogé de leur propre autorité; qu'en entrant dans cette voie, il faudrait admettre qu'un autre arrêté, pris en sens inverse, par trois autres citoyens, aurait pu mettre à néant le permis

[ocr errors]
[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small]

Chasse, bêtes fauves, animaux nuisibles, pigeons ramiers,

Le droit du propriétaire ou fermier de détruire, mêmes avec armes à feu, les bêtes fauves qui portent dommage à ses propriétés, ne s'applique pas seulement aux bêtes fauves proprement dites, mais à tous animaux sauvages qui endommagent ses récoltes, et notamment aux pigeons ramiers qui, dans les temps de neige, attaquent les tiges des colza (L. 3 mai 1814, art. 9) (1).

[ocr errors]

(Carlier.) -
- ARRÊT.

LA COUR: Attendu, en fait, qu'il a éte constaté par l'instruction qu'au moment où le prévenu a été mis en contravention, il ne parcourait pas la campagne, en quête du gibier, mais qu'il se tenait immobile, dans une hutte en paille, construite ostensiblement sur son champ, pour repousser et détruire avec une arme à feu les pigeons ramiers qui venaient ravager sa récolte de colza; Attendu qu'il a été constaté, en outre, par l'instruction, et qu'il est d'ailleurs notoire, qu'effectivement les pigeons ramiers nuisent considérablement aux plantes de colza, dont ils cassent les tiges à l'époque surtout où la terre est couverte de neige; qu'il est d'usage à Tubize et dans les communes voisines de prévenir leurs dégâts, en recourant an mode employé par le prévenu; et qu'afin qu'on ne puisse suspecter les intentions des cultivateurs, les bourgmestres de ces localités leur délivrent ordinairement des permissions spéciales à cet effet; Attendu que le prévenu avait obtenu une permission semblable; Attendu, en droit, que l'article 3 de la loi (belge) du 26 février 1846 accorde au propriétaire et au fermier la faculté de repousser on de détrurie, en tout temps, même avec des armes à feu, les bêtes fauves qui porteraient dommage à leurs propriétés ; Attendu que la loi ne contient pas la définition des mots bétes fauves, et que les discussions qui ont eu lieu dans le sein des Chambres législatives n'indiquent pas d'une manière précise, quels sont les animaux que l'on doit ranger dans cette catégorie ; Attendu que, dans l'esprit de la loi, il faut entendre par bétes fauves tous les animaux sauvages qui détruisent les fruits de la terre, et que c'est dans ce sens que M. le ministre de l'intérieur a interprété ces mots, dans une dépêche qu'il adressait le 28 octobre 1853 à M. le gouverneur de Brabant, et dans laquelle il émet l'opinion formelle qu'une autorisation n'est pas nécessaire pour tuer les pigeons ramiers qui dévastent les récoltes; Attendu que, dans ces circonstances, on ne peut considérer comme un fait de chasse le fait posé par le prévenu; que tout au moins la bonne foi du prévenu enlève à ce fait tout caractère délictueux; - Par ces motifs, réformant, renvoie le prévenu acquitté sans frais.

[blocks in formation]
[ocr errors]

C. de Bruxelles (Ch. corr). MM. Lyon, pr.;

(1) Voir, en ce sens, les indications et observations présentées en note d'un arrêt de la Cour de cassation du 29 avril 1858 (D. P., 58, I, 299), et d'un arrêt de la Cour de Rouen du 7 août 1862 (D. P., 64, II, 133).

N° 83. COUR DE BORDEAUX. 27 novembre 1867

-

[ocr errors]

Fonctionnaire public, mise en jugement, commissaire de police, délit hors des fonctions, chasse.

Un commissaire de police ne peut être cité directement devant la Cour, en conformité de l'article 479 du Code d'instruction criminelle, à raison d'un délit qu'il a commis hors de l'exercice de ses fonctions et même hors du territoire où il est chargé de les exercer (C. instr. crim., 479, 483) (1).

(Rallion.)

Sur la plainte d'un propriétaire de la Commune de Ruch, M. le procureur général avait fait citer devant la première Chambre de la Cour, le sieur Rallion commissaire de police à Castillon, sous la prévention d'avoir chassé sans permis sur le territoire de la commune de Ruch.

ARRÊT.

LA COUR: Attendu, en fait, que le prévenu Rallion est commissaire de police à Castillon, où il est chargé de la surveillance des cantons de Castillon et de Pujols, arrondissement de Libourne; que le délit pour lequel il est poursuivi, tel qu'il est articulé dans la citation et constaté par les témoins, aurait été commis sur le territoire de la commune de Ruch, canton de Sauveterre, arrondissement de la Réole, par conséquent hors des limites du territoire dans lequel Rallion exerce ses fonctions, soit comme commissaire de police ordinaire, soit comme_officier du ministère public près le Tribunal de police de Castillon; Que Rallion ne pouvait donc être à aucun titre et n'était pas de fait dans l'exercice de ses fonctions au moment du délit à lui imputé ; qu'ainsi l'article 483 du Code d'instruction criminelle lui est absolument inapplicable; Attendu, d'autre part, que l'article 479, déterminatif de la compétence de la Cour impériale à l'égard des délits commis par des juges en dehors de leurs fonctions, et destiné à leur assurer, même en ce cas, les garanties d'une juridiction exceptionnelle, ne peut recevoir qu'une application bien plus limitée que celle de l'article 483; Que, pour se rendre compte de cette différence très rationnelle et en harmonie avec celle des raisons qui ont dicté ces deux dispositions, il suffit de comparer les textes de l'une et de l'autre; Attendu que l'article 483, quand il s'agit de délits commis dans l'exercice des fonctions, assure expressément les mêmes garanties à divers ordres de magistrats, qui ne peuvent aucunement, en cas de delits commis hors de leurs fonctions, réclamer le benéfice de l'article 479; - Qu'il en est ainsi pour les juges de simple police qui ne cumulent pas avec cette qualité celle de juges de paix, pour les juges des Tribunaux de commerce et pour les officiers de police judiciaire, lesquels, mentionnés audit article 483, ne le sont pas dans l'article 479; Que Rallion ne peut donc être poursuivi devant la Cour comme commissaire de police, officier de police judiciaire; Qu'il ne peut pas l'être davantage comme officier du ministère public près le juge de police du canton de Castillon; Attendu, en effet, que, si le juge de paix ainsi

[ocr errors]

(1) Conf. Paris, 15 janvier 1828 (rapp. dans Dalloz, vo MISE EN JUGEMENT, no 266; Morin, Répert. du droit criminel, vo FONCTIONNAIRE PUBLIC, no 11). Contrà Limoges, 6 juin 1851 (Dalloz, 53, II, 77).

La question est aussi controversee à l'égard des maires et adjoints.— Voir, dans le sens de l'arrêt, Limoges, 25 fevrier 1862 (Dalloz, 62, II, 1863). Grenoble, 4 décembre 1867 (Rev. jud., 68, 1, 193). Contrà Nancy, 20 avril 1857 (Dalloz, 62, II, 183); Cass., 3 avril 1862 (Dalioz, 62, I, 387).

dénommé dans l'article 479, est couvert par sa disposition, il le doit à cette qualité permanente chez lui et non pas à celle qui est momentanée et secondaire du juge de police; que, en tant que juge de paix, ce magistrat n'a point auprès de lui d'officier du ministère public, et n'en reçoit le concours que lorsque lui-même remplit les fonctions de juge de police; que, lors done qu'on voit l'article 479 exclure per omission les juges de police eux-mêmes lorsqu'ils ne sont pas en même temps juges de paix, il semble impossible d'adinettre que le législateur ait voulu en agir autrement à l'égard des officiers du ministère public exerçant près ces magistrals, encore bien que ceux-ci, lorsqu'ils sont juges de paix, doivent, à raison de cette autre qualité alors concomitante chez eux, être soumis à la juridiction exceptionnelle; que l'article 479 n'est donc textuellement applicable qu'aux officiers du ministère public près ces Tribunaux correctionnels de première instance; Attendu que cette conséquence est rendue plus évidente encore par la précaution que prend l'article 483 d'étendre son application à tous les officiers du ministère public exerçant soit près des Tribunaux, soit près des juges dont il vient de parler, tandis qu'au contraire l'article 479, après avoir compris dans son texte le juge de paix, juge isolé, près lequel il n'y a point de ministère public, et les membres des Tribunaux correctionnels de première instance, n'ajoute, comme soumis à la juridiction de la Cour, que les officiers chargés du ministère public près ces Tribunaux, ce qui exclut encore la pensée contradictoire d'accorder au ministère public près un juge de police la juridiction exceptionnelle refusée à celui-ci ; Qu'ainsi Tarticle 479 demeure inapplicable au délit poursuivi contre le prévenu Rallion; Par ces motifs, la Cour se déclare incompétente; renvoie le procureur général à se pourvoir devant les juges qui doivent en connaître.

Du 27 novembre 1867. C. de Bordeaux (1re Ch.) - MM. Raoul Duval, 1er prés.; Fabre de la Bénodière, av. gén.

N° 84.

TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE Mirecourt. 19 août 18741.

Un maire qui fait procéder à l'exploitation d'une coupe sans avoir au préalable obtenu le permis exigé par l'article 81 du Code forestier commet le délit d'exploitation abusive en faisant abattre un certain nombre d'arbres marqués pour réserves par l'administration forestière lors du martelage, aux termes de l'article 100 du même Code.

Il exciperait en vain de la nécessité où la commune se trouvait pour obtenir des fonds, afin de subvenir aux exigences de l'armée allemande qui occupait le pays.

(Fèvre.)

En 1870, pendant que le département des Vosges était occupé par l'armée allemande et administré par un préfet prussieu, le sieur Fèvre, maire de la commune de Gelvécourt et Adompt, crut pouvoir, malgré les avertissements de l'administration forestière: 1° Faire exploiter, sans l'obtention préalable du permis, la coupe ordinaire marquée pour l'exercice 1870; 2o Modifier le martelage de ladite coupe en griffant et faisant abattre sous sa direction des arbres mis en réserve; 3o Faire abattre également des réserves dans une coupe extraordinaire qui avait été délivrée pour le même exercice 1870 et exploitée régulièrement après la délivrance du permis, par un entrepreneur responsable. - Des procès-verbaux furent rédigés par les gardes du cantonnement de Dompaire au moment même où les delits furent commis, et des poursuites furent exercées tant contre les ouvriers que contre le maire qui avait, de sa personne, participé aux actes répréhensibles. — A

l'audience, il prit fait et cause pour les ouvriers auxquels il avait donné les ordres, et accepta toute la responsabilité. Des conclusions subsidiaires furent donc prises à l'effet de renvoyer des poursuites les ouvriers, et d'obtenir la condamnation du maire de la commune. Le jugement suivant fut rendu le 19 août 1871 par le Tribunal correctionnel de Mirecourt sur les conclusions conformes de l'administration et du ministère public.

JUGEMENT.

[ocr errors]

Attendu que des déclarations faites à l'audience par Fèvre, il résulte que Duvoy et autres n'ont exploité les coupes extraordinaires et ordinaires de la commune de Gelvécourt pour l'exercice 1870, que sur les ordres et les indications qu'il leur a donnés, alors qu'il était maire de ladite commune, prenant ainsi sous sa responsabilité personnelle les faits des autres prévenus qui n'étaient que ses ouvriers ou agents; Attendu qu'ensuite de cette déclaration et statuant sur les conclusions nouvelles prises par l'administration forestière, tous les procès-verbaux peuvent être joints et poursuivis contre Fèvre, seul prévenu restant en cause; Attendu qu'il n'y a pas lieu de requérir les amendes édictées par l'article 192 du Code forestier, ni des restitutions et amendes au profit de la commune de Gelvécourt, dont les droits ne peuvent être que réservés contre son ancien maire, dans le cas où celui-ci en aurait compromis les intérêts, soit en faisant exploiter abusivement les coupes, s'il a contrevenu aux délibérations du conseil municipal et aux ordres de l'autorité supérieure, soit en ne rendant pas compte des produits obtenus par l'abatage, ou en opérant mal l'aliénation; Mais attendu que Fèvre, en sa qualité de maire, a fait procéder à l'exploitation de la coupe ordinaire de l'exercice 1870 sans avoir demandé et dès lors obtenu le permis préalable exigé par l'article 81 du Code forestier; - Attendu que le même en sadite qualité a commis, pour l'une et l'autre des deux coupes dont il s'agit, le délit d'exploitation abusive de ces coupes en faisant abattre un certain nombre d'arbres marqués pour réserves par l'administration forestière lors du martelage, aux termes de l'article 100 du mème Code; - Attendu que le prévenu excipe en vain de la nécessité où la commune se trouvait pour obtenir des fonds, afin de subvenir aux exigences de l'armée allemande qui occupait le pays; que toute autorité française doit d'abord se conformer aux lois du pays; que le prévenu pouvait prendre conseil des agents forestiers qui ont continué leurs fonctions autant que faire se pouvait pendant l'invasion; que néanmoins, à cause des circonstances exceptionnelles du moment, il y a lieu d'appliquer le minimum des amendes encourues;

Par ces motifs, ouï M. l'inspecteur forestier en ses conclusions et en présence de M. le procureur de la République; Le Tribunal déclare Benjamin Fèvre convaincu du délit d'avoir ordonné l'exploitation d'une coupe communale sans permis préalable de l'administration forestière ainsi que du double délit d'exploitation de deux coupes communales contrairement aux ordres de la même administration, et lui faisant application des articles 81 et 100 du Code forestier lus à l'audience par le président, et qui s'énoncent ainsi..

Le condamne en 650 francs d'amende, fixe la durée de la contrainte par corps à quatre mois, réserve à la commune de Gelvécourt tous ses droits en dommages-intérêts, et condamne le même prévenu aux dépens liquidés à 66 fr. 05; renvoie tous les autres prévenus des poursuites dirigées contre

eux.

[ocr errors]

Du 19 août 1871. Trib. corr. de Mirecourt. MM. Laprévote, prés. ; Honoré, procureur de la République ; Delageneste, inspecteur des forêts; Dérise, av.

« PreviousContinue »