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Emendant, au fond: Dit que les premiers juges ont à tort déclaré le marquis de la Ferté-Meun civilement responsable du dommage cansé à Buisson par Lefebvre et par Richard; décharge ledit marquis de la Ferté Menn des condamnations prononcées contre lui de ce chef; Dit que le jugement, au résidu, sortira son plein et entier effet; - Condamne Buisson aux dépens de première instance et d'appel vis-à-vis du marquis de la Ferté-Meun; Condamne Lefebvre et Richard aux dépens d'appel vis-à-vis de Buisson; Ordonne la restitution de l'amende consignée par le marquis de la FertéMenn, etc.

Du 10 mai 1872. Cour de Paris (Ch. civ.). MM. Rohault de Fleury, prés.; Johanet el Cresson, av.

N° 95.- COUR DE NANCY. 1er août 1871.

Garde forestier, visite domiciliaire, magistrat, procès-verbal, nullitė. L'incompétence du magistrat qui a assisté un garde forestier lors d'une visite domiciliaire, n'a pas pour effet de vicier le procès-verbal rédigé par ce garde le droit de verbaliser étant inhérent à la qualité du garde, et ne découlant nullement de la présence du magistrat (C. for., 161) (1).

Ainsi, est valable et produit son effet un procès-verbal de perquisition domiciliaire rédigé par un garde forestier et constatant un délit, alors même que, lors de cette perquisition, il n'a été assisté (au lieu d'un des magistrats déterminés par l'article 161 du Code forestier); que par un simple agent de police, lequel d'ailleurs lui a été indiqué par le maire comme étant le commissaire de police lui-même (2).

(C... c. Admin. for.)

Dans un procès-verbal dressé le 17 décembre 1870, les sieurs Thomassin et Delange, gardes forestiers & Flavigny, disent: « Vers deux heures du soir, faisant notre tournée dans la forêt domaniale Rouzelot, commune de Flavigny, nous avons fait une visite domiciliaire à Saint-Nicolas, d'après les délits qui se commettaient dans ladite forêt, étant assistés de M. le commissaire, nous avons trouvé au domicile du sieur C... trois stères de bois vert essence chêne..., le tout coupé en délit et provenant de la forêt domaniale de Flavigny et exploité à la scie. »Sur la poursuite dirigée par l'administration forestière, le prévenu a soutenu, en fait, que l'officier qui avait assisté à la

(12) Il est constant, en principe, et divers arrêts ont jugé que l'assistance des magistrats, dans les cas prévus par la loi forestière, n'est qu'une simple mesure de police destinée à sauvegarder la sûreté individuelle et domiciliaire, et n'infine nullement sur les constatations que les gardes, en vertu du droit inhérent à leur qualité, ont le pouvoir de faire. Aussi la jurisprudence et la doctrine sontelles également d'accord pour admettre que le consentement des parties intéressées suffit pour couvrir l'irrégularité tirée de l'absence (et ce qui se dit de l'absence doit se dire également de l'incompétence) de tout officier public lors de la perquisition. En réalité, l'unique effet de la defense faite par la loi aux gardes forestiers de s'introduire dans le domicile d'un particulier sans l'assistance d'un magistrat, est de donner à ce particulier le droit de s'opposer à l'introduction des gardes non legalement assistés, et de rendre coupables d'abus d'autorité les gardes qui passeraient outre au mépris de cette opposition. Voir, sur ces divers points, Table gen., Devill. et Gilb., vo GARDE FORESTIER, n. 7et suiv.: Table décenn., eod. verb., no 1 et suiv. Rép. gén., Pal. et Suppl., FORÊTS, no 1967, 1982 et suiv.

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perquisition était, non pas le commissaire de police, comme l'exige impérieusement et absolument l'article 161 du Code forestier, mais un simple agent de police; que dès lors, en droit, la perquisition domiciliaire était nulle, ainsi que tout ce qui s'en était suivi.

ARRÊT.

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LA COUR: Sur le premier moyen d'appel, tiré de l'incompétence de l'agent en présence duquel s'est faite la visite: Attendu qu'il résulte tant des énonciations du procès-verbal que de la déposition faite par Delange sous la foi du serment, que ce garde et son collègue Thomassin, après avoir, le 17 décembre 1870, constaté dans la forêt domaniale confiée à leur surveillance des délits considérables et appris que les bois délictueux avaient été transportés à Saint-Nicolas, se sont rendus dans cette localité et ont d'abord fait des recherches dans plusieurs maisons avec l'assistance du maire de SaintNicolas, qu'ils avaient requis à cet effet; qu'invité par les gardes à les accompagner encore chez le sieur C***, où ils allaient faire une perquisition, ce fonctionnaire leur a déclaré que la fatigue ne lui permettait pas de continuer, et a envoyé, pour le remplacer, le sieur Henry, agent de police, qu'il a désigné aux gardes comme étant le commissaire de police lui-même; que Delange et Thomassin, qui ne connaissaient pas personnellement le commissaire de police de Saint-Nicolas, ont dû accepter cette substitution el se contenter de l'assistance du sieur Henry, convaincus qu'ils étaient qu'ils procédaient avec le concours de l'un des fonctionnaires compétents énumérés par l'article 161 du Code forestier; Attendu qu'il est de notoriété que le juge de paix de Saint-Nicolas et son suppléant avaient cessé de remplir leurs fonctions au mois de décembre 1870; que les gardes ne pouvaient donc que s'adresser, comme ils l'ont fait, au maire de Saint-Nicolas; puis procéder, aux lieu et place et sur le refus de celui-ci de les accompaguer au domicile de C***, avec l'assistance de l'agent qu'ils ont dû croire, sur l'affirmation du maire, et qu'ils ont, en effet, considéré comme investi des fonctions de commissaire de police, puisque c'est la qualité qu'ils lui ont donnée dans leur procès-verbal; que les gardes se sont donc conformés, autant qu'il dépendait d'eux de le faire, aux dispositions de l'article 161 precité: ce qui suffit pour imprimer à leur opération le caractère de la légalité: Attendu qu'il faudrait, pour déclarer irrégulière la perquisition faite par les gardes Thomassin et Delange, dans les conditions que la Cour vient de rappeler, ne tenir aucun compte des circonstances exceptionnelles dans lesquelles se trouvait alors le pays, de l'impossibilité absolue où l'on était de recourir à l'autorité judiciaire, et de l'erreur, tout à fait indépendante de leur volonté, sous l'empire de laquelle les gardes ont été placés; et qu'une telle décision serait aussi dangereuse pour l'ordre public que contraire aux saines notions du droit;-Attendu, d'ailleurs, que l'incompétence du fonctionnaire assistant les gardes ne pourrait, alors même qu'on ferait abstraction de la force majeure, entraîner la nullité de la perquisition et encore moins celle du procès-verbal; qu'en effet, le droit de verbaliser est inhérent à la qualité des gardes, et ne découle nullement de la présence de l'officier municipal, dont l'assistance n'est requise que pour donner une protection à l'habitant objet de la perquisition, sans être une condition de la régularité du procès-verbal et sans que la loi attache à son omission la peine de la nullité; - Qu'il convient donc de rejeter, comme l'ont fait à bon droit les premiers juges, l'exception de nullité opposée par C***, à la perquisition et au procès-verbal du 17 décembre 1870; Attendu que la solution donnée à la première question soulevée par l'appelant dispense la Cour de se prononcer sur la seconde, celle de savoir quels peuvent être la valeur et les effets juridiques du consentement qu'auraient pu donner à la

LÉGISLATION ET JURISPRUDEnce.

perquisition du 17 décembre la servante du prévenn et la dame C*** ellemême, en l'absence de son mari;

Du 1er août 1871.

Confirme, etc.

Cour de Nancy (Ch. corr.).MM. Briard, prés.; Liffot de Buffévant, 1er av. gén.; Moreau, insp. for.; Lallement, av.

N° 96. TRIBUNAL DE DOUAI.

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Chasse, bail, jouissance (privation de), force majeure, compensation. Le fermier d'un droit de chasse, qui n'a pu user de son droit par suite du décret du 10 septembre 1870, prohibant la chasse sur toute l'étendue du territoire, est fondé à réclamer une diminution proportionnelle de loyer (C. civ., 1722) (1).

En est-il ainsi alors même que ce fermier se serait chargé des cas fortuits : une telle clause dans un bail devant toujours être présumée n'avoir prévu que les cas fortuits altérant les fruits de la chose louée et non ceux affectant la substance même de cette chose (2).

Le système de compensation établi par l'article 1769 du Code civil entre les bonnes et mauvaises années de location, est inapplicable aux baux de chasse (3).

(De Pillon de Saint-Philbert c. hospices de Douai.)

- JUGEMENT.

Considérant que, par baux passés aux enchères publiLE TRIBUNAL : ques devant Me Gambart, notaire à Douai, le 3 juillet 1867, enregistrés, le demandeur s'est rendu adjudicataire, pour neuf années, à partir de la fermeture de la campagne 1867-1868, et moyennant un fermage annuel de 1 248 francs, de la location du droit de chasse, appartenant aux hospices de Douai, sur diverses parties de terres, désignées auxdits baux; que, le 13 septembre 1870, un décret du Gouvernement de la défense nationale, sanctionné par une pénalité spéciale, a suspendu, sur toute l'étendue de la France, la faculté de chasser; que la suspension prononcée par ce décret s'est prolongée pendant toute la campagne 1870-1871; que, durant cette campagne entière, le demandeur a donc été privé, d'une manière absolue et Considérant que par une force majeure irrésistible, de la jouissance du droit qui, dans les baux susmentionnés, constituait à son égard la chose louée; ledit demandeur est fondé à réclamer, en raison de cette privation de jouissance, une diminution proportionnelle de ses loyers; qu'en effet, les baux de chasse sont, comme tous autres baux de droit commun, régis par les prin

(1) On objectait que le droit de chasse était un droit purement aléatoire soumis au bon plaisir de l'administration. Le jugement répond avec raison que le droit de chasse est un attribut de la propriéte, que l'autorité peut réglementer, mais Voir, au surplus, sur l'application de l'article 1722 au bail non supprimer. d'un droit incorporel, M. Troplong, Louage, t. I, no 236 et suiv.

(2) Voir couf., Turin, 16 mars 1811; Metz, 11 mars 1812 (P. chr.); MM. Duranton, t. XVII, no 213; Duverger, Louage, t. II, no 201; Marcadé, art. 1773, no 1; Troplong, Louage, t. II, no 759; Masse et Verger, sur Zachariæ, i. IV, § 706, note 13, in fine, p. 396.

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(3) M. Troplong, Louage, t. I, no 237, paraît cependant appliquer le système de compensation de l'article 1769 aux baux de droits incorporels, notamment au bail d'un droit d'octroi. « Si le fermier d'un octroi, dit-il, ne pouvait, par suite d'une sédition, percevoir les droits pendant un certain temps, et qu'il démontråt que, tout calcul fait entre les bonnes et les mauvaises années, il éprouve une perte no table, il sera écouté dans sa demande en diminution de prix. »

cipes généraux édictés en matière de louage; que, parmi ces principes, l'article 1722 du Code civil, interprété suivant son esprit, permet au preneur de demander une diminution du prix du bait s'il a été, par force majeure, dépossédé, en tout on en partie, de la jouissance de la chose lonée; — Que l'administration défenderesse oppose en vain au demandeur l'article 5 (1) de ses contrats; que cet article, d'ailleurs assez obscur, est, même entendu dans son sens le plus large, inapplicable en l'espèce; qu'il est, en effet, de principe, que quelque générale que soit la clause d'un bail à ferme qui charge le preneur des cas fortuits, cette clause doit être toujours présumée n'avoir prévu que ceux de ces faits fortuits qui altéreraient seulement les fruits de la chose louée; qu'on ne peut en étendre les effets, à moins d'une stipulation expresse, aux événements de force majeure, qui, affectant la substance même de cette chose, viendraient, pour tout ou partie, à la soustraire à la jouissance du preneur; que l'application de ce principe à la matière de chasse conduit à décider que le locataire d'un droit de chasse, bien qu'ayant renoncé, en termes généraux, à réclamer jamais une réduction de ses fermages, sans autrement spécifier les effets de sa renonciation, doit être présumé n'avoir voulu élendre cette renonciation qu'aux seuls cas fortuits qui pourraient le priver des fruits de la chose louée, c'est-à-dire qui, dans une mesure plus ou moins grande, pourraient gêner ou amoindrir l'exercice de son droit de chasse, à l'exclusion de ceux qui, aflectant ce droit lui-même, viendraient pour un temps plus ou moins long à l'anéantir entre ses mains; - Et que le décret du 13 septembre 1870 n'est pas venu seulement apporter une gêne à l'exercice du droit de chasse loué au demandeur; qu'il a momentanément suspendu ou, en d'autres termes, supprimé ce droit lui-même; qu'il constitue donc un événement qui ne peut être classé parmi ceux qu'anrait prévus et que pourrait régir l'article 5 invoqué; Que l'on objecte à tort que le droit de chasse est un droit purement aléatoire, soumis, quant à son exercice, à l'autorisation de l'autorité toute-puissante pour le perimettre ou l'interdire; que tel n'est pas le caractère du droit dont il s'agit; qu'il n'est pas une concession gracieuse du prince; qu'il est la propriété exclusive de celui qui possède le sol, dont il n'est qu'un accessoire et pour ainsi dire une fraction; que si, néanmoins, la loi du 3 mai 1844 a attribué aux préfets le pouvoir de réglementer l'exercice de ce droit, cette attribution n'a eu lieu que dans le but unique, nettement précisé par le rapporteur de ladite loi, de protéger les récoltes et de favoriser la reproduction du gibier; que ce pouvoir, ainsi conféré à l'autorité administrative, n'a donc rien d'illimité et ne permet pas à celle-ci de suspendre le droit de chasse pour des causes autres que celles cidessus spécilices;

Considérant enfin que, sans plus de fondement, l'administration défenderesse se prévaut comme d'une fin de non-recevoir de l'article 1769 du Code civil; que cet article n'est applicable qu'aux baux à ferme et ne dispose que pour un cas tout particulier, celui de destruction de récoltes; que la nature éminemment spéciale des baux de chasse s'oppose à ce que le gibier soit considéré comme constituant pour le chasseur une récolte; que la classe, en effet, et surtout la chasse en plaine, comme celle dont s'agit en l'espèce, a bien moins pour but Tappropriation du gibier au point de vue de sa valeur vénale, que l'exercice d'un plaisir, en général plus onéreux que. productif; que la privation de ce plaisir pendant un temps plus ou moins long est toujours pour le chasseur une perte irreparable; qu'il n'est point possible de lui appliquer le système des compensations réglé par ledit article 1769; - Par ces motifs, etc.

(1) Cet article 5 est ainsi conçu : « Les adjudicataires ne pourront prétendre à aucune indemnité ou diminution de fermage pour quelque cause que ce soit, même pour inexactitude dans la désignation cadastralė. »

MM. Lemaire, prés.;

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Du 20 décembre 1871. Trib. civ. de Douai. Pelletreau, proc. de la Républ.; Coquelin et Talon, av.

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Les Tribunaux correctionnels ne sont incompétents pour statuer sur un délit commis par un maire, officier de police judiciaire, que si ce délit a été commis par lui dans l'exercice de ses fonctions.

Un maire est dans l'exercice de ses fonctions à raison de la nature du fait, mais non à raison du lieu dans lequel ce fait s'accomplit.

Spécialement, un maire qui chasse en temps prohibé et sans permis de chasse sur le territoire de sa commune ne peut être considéré comme élant dans l'exercice de ses fonctions au moment où il commet le délit.

(Bouvry.)

Le sieur Bouvry, maire de la commune de Marfaux (Marhe), y deineurant, a été traduit devant le Tribunal de police correctionnelle de Reims, comme prévenu d'avoir, le 15 novembre 1871, chassé sans permis de chasse et en temps prohibé sur le territoire de la commune de Marfaux. Le 7 février 1872 le Tribunal a rendu le jugement suivant :

LE TRIBUNAL: - Attendu qu'aux termes de l'article 483 du Code d'instruction criminelle, les officiers de police judiciaire sont justiciables de la Cour d'appel pour les délits qu'ils commettent dans l'exercice de leurs fonctions; - Attendu que les articles 8, 9 et 11 du même Code confèrent aux maires la qualité d'officiers de police judiciaire ; Attendu que la loi des 3 et 4 mai 1844, dans ses articles 22, 24 et 25, en leur confirmant cette qualité, donne de la façon la plus expresse aux maires pleine compétence en matière de chasse pour rechercher et constater les délits commis dans la circonscription de leur commune; Attendu qu'ayant ainsi pouvoir pour rechercher et constater à chaque instant toute infraction à la loi sur la chasse, un maire doit être considéré à cet égard comme étant constamment dans l'exercice de ses fonctions lorsqu'il se trouve dans les limites de son territoire; Attendu que le sieur Bonvry, maire de Marfanx, est cité à la requête du ministère public devant le Tribunal pour avoir, le 15 novembre, audit Marfanx, chassé sans permis et en temps prohibé; Attendu qu'au moment où il commettait le délit relevé contre lui, ledit sicur Bouvry était dans l'exercice de ses fonctions;

Par ces motifs, le Tribunal se déclare incompétent.

M. le procureur de la République a relevé appel de ce jugement.
La Cour a rendu l'arrêt suivant:

ARRÊT.

LA COUR: En ce qui touche le moyen d'incompétence;

Considérant qu'aux termes de l'article 483 du Code d'instruction criminelle, les Tribunaux correctionnels ne sont incompétents pour statuer sur un délit commis par un maire, officier de police judiciaire, que si ce délit a été commis par lui dans l'exercice de ses fonctions; - Considérant que, dans l'espèce, Bouvry aurait été trouvé chassant en temps prohibé et sans permis de chasse, et que l'on ne peut sérieusement prétendre qu'il était dans l'exercice de ses fonctions en commettant ce délit; Considérant que peu im

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