Page images
PDF
EPUB

porte de rechercher si ce délit aurait été commis sur le territoire de sa commune; qu'un maire est dans l'exercice de ses fonctions à raison de la nature du fait, mais non à raison du lieu dans lequel ce fait s'accomplit; Considérant, en conséquence, que le Tribunal correctionnel de Reims avait été compétemment saisi et que c'est à tort qu'il s'est déclaré incompétent; Considérant qu'aux termes de l'article 215 du Code d'instruction criminelle il y a lieu, par voie d'évocation, de statuer au fond;

Au fond: Considérant que de l'instruction et des débats ne résulte pas la preuve que Bouvry ait commis le délit de chasse qui lui est imputé; Par ces motifs; Infirme le jugement dont est appel, en ce que les premiers juges se sont déclarés incompétents; Evoquant et statuant au fond;

[ocr errors]

Renvoie Bouvry des fins de la poursuite, sans dépens.
Du 27 avril 1872. Cour de Paris (Ch. corr.). -

MM. Bertrand, prés.;

Guérin de Vaux, comm. rapp.; Merveilleux-Duvignaux, av. gén.; Guerrier, av.

No 98.

[ocr errors]

COUR DE CASSATION (Ch. crim.). 2 décembre 1871.

1o Procès-verbal, preuve contraire, force majeure, notoriété publique ; 2o cassation, force majeure, appréciation; 3°, 40 et 5° excuse, force majeure, guerre, ennemi, réquisition, coupe de bois ; forêt, force majeure, guerre, ennemi, réquisition.

Le juge de police peut, sans recourir à une enquête, admettre comme excuse la force majeure résultant de faits (des événements de guerre) établis par la notoriété publique, alors que ces faits ne sont pas en contradiction avec ceux constatés par le procès-verbal (C. instr. cr., 154; C. for., 176) (1).

La Cour de cassation est compétente pour décider si les faits souverainement constatés par le juge de répression réunissent les caractères de la force majeure dans le sens des articles 64 et 65 du Code pénal (2).

L'action d'avoir coupé et enlevé du bois dans une forêt d'autrui est justifiée par la force majeure, et, par suite, dépourvue de caractère délictueux, lorsque son auteur a agi pour obéir aux réquisitions de troupes ennemies, et dans la crainte du pillage et de tous les dangers qui pouvaient être la conséquence directe d'un refus (C. pén., 64 et 65) (3).

Il en est ainsi alors même que l'enlèvement du bois aurait continué à un moment où la présence des ennemis avait cessé dans le pays, si de nouvelles troupes étaient annoncées ou attendues (4).

Et il n'importe que le juge de répression ait réservé au propriétaire

(1) Mais lorsque les faits constitutifs de la force majeure alléguée sont en opposition avec ceux constatés par le procès-verbal, le juge ne peut en tenir compte qu'autant qu'ils sont établis par un des moyens de preuve que la loi autorise. Voir Dalloz, Table des vingt-deux années, vis EXCUSE, no 32, et PROCÈS-VERBAL, no 46 et suiv. Voir aussi Jur. gen., vo FORCE MAJEURE, no 46. (2) Conf. Crim rej., 28 février 1861 (D. P., 61, I. 141).

(3.4 et 5) L'excuse tirée de la force majeure est admissible en matière de délits forestiers comme en toute matière criminelle, mais à la condition que cette excuse s'appuie sur des faits établis avec précision et non contraires aux énonciations du procès-verbal.— Voir Dalloz, Table des vingt-deux années, vo FORÈTS, n° 57.

de la forêt l'action en réparation civile pour le cas où un dommage lui aurait été causé, cette décision étant sans influence sur l'appréciation de circonstances qui ont accompagné le délit prétendu (5).

[merged small][ocr errors][merged small]

LA COUR: Sur le premier moyen, pris de la violation prétendue des articles 154 du Code d'instruction criminelle et 176 et suivant du Code forestier : Attendu que le pourvoi soutient, à cet égard, que l'arrêt attaqué, pour prononcer la relaxe, fondée sur l'excuse de force majeure, a pris pour unique fondement de la force majeure, qu'il admettait les allégations du prévenu; Mais attendu que, loin de se baser exclusivement sur ces allégations, l'arrêt attaqué déclare que les faits allégués comme constitutifs de la force majeure sont établis; qu'en effet il dit expressément « que les craintes alléguées par les divers inculpés étaient sérieuses; que Selongey et les communes avoisinantes avaient été envahies le 11 décembre 1870 et les jours suivants par les troupes allemandes, dont le passage avait été marqué par de nombreuses réquisitions; qu'à la date où le procès-verbal a été rédigé, elles. avaient, il est vrai, quitté Selongey; mais que tous les jours on en annonçait et on en attendait d'autres qu'on dirigeait sur cette localité »; - Attendu que ces fails n'étaient nullement en contradiction avec ceux que constatait le procès-verbal et qu'avouait l'inculpé, mais qu'ils étaient de nature à en détruire les effets; qu'ils étaient d'une incontestable notoriété publique; que c'étaient des faits de guerre et des conséquences patentes de l'invasion du territoire français; qu'ainsi, par eux-mêmes' ils pouvaient être considérés comme existants, en dehors de toute preuve résultante de l'enquête ; — Attendu qu'il suit de là qu'il n'y a pas eu violation, dans l'arrêt attaqué, des règles prescrites par les articles 154 du Code d'instruction criminelle et 176 du Code forestier;

[ocr errors]

Sur le deuxième moyen, pris de la violation des articles 64 et 65 du Code pénal: Attendu que le pourvoi conteste le caractère légal de la force majeure, attribué par l'arrêt attaqué aux circonstances souverainement constatées par le juge du fait; que ce point rentre dans l'appréciation du droit, qui appartient à la Cour de cassation; Attendu que l'arrêt attaqué déclare que l'inculpé était placé sous l'influence des événements de la guerre, en face de la perspective à peu près certaine d'un nouvel envahissement de la contrée par de nombreux ennemis, à la suite d'une première et toute récente invasion signalée par des réquisitions multipliées; qu'il avait la crainte sérieuse du pillage et de tous les dangers qui pouvaient en être la conséquence directe, dans le cas d'une résistance dictée par le patriotisme; qu'en presence de telles déclarations l'arrêt attaqué a pu, sans commettre aucune violation des articles 64 et 65 du Code pénal, considérer le défendeur Bratigny comme ayant été contraint par une force à laquelle il n'a pu résister, et décider qu'il n'y avait pas de délit dans les faits incriminés; Attendu que la réserve faite par l'arrêt au profit de Mandat de Graucey de l'action en réparations civiles, pour le cas où un dommage lui aurait été causé du chef de l'inculpé, est sans influence sur le caractère légal des circonstances qui ont accompagné le délit prétendu et qui constituent le délit de force majeure ; REJETTE.

[ocr errors]

Du 2 decembre 1871. Ch. crim. - MM. Legagneur, pr.; Barbier, rapp.; Bédarrides, av. gén., c. conf.; Mazeau et Duboy, av.

[merged small][merged small][ocr errors]

Délit forestier, cheptel, responsabilité,

Celui qui a pris des bestiaux à cheptel doit être déclaré responsable, à l'exclusion du bailleur, du fait du gardien qui les a menés paitre en délit dans un bois (C. civ., 1385; C. forest., 199 et 202) (1).

Et le propriétaire du bois, fût-il même le bailleur à cheptel, est fondé à réclamer des dommages-intérêts pour la réparation des dégâts (C. civ., 1382 et suiv.).

(De S*** c. Caillat.) - ARRÊT.

--

LA COUR: - Attendu qu'il est reconnu par les parties que le sieur de S*** a donné, à titre de cheptel à moitié, soumis aux règles du Code Napoléon, à Sylvain Caillat, le troupeau qui a été trouvé en délit; - Attendu que, par suite, le propriétaire n'était plus chargé de l'administration du troupeau, ni du choix du berger préposé à sa garde, administration et choix qui étaient laissés à la direction du preneur; Que, pendant toute la durée du cheptel, le droit du bailleur qui n'a ni la disposition, ni la possession des animaux, se trouve suspendu et remplacé par le droit de reprendre, à la fin du cheptel, les bestiaux dont il s'est dessaisi; d'où il résulte que le fermier doit être déclaré responsable du délit commis par son patre; Attendu qu'il importe peu que de S*** soit en même temps le propriétaire poursuivant la répression du délit et le bailleur à cheptel; Que son droit comme propriétaire du bois est aussi complet que celui appartenant à des étrangers pour faire respecter sa propriété, Attendu que le procès-verbal dressé par le garde particulier, auquel est due foi jusqu'a inscription de faux, constate que, le 21 juin dernier, vingt vaches, composant le troupeau de Caillat, pacageaient dans le bois de S***; Que ce fait constitue le délit prévu et puni par les articles 199 et 202 du Code forestier; - - Par ces motifs, etc. Du 22 août 1870. C, Orléans (Ch. corr.), MM, Martin-Saint-Ange, prés.; Johanet et Desplanches, av.

N° 100.

COUR DE BOURGES (Ch. corr.).— 24 mars 1870, Chasse, louveterie, battues : 1o et 2° autorisation, sangliers, dėlai, omission, 3o territoire, limitation, animal blessé, poursuites.

Le préfet n'est pas tenu, dans l'arrêté qui prescrit un certain nombre de battues pour la destruction des animaux nuisibles, et spécialement des sangliers (2), de fixer un délai pour l'exécution des battues, à peine d'illégalité (arrêté du gouv. 19 pluv. an V, art, 3). (3).

Par suite, l'autorisation accordée le 6 août serait à tort considérée comme périmée le 12 décembre, alors surtout qu'il en a été fait usage une première fois sans résultat (4).

(1) Voir conf., Cass., 14 février 1862 (Journal du palais, 1862, 908; Sirey, 1862, 1, 999), et la note.

(2) On a contesté que des battues puissent être prescrites pour la destruction des sangliers, a cause du caractère de gibier qui appartient à ces animaux. Mais il a été décidé que lorsque, à raison de leur multiplication, les sangliers deviennent nuisibles et dangereux, leur destruction peut être ordonnée comme celle des loups et autres animaux nuisibles. Crim. rej. 21 janv. 1864 (Dalloz, Rec. pér., 64, I, 321), et la note.

(3 et 4) Les chasses ou battues ne peuvent faire l'objet d'autorisations perma

LÉGISLATION ET JURISPRUDence.

Le lieutenant de louveterie, autorisé à faire une battue sur le territoire de communes spécialement indiquées dans l'arrêté du préfet, n'excède pas cette autorisation, lorsque, après avoir organisé la battue sur le territoire désigné, il poursuit sur le territoire de communes voisines l'animal qu'il a fait lever et qui a été blessé, si d'ailleurs il ne sort pas de la circonscription territoriale qui lui est assignée par son acte de nomination; ici ne s'applique pas l'article 11 de la loi du 3 mai 1844, quin'a pas modifié les règlements sur la louveterie (1).

(De Pomereu c. Millot.)

-

ARRÊT.

[ocr errors]

LA COUR : Attendu que, par son arrêté du 6 août 1869, le préfet de la Attendu que, Nièvre a prescrit que cinq batines auraient lieu pour la destruction des sangliers dans les communes de Montembert et de la Nocle; en exécution de cet arrêté, une première battue a été effectuée sans résultat, et que le lieutenant de louvelerie Millot en a organisé une seconde le Que, dans cette nouvelle battue, deux sangliers ont 12 décembre dernier; été mis à mort; qu'un troisième, déjà blessé, s'est réfugié dans un bois situé sur le territoire de la commune de Fours et appartenant au marquis de Pomeren; que le lieutenant de louveterie et son piqueur ont poursuivi l'animal Attendu que, si blessé jusque dans l'intérieur de ce bois ; qu'il s'agit d'apprécier ce fait; Sur la prétendue péremption de l'arrêté préfectoral: l'arrêté du 6 août ne mentionne pas le délai dans lequel devaient avoir lieu les battues, il ne s'ensuit pas qu'il fût tombé en péremption le 12 décembre; Attendu qu'aucune disposition législative ou réglementaire relative à la Que, sans louveterie n'impose à l'administration l'obligation d'impartir un délai pour l'exécution des battues à peine d'illégalité desdites battues; prétendre interpréter l'arrêté, il y a lieu d'admettre que, à défaut de lixation d'un délai, l'administration départementale se repose sur l'officier de louveterie du soin d'apprécier l'opportunité des battues suivant les besoins de l'agriculture, les demandes des intéressés et les convenances des habitants; Que l'arrêté du 6 août n'ayant pas été rapporté, n'avait par conséquent pas cessé d'exister au 12 décembre;

[ocr errors]

En ce qui touche la poursuite, par l'officier de louveterie et son domestique,

pentes (circ. min. int. 1er mars 1865, Dalloz, Rec. pér., 65, III, 45); un préfet ne peut donc pas, par un arrêté de principe, autoriser le lieutenant de louveterie å detruire les loups et autres animaux nuisibles en tout temps et en tout lieu, sans être astreint a recourir chaque fois à l'autorisation administrative (Lettre min. int. 13 déc. 1860, Dalioz, Rec. pér., 61, III, 62). Toutefois, il n'est pas necessaire que chaque battue soit l'objet d'une permission distincte; et d'après un arrêt de la Cour de cassation, l'autorisation du prefet a un caractère suffisamment special lorsqu'elle permet au heutenant de louveterie de faire, dans un delai determiné, un ceriain nombre de battues dans les forêts de l'arrondissement La presente décision fait un pas de (arrêt de rejet précité, du 21 janv. 1864). · plus dans la même voie; elle admet la legalité d'une autorisation se boruant à lixer le nombre des battues sans prescrire de delai. Le doute nous paraît possible sur ce point, car une permission dont un lieutenant de louveterie peut indėliniment tarder à faire usage, dégénère en une permission permanente, et peut ainsi servir, contrairement a l'esprit des règlements sur la matière, à donner un caractère régulier à une battue qui serait entreprise à l'époque de la reproduction, c'est-à-dire à un moment de l'année où une telle mesure ne peut qu'etre tres-inopportune et fort dommageable au gibier proprement dit, V, Dallóz, Jur. gen., yo CHASSE, nos 12 et 13.

(1) Juge même, en ce qui concerne les habitants prenant part à une battue, V. Nancy, 11 mai que le fait par eux d'être entres dans une forêt située hors du département ne con-titue pas un delit de chasse, s'ils ont agi de bonné foi. 1850 (Dalloz, Rec. per., 52, 11, 208).

d'un sanglier dans le bois du marquis de Pomereu, situé sur le territoire de Fours: Attendu que les termes de l'arrêté ne sauraient, d'après la nature des choses, être entendus dans un sens restrictif que relativement aux lieux où devaient s'organiser les chasses; - Attendu que l'institution de la louveterie se propose la destruction des animaux nuisibles; qu'elle deviendrait sans objet si un animal levé ne pouvait être poursuivi sur un territoire voisin, quoique compris dans les limites de la circonscription du louvetier; Qu'il est plus rationnel d'admettre avec le premier juge qu'un animal de cette espèce peut, surtout quand il est blessé, être poursuivi jusqu'à ce qu'il soit mis à mort, sur un terrain situé en dehors du lieu où il a été lancé, même en dehors d'une commune dénommée à l'arrêté préfectoral, quand, pour accomplir sa mission, l'officier de louvete rie ne sort pas de la circonscription territoriale qui lui est assignée par son acte de nomination; Attendu que la législation sur la police de la chasse n'est pas applicable à l'espèce, et que lesprincipes, empruntés notamment à l'article 11 de la loi du 3 mai 1844, ne sauraient regir les droits et les devoirs des officiers de louveterie, qui soût réglés par des dispositions spéciales, lesquelles ont été respectées ; Attendu, en effet, que l'arrêté du Directoire exécutif du 19 pluviôse an Va pourvu au moyen de prévenir les chasses voluptuaires exécutées sous les apparences d'un intérêt public; qu'à cette fin, il a exigé le concours de l'administration forestière pour l'organisation et l'exécution des battues ordonnées par l'administration; Attendu que toutes les formalités légales d'usage ont été accomplies au cas particulier, et que dès lors les prévenus ne sauraient être considérés comme coupables d'un délit de chasse sur le terrain d'autrui ; Par ces motifs, confirme le jugement, etc.

[ocr errors]

Du 24 mars 1870. C. de Bourges (Ch. corr.).

[ocr errors]
[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]
[ocr errors]
[ocr errors]

1o, 2o et 3o Propriété, titre, non-usage, possession intentionnelle, possession contraire, preuve. Usage forestier: 4° et 5o Prescription, usage, preuve; 6o pacage, menu bétail, prohibition, indemnité, prescription.

Le droit de propriété, une fois acquis et établi par un titre, n'est pas susceptible de se perdre par le non-usage (C. civ., 544) (1);

Le propriétaire, quelle que soit l'ancienneté de son titre, conserve, par l'intention seule, sa possession primitive (2);

C'est à celui qui se prévaut d'une possession contraire à ce titre à prouver que cette possession réunit les conditions et la durée nécessaires pour entrainer l'acquisition de la propriété (C. civ., 1315) (3);

Les droits d'usage forestier se prescrivent par l'inaction de l'usager pendant trente ans (C. civ., 706) (4);

C'est à l'usager à prouver qu'il a exercé son droit dans les conditions imposées par le titre de concession ou dans des conditions équivalentes (C. civ., 1315) (5);

L'indemnité accordée aux usagers que l'article 78 du Code forestier

(1) V. des applications de ce principe, Req. 25 avril 1855 (Dalloz, Rec. pèr., 55, I, 160), et Req. 13 juin 1865 (Dalloz, Rec. pér., 65, I, 447).

(2, 3, 4 et 5) Le présent arrêt tire plusieurs consequences fort exactes de la différence qui existe entre la proprieté et les servitudes. Le droit de propriété étant, en principe, absolu et sans restriction, tandis que la servitude est un droit

« PreviousContinue »