Page images
PDF
EPUB

ARRÊT.

---

[ocr errors]

« LA COUR :-Statuant sur l'appel interjeté par Leclerc contre un jugement du Tribunal correctionnel de Fontainebleau, du 9 août 1872, qui a renvoyé les nommés Roubault père et fils des fins des poursuites intentées contre eux, donne défaut contre Roubault fils, non comparant, et pour le profit; Considérant qu'il résulte d'un procès-verbal régulièrement dressé que Roubault père a, le 12 juillet 1872, conjointement avec son fils, dans la forêt de Fontainebleau, au canton de Courbuisson, commune de Bois-le-Roi, enlevé sans autorisation, à l'aide d'un sac, une certaine quantité de larves de fourmis évaluée à 30 litres; Considérant que Leclerc, locataire de la chasse pour le canton de Courbuisson, justifie que l'administration des forêts lui a garanti comme une des conditions de son contrat l'entière possession des fourmilières et des larves de fourmis existant sur son canton, et qui sont inConsidédispensables pour l'élevage et pour la conservation du gibier; rant qu'il est établi que des œufs de fourmis, après l'éclosion de la larve, laissent sur le sol des débris qui présentent essentiellement le caractère d'un engrais, et que ces débris de larves entrent pour une quantité plus ou moins considérable dans la composition du sol forestier ; Considérant qu'il est reconnu par Roubault lui-même qu'en s'emparant des œufs ou larves de fourmis il a enlevé tout ou partie des fourmilières elles-mêmes, qui contien nent de la terre, du sable, des feuilles mortes, des débris de végétaux, des détritus animaux, composant le sol forestier dont l'enlèvement est formellement prohibé par l'article 144 du Code forestier; -Considérant dès lors que le fait d'enlèvement de larves de fourmis commis par Roubault père et fils constitue le délit prévu par l'article 144 du Code forestier; Dit que c'est à tort que le Tribunal correctionnel de Fontainebleau a relaxé les nommés Roubault père et Roubault fils des poursuites et qu'il s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande en dommages-intérêts formée par Leclerc, qu'il a renvoyé à se pourvoir devant les tribunaux civils; Considérant que, le ministère public n'ayant point interjeté appel dans les délais de la loi, il ne peut être prononcé aucune peine contre Roubault père et fils:Mais considérant que la plainte de Leclerc est fondée, que son action est recevable, qu'il lui a été causé un préjudice dont il lui est dû réparation et que la Cour a les éléments nécessaires pour en fixer le montant;-Condamne Roubault père et Roubault fils solidairement et chacun à 5 francs de dommages-intérêts envers Leclerc, et aux dépens du procès. »>

Du 30 novembre 1872. — C. de Paris (Ch. corr.).—M. Rohault de Fleury, prés.; Jullemtier, av.

[blocks in formation]

La vente d'un bois moyennant deux prix distincts, l'un pour le sol et l'autre pour la coupe actuellement à faire, est passible du droit de 5 fr. 50 pour 100 sur la totalité, alors qu'il est dit que l'acquéreur entrera en jouissance du jour du contrat, qu'il prendra l'immeuble dans l'état où il se trouve et qu'il payera les intérêts de son prix à partir de l'entrée en jouissance. (L. 22 frim. an VII, art. 9, et art. 69, § 5, n° 1, et § 7, n° 1) (1)..

Peu importe que, l'immeuble étant dotal à la femme venderesse, les parties aient considéré le prix de la superficie comme s'appliquant à un objet mobilier, et comme étant à ce titre dispensé du remploi.

(Schittcelé c. Enregistr.)

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL: Attendu que, par acte notarié des 21-29 janvier 1868, le marquis de Moustier, en son nom et comme mandataire de sa femme, a vendu au sieur Schittcelé une pièce de bois faisant partie des biens dotaux de Mme de Moustier, moyennant un prix de 45 000 francs s'appliquant pour 10 000 francs aux fruits, c'est-à-dire à la coupe de bois à faire actuellement sur l'immeuble vendu et non soumise à emploi, et pour 35 000 francs de surplus à la propriété réputée fonds et soumise à emploi ou remploi ; Attendu que les droits d'enregistrement résultant de la transmission de la propriété d'immeubles sont acquis au Trésor par le seul fait de l'existence de l'acte constatant cette transmission; Attendu que l'acte susénoncé porte textuellement que la pièce plantée en bois est vendue telle qu'elle existe et comporte avec les arbres et les taillis existant dessus; qu'il y est énoncé que l'acquéreur sera propriétaire et aura la jouissance de l'immeuble présentement vendu dès le jour du contrat, avec obligation de prendre l'immeuble dans l'état où il se trouve; qu'il devra les intérêts de son prix à partir de l'entrée en jouissance ; Attendu qu'en envisageant cet acte par rapport à l'acquéreur on ne peut y voir deux ventes distinctes et séparées, mais seulement une vente unique formant un tout indivisible; qu'il importe peu, au point de vue de la nature du droit cédé à l'acquéreur, qu'il ait indiqué que, dans le prix de vente fixé à 45 000 francs, 10 000 francs représentaient la valeur des arbres et seraient versés entre les mains des vendeurs sans obligation. de remploi, puisque ces stipulations n'ont pour but que de régler les droits respectifs des vendeurs entre eux, comme conséquence des stipulations de leur contrat de mariage; Attendu qu'en principe les coupes ordinaires de bois taillis ou de futaies mises en coupes réglées ne deviennent meubles qu'au fur et à mesure que les arbres sont abattus; que, par dérogation à ce principe, il a été admis que quand la vente porterait sur des coupes de bois non encore abattus, mais destinés nécessairement à l'être, de par le contrat, dans un temps rapproché, le droit transmis serait mobilier, puisque en effet, dans ce cas, le contrat n'a pour objet que des bois détachés du sol; qu'il ne peut en être de même quand l'acquéreur, comme dans l'espèce, acquiert par un seul et même acte fonds et superficie; qu'en effet l'objet du contrat n'est qu'un immeuble indivisible, indépendant de l'exploitation et de l'abatage des arbres,

(1) Voir, en ce sens, M. Garnier, Rép. gén. de l'enreg., vo VENTE D'Immeubles, no 14148, où il cite à ce sujet, d'après Journ. de l'enreg. (art. 11999), un jugement du Tribunal de la Seine du 22 février 1838. Voir aussi Cass., 12 novembre 1855 (Journal du palais, 1856, II, 182). En pareilles circonstances, l'appréciation des faits échappe à la censure de la Cour de cassation. }

RÉPERT. DE LÉGISL. FOREST. — · AVRIL 1873.

T. V.-19

que l'acquéreur peut faire ou ne pas faire, suivant sa volonté, et sans qu'il puisse y être contraint par la convention des parties; Attendu, en conséquence, que l'acte en question contient une véritable transmission de valeurs immobilières, passible du droit de 5 fr. 50 sur la totalité du prix; – Par ces motifs, etc.

Du 5 août 1871. Tribunal de Meaux.

N° 149. — COUR DE CASSATION.

26 juillet 1870.

10 Chose jugée, identité des parties, Etat, domaine maritime;
20 et 3° pêche, étang salé, propriété privée, marins inscrits.

Le jugement qui a décidé contre l'Etat qu'un étang salé est une propriété privée, a-t-il l'autorité de la chose jugée à l'égard de particuliers qui prétendent qu'ils ont le droit de pêcher librement sur cet étang, comme sur une dépendance de la mer avec laquelle il communique (C. civ., 1351; non rés.)?

La disposition de l'article 57 du décret réglementaire du 19 novembre 1859, rendu en exécution du décret législatif du 9 janvier 1852, d'après laquelle la pêche est libre sans fermage ni licence dans les étangs sales communiquant avec la mer, ne s'applique pas aux étangs salés appartenant aux communes ou aux particuliers;

En conséquence, les communes et les particuliers propriétaires d'étangs salés peuvent y exercer exclusivement le droit de pêche, à la condition toutefois de n'employer à cette exploitation que des marins inscrits (décr. 19 nov. 1859, art. 57, § 3).

(Seris, Molle et autres c. Gondran et autres.) ·

[ocr errors]

ARRÊT. arrêt Attendu que, par LA COUR: Sur les deux premiers moyens : rendu, le 4 février 1857, par la Cour impériale de Montpellier, et devenu définitif, il a été jugé avec l'Etat que l'étang salé, objet du procès, n'était pas une dépendance du domaine public, et qu'il appartenait à la commune de Latter; Attendu que les demandeurs, ainsi que cela résulte de leurs conclusions en première instance et en appel, sans contester le droit de propriété le droit de ladite commune, ont seulement prétendu qu'il ne comprenait pas de pêche; Attendu que, s'il est vrai que, d'après l'article 57 du décret réglementaire du 19 novembre 1859, rendu en exécution du décret législatif du 9 janvier 1852, la pêche est libre, sans fermage ni licence, dans les étangs salés communiquant avec la mer, il y a lieu de reconnaître que cette disposition, dans ses termes absolus, n'a eu en vue que les dépendances du domaine public, et est sans application aux étangs salés appartenant aux communes ou aux particuliers; Attendu que cette interprétation de la loi est conforme non-seulement aux règles du droit commun, mais aussi aux dispositions précises des articles 102 et suivants du même décret, qui impartissent un délai aux communes et aux particuliers pour justifier de leurs titres de proprieté, et chargent l'administration de faire connaître par des affiches les portions du domaine public maritime sur lesquelles seraient exerces des droits exclusifs de pêche ; Attendu que si, aux termes du troisième alinéa de l'article 57 du décret susénoncé, les communes ou les particuliers, reconnus proprié taires d'étangs salés, ne peuvent y faire exploiter la pêche que par des ma rins inscrits, on ne peut attribuer à cette mesure, prise dans l'intérêt de la navigation maritime, d'autre caractère que celui d'une réglementation_aute»

[ocr errors]

risée par l'article 745 du Code civil, et n'ayant trait qu'à l'exercice du droit dont l'extinction ne peut se présumer; Attendu que, de ce qui précède, il suit que l'arrêt attaqué, en faisant aux demandeurs qui s'étaient livrés sans autorisation à la pêche dans l'étang de Latter l'application de l'article 1382 du Code civil, n'a vioié aucune des dispositions de loi visées par le pourvoi; Par ces motifs, rejette le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour de Montpellier du 26 février 1867.

-

Du 26 juillet 1870. Ch. civ. MM. Laborie, prés. Hély-d'Oissel, rapp.; Paul Fabre, pr. gén.; (c. conf.) Larnac et Bosviel, av.

N° 150.

COUR DE CASSATION.- -11 novembre-1872.

Chose jugée: 10 jugement, contrat judiciaire; 2° disposition comminatoire ; 3o compétence administrative, disposition réglementaire ; 40 usage forestier, déchéance, loi rétroactive.

Lorsqu'un arrêt appelé à déterminer, d'après les titres respectivement produits, l'étendue et le mode d'exercice des droits de dépaissance réclamés par les habitants d'une commune sur la propriété d'un tiers, a déclaré, sur la demande et conformément aux conclusions de ce dernier, que « ceux des habitants qui introduiraient dans les pâturages assujettis des bestiaux étrangers à la commune seraient déchus de leurs droits de dépaissance », cette disposition ne constitue pas un contrat judiciaire, mais bien une décision proprement dite, susceptible d'acquérir l'autorité de la chose jugée et devant, quand elle n'a pas été attaquée par les voies légales, recevoir son exécution (C. civ., 1354);

Et le juge ne peut refuser d'appliquer la déchéance ainsi prononcée, sous prétexte ni qu'elle serait purement comminatoire;

...

Ni qu'elle présenterait les caractères des dispositions générales et réglementaires prohibées par l'article 3 du Code civil;

...

Ni, enfin, qu'elle constituerait une peine supprimée par la promulgation du Code forestier (C. civ., 2; C. forest., 218) (1).

(Hérit. Mourgues c. Boissier.)

Les habitants de la commune des Saintes-Maries possèdent, en vertu de titres fort anciens, divers droits d'usage, et notamment des droits de dépaissance sur la portion du domaine de Sylveréal connue sous le nom de Pinededes-Saintes ou Sylve spéciale. L'exercice de ces droits était originairement soumis au payement de certaines redevances. A l'époque de la Révolution, le domaine de Sylveréal appartenait à l'abbaye de Valmagne. Le 10 février 1793, il fut adjugé, comme bien national, à un sieur Joseph Gondran, qui, par acte du 22 germinal an III, céda cette adjudication à un sieur Louis Mourgues, sous la réserve, toutefois, des arbres complantés dans la Pinède. L'article 3 de l'acte de cession portait que les habitants jouiraient à l'avenir, comme ils avaient fait pour le passé, des droits et facultés de faire dépaître leurs bestiaux gros et menus dans les communaux de la Pinède, mais

(1) C'est une application pure et simple du principe de la non-rétroactivité des lois posé par l'article 2 du Code civil et reproduit par l'article 218 du Code forestier pour les matières réglées par ce code. Voir, sur les questions relatives à la non-rétroactivité des lois, Dalloz, Jur. gén., vo Lois, nos 182 et suiv.

Le

sans être tenus à aucun payement ni indemnité envers le sieur Mourgues. Le 16 fructidor an XII, le sieur Mourgues obtint du conseil de préfecture des Bouches-du-Rhône un arrêté déclarant qu'il était interdit aux habitants d'introduire des bestiaux étrangers dans les bois soumis à la dépaissance. 25 septembre 1809, le même conseil de préfecture rendit un nouvel arrêté par lequel, après avoir disposé que les droits d'usage appartenant à la commune dans la Pinède de Sylveréal étaient maintenus, conformément aux titres, il autorisait la commune à plaider devant les tribunaux pour faire juger les contestations existant entre elle et les sieurs Gondran et Mourgues sur la nature et l'étendue de ces droits. A la suite de cet arrêté, une instance s'engagea devant le Tribunal d'Arles. Par jugement du 4 mars 1819, ce tribunal maintint les habitants et possédants-biens dans l'exercice des droits et facultés à eux concédés par les anciens titres, en expliquant que ces droits appartenaient aux propriétaires non domiciliés dans la commune aussi bien qu'à ceux qui y étaient domiciliés; mais à la charge par les usagers de payer les redevances anciennement stipulés, et sous la prohibition, déjà portée dans l'arrêté de l'an XII, d'introduire dans les dépaissances des bestiaux étrangers à la commune. Le maire de la commune, autorisé par un arrêté du conseil de préfecture des Bouches-du-Rhône du 16 juillet 1819, releva appel de ce jugement, et demanda notamment à la Cour d'Aix de décider que le droit de dépaissance appartenait aux habitants non propriétaires comme aux propriétaires, et de déclarer que les redevances établies par les anciens titres étaient supprimées. De leur côté, les héritiers Mourgues conclurent: «En leur concédant acte: 1° qu'ils n'empêchent, en ce qui les concerne, que la demande de la commune des Saintes-Maries dans la citation principale des 21 et 24 février 1810, en inhibition d'exiger les redevances, soit considérée comme une acceptation de sa part de la franchise de toute redevance sur la dépaissance, stipulée par Gondran dans le susdit acte du 22 germinal an III; 2° de ce qu'ils n'ont jamais contesté que les habitants de ladite commune, non propriétaires dans son terroir, puissent user de la dépaissance pour les bestiaux à eux propres et personnels; l'appellation de ladite commune et ce dont est appel, quant à ce seulement, seront mis au néant; émendant, lesdits habitants non propriétaires dans le terroir jouiront gratuitement de la dépaissance dans la Pinède dont il s'agit et dans les pâtis de Ravan, dans leurs bornes et limites énoncées dans ledit jugement, savoir: lesdits habitants non propriétaires pour les bestiaux à eux propres et personnels, et lesdits propriétaires pour ceux attachés à l'exploitation de leurs propriétés, sous peine, en cas d'interposition légalement constatée, d'ètre déchus de ladite faculté. » - La Cour a statué sur ces conclusions par arrêt du 20 février 1824 dont les motifs et le dispositif sont ainsi conçus ... Considérant, quant aux usages et facultés des habitants de Saintes-Maries-surSylveréal, que ces usages et facultés sont réglés pas des titres anciens, mais que Gondran, en cédant ses droits à la propriété à Mourgues par l'acte du 22 germinal an III, s'est aussi occupé de ces usages et facultés, et qu'il a imposé à cet égard à son acquéreur des conditions qu'il est impossible à celui-ci de ne pas remplir: ainsi, la dépaissance doit être soufferte gratuitement...; on a bien dit que ces conditions avaient été révoquées par Gondran en présence de Mourgues avant l'acceptation par la commune, et c'est même ladessus que s'est fondé le premier Tribunal pour restreindre les facultés des habitants et pour les soumettre au payement de certaines redevances; mais ces conditions pouvaient-elles être révoquées? Ce n'est pas ici une indication en faveur d'un tiers, qui est révocable jusqu'à l'acceptation, mais une espèce de pollicitation en faveur des habitants, pour se servir des termes du droit romain, irrévocable de sa nature; d'ailleurs les hoirs Mourgues ont observé avec quelque raison que la commune, en demandant par să citation introductive d'instance qu'il fût inhibé aux propriétaires d'exiger aucune rede

« PreviousContinue »