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tement comme moyen d'atteindre ce but, à prendre les mesures nécessaires pour protéger l'ordre intérieur;

« Qu'au milieu des désastres qui accablaient la France envahie par les armées ennemies et en l'absence de tout pouvoir régulièrement élu et constitué, les forces vives du pays lui ont prêté leur concours;

«Attendu que, depuis le rétablissement de l'ordre légal, l'Assemblée nationale et le pouvoir exécutif ont, dans leurs actes, admis le principe de l'antorité attachée aux mesures législatives de ce gouvernement tant qu'elles ne seraient pas législativement rapportées;

« Qu'il résulte de cet état de choses que le décret sur la chasse du 13 septembre 1870, qui se rattachait même, sous certains rapports, au système de la défense du territoire et qui n'est point encore rapporté, a force légale et que c'est à tort que l'arrêt attaqué lui a refusé ce caractère;

«Attendu que c'est également à tort qu'il a prétendu que ce décret, en admettant qu'il fût légal, n'avait eu qu'une durée provisoire et bornée à celle de l'état de guerre ;

Que rien, ni dans le texte ni dans les circonstances, ne justifie cette prétention;

«Attendu d'ailleurs, en fait, que l'état de guerre existait encore, non-seulement au moment de la perpétration du délit poursuivi, mais même à la date de l'arrêté attaqué, la paix n'ayant été conclue que le 10 mai par le traité de Francfort, lequel n'a été ratifié par l'Assemblée nationale que le 18, et n'a été définitivement publié par le Journal officiel que le 31 du même mois; «Par ces motifs,

«La Cour casse et annule l'arrêt rendu le 5 avril 1871 par la Cour d'appel de Douai, Chambre des appels de police correctionnelle, dans la cause du ministère public contre Aimé-Joseph Delvallées, et pour être statué sul'appel du procureur de la République près le Tribunal de Valenciennes conr tre le jugement rendu par ce Tribunal le 27 janvier précédent, renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel d'Amiens, Chambre des appels de police correctionnelle, à ce déterminé par délibération spéciale prise en Chambre du Conseil.

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Nous faisons suivre cet arrêt d'un précédent rendu le 2 mars 1871 par la section de la Chambre criminelle de la Cour de cassation réunie à Paù. On verra que la Cour de Douai, dont la décision avait déjà été précédemment cassée, a persisté dans sa doctrine sur ce point de droit; c'est en effet sur un nouveau pourvoi du procureur général de cette Cour contre un second arrêt rendu dans le même sens, que la Cour de cassation a été amenée à casser cette seconde décision.

Voici le texte de l'arrêt rendu à Pau le 2 mars dernier,

« LA COUR : — Oui M. le conseiller Dagallier, en son rapport, et M. l'avocat général Bédarrides dans ses conclusions;

«Altendu, en fait, que François- Isaïe Maison, traduit en police correctionnelle sous la prévention de deux délits de chasse commis sans permis et en temps prohibé, avait été, par jugement du Tribunal de Saint-Pol, en date du 25 novembre 1870, condamné à une première amende de 50 francs, par application des articles 11 et 12 de la loi du 3 mai 1844, à une seconde amende de 100 francs en faveur de la Caisse des secours des familles des

soldats blessés, par application des articles 2 et 3 du décret du 13 septembre 1870, et, en outre, à un mois d'emprisonnement;

« Attendu que, sur l'appel du condamné et contrairement aux conclusions du ministère public, qui avait requis à l'audience la confirmation du jugement de première instance, la Cour de Douai, émendant, ne prononça contre le prévenu qu'une amende unique de 150 francs par application de la loi du 3 mai 1844, dont les articles sont seuls visés dans l'arrêt attaqué;

<< En cet état des faits,

« Sur le premier moyen du pourvoi, tiré de la violation du décret du 13 septembre 1870:

« Vu la loi du 3 mai 1844 et le décret du 13 septembre 1870;

Attendu qu'aux termes de l'article 2 de ce décret, tout individu convaincu de délit de chasse en temps prohibé doit être, indépendamment des peines édictées par la loi du 3 mai 1844, condamné à une amende extraordinaire de 100 francs à 500 francs, laquelle, suivant l'article 3, doit être versée à la Caisse des secours pour les familles des soldats blessés ;

« Attendu, dès lors, que Maison, déclaré coupable de délit de chasse en tempe prohibé, devait être condamné à deux amendes, qu'il est impossible de réunir et de confondre, parce qu'elles ont des destinations spéciales et différentes, l'une prononcée par la loi du 3 mai 1844, et l'autre par le décret du 13 septembre 1870;

« Sur le second moyen, tiré d'un défaut de motifs :

Vu l'article 408 du Code d'instruction criminelle et l'article 7 de la loi du 20 avril 1810;

«Par ces motifs :

«Attendu qu'en s'abstenant de statuer sur les réquisitions du ministère public tendant à l'application du décret du 13 septembre 1870, et en refusant, sans donner les motifs de sa décision à cet égard, d'appliquer ledit décret, l'arrêt attaqué a violé tout à la fois l'article 408 du Code d'instruction criminelle et l'article 9 de la loi du 20 avril 1810;

« Casse et annule l'arrêt rendu en la cause par la Cour d'appel de Douai, le 4 janvier 1871, et pour être statué conformément à la loi sur la prévention dirigée contre le nommé Maison, renvoie le prévenu et les pièces de la procédure devant la Cour d'Amiens, Chambre des appels de police correctionnelle;

« Ordonne, etc. »

Du 2 mars 1871.

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rapp.; Bedarrides, av. gén.

N° 36. COUR D'APPEL DE ROUEN (Ch. corr.).

-

3 février 1870.

Chasse, chiens courants, terrain d'autrui.

Le passage des chiens courants sur un fonds appartenant à autrui, lorsqu'ils sont à la poursuite du gibier, n'est point un droit pour le chasseur, mais seulement un fait qui peut, dans certaines circonstances, ne pas être considéré comme délit.

Ce fait ne peut être excusable qu'à la condition que le chasseur aura fait tout ce qui lui était possible pour rappeler ses chiens.

Doit être considéré comme délit de chasse sur le terrain d'autrui le fait d'attendre, en action de chasse, les chiens sans les rappeler, alors surtout qu'il est constant qu'ils ont cessé pendant quelque temps de donner de la voix.

(De Boisgelin c. Colombe.)

Il avait été ainsi jugé par le Tribunal correctionnel de Bernay, le 17 décembre 1869, en ces termes :

<< Le Tribunal,

Attendu qu'en admettant la vérité de ce fait, qui ne résulte d'ailleurs que de la seule allégation des deux chasseurs, Colombe n'en aurait pas moins commis un délit de chasse en ne rappelant pas son chien au moment où celui-ci perdit la trace du lièvre qu'il poursuivait;

« Attendu, en effet, qu'il est établi par la déposition du garde Vanelli, confirmée en ce point par celle du sieur Legrand, que, pendant cinq ou six minutes, dans la forêt, le chien a cessé de suivre le gibier et de chasser à voix :

« Qu'il résulte des mêmes dépositions que Colombe ne rappela pas alors son chien et le laissa continuer à chasser sur la propriété de la comtesse de Boisgelin;

« Attendu qu'en principe la loi sur la chasse défend de chasser sur le terrain d'autrui sans le consentement du propriétaire;

«Que le passage des chiens courants sur un fonds appartenant à autrui, lorsqu'ils sont à la poursuite du gibier, n'est point un droit pour le chasseur, mais seulement un fait qui peut, dans certaines circonstances, ne pas être considéré comme un délit;

a Que si ce fait peut être déclaré excusable lorsqu'il est démontré que la chasse a été loyalement faite, et que le chasseur n'avait nullement l'intention de porter atteinte aux droits du propriétaire, sur le terrain duquel ont passé les chiens, les Tribunaux doivent aussi, dans leur appréciation, se gårder d'un excès d'indulgence qui aurait pour effet d'autoriser des individus nonpropriétaires de terrains riverains, à commettre journellement dans les forêts, à l'aide de chiens courants, des actes de braconnage;

« Attendu qu'à l'égard du prévenu, il y a lieu de considérer d'abord que le fonds sur lequel, d'après sa propre déclaration, le gibier aurait été lancé ne lui appartenait pas, et, en second lieu, que le sieur Colombe n'a fait aucune tentative, aucun effort pour rappeler son chien, lorsqu'étant dans la forêt, ce chien a cessé de suivre le gibier;

«Attendu d'ailleurs que Colombe a déjà subi une condamnation pour délit de chasse;

« Que, dans ces circonstances, l'excuse qu'il invoque ne saurait être admise;

<< Par ces motifs,

« Déclare Colombe coupable d'avoir chassé dans la forêt de Beaumont-leRoger, sans le consentement du propriétaire, etc. »

M. Colombe a interjeté appel de ce jugement, mais la Cour a confirmé purement et simplement la décision frappée d'appel. Du 3 février 1870.

et Ducôté, av.

-

MM. de Tourville, prés.; Couvet, av. gén., Homais

No 37.-TRIBUNAL Civil de SenLIS. 23 juin 1870.

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Dégats commis par le gibier, lapins, lièvres, faisans, plantation de choux action en dommages-intérêts.

Un propriétaire de bois ne saurait être responsable des dégâts commis par des lièvres qu'autant qu'il aurait favorisé outre mesure la multiplication de ces animaux.

Le passage de faisans à travers un pré, n'ayant occasionné d'ailleurs

qu'un dommage insignifiant, qui n'excède pas la servitude imposée naturellement aux riverains de bois, ne peut donner droit à aucune indemnité au profit du propriétaire de ce pré.

N'a également droit à aucune indemnité, à raison des dégâts commis par le gibier, même par des lapins, le propriétaire qui, dans un but évident de spéculation, cultive des choux, carottes ou autres produits dont le gibier est avide.

(Tardif c. André.)

M. André, banquier à Paris, s'est rendu adjudicataire du droit de chasse dans la partie de la forêt de Chantilly qui avoisine le territoire de Coye. Vers la fin de l'année 1869, il fut en butte aux réclamations de nombreux cultivateurs riverains, qui prétendaient que le gibier sorti de la forêt avait causé des dégâts dont le chiffre total dépassait 6 000 francs.

Parmi ces réclamants figurait M. Tardif, dit Sabreur, qui demandait 909 fr. 35 pour le préjudice causé par des lièvres et des lapins dans des pièces de seigle, d'avoine, et dans une autre pièce de terre où il avait planté 14 404 choux et des carottes. Il se plaignait, en outre, du passage de faisans dans un pré qu'ils auraient piétiné, et réclamait de ce chief également une indemnité.

M. André résistait à cette prétention: il déclinait toute responsabilité à l'égard des lièvres et des faisans, par le motif que rien n'établissait que ce gibier fût réellement sorti de la forêt, et que d'ailleurs il n'y avait aucune faute à lui reprocher sous ce rapport. Quant au lapin, il acceptait en principe la responsabilité, mais il soutenait que M. Tardif avait planté des choux et des carottes dans un terrain qui n'était nullement affecté à cette culture, et que dès lors il devait supporter une forte partie du dommage éprouvé.

En conséquence, M. André offrait à M. Tardif une somme de 583 fr. 31 pour solde de tout compte.

Ces offres ayant été refusées, l'action fut portée devant le Tribunal de Senlis, qui a rendu le jugement suivant:

«Le TRIBUNAL :

En ce qui touche l'indemnité réclamée pour lièvres: Attendu que le lièvre, animal nomade de sa nature, habite autant la plaine que le bois; que dans ces conditions le propriétaire du bois ne peut être rendu responsable au regard du propriétaire de la plaine que s'il y a faute de sa part en favorisant, par exemple, outre mesure, la multiplication de ce gibier, ou par tout autre fait personnel de nature à causer des dégâts qui excèdent la tolérance ou servitude naturelle résultant nécessairement de la situation réciproque des bois et de la plaine;

« Qu'aucune faute semblable imputée au sieur André n'est articulée de ce chef par le défendeur;

<<< Qu'il n'y a donc pas lieu d'accorder d'indemnité de ce chef;

En ce qui touche les indemnités pour faisans:

« Attendu que le passage sur les prés du sieur Tardif par les faisans n'a occasionné en fait qu'un dommage insignifiant qui n'excède pas la servitude imposée naturellement aux riverains;

« Qu'il n'est encore dû de ce chef aucune indemnité;

«En ce qui touche la demande en indemnité relative aux choux, carottes et haricots détruits par le gibier:

« Attendu qu'il résulte des documents de la cause que dans les terres louées par Tardif, la culture maraîchère ne peut convenir en raison de la nature du sol;

« Que, du reste, le prix de la location (24 francs l'hectare) l'indique suffisamment,

REPERT. DE LÉGISL. FOREST.

OCTOBRE 1871.

T. V.-6

« Que si des choux, carottes et haricots ont été par lui plantés, ce n'était pas pour obtenir une récolte, mais seulement dans un but de spéculation irès-fréquent dans le voisinage des bois pour attirer le gibier de la forêt et obtenir ainsi des indemnités de beaucoup supérieures au produit normal de la terre;

« Qu'il n'est donc rien dû de ce chef;

« Attendu, au surplus, que Tardif, en louant au domaine de Chantilly avec cette condition qu'il ne pourrait faire au domaine aucune réclamation relative aux dégâts occasionnés par le gibier, a loué, moyennant un prix en rapport avec la charge onéreuse qu'il avait acceptée ;

<< En ce qui touche les indemnités relatives aux dégâts commis par les lapins:

«Attendu qué André reconnaît en être tenu;

Attendu que le Tribunal a des éléments suffisants pour les déterminer ; « Que la somme de 583 fr. 31 qui a été offerte est suffisante et même au delà pour la réparation du préjudice causé;

Par ces motifs,

« Déclare suffisantes les offres faites par André à Tardif;

& Condamné au besoin André à réaliser lesdites offres ;

A plus prétendre, déclare le sieur Tardif mal fondé ; « Condamne, en outre, le sieur Tardif aux dépens. »

Du 23 juin 1870. Trib. civ. de Senlis. - MM. François, prés.: Sorel et Vantroys, av.

No 38.

-

TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE BORDEAUX.

-14 juin 1871.

Délit de chasse, prescription, interruption de prescription. Lorsque l'action a été intentée dans le délai, ce n'est pas la prescription de trois mois, mais bien celle de trois ans qui est applicable.

(Bellouguet.)

Le jugement suivant l'a ainsi décidé :

« Sur l'exception de prescription :

Attendu que la prévention dirigée contre Bellonguet se réfère à un acte de chasse qui a été commis à la date du 17 octobre 1870; que, dans le cours des trois mois qui ont suivi, et à la date du 17 novembre suivant, Bellongnet a été cité, à la requête du ministère public, à comparaitre devant le Tribunal de police correctionnelle, à l'audience du 21 du même mois ;

« Attendu qu'à cette époque le prévenu se trouvant au service militaire, M. le procureur de la République n'a pas requis de condamnation par défaut contre Bellouguet, et a voulu attendre la fin de la guerre et le retour du prévenu dans ses foyers pour continuer contre lui les poursuites dont s'agit au procès actuel;

& Que s'il s'est éconté plus de trois mois entre les citations en date du 17 novembre, et l'avenir qui a été notifié au prévenu le 2 juin dernier, pour comparaître de nouveau devant la juridiction correctionnelle, l'action pnblique ne s'est pas trouvée éteinte par l'expiration de ce laps de temps,

« Qu'il est, en effet, de jurisprudence constante que lorsque l'action a été une fois intentée dans le délai d'une courte prescription, l'action ainsi pendante devant le Tribunal ne s'éteint pins que par la prescription ordinaire de trois ans, fixée par les articles 637 et 638 du Code d'instruction criminelle;

« Au fond:

<< Attendu qu'il résulte des débats que Bellouguet a chassé le.....;

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